De vous à moi, je suis pas débile, non plus, je perçois l’idée. Si je mets un taquet aux cathos en passant, je peux mettre un taquet aux musulmans. C’est gagnant-gagnant ou, plutôt, tout bénéf. Et puis cela permet d’expliquer aux musulmans que ce n’est pas parce que c’est eux qu’on est fâchés, qu’on a déjà été fâchés tout pareil avant avec des français qui mangent du saucisson, eux. Bref, il n’y a là rien que de très ordinaire, tout le monde est passé par là, vous y passerez aussi. C’est à peu près le propos, dans le meilleur de cas. C’est à tout le moins le propos que l’on entend de plus en plus régulièrement, de la bouche de plus d’un politique – de sorte que je ne donnerai pas de noms, parce que je suis pas une balance. Je lis donc que les catholiques ont posé problème à la République et j’entends qu’on fera avec les musulmans comme on a fait avec eux. En somme, on a soumis les catholiques, on va se faire les autres tout pareil. Mais sans vouloir poser de problème à la République – notez que mes enfants vont en primaire à la laïque du coin, que je vote à toutes les élections (pour des candidats républicains) et que j’ai suivi une formation aux premiers secours – je me permets de m’enhardir jusqu’à confesser mon inconfort et souhaiter en appeler à plus de délicatesse, avec tout le respect je dois aux élus de la République, s’entend.
C’est accessoire, mais je me permets déjà d’envisager que l’on inverse la proposition : si les catholiques ont posé problème à la République, la République a posé problème aux catholiques. De vous à moi, par exemple, ce n’est pas que les catholiques soient susceptibles mais les « mariages républicains » ont pu chiffonner la mémoire. Cette façon d’attacher deux prêtres ensemble et de les coller par le fond de la Loire, on a beau aimer son prochain, ça titille. Maintenant, c’est vrai que ces prêtres posaient problème : ils ne voulaient pas jurer fidélité à un pouvoir temporel et pas toujours bien cool. Plusieurs dizaines de prêtres sont alors noyés à Nantes et dans sa région dans une forme d’exécution collective que ne renieraient pas rétrospectivement les régimes génocidaires. En 1792, il avait déjà été décidé de déporter les prêtres non-jureurs. 829 prêtres et religieux réfractaires sont notamment amenés à Rochefort en vue d’une déportation en Guyane, que chacun sait impossible. Ils seront donc parqués sur des navires dans des conditions telles que les deux tiers d’entre eux (547) y meurent, entre le 11 avril 1794 et le 12 avril 1795. Pensons aussi aux carmélites de Compiègne. Seize religieuses retirées dans leur carmel, qui en sont expulsées avant d’être guillotinées, le 17 juillet 1794. Elles posaient problème, les Carmélites. La République, ou plutôt son aïeule, l’a réglé.
En 1880, c’est l’expulsion des Jésuites – encore, diront-ils. Jules Ferry leur donne trois mois pour quitter le pays. 5.463 Jésuites sont ainsi expulsés. Ça en fait, des Jésuites. La République bannit ainsi de France des Français. Elle expulse de son sol ses propres citoyens, certes catholiques mais Français quand même. O tempora, o mores ouais, mais tout de même, pensez-y deux secondes. Pour ne pas mollir, certaines municipalités en profitent pour expulser les religieuses qui se dévouent dans les hôpitaux. Passant dans l’église du couvent dominicain de l’Annonciation, au 222, rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris, vous pourrez aussi y découvrir aussi une plaque témoignant du fait que, en raison des interdictions et expulsions de 1880, 1886, et 1901, les Dominicains ont dû racheter par deux fois leur propre couvent.
Début du XXème, et c’est l’expulsion des congrégations – encore, diront-elles. Une manie. Agacés que, République ou pas, les religieux se montrent résolus à vivre leur foi librement comme ils l’ont fait en France depuis plus d’un millénaire et demi, Émile Combes et ses amis poursuivent une politique farouchement anticléricale et interdisent nombre de congrégations. C’est ainsi que les moines de la Grande Chartreuse sont expulsés de leur monastère par la force des armes. La Grande Chartreuse… Ce monastère insupportable pour l’ordre républicain, fiché sur les pentes Iséroises, dans le silence et la solitude depuis mille ans. Combes chutera lorsqu’éclatera le « scandale des fiches » : 20.000 fiches établies pour épurer l’armée de ses officiers catholiques. Vient ensuite la loi de 1905, loi de séparation des Eglises et de l’Etat, loi que l’on dit de pacification, mais qui donnera tout de même lieu à la sérieuse crise des inventaires, durant laquelle, somme toute, les fidèles français refusent que ce que leurs pères ont construit pour l’Eglise lui soit retiré.
Vous me pardonnerez de ne pas avoir été exhaustif. Je suis sûr que vous comprenez l’idée, vous aussi. Mais fatalement, quand on enchaîne massacres, expulsions, bannissements et discriminations, on finit par penser que si les catholiques ont posé problème à la République, la République a posé problème aux catholiques aussi. Depuis, bien évidemment, les choses se sont apaisées. Même si cela a eu du mal à passer, le pape Léon XIII en 1892 a demandé aux catholiques d’accepter la République. Bonne pâte, les catholiques ont même accepté de considérer que la laïcité n’est pas étrangère aux Évangiles. Je serais encore de ceux qui suivraient hardiment Benoît XVI lorsqu’il souligne que, dans les périodes de sécularisation, l’Eglise « se dépouille, pour ainsi dire, de sa richesse terrestre et revient embrasser pleinement sa pauvreté terrestre » de sorte que son témoignage missionnaire est plus clair.
Mais enfin, tout de même, s’il ne me passe pas même par l’esprit de remettre la situation présente en cause, si je veux bien concevoir que des catholiques se soient montrés également agaçants, il me semble que d’autres pays, non moins démocratiques, sont parvenus à des résultats sensiblement identiques avec des méthodes sensiblement plus civilisées. Et, peut-être est-ce moi qui ait l’épiderme sensible, mais donc, quand d’aucuns se rengorgent à l’évocation de ce qu’a pu faire la République avec les catholiques, l’idée me parle moyen-moyen. Malgré tous mes efforts et ma formation aux premiers secours, je ne parviens pas à voir là l’illustration glorieuse des grands principes républicains et démocratiques. Et je suis tatillon peut-être mais je ne verrais pas sans déplaisir que l’on cesse d’utiliser ainsi les catholiques dans le débat. Mon père, et son père avant lui, disaient : « je vais en prendre un pour taper sur l’autre ». L’idée est un peu différente, mais évocatrice.
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La politique religieuse de la IIIème république révèle en effet (entre autres phénomènes) l’imperfection de son libéralisme.
http://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1979_num_34_4_294088_t1_0835_0000_000
Merci Koz
Tout est bien dit, avec humour, et pourtant avec beaucoup de justesse et de profondeur. C’est une réflexion que nous devrions tous faire très sérieusement : regarder le passé (et pas seulement les croisades) avec nos compatriotes musulmans pour les aider à comprendre qu’ils ne sont pas plus victimes que d’autres en d’autres temps. Ce qui n’empêche pas, au contraire, de lutter avec eux contre les racistes de tous bords (chrétiens, athées ou ….musulmans, de tous bords politiques)
ou surtout cesser de faire référence à une période qui n’a rien de glorieux, pour envisager un présent selon des modalités plus… républicaines.
D’accord en tout point et rien à rajouter, au commentaire de « Jacotte » : « …regarder le passé (et pas seulement les croisades) avec nos compatriotes musulmans pour les aider à comprendre qu’ils ne sont pas plus victimes que d’autres en d’autres temps. Ce qui n’empêche pas, au contraire, de lutter avec eux contre les racistes de tous bords (chrétiens, athées ou ….musulmans, de tous bords politiques) ».
Pour ceux qui aiment les images, celle-ci
http://www.encyclopedie-bourges.com/loi1905a.jpg
illustre clairement la « séparation des Églises et de l’état ».
La légende est limpide: « séparons-nous, je garde vos biens »
(Tentez ça lors d’un divorce, il est douteux que le juge accepte.)
En bon français, cela s’appelle une spoliation, un pillage.
Qui a eu lieu à deux reprises, et pas qu’au couvent dominicain de l’Annonciation.
Heureusement que le « droit de propriété » figure au nombre des « droits de l’homme ». Une expropriation suppose une juste compensation. Les Catholique attendent toujours (ils sont patients) cette juste réparation et une expression de repentance.
SANS a écrit :
Rien à rajouter à ma réponse à Jacotte, du coup.
C.B. a écrit :
Non, je ne crois pas que les catholiques attendent quoi que ce soit à cet égard. Quant à la repentance, par cohérence, je ne l’attends pas. Je ne souhaite pas que le pays s’entretienne dans une repentance permanente. Cela suppose que certains de ceux qui pourraient l’attendre y renoncent.
En revanche, comme je le fais ici, attendre que l’on n’évoque ces événements qu’avec un minimum de délicatesse et que, faute de repentance, à tout le moins on ne glorifie pas la période, oui.
Merci de cette mise en perspective qui évite ce mauvais argument dont je partage avec vous l’agacement.
Sur la place des catholiques face à la république puis je me permettre de rajouter la dernière tentative avortée d’expulsion des congrégations en 1924 par Edouard Herriot (parmi eux, ces Jésuites qui étaient revenus, en 1914, dans le cadre de la mobilisation des exilés… et dont 163 moururent au au front, aumôniers de leurs frères combattants…) . Tentative d’expulsion avortée qui trouva notamment face à elle cette fameuse « Lettre Ouverte à Monsieur Herriot », du père Paul Doncoeur… Aumônier militaire Jésuite : Une petite remise en place salutaire.
« Nous ne partirons pas! ».
C’est une très belle lettre !
«… Alors M. Herriot a fait le grand geste d’ouvrir tout large les deux bras encore sanglants de la France et a donné à tous les misérables leur pardon. Par la porte ouverte on a voulu faire passer tous les coupables et tous les lâches, les insoumis, les déserteurs et les traîtres. S’ils reviennent pour servir et réparer, j’applaudis. Mais cette même porte ouverte aux frontières, le même M. Herriot, du haut de la tribune française, il nous la montre, pauvres bougres de religieux, rentrés le 4 août 1914 pour la bataille.
« Eh bien ! Non nous ne partirons pas. Pas un homme, pas un vieillard, pas un novice, pas une femme ne repassera la frontière, cela jamais ! J’ai vécu douze ans en exil, de 22 à 34 ans, toute ma vie d’homme. Je vous le pardonne. Mais le 2 août 1914, à 4 heures du matin, j’étais à genoux chez mon supérieur. C’est demain la guerre, ai-je dit, ma place est au feu. Et mon supérieur m’a béni et m’a embrassé. Par des trains insensés, sans ordre de mobilisation (j’étais réformé), sans livret militaire, j’ai couru au canon, jusqu’à Verdun. Le 20 août, à l’aube, avant la reprise du combat, à la recherche des blessés du 115ème, j’avançais au-delà des petits postes, quand tout à coup, je fus enveloppé par le craquement de vingt fusils, et je vis mon camarade étendu de son long, contre moi, sur la route, la tête broyée. J’ai senti à ce moment que mon cœur protégeait tout mon pays. Jamais je n’avais respiré l’air de France avec cette fierté, ni posé mon pied sur sa terre avec cette assurance.
« Je ne comprends pas encore comment je ne fus pas tué alors, ni vingt fois depuis. Le 16 septembre, j’étais prisonnier devant Noyon, en plein combat ; en novembre, j’étais de nouveau en France et en décembre je retrouvais le feu avec la plus belle des divisions, la 14ème de Belfort. Avec elle, je me suis battu trente mois, jusque devant Mézières, le 11 novembre 1918. J’ai été trois fois blessé, je garde toujours sous l’aorte un éclat d’obus reçu dans la Somme… et, démobilisé, j’ai commis le crime de rester chez moi… Et maintenant vous me montrez la porte !
« Vous voulez rire M. HERRIOT ! Mais on ne rit pas de ces choses. Jamais, pendant cinquante mois, vous n’êtes venu me trouver, ni à Tracy-le-Val, ni à Grouy, ni à Souain, ni au fort de Vaux, ni à Brimont, ni à la Côte 304, ni à Tahure. Je ne vous ai vu nulle part me parler, et vous osez me faire sortir aujourd’hui ? Vous n’y pensez pas ! Ni moi, entendez-vous, ni aucun autre (car tous ceux qui étaient en âge de se battre se sont battus), ni aucune femme, nous ne reprendrons la route de Belgique. Cela jamais ! Vous ferez ce que vous voudrez, vous prendrez nos maisons, vous nous ouvrirez vos prisons – il s’y trouve en effet des places laissées libres par qui vous savez – soit ! Mais partir comme nous l’avons fait en 1902 ? Jamais !
« Nous avons aujourd’hui un peu plus de sang dans les veines, voyez-vous, et puis, soldats de Verdun, nous avons appris aux bons endroits ce que c’est que de s’accrocher à un terrain. Nous n’avons eu peur ni des balles, ni des gaz, ni des plus braves soldats de la Garde ; nous n’aurons pas peur des embusqués de la Politique. Et je vais vous dire maintenant pourquoi nous ne partirons pas. Ce n’est pas de courir au diable qui nous effraie. Nous ne tenons à rien, ni à un toit, ni à un champ. Jésus-Christ nous attend partout et nous suffira toujours au bout du monde. Mais nous ne partirons plus parce que nous ne voulons plus qu’un Belge, ou qu’un Anglais, ou qu’un Américain, ou qu’un Chinois, ou qu’un Allemand, nous rencontrant un jour loin du pays, nous pose certaines questions auxquelles nous répondrions, comme jadis, en baissant la tête : « La France nous a chassés ». Pour l’honneur de la France – entendez-vous ce mot comme je l’entends ? – pour l’honneur de la France, jamais nous ne dirons plus cela à un étranger. Donc nous resterons tous. Nous le jurons sur la tombe de nos morts ! ».
excellent papier et rappels salutaires. Une nuance toutefois : les Jésuites furent aussi explusés sous Louis XV, certes avec moins de violence que sous la République et pour des raisons liées au gallicanisme, mais l’exil n’en fut pas moins douloureux, et la désorganisation de l’enseignement aussi
@ gerylecerf : d’où le « encore – diront-ils », et avec la réserve que vous apportez. Cela étant, on me dit que la République s’honore de plus de justice que la Monarchie.
@ Bernard : très belle lettre, en effet. Et l’on en apprend plus encore sur le Père Paul Doncoeur, sur le site du Diocèse aux Armées. Une sacrée figure.
Excellent !
Entièrement d’accord avec ce billet. Au passage, je perçois que dans l’esprit de certains de nos chers politiques, on n’est pas loin de se dire que les religions tout court posent problème à la République. Ce qui permet de se défouler sans passer pour un xénophobe…
Jacotte a écrit :
Voilà quoi me laisserait assez froid, si j’étais musulman. Mais, si je regarde la chose en tant que catholique, je ne me résigne pas à ce qu’on traite aujourd’hui les musulmans avec la même intolérance que celle montrée par la France aux catholiques sous Ferry ou Combes. Et en tant que républicain, je tiens à ce que la République solidement installée du XXIe siècle respecte ses propres valeurs avec plus d’exigence que celle, encore jeune et fragile, du XIXe.
Merci pour le rappel des faits. Pourtant de nombreux catholiques (et je ne parle pas là des politiques mais bel et bien des simples citoyens), sont, justement à cause de cet historique, dans la rancoeur envers l’Islam et surtout envers la République. Ils considèrent que c’est « 2 poids 2 mesures », en bref qu’on épargne à l’Islam ce qu’on a imposé aux catholiques : pas le côté violence et expulsion, mais le côté « primauté des lois républicaines sur les lois religieuses, et ce par la force s’il le faut ». Et ils attendent que tous les musulmans adoptent le profil bas comme l’a fait l’Eglise catholique, qui a recommandé d’elle-même l’abandon du port du vêtement religieux, qui respecte l’interdiction du mariage religieux en l’absence de l’acte attestant du mariage civil préalable (alors que de nombreux mariages musulmans sont célébrés sans ce préalable -souvent par manque d’information, parfois par refus clair de la règle), qui ne revendique pas de salles de prière ou de signes religieux au travail, n’exige pas l’éducation chrétienne des enfants issus de mariages mixtes, n’interdit pas aux chrétiens d’épouser des musulmans, etc.
Beaucoup de catholiques ont admis cette invisibilité, cette prédominance de la loi républicaine, et attendent des musulmans la même chose. Et comme une minorité intégriste expose son refus de cette prédominance, ils attendent des politiques qu’ils fassent par la loi ce que les gens ne font pas d’eux-mêmes. Et ainsi bien des catholiques deviennent des laicards. Car il n’est pas question évidemment d’expulser des musulmans ou de saccager des mosquées.
Evidemment l’absence d’autorité religieuse ayant le même impact que Léon XIII rend la chose plus compliquée, ainsi que l’influence catholique sur l’organisation sociale (jours féries, etc). Une bonne part de la difficulté est là, il s’agit non pas d’obliger un clergé puissant à se conformer à des règles en considérant que cela entraînera les « ouailles », mais de faire valoir des normes sociales dont l’application relève du choix personnel et dont l’origine historique est l’équilibre entre une religion qui n’est pas la leur et l’Etat, équilibre issu d’un combat violent, perdu par la religion (en termes de pouvoir officiel) avant qu’elle n’y consente. Les politiques ne tiennent pas ces discours par hasard. Ils les tiennent parce que c’est ce qu’attendent les gens, dont beaucoup de catholiques, au nom de l’égalité de traitement, de la culture Française. Et bien sûr , avec eux, et plutôt à gauche, les bouffeurs de curés qui en toute cohérence « Républicaine » entendent bouffer de même les imams…
@Koz et Bernard, vous m’apprenez des points de notre histoire dont je n’avais qu’une très très très vague connaissance. Et je ne connaissais pas du tout le père Paul Doncoeur et sa lettre.
Il y a d’ailleurs un très beau groupe scout qui porte le nom de RP Doncœur, celui-ci étant l’aumônier des routiers à leur création en France, et – selon le père Forestier, premier Commissaire général de la branche – le vrai fondateur… 🙂
Le Révérend Père Doncœur a écrit beaucoup d’ouvrages consacrés à la jeunesse, dans laquelle il mettait toute son espérance : « Cadets » par exemple semble garder toute son actualité : http://bit.ly/2d4vYqJ
Je ne sais pas si ce billet avait de l’humour mais certainement de l’humeur et de l’aigreur;
revenir au douloureux XIXè est pour le moins surprenant, surtout en utilisant l’analogie avec le catholicisme, pour le moins déplacé.
La IIIè République a voulu reprendre le contrôle de l’enseignement public que la Monarchie, la Révolution et l’Empire avaient laissé à l’Eglise, par manque de moyens… ou d’idéologie?
L’enseignement privé ne concernait que les socialistes ou anarchistes de tout poil; les mairies finançaient des congrégations pour tenir les écoles communales, donc catholiques, et tant pis pour les athées, juifs et protestants.
Je ne crois pas qu’une telle situation serait compréhensible de nos jours.
Les congrégations ont été expulsées car elles refusaient le régime d’autorisation et s’étaient mises hors la loi en refusant de sortir de l’enseignement public, alors qu’elles pouvaient très bien créer des écoles privées mais avaient peur de perdre leurs effectifs.
La loi 1905 est un bon compromis, plutôt favorable à l’Eglise, et CB est bien le seul catholique à réclamer restitution et repentance car l’Eglise serait incapable de financer ses locaux.
Rien à voir donc avec la situation actuelle.
En revanche, s’il faut chercher un lien avec 1905, comme le suggérait Alain Minc l’année dernière, pourquoi ne pas suspendre quelques temps la loi 1905 où « l’Etat ne finance aucun culte » pour lancer un vaste programme de construction de mosquées et écoles?
à Koz : « dans une forme d’exécution collective que ne renieraient pas rétrospectivement les régimes génocidaires »
Je suis assez exaspéré par l’utilisation délirante des totalitarismes européens des années 1920-1950 au sujet de l’islam pour ne pas avoir envie de le lire sous votre plume… Il ne s’agit PAS de génocide mais bien de solide répression à l’ancienne. Après ça, s’en prendre à des prêtres a un côté transgressif qui favorise les outrances. Mais n’oublions pas que les révolutionnaires se sont aussi entretués (Girondins, Montagnards après Robespierre, puis la Terreur blanche…)
Bref. N’oublions pas non plus l’ambiance de guerre civile, de complots en tous genres, notamment dans l’Ouest, avec les descentes des Anglais (bruit de crachat) et la présence du Comte d’Artois pas loin.
Pour la période de la IIIème République, c’est pareil, soyons plus mesurés. Souvenons-nous que, effectivement, le régime est sorti du chapeau par hasard et n’est pas populaire ; souvenons-nous aussi que le Pape est retranché au Vatican comme une moule sur son rocher, enfermé dans son Syllabus comme dans sa coquille. Alors c’est vrai qu’il y a Rerum novarum, mais on peut aussi admettre que l’Eglise n’a pas trop soutenu, sauf en 1848, les mouvements des Droits des peuples et tout.
Dans ce contexte, face à une Eglise massivement monarchiste, la répression a eu lieu, au mépris des lois et principes de la République. Elle a aussi eu lieu avec les « lois scélérates » contre des non-catholiques, par exemple, ou contre les particularismes régionaux.
Gwynfrid a écrit :
Tout ce qui précède n’empêche pas que je suis résolument d’accord avec vous. Pardon des offenses, grâce à une connaissance fine du passé ; mais pas leur répétition, avec une nouvelle victime.
Merci pour ce billet qui retrace ce que beaucoup d’entre nous pensons. Ce qui me herisse le poil est de voir le deni dans lequel vivent les politiques. Deni de leur propre histoire, deni de leurs racines (pas forcement chretiennes, mais bon, quand meme…), deni meme de leur langue! L’autre jour je suis tombee sur l’un d’entre eux, en course pour la presidentielle, a qui l’on faisait remarquer qu’il avai une reelle « vocation » a la vie politique, l’engagement citoyen etc… Ce a quoi il a repondu « oui, enfin, je suis laic hein! ». Mais ca veut dire quoi ca? « Je suis laic »??? Pour aller dans le sens de votre pere et grand pere: il y a des baffes qui se perdent….
J’ai un malaise en vous lisant.
On a fait ça aux cathos on peut le faire aux musulmans au nom des valeurs de la République: ok, je comprends bien l’erreur de raisonnement et je la partage.
Mais en soi que le raisonnement soit mal justifié n’invalide pas un raisonnement aux effets comparables avec une majeure correcte : n’existe-t-il pas une raison légitime de traiter une partie de l’islam comme on l’a fait avec les catholiques (de manière certainement anormale) du XIXème? Dans ce cas la comparaison n’est présente que pour les effets du raisonnement.
Ne peut on ainsi dire qu’il est légitime de fermer certaines mosquées et de déchoir de leurs fonctions des personnes qui portent atteinte au bien commun de la société en les expulsant ou en leur mettant des bâtons juridiques importants dans les roues ?
Tout est ensuite question de prudence dans le choix des mesures et leur champ d’application au regard de la protection du Bien Commun auquel doit tendre le Politique au sens large.
Certes, comme pour toute question prudentielle les positions sur ce point peuvent être très éloignées, plus ou moins critiquables.
Vous avez certainement la vôtre, j’ai la mienne.
Mais elles font alors l’objet d’un débat qu’on peut souhaiter bien mené afin de trouver la bonne solution permettant à chacun des membres de la Cité de mener comme le dit Saint Thomas une vie selon la vertu, mode de vie qui constitue la fin naturelle du rassemblement des hommes en société.
Cela dit , je n’ai toujours pas compris en quoi , les français catholiques , même en congrégation , devaient être expulsés. J’ai visite au Québec une abbaye St Benoit du Lac (il me semble) où se trouve gravés dans le marbre les épisodes de leur arrivée via la Belgique au Canada. Il me semble que les catholiques étaient encore majoritaires et que le petit pète Combes entretenait une correspondance pas forcément spirituelle mais aussi sentimentale avec une sœur en Alger.
Encore des gens qui ont fait mal à la France et à la concorde nationale , mais d’une certaine façon il faudrait que leurs épigones traitent le problème musulman de la m^me façon
Si ma mémoire est bonne, je n’ai entendu cet adjectif que pour désigner ces intervenants, de la messe catholique ou du catéchisme affilié, qui ne sont ni prêtres ni religieux d’un ordre particulier.
D’où la suggestion perverse suivante: bien malgré lui ce candidat a déclaré « je suis catholique! » 😉
Merci pour le style! Une plume, comme on dit…
Billet très intéressant et informatif. Certaines congrégations on pu s’exiler en 1905 de l’autre côté de la frontière et fonder des écoles catholiques qui ont très bien marché et qui de nos jours sont devenues laïques et très importantes, ouvertes à tous (à condition d’avoir les moyens financiers), de religion chrétiennes, juive, musulmane ou sans religion, tout en gardant les valeurs catholiques.
Difficile de commenter ces temps-ci les billets trop franco-catholiques et de plus en plus pointus 😉
Germaine a écrit :
?????
La plupart des congrégations ont déposé une demande d’autorisation, le gouvernement les a systématiquement refusées.
Allez vous renseigner avant de dire n’importe quoi.
« La IIIè République a voulu reprendre le contrôle de l’enseignement public que la Monarchie, la Révolution et l’Empire avaient laissé à l’Eglise, par manque de moyens… ou d’idéologie? »
Euh… Non. Avant la IIIe République, l’Eglise se charge de l’éducation, il s’agit d’un de ses rôles traditionnels (avec la charité, les hôpitaux…) depuis le Moyen-Âge (Ce n’est pas la république, qui a construit les premières universités….). Les écoles accueillent les enfants avec pour principale condition le nombre de places. Depuis Louis XIV, les régimes veulent, pour différentes raisons, scolariser l’ensemble des enfants de France. La IIIe République est le régime qui récolte les fruits de toutes les constructions d’écoles, catholiques ou non qui ont été crées auparavant par les régimes ou les personnes privées. Sa principale est de « nationaliser » toutes ces écoles et d’instaurer une éducation gratuite et obligatoire (ce qui n’est possible que parce un grand nombre d’acteurs, Eglise en tête, a construit les écoles au préalable…). D’ailleurs les méthodes pédagogiques utilisées sont les mêmes…
Par idéologie (revanchisme…), la IIIe République s’arroge le contrôle de l’Education et expulse l’Eglise de l’Education parce qu’elle n’a pas le même discours, en plus du fait que les catholiques sont plutôt opposés à la République…
Après avoir lu votre article, je dirai plutôt que c’est l’intolérance laïque et politique qui posait problème (aux catholiques).
A l’heure actuelle, il me semble cependant que l’Etat français est largement tolérant à l’égard des religions. En tout cas, il n’est pas dans une logique de combat contre la religion catholique.
A mon niveau, par exemple, je constate que la République française ne m’empêche pas d’aller à la messe, ni de prier, ni de vivre comme je l’entends en essayant de me conformer aux Evangiles.
Alors, où est le problème ?
Pensez-vous sincèrement qu’on va revenir aux « massacres, expulsions, bannissements et discriminations » que vous évoquez ?
N’oublions pas l’Alsace et la Moselle…. Français dit de l’intérieur vivant en Moselle depuis plus de 20 ans , j’ai pu constater à quel point le maintien du concordat ( contrat ou convention passée entre la France et Rome supposant une séparation… car on ne contracte pas encore avec soi même) n’a jamais été un élément liberticide portant atteinte à la liberté de conscience. Ce qui par voie de contraste montre bien que ces textes ( lois de séparations- mais également d’interdiction des congrégations dans des conditions qui nous vaudraient d’inévitables condamnations de la CEDH ou du Cons Constit si elles étaient promulguées actuellement….) , avaient bien pour but d’exclure L’Église ou d’en réduire notablement la place dans la société française. Le concordat qui avait été conçu par Napoléon pour « tenir » l’ Église et ne pas se retrouver avec un facteur de sape du régime , avait montré qu’un équilibre avait été trouvé entre Etat et Eglise, à tel point que les allemands n’y touchèrent pas entre 1870 et 1918, de peur de le rompre face à une Église catholique qui est resté pendant ces 40 années d’annexion un facteur de francophilie indéniable ( Cf la figure de Mgr Dupont des Loges et du chanoine Collin).
Le plus navrant est à cet égard de constater que l’idéalisation de la loi de 1905 fait obstacle à une approche concordataire des relations avec l’Islam que beaucoup parmi le personnel politique appellent de leurs vœux sans pouvoir l’exprimer clairement .
Pour une approche concordaire, il faut une institution en face. Hors l’islam sunnite a pour particularité de ne pas avoir d’organisation cléricale formelle, contrairement au Chiisme. Bien essayé mais inapplicable sauf à construire ex nihilo cette institution représentative. JE vous renvoie à la réussite qu’est le CFCM.