Mon Président au Vatican

Qu’attendez-vous de la rencontre de Nicolas Sarkozy et de Benoît XVI ? Bougez pas. Je pose 9, je retiens 1, je me tâte et je reviens : grosso modo, rien.

Franck Louvrier peut bien rappeler qu’il est le premier à avoir écrit « sur la question », dans les yeux ou presque, je te le dis  : tu m’as brisé le coeur une fois, Nico, tu le briseras pas deux. Caramels, bonbons, et chocolats… Merci pas pour moi mais… tu peux bien les offrir à une autre, qui aime les fleurs et le parfum des roses. Moi, les mots tendres enrobés de douceur, se posent sur ma bouche, mais jamais sur mon coeur. Et encore, la bouche…

Seulement, tu vois, au début, j’y ai cru.

La République, les Religions, l’Espérance, on n’est pas des paquets à l’avoir lu. Moi, si. Et si je suis resté sceptique sur le coup, quelque peu outré, du curé et de l’instituteur, la laïcité positive, oui, ça résonnait un poil. Tout cela, ça contrebalançait tes écarts de langage, tes propositions insolentes. Tout cela, et je me disais encore : il est pas comme ça, c’est pas sa vraie nature, c’est stratégique. Mais si ta vraie nature est stratégique, mes potes cathos et moi, on aime la consistance, la cohérence. Et puis l’absolu. C’est un peu surrané, mais pas tant que ça. Aujourd’hui, par moments, j’ai le sentiment de passer rétrospectivement pour une truffe[1]. Tu imagines comme c’est contrariant. La maitresse humiliée, tu connais ? Et je peux compter sur mes petits camarades pour porter le fer. C’est que le monde est ce qu’il est Nico, impitoyable, alors que, pourtant, je pourrais espérer de la compréhension : qui n’a pas été malheureux en amour ?

Alors, tu vas voir Benoît XVI demain. Bien. On dit que tu pars avec une délégation assagie. L’ambiance n’est donc pas au défi. Bien. Tu devrais te faire attentif. Parfait. Et puis, en rentrant de Vézelay, tu as fait projeter Des hommes et des dieux au château… Et ce « long manteau de cathédrales » que tu évoques encore, comme un petit goût de reviens-y, cet air de tu te souviens ? C’était toi, c’était moi, c’était nous. On était jeunes, on était beaux, avec toi tout devenait possible. Ah, Dieu, quelle cour ! Quelle reconquête !

Mais la ficelle est un peu grosse. Ce « long manteau de cathédrales »… Et encore des paroles, que tu sèmes au vent.

Qu’attendre de cette rencontre ? Que Benoît XVI trouve la bonne distance ? Comme le dit Maurice, le pape n’est pas un marche-pied pour se remettre en selle. Si je comprends que le Vatican accorde une certaine attention à l’auteur du discours de Latran, à celui qui est venu après la rature française sur les « racines chrétiennes de l’Europe », si je n’oublie pas que Sarkozy est resté ferme sur certains sujets de société, il faut espérer que le Vatican attende, lui aussi, plus d’actes que de discours. Quand on a souffert une fois, mon Nico, tu le sais, on attend des preuves d’amour. Et chez les hommes inconstants, on les attend sur le long terme.

Mais allez, Nicolas Sarkozy n’est-il pas simplement à l’image de ceux qui voient dans le christianisme un objet intellectuel, au mieux un héritage, une tradition française, un fait de civilisation ? C’est un christianisme de musée, c’est une France-conservatoire. C’est la considération que l’on doit encore aux derniers des Mohicans. S’il est toujours hasardeux de spéculer sur la foi d’un homme[2], ce n’est pas un christianisme personnel, intégré. Son parcours, ses valeurs, ne l’amènent-ils pas naturellement à voir dans le catholicisme quelque chose de simplement antimoderne, décalé, voire formolisé, qui occupe certains, mais qui passera ?

Qu’est-ce qui peut bien ressortir d’une telle rencontre avec un Vatican courtois et diplomate ? Une photo pour la Une des journaux, sur laquelle Benoît XVI, parce qu’il est bien élevé, et parce que Nicolas Sarkozy n’est tout de même pas l’antéchrist, apparaîtra souriant ? Y aurait-il seulement désapprobation, le saurons-nous ? Le pape réitérerait-il un rappel à « l’accueil des légitimes diversités humaines », l’apprendrons-nous ? Qu’attendre vraiment, fondamentalement, profondément, sinon une inflexion de sa politique voire de son style, un apaisement du climat ? Mais qui y croit encore ? Qui donc croit que cette visite dépasse le cadre du bouquet final de la séquence catholique ?

crédit photo : antifuse

  1. mais non, rassurez-vous, je considère encore que les pires truffes restent braquées dans leurs certitudes []
  2. voire malvenu, et je vous prie de m’en excuser []

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113 commentaires

  • Assez d’accord.

    Je ne comprends même pas très bien l’intérêt politique. Les cathos qui voteront NS dans deux ans le feront par rejet de l’alternative, pas parce que NS aura rencontré le Pape. À l’inverse, NS peut perdre des voix du côté laïc.

  • Pfff le niveau baisse … La tournée précédente du Grand Sarko Circus avait quand même plus de gueule avec Bigard et Madame Bruni mère dans la troupe !

    Sinon, même après avoir déclaré « À Tibhirine, j’ai compris ce qu’est la force invincible de l’amour et le sens véritable du mot tolérance », Sarko n’a quand même pas osé l’ordre des mots « La Religion, la République, l’Espérance » dans son titre 😉 !

  • « tu m’as brisé le cœur une fois, Nico, tu le briseras pas deux »
    Vous ne voterez donc pas à nouveau pour lui s’il se présente en 2012, même au second tour, s’il se trouve face à un candidat du PS ou d’Europe Écologie ?

    Il y a une certaine schizophrénie aujourd’hui chez beaucoup de chrétiens, qui au fond n’est que le prolongement de l’hypocrisie de la bourgeoisie chrétienne du 19e siècle jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, qui consiste à se prétendre solidaire, fraternel, charitable, mais à soutenir les contre-réformes sociales de la droite. Boutin figure très bien cela avec ses missions payées à prix d’or, ou ses tentatives de ramener chaque discussion où les chrétiens sociaux peuvent avoir leur place vers son propre parti, qui soutient pourtant l’abaissement des mesures égalitaires en France. Mais beaucoup de grands entrepreneurs et grands bourgeois sont encore pires, bien sûr.

    Je m’étonne que La Croix, que les organisations chrétiennes, et que les blogueurs comme vous, ne soulignent pas leur choc immense devant l’accroissement des inégalités, le fait que le capital a pris 10 points de PIB au travail ces 20 dernières années, et, pour la contre-réforme des retraites, le fait qu’on oblige des personnes à travailler plus longtemps ou gagner moins, alors même qu’elles souffrent déjà de bas salaires et d’un marché de l’emploi très injuste. Quand un ouvrier a une espérance de vie en bonne santé de 59 ans, comment peut-on trouver juste d’exiger de lui un départ à la retraite à 62 ans ?! Quand 60% des salariés qui activent leurs droits à la retraite sont au chômage aujourd’hui, au moment où ils les activent, comment peut-on trouver juste d’attendre d’eux qu’ils les activent deux ans plus tard ?! Comment peut-on trouver juste que le financement, équilibré jusqu’à la crise financière provoquée par les banquiers, ne reposent que sur les travailleurs, ceux-là même qui étaient les premiers lésés de cette crise ?!
    Sur tous ces points, le silence de l’Église est assourdissant. Comme le dit très bien Sam Harris, dans son livre ou dans une interview ludique ici (http://www.thedailyshow.com/watch/mon-october-4-2010/sam-harris), l’Église catholique met plus d’énergie à lutter contre la contraception et l’avortement, ou à cacher ses scandales, qu’à lutter contre un génocide qui se déroule ou à réduire la pauvreté dans le monde.
    Et de votre côté, vous avez beau être chrétien, je n’ai pas l’impression que vous vous préoccupiez du sort de votre prochain, s’il n’est lui-même chrétien, ou riche.

    Petite anecdote personnelle pour ne pas avoir l’air crispé : hier, sortant de la bibliothèque avec un ami, on se dirige vers un café alors qu’on est un peu pressés, quand je vois une dame avec une lourde poussette l’air mal en point pour descendre des escaliers, de l’autre côté de la rue : je traverse et l’aide (c’est à Saint-Germain-des-Près, les locaux n’aident jamais, que les banlieusards qui y ont cours manifestement). Mon pote, Beauceron égoïste, me fait remarquer que même si je me suis fait débaptiser, c’est une sorte de « réflexe chrétien » qui m’anime, alors que pour ma part je suis persuadé simplement que c’est « normal », d’autant plus pour un républicain de gauche. Quand on croise autant de prétendus chrétiens dans ces beaux quartiers qui font leurs courses au Bon Marché, qui s’achètent des vêtements à plusieurs centaines d’euros, qui vont certes donner 100€ par mois au secours catholique, mais qui n’adressent pas une parole réconfortante, un billet ou un paquet de nourriture, ou même un sourire, aux mendiants qu’ils croisent dans la rue, je me dis que l’Église catholique de France, surtout à Paris, est ancrée très à droite et loin des Évangiles. Ma marraine m’avait amené un jour à Taizée en Bourgogne, l’ambiance et la volonté d’aider son prochain étaient tout autres.

    Tout cela pour dire : aux catholiques qui comme vous refusent que leur religion soit un « christianisme de musée », je réponds : alors soyez chrétiens. Suivez les exemples beaux et généreux de François d’Assise (http://www.franceculture.com/emission-concordance-des-temps-concordance-des-temps-saint-francois-d-assise-et-l-argent-une-soudain), de l’abbé Pierre (http://www.youtube.com/watch?v=swZePLi2nuM&feature=related), de Térésa… Sinon, ce sont bien vous les chrétiens « esthétiques », qui saupoudrez de religiosité un message qui prêche l’inégalité !

  • @ Aristote: oui, c’est surprenant. Je me garderais bien de prendre Sarko pour une andouille : il a tout de même brillamment remporté une présidentielle que le PS disait « imperdable », pour lui. Passant après Chirac, après les 21 avril et autres 29 mai, la tâche n’était pas aisée. Il n’est donc pas mauvais stratège. Mais il donne trop le sentiment de ménager la chèvre et le chou. Au final, il me semble qu’au lieu de donner une image d’ouverture, il donne une image brouillonne.

    Enfin, j’imagine qu’il veut donner aussi une image de « président de tous les français ».

    Mais il y va tellement avec les gros sabots : il avait la visite au Pape, il a fallu qu’il ajoute la visite à Vézelay, le retour sur les cathédrales, et la projection de Des hommes et des dieux (certes, six mois après, cela n’aurait plus été d’actualité). Au final, on sent trop les coups de « spin doctors » derrière ça, la blitzkrieg d’opinion. Il aurait pu chercher à étaler les messages dans le temps.

    Yogui a écrit : :

    Sarko n’a quand même pas osé l’ordre des mots « La Religion, la République, l’Espérance » dans son titre !

    Corrigé, en effet. Mais « La République, les religions, l’espérance », la différence est vraiment dans la nuance.

  • Oui, garder le maximum de distance avec ces « papouilles » dérisoires. Ce n’est pas parce qu’on n’attend plus grand respect et estime de la gauche (je suis de gauche) que le discours vaguement faux jeton de la droite va nous réjouir. La « vieille maîtresse » sait que ses charmes sont fanés. Elle ne fera qu’entrouvrir sa porte. Elle sait qu’en ces temps « qui sont les derniers » les anciens amants ne reviendront pas et qu’il faut ouvrir l’oeil : les urgences auxquelles il va falloir faire face sont rarement dans l’axe du regard médiatique. L’injection de quelques images pipoles « volées au pape » ne changera rien à notre pitoyable cirque médiatico-électoral.

  • NS, je crois, considère les religions comme un régulateur social gratuit pour la république.
    Les prêtres et les imams pèsent bien moins que les flics, les juges et les éducs sur nos dépenses et sont souvent plus efficaces à long terme.

    Alors il essaye de conserver de bonnes relations, cela fait partie du « job ».

    Pourquoi lui reprocher un tel pragmatisme, cela n’empêche pas les croyants de croire (sans être dupe d’un tel cinéma).

  • Je suis bien d’accord avec vous, avec néanmoins une pointe d’appréhension supplémentaire. J’avoue que je redoute un peu cette visite. Que peut-il en sortir de bon ? Que faut-il en attendre ? Je crois me souvenir qu’elle a été provoquée suite aux expulsions de Roms. Si tel est le cas, que peut dire Benoît XVI ? « Méchant président ! « ; Dans ce contexte, comment aborder d’autres sujets ?

    Si on se place maintenant du coté de M. Sarkosy, je suis assez d’accord avec ce qui a été dit plus haut : ce n’est pas la visite du Président au Pape qui va pousser les cathos français à voter plus pour lui. Qu’est-ce que M. Sarkosiy attend donc de cette visite ?

    La seule note positive en ce qui me concerne : la confiance en Benoît XVI pour tirer profit de cette occasion… On peut penser que le Pape aura bien préparé cette rencontre pour réussir à glisser quelques propos qui pourront être utiles à la société française.

  • @ Irfan

    Je ne suis pas choqué par ce que vous écrivez. La complication, c’est que des personnes de bonne foi peuvent être en désaccord sur ce qui cloche, sur ce qui aboutit à ce que vous dénoncez. Je prends un exemple : vous dites il est anormal de demander à quelqu’un qui est chômeur à 60 ans de retarder à 62 ans l’âge de son départ en retraite. Sans doute, mais il n’est pas absurde de défendre la thèse que les 35 h et la retraite à 60 ans font partie des raisons (je n’ai pas écrit ce sont les seules raisons) pour lesquelles le chômage est si élevé en France. Je ne vous demande pas de souscrire à cette thèse, mais elle est suffisamment plausible pour ne pas accuser ceux qui la défendent de mauvaise foi égoïste.

    Je trouve normal que l’on trouve des chrétiens pour soutenir en gros la réforme des retraites proposée et normal qu’on en trouve pour la contester. Cela fait partie des désaccords légitimes au sein de notre foi.

    Nous ne sommes pas tous des Saint François et nous sommes mêmes parfois des contre-exemples. Ben oui. Mais bon, rien ne vous interdit de fixer votre attention sur Saint François plutôt que sur Aristote !

    NB : je n’ai rien contre les habitants du quartier de Saint Germain des Prés, mais en quoi sont-ils particulièrement représentatifs des chrétiens ?

  • Il y a hélas pas mal de vrai dans ce que vous dîtes, Irfan, et je vous rejoins sur certaines critiques.
    Mais ce que vous observez à Paris est un phénomène sociologique, pas religieux.
    Donc, quand vous extrapolez ce que vous observez à Paris à l’Eglise catholique entière (« l’Église catholique met plus d’énergie à lutter contre la contraception et l’avortement, ou à cacher ses scandales, qu’à lutter contre un génocide qui se déroule ou à réduire la pauvreté dans le monde »), vous êtes dans l’erreur.
    Lisez ce que dit le pape, regardez ce que fait l’Eglise dans le monde, vous la verrez, votre erreur.

  • @ PMalo:
    La juxtaposition de mes deux remarques était peut-être maladroite, mais elles ne sont aucunement liées : sociologiquement, à Paris et ailleurs, beaucoup de soi-disant chrétiens parmi les classes les plus riches se comportent de façon très égoïste, souvent excluante, et de fait violente (voir la courte vidéo de l’abbé Pierre que j’ai indiquée plus haut : http://www.youtube.com/watch?v=swZePLi2nuM&feature=related). Géopolitiquement, dans le monde, et c’est ce que l’auteur américain que j’ai cité défend, l’Église s’intéresse plus à ses propres intérêts et à la cohérence de sa doxa, plutôt qu’au bien des plus faibles. On se souvient du tollé soulevé par la jeune fille violée qui avait été excommuniée pour avoir avorté, tandis que des violeurs d’enfants ne sont pas excommuniés. Je sais que le droit canon ne suit heureusement pas les fluctuations de la société qui sont celle du temps court, mais il y a là quelque chose de choquant pour l’esprit qui est tourné vers son prochain. L’Église n’a rien voulu faire au Rwanda, elle n’aide guère au Liban, etc. Par contre, elle fait des déclarations pour attaquer le port du préservatif ou la laïcité française qu’elle ne comprend manifestement pas.

    @ Aristote:
    « il n’est pas absurde de défendre la thèse que les 35 h et la retraite à 60 ans font partie des raisons (…) pour lesquelles le chômage est si élevé en France. [Cette thèse] est suffisamment plausible »
    Il faudrait étayer cette assertion !
    Au contraire les 35h et la retraite à 60 ans, si ces règles étaient réellement appliquées, baisseraient largement le chômage en France ; seulement les 35h ont largement été contournées (et ne sont pas si « franco-françaises » que la droite veut bien le dire : beaucoup de pays où le contingent légal d’heures hebdomadaires travaillées est de 40 payent l’heure du déjeuner ! Le Canada par exemple. Ce sont bien des 35h, payées 40 !!) par les heures supplémentaires dont beaucoup non déclarées et par le statut de « cadre » qui a été largement dévoyé et permet de faire travailler 55 ou 60h par semaine notamment les jeunes, avec un salaire horaire faible par rapport à leur qualification. Quant à la retraite à 60 ans, elle permet surtout de rehausser les faibles retraites, alors que la réforme Balladur-Veil et la réforme Fillon ont appauvri grandement les plus pauvres : dans les années 1990 on cotisait en moyenne 37 annuités, proche donc des 37,5 annuités demandées ; on cotise aujourd’hui plutôt 35,5 annuités dans une carrière réelle, alors que la loi a demandé 40, puis 41,5 annuités à présent ! C’est une simple façon d’appauvrir les pauvres. Sans parler du passage des 10 meilleures années au 25 meilleures années dans le privé, opéré par la réforme Balladur-Veil, qui est scélérate, ne sert que l’intérêt des plus riches au détriment des travailleurs qui font une « belle carrière », et qui surtout permet au gouvernement et à la droite d’opposer privé et public de façon totalement artificielle, pour scinder les luttes sociales.
    C’est en tout cas un tout autre débat : je m’étonnais simplement que le chrétien, censé aider son prochain, pense performance économique plutôt que bien-être du plus fragile. Je suis heureux de voir qu’apparemment certains restent ouverts à la discussion, et ressentent ce même malaise que moi.

  • Une phrase m’a fait tilté à la fin, quand vous dites que le catholicisme est antimoderne. Il apparaît que la modernité trouve son fondement dans ce siècle des Lumières, et quand on lit son plus illustre auteur (à mon sens Kant mais c’est tout à fait subjectif en fait..), on y voit clairement, et il le confesse même, une (monumentale) inspiration chrétienne. Les impératifs catégoriques ne sont pas plus que les commandements du Christ – aime ton prochain comme toi même/comme je vous ai aimé… – laïcisé.

    En revanche, et Marcel Gauchet le disait de façon intéressante lors de ces conférences aux Bernardins sur cette « radicalisation de la modernité », ce qui est « contemporain » n’est plus vraiment « moderne ». Les idées, l’inspiration, et même le sens ont été mutilé, voir détruit. Ainsi le « contemporain » (au sens de notre époque, pas de l’homme contemporain – les individualités restent mystérieuses) abhorre le christianisme, mais je ne suis pas sûr qu’il n’aime tellement plus le moderne originel.

    Enfin c’est une petite réflexion comme ça, même si j’entends très bien l’idée sous jacente de votre phrase. C’est juste que vu l’étymologie de « catholique », et vu que la modernité se veut avant tout universel, ça sonnait … étrange.

    Merci pour cet article, merci pour le temps que vous passez à informer vos lecteurs!

  • J’ai sur Koz (et, je crois, sur pas mal de cathos) l’avantage de ne jamais avoir cru au discours du Latran ni au concept, que je trouvais creux ès le départ, de laïcité positive. Je ne suis donc pas déçu par notre Président sur ce point particulier.

    Je n’ai pas la moindre idée de ce que sont les convictions profondes de Nicolas Sarkozy. Je soupçonne qu’il n’en a pas, mais cela relève de la spéculation et ce n’est pas très intéressant. Ce qui est intéressant, ce sont ses actes, et en la matière il est désormais clair que sa politique consiste à étudier la segmentation du « marché » électoral – j’emploie à dessein un langage marketing – et à dire ce qu’il faut pour conquérir les segments qui font partie des objectifs qu’il a définis, afin d’être élu, puis réélu. Et ce, tout à fait indépendamment des convictions qu’il peut ou non avoir.

    Il n’y a donc rien à attendre de spécial du Président, à l’occasion de cette rencontre. Par contre je suis tout à fait intéressé par ce que va dire Benoît XVI. S’en tiendra-t-il aux banalités polies des bonnes relations entre le Vatican et la France ? Ou arrivera-t-il à glisser une phrase significative et surtout à la faire retenir par les médias ? Le test est finalement plus pour le Vatican que pour l’Élysée.

  • Comme Gwynfrid, je ne m’étais pas fait avoir par le grand spectacle de Latran, je ne me sens donc pas abandonné… par Sarkosy. Mais voilà, moi aussi on m’a pris pour une truffe, et donc je me joins à Koz et Dalila pour pleurer sur l’inconstance et la cruauté des hommes :

    http://www.lefigaro.fr/politique/2007/12/26/01002-20071226ARTFIG00005-bayrou-sarkozy-remet-en-cause-la-laicite-republicaine.php

    Ah, François, mon François! Qu’as-tu donc fait de notre histoire?

  • Que peut-on attendre de la rencontre entre Sarkozy et Benoît XVI ?

    Pour Sarkozy, d’être touché par la Grâce ! Et prions pour cela afin qu’il ressorte autre chose de cette rencontre qu’un coup marketing raté (les cathos ne sont et ne seront plus dupes).

    Pour le pape, bien plus fin renard politique qu’on ne le croît, cela lui permettra peut-être de réaffirmer les points non négociables qu’attendent les catholiques de la politique Française : respect de la vie et de la famille, charité, liberté et vérité.

  • Merci Koz pour le lien d’archive, je me doutais que ce billet devait exister…
    Sans vouloir refaire le match, 3 ans après, et même si tu qualifiais les termes du débat d’alors de « congelés en 1905 », convenons que ça ressemblait autrement plus à de la vraie politique que ce l’on nous a servi récemment, de l’identité nationale à la place de l’Islam dans notre société. Que ce soit les interventions de Raffarin, Bayrou ou Sarkosy d’ailleurs.

  • Irfan, il y a du vrai et du moins vrai dans ce que vous dites, et le tout étroitement imbriqué, ce qui fait d’une part l’intérêt de votre intervention et d’autre part la difficulté d’y répondre de manière pertinente.
    Je vais juste réagir sur quelques points :

    Sur le point sociologique, vous avez raison. Et, hélas, ce sera ainsi pour tout chrétien jusqu’à la fin des temps, à Paris comme à Honolulu, Tombouctou, et même Taizé. La conversion et la foi sont quelque chose d’intimement personnel et je ne peux donc que déplorer ce que vous relevez comme incohérences entre la foi et les œuvres, mais personne ne peut agir à la place des autres ; j’essaie juste d’être exemplaire à mon niveau, et ya déjà du boulot.Mais vous savez comment les habitudes culturelles et sociologiques sont des choses très difficiles à dépasser, par leur importance dans la construction de chaque personne ; je le déplore autant pour les autres que pour moi. (Mère Theresa, en réponse à la question « que changeriez-vous aujourd’hui dans l’Eglise ? » répondait en substance « moi ».) Si vous préférez voir des cathos exemplaires, ce qui serait tout à votre honneur, regardez les saints, là vous êtes quasiment sûr de ne pas être déçu car ils ont été reconnus pour la façon héroïque dont ils ont exercé les vertus chrétiennes. Conseil que vous a déjà donné Aristote, si je ne m’abuse ; en plus avec votre exemple de st François d’Assise, que l’on fêtait il y a 3 jours, saint que j’apprécie tout particulièrement (une certaine similitude de parcours, peut-être…) et qui m’inspire énormément jusque dans ma vie la plus quotidienne matérielle comme spirituelle.

    Géopolitiquement, vous dites que « dans le monde, l’Église s’intéresse plus à ses propres intérêts et à la cohérence de sa doxa, plutôt qu’au bien des plus faibles. » Je ne perçois pas clairement quels sont ses « propres intérêts », mais la cohérence de sa doxa, si : il s’agit justement entre autres de la défense du plus faible. Je n’arrive donc pas à percevoir le sens de votre critique.

    Quant à l’histoire de l’avortement de la fillette de Recife, tout a été dit, en particulier ici-même en son temps, donc je vous conseille avec toute la bienveillance dont je suis capable de vous renseigner sur ce qui s’est passé et de tenter de comprendre. Au sujet du Liban et du Rwanda, je ne maîtrise pas du tout le sujet, donc admettons. Mais quid des autres pays, des autres conflits, des autres sujets de société ? Si vous me citez deux exemples où des hommes d’Eglise ont foiré, ce qui est possible, je peux vous citer une multitude de cas où l’Eglise a été une balise exemplaire et un recours inégalable pour une multitude de personnes. Mais nous ne sommes pas là pour compter les points, n’est-ce pas ?

    Sur le port du préservatif, idem que pour « l’affaire de Recife ».

    Et pour finir, « la laïcité française qu’elle ne comprend manifestement pas » : il me semble plutôt que c’est la laïcité française qui dérive et ne respecte guère la laïcité dans sa définition. N’inversez pas les rôles. Il me semble que Koz en a fait un article il y a quelques jours, je vous conseille de vous y reporter (sujet que je ne maîtrise pas non plus, cet article et ses commentaires m’ont beaucoup apporté justement).

    @ Augustin : le sujet de la modernité me passionne ; on a déjà fait un immense bout de chemin quand chacun des interlocuteurs a réussi à bien définir les mots qu’il emploie ! Sinon on a vite fait de s’embrouiller. Je crois donc en l’occurrence que les questions que vous soulevez sont plus des questions de vocabulaire et de définitions que des questions philosophiques, sur lesquelles je pense qu’il n’y a pas de profond désaccord.

  • @ Irfan
    Je suis toujours ravi d’entendre des non-chrétiens revendiqués me (nous) dire ce que doit faire un chrétien, ce qu’il doit penser, comment il doit agir.
    Aux yeux de la droite et de la gauche, celui-ci est censé trop souvent jouer l’idiot utile dont on rançonne la pseudo-bonne conscience contre un plat de lentilles électoral.
    Pourtant, j’ai du mal à situer dans les Écritures, dans les textes des Pères de l’Église ou la vie des Saints les enseignements qui devraient, pour reprendre votre exemple, inciter chaque chrétien à prendre position pour le maintien de la retraite à 60 ans.

    La gauche est parfois tellement persuadée de défendre objectivement le peuple et partant, d’appartenir au camp du bien, qu’elle ne comprend pas comment un chrétien ne peut pas être de gauche sans hypocrisie ou sans cynisme. Les choix économiques de droite ou de gauche sont pourtant de simples outils. Si moi, chrétien de droite, je considère que la gauche mène le pays à la ruine, il est normal, par souci des pauvres (et des autres qui risquent de le devenir) de ne pas lui prêter allégeance. Même raisonnement (en miroir) pour un chrétien de gauche.

    En outre, l’altruisme, la lutte contre la pauvreté, et j’en passe, ne sont pas des concepts spécifiquement chrétiens. Vous le dites bien vous-même, nul besoin d’être chrétien pour les reprendre à son compte.
    Souffrez que nous ayons une autre vision que la vôtre de la solidarité, que nous nous efforçons en particulier de ne pas confondre avec la charité chrétienne.

    Pour finir, j’ai une excellente nouvelle pour vous : le christianisme n’a pas vocation à définir la politique économique d’un pays, pas plus que la science, pas plus que l’histoire, pas plus que le droit. Et après tout, n’est-ce pas ce que voulaient les promoteurs de la Loi de 1905 ? Il faudrait juste garder à l’esprit que la politique n’a pas à définir ce qu’est la foi chrétienne. Qu’elle soit de droite ou de gauche.

  • @ Augustin et PMalo

    Postmoderne, distingué de moderne ? Cela a l’avantage de garder un sens neutre à contemporain.

  • En tout cas Benoît XVI ne va pas reprocher à Sarkosy d’avoir remonté l’âge de la retraite en France, qui reste bien en dessous de l’âge de la retraite en Allemagne, qui est bien en dessous de l’âge canonique de 75 ans pour les évêques, et encore bien en dessous de l’âge de la retraite du pape lui-même. Quand il y a de la marge, il y a de la marge.

  • Bien vu, Koz ! Nous sommes effectivement entrés dans un vaste plan marketing pré-électoral, qui vise d’abord à rassembler son camp. Nicolas Sarkozy lui-même estime en effet qu’en dessous de 28% au premier tour, c’est foutu pour lui. Et compte tenu de sa cote de popularité en berne et de la concurrence de Marine Le Pen, c’est pas gagné !

    Son camp, c’est d’abord les personnes âgées, dont le premier sujet de préoccupation reste l’insécurité et qui doutent de plus en plus (les sondages commandés par l’Elysée le montrent) de l’efficacité de la politique du président, ex-ministre de l’Intérieur, dans ce domaine. D’où le virage sécuritaire de cet été, qui vise également à ramener au bercail les électeurs du Front national.
    (Je rappelle que 61% des 60-69 ans et 68% des plus de 70 ans ont voté pour lui au second tour en 2007, Ségolène Royal étant majoritaire chez les moins de 60 ans).

    Son camp, c’est aussi les catholiques (80% des catholiques pratiquants votent à droite, 17% pour le PS et 3% pour l’extrême gauche). Et ceux-ci ont pu être « troublés » par certains épisodes du quinquennat, dont le dernier en date est celui de l’expulsion des Roms. D’où cette rencontre avec le Pape, avec un objectif évident d' »apaisement ».

    Mais même si elles ont compris (enfin), comme tout le monde, que Sarkozy était avant tout le roi de la parole, toutes ces catégories s’abstiendront-elles pour autant de voter pour lui en 2012 ? Personnellement, j’en doute. Quand il y aura un candidat de gauche en face (dont on attisera habilement le côté repoussoir), elles retrouveront à mon avis leurs vieux réflexes… Donc c’est pas perdu non plus pour lui (malheureusement, de mon point de vue).

  • @ PMalo:
    « regardez les saints » euh, non merci : d’abord je ne crois pas en la magie (et je préférais donc parler des réalités sociologiques, pas de la foi et des œuvres – qui sont une hypocrisie contrairement à la solidarité bien comprise) ensuite la sainte qui a donné le nom à l’église qui me fait face au moment où je vous écris, Marguerite-Marie, était coprophage. Bel exemple ! 🙂
    Par contre comme vous, je pense que François d’Assise, l’abbé Pierre, et d’autres doivent être célébrés et mis en avant pour leurs discours et leurs actes, comme, républicain, j’essaie de mettre en avant la pensée solidariste de Léon Bourgeois. Et il me semble bien que ce sont des personnages qui nous rassemblent dans la solidarité laïque : mon athéisme et votre catholicisme sont des choses que nous gardons en-dedans ; nos idéaux de justice et d’égalité sont des choses qui nous conduisent en-dehors. Il me semble qu’aujourd’hui beaucoup de chrétiens oublient ces idéaux.
    Quant à la laïcité, j’ai lu l’article de Koz et l’ai trouvé très mal écrit et partant d’un manque de connaissances. Remarquez : je ne le lui reproche pas. Il se trouve que je suis en ce moment en M2 d’histoire et que mon sujet porte sur la laïcité en Alsace-Moselle de 1918 à 1924. L’apprenti historien que je suis a déjà lu beaucoup de livres, pensées et actions d’hier comme d’aujourd’hui sur la laïcité. Comme je n’aime pas trop l’interface de ce blog (mes sauts de ligne disparaissent :-() je ne m’étends pas plus sur le sujet, mais je maintiens que l’Église et une grande partie de ses fidèles n’ont toujours pas compris la laïcité (et que beaucoup de républicains non plus).
    Pour la fillette de Recife et le préservatif, c’est un sujet éloigné de ce dont j’apprécie que nous discutons calmement, et je suppose que ce sujet (pour moi : une pensée magique qui se prend tellement au sérieux qu’elle fait énormément de mal à la vie réelle d’humains ; pour vous : la protection de la vie des êtres les plus faibles, de la divinité de la transmission de celle-ci ?) n’est pas de ceux sur lesquels on peut tomber d’accord en discutant dans les commentaires d’un blog.

    @ Henry le Barde:
    Euh… on parle ici de quelqu’un qui se revendique très ouvertement et très fortement chrétien ET de droite, mettant les deux en liaison, et le faisant publiquement. Il me semble intéressant et important d’interroger cette relation, puisqu’il y a manifestement amalgame, de même quand Mme Boutin se positionne en tant que chrétienne. Il me semble évident que la position chrétienne, en ce qui concerne la politique actuelle du gouvernement (lois contre les retraites et l’immigration) ne devrait pas être au soutien de celle-ci. Cela dit, comme vous le soulignez, j’étais chrétien par pédobaptême, et quand j’ai vu l’hypocrisie énorme de l’Église et de la majorité des catholiques, j’ai préféré partir à ma majorité.
    Quant au reste j’aurais mieux aimé que vous répondiez à mes arguments qu’à vos fantasmes (je ne suis dans aucun parti ni syndicat donc je ne suis pas « la gauche » ou « la politique » : mais un citoyen qui débat).

  • @ Jeff

    La stratégie de NS est diabolique. Il joue au con, grave. Les socialistes se disent : NS a tellement fait le con qu’on est sûr de gagner. Ils se lâchent, tant au niveau du programme que du candidat, NS faisant ce qu’il peut pour indirectement favoriser le plus gaucho. L’effet repoussoir est alors maximisé et NS gagne.

  • @ Pepito:
    Je pense que votre commentaire était à vocation humoristique, mais il convoie une mensonge que l’on entend hélas trop en ce moment, sur la retraite en Allemagne. Trois points à ce propos :
    1) l’âge de départ à la retraite en Allemagne devrait être porté à 67 ans en 2029, pas avant ;
    2) on peut y partir à la retraite avec 35 annuités ;
    3) si l’on prend en compte les différences démographiques énormes entre France et Allemagne, comparer les systèmes législatifs des deux pays revient à comparer les règles encadrant le chauffage en Espagne et en Suède.

    @ Jeff:
    Belle analyse de la stratégie simple et brutale du président-candidat Sarkozy, anciennement ministre-candidat, qui bien qu’au pouvoir depuis près de 10 ans se plaint de l’opposition en matière de sécurité, d’économie… Si seulement on avait un CSA garant de la démocratie (alors que Michel Boyon, dircab de Léotard en 1986, qui a vendu pour moins que sa valeur TF1 à Bouygues au nom du « mieux-disant culturel » (si, si), doit aujourd’hui vérifier le respect de la charte qu’il a lui-même constituée, en tant que président du CSA…) les médias auraient pu pointer facilement ces mensonges grossiers.

  • Ah, Paroles, quelle belle chanson…
    et qui l’aurait mieux chantée que Dalida ?
    Merci pour le lien !

    Quand les interprètes sont bons, on leur pardonne beaucoup, et on finit -souvent- par leur revenir.
    Je vois bien à quel point vous incarnez les exaspérés du sarkozisme, ou plutôt de Sarkozy, que je compte en effet nombreux autour de moi. Mais le cas ne me semble pas désespéré.

    En matière de religion plus qu’ailleurs, le parrallèle entre Napoléon et Sarkozy est parlant. Ils partagent un certain réalisme, qui tient compte des réalités profondes et anciennes et de la sensibilité des persones. Ils ont aussi en commun un volontarisme: ne pas fuire les réalités, donner corps aux courants spirituels, les engager dans un dialogue et un rapport institutionalisé avec la république. Le tout pour entrer dans une modernité non dénuée de spiritualisme.

    Qui dit mieux ? Les démocrates chrétiens mous du genou à la Bayrou, qui sont incapables de surmonter la contradiction entre leur foi et la laïcité qu’ils entendent servir ? Les laïcards qui restent aveuglés par leurs oeillères anti-catho ? Si seulement vous pouviez me montrer un homme politique qui aurait mieux fait dans ce domaine, cela m’aiderait à partager votre désenchantement.

    Et pourquoi mettre l’accent sur les convictions personnelles de Sarkozy ? Il en a sans doute, ou pas, mais nul ne s’étonnera qu’il place en priorité les devoirs de sa charge, et qu’il essaie de faire avancer son projet de civilisation. Même avec maladresse, parfois. On pouvait s’agacer quand il arrivait au Vatican avec Bigard à sa gauche et son portable dans sa main droite. C’est toujours pour le Saint-Père moins d’avanies que n’en a connues Pie VII.

    Oubliez le style qui vous insupporte, demandez-vous si les bulletins que vous aurez en main en avril ou mai 2012 représenteront beaucoup mieux sur le fond. Lorsque l’isoloir se profilera à l’horizon, chacun réajustera ses perspectives.

  • @ Irfan: vous savez que vous me plaisez, vous ? Mes articles sont mal écrits et l’interface du blog est pourrie, puisqu’elle bouffe vos sauts de ligne (laissant ceux des autres indemnes, par magie, probablement). Le tout est dit avec une humilité sans borne : cessez donc de nous parler de votre M2 d’Histoire, on est contents que vous ayez eu votre bac et que vous soyez encore sur les bancs de la fac, mais nous ça fait des années qu’on les a quittés, pas moins diplômés que vous. La pratique, si pratique il y a dans votre discipline, vous amènera peut-être à un peu moins de cuistrerie. Cela étant dit, je ne goûte pas spécialement les échanges avec ceux qui se font un devoir d’être odieux à l’égard de leur hôte. Prenez garde, ou je vous renvoie sur les bancs de la fac finir votre puberté. Et votre goûter.

    ps : sur mon blog, je suis un despote voire un salaud. Ne perdez donc pas trop de temps à répondre à ce commentaire, je n’ai aucune intention de poursuivre l’échange. Depuis le temps que je blogue, j’en ai vu un paquet, comme vous, et le personnage a fini de m’amuser.

  • @ Irfan:

    « l’Église catholique met plus d’énergie à lutter contre la contraception et l’avortement, ou à cacher ses scandales, qu’à lutter contre un génocide qui se déroule ou à réduire la pauvreté dans le monde. »

    Cher Irfan, j’ai le sentiment que vous confondez un peu « réalité » et « réalité médiatique » (ce qui paraît pour le coup surprenant de la part de quelqu’un qui, j’imagine, se pique par ailleurs d’esprit critique). Allez lire plunkett.hautetfort.com par exemple. Vous verrez que l’Eglise parle beaucoup plus de questions sociales que de cul (pour faire simple). Maintenant, ce que les journalistes ou les gens qui prennent Sam Harris au sérieux retiennent des nombreux documents vaticanesques, c’est une autre histoire …

    Il ne faut désespérer de rien, ceci dit: on trouve même des militants communistes pour faire l’effort de lire correctement (http://www.causeur.fr/benoit-xvi-anticapitaliste-calomnie,6118). Peut-être est-ce parce qu’il s’intéresse réellement au sujet plutôt que de se chercher de bonnes raisons de ne pas avoir la foi.

  • Je n’ai strictement rien à dire de vraiment intelligent sur le billet que j’ai pourtant lu avec attention, je comptais donc m’abstenir comme la plupart du temps, mais je vois en commentaire une idée reçue douteuse sur laquelle est construit un analyse scabreuse. Je propose donc de rectifier :

    Jeff a écrit : :

    Je rappelle que 61% des 60-69 ans et 68% des plus de 70 ans ont voté pour lui au second tour en 2007, Ségolène Royal étant majoritaire chez les moins de 60 ans.

    Dans le sondage que vous évoquez, rien ne permet de dire que Ségolène Royal était majoritaire chez les moins de 60 ans, vu que 50 % des 35-44 ans et 57 % des 25-34 ans ont voté pour Nicolas Sarkozy.

  • Ah, ces déçus de l’Eglise… Je pourrais en faire partie, comme je crois beaucoup ici. Ce qui montre par ailleurs qu’on en attend vraiment quelque chose et donc qu’elle a un poids moral signifiant ; c’est toujours ça de pris.
    Mais l’Eglise n’est pas un club de pétanque. Et je répète la réponse de Mère Teresa à la question « que changeriez-vous dans l’Eglise aujourd’hui ? » : « moi ». Bon, si même Mère Teresa a dit ça, ça pourrait faire réfléchir les petits clampins moyens que nous sommes. Mais non, certains préfèrent faire la morale aux autres sans se remettre en question, tout en critiquant ce travers chez les autres. Trop facile.

    Je passe sur la pensée magique, la coprophagie, la laïcité en Alsace-Moselle entre 1918 et 1924 (il me semble que justement il y a une astuce historique quelque-part avec la laïcité en Alsace, qui fait que justement on ne peut pas vraiment la comparer au reste du pays…), pour conclure que, en effet, je crois qu’on ne pourra tomber d’accord par une discussion par commentaires interposés. Dommage, je me sentais tout plein de bonne volonté.

    Koz, attention, vous risquez de le froisser et ainsi de corroborer ses fantasmes sur les chrétiens. 😉

  • @Koz

    interface du blog est pourrie, puisqu’elle bouffe vos sauts de ligne

    Ca c’est pas faux. Pour changer de paragraphe il faut 2 sauts de ligne. On s’y fait, je vous rassure, mais la premier fois c’est frustrant.

    Merci d’avoir remis l’option « modifier ». 🙂

  • @Irfan,

    Vous écrivez : « Il me semble évident que la position chrétienne, en ce qui concerne la politique actuelle du gouvernement (lois contre les retraites et l’immigration) ne devrait pas être au soutien de celle-ci. »

    Visiblement vous n’avez pas bien compris les propos d’Henry Le Barde :

    « Si moi, chrétien de droite, je considère que la gauche mène le pays à la ruine, il est normal, par souci des pauvres (et des autres qui risquent de le devenir) de ne pas lui prêter allégeance. Même raisonnement (en miroir) pour un chrétien de gauche. »

    L’Evangile ne préconise pas de choix politiques, se serait trop simple et si c’était le cas Il n’aurait pas résisté 2000 ans.

    Par exemple, êtes-vous certain qu’il est moralement acceptable de laisser les caisses de retraites s’endetter ? C’est-à-dire transférer à nos enfants la charge des retraites de leurs grands-parents que nous refuserions égoïstement d’assumer ?

  • @ Xerbias

    Rien de « douteux » ou de « scabreux » (surveillez votre vocabulaire, inutile d’être insultant, surtout si vous avez tort). Je maintiens ce que j’ai dit : un politologue s’est amusé à réaliser cet exercice et Nicolas Sarkozy était bien minoritaire chez les moins de 60 ans en 2007 (quand on fait 61% chez les 60-69 ans et 68% chez les plus de 70 ans, et que l’on gagne au final 53/47, il faut bien avoir perdu dans certaines catégories). Quant à mon analyse, que vous qualifiez de « scabreuse », j’attends vos arguments la contestant…

    Pour ma part, puisque vous semblez douter de sa pertinence, j’étaye un peu en citant Jérôme Fourquet, directeur adjoint du département « Opinion » de l’Ifop : « Ce qui est en jeu au début de l’été, c’est la crédibilité de Nicolas Sarkozy sur un de ses sujets de prédilection : la lutte contre l’insécurité. Il y a encore quelques mois, ce thème-là restait un de ses points forts et constituait le « coeur nucléaire » de sa crédibilité. Or, à la veille des vacances, tous les indicateurs sont au rouge : 57% des Français estiment que la situation s’est dégradée sur ce plan au cours des derniers mois… Un sondage réalisé au lendemain de l’intervention du président de la République à la télé le 12 juillet montre que sur la lutte contre la délinquance, il n’est pas parvenu à convaincre plus de 40% des Français… Aujourd’hui, en termes de volumes, les gros bataillons de l’électorat sarkozyste, ce sont les personnes âgées. Or, c’est chez elles que la demande de sécurité est la plus forte… ».

    Vous pouvez tout à fait voter pour Nicolas Sarkozy, vous avez sans doute de bonnes raisons pour le faire, mais cela ne vous empêche pas d’être lucide sur ses méthodes (entre autres fondées sur un usage très important des sondages et sur une communication habile et ciblée).

  • J’ajoute quelques chiffres :

    La confiance accordée au gouvernement en matière de lutte contre l’insécurité est passée de 78% en août 2007 à 49% en décembre 2009 (49% également en septembre 2010, donc érosion freinée, mission à moitié accomplie avec la mise en scène médiatique de l’expulsion des Roms et la loi inutile sur la déchéance de la nationalité en cas de meurtre de policiers).

    Ce sont les plus de 65 ans qui estiment que la délinquance a le plus augmenté (72%, dont 24 % « peu augmenté » et 48% « beaucoup augmenté »).

    Si mon analyse est « scabreuse », cela voudrait dire que Nicolas Sarkozy n’a rien à faire de ces chiffres. Qui peut le croire ?

  • Augustin a écrit : :

    Une phrase m’a fait tilté à la fin, quand vous dites que le catholicisme est antimoderne. Il apparaît que la modernité trouve son fondement dans ce siècle des Lumières, et quand on lit son plus illustre auteur (à mon sens Kant mais c’est tout à fait subjectif en fait..), on y voit clairement, et il le confesse même, une (monumentale) inspiration chrétienne.

    Bonsoir Augustin,

    il y a effectivement une continuité entre l’inspiration chrétienne de nombreux penseurs modernes. Je n’ai aucun problème à reconnaître qu’il y a dans la doctrine chrétienne beaucoup de vérités et de réflexions de qualité.

    Je pense toutefois que cet argument n’est pas aussi impressionnant qu’il en a l’air. On pourrait trouver le même genre de parallèles entre la pensée chrétienne et les sagesses qui l’ont précédées, grecques, latines, ou proches orientales. Chaque période réutilise, et c’est bien heureux, le meilleur des périodes précédentes. De plus, la philosophie chrétienne et l’application qui en est faite aujourd’hui et maintenant dans l’église catholique sont à mon avis des choses assez différentes.

    Pour le reste, qui est le sujet principal du billet, la visite du président Sarkozy au Vatican ne m’intéresse pas particulièrement. J’ai l’impression que ce n’est pas vraiment lors de cette rencontre que va se décider le futur du monde, d’un côté comme de l’autre. L’élection présidentielle brésilienne est sans doute un sujet beaucoup plus important.

  • Je ne comprends pas pourquoi mes commentaires tout à fait sérieux et véridiques sont considérés comme des commentaires à vocation humoristique.

  • Jeff a écrit : :

    Rien de « douteux » ou de « scabreux » (surveillez votre vocabulaire, inutile d’être insultant, surtout si vous avez tort). Je maintiens ce que j’ai dit : un politologue s’est amusé à réaliser cet exercice et Nicolas Sarkozy était bien minoritaire chez les moins de 60 ans en 2007 (quand on fait 61% chez les 60-69 ans et 68% chez les plus de 70 ans, et que l’on gagne au final 53/47, il faut bien avoir perdu dans certaines catégories).

    Désolé pour le mot « scabreux », il était certainement mal choisi et je ne le voulais pas insultant, je cherchais un mot pour dire « fortement bancal », puisque reposant sur un argument douteux (car non établi). Voici le sondage où l’on a les données que vous citez sur les plus de 60 ans. Je n’ai pas trouvé de données indiquant que Sarkozy était minoritaire chez les moins de 60 ans. Mais votre politologue s’appuyait-il sur des chiffres qui lui étaient exclusifs ?

  • Au vu de la teneur des messages, il semble qu’effectivement, personne n’attende grand-chose de la visite en elle-même. Notons tout de même qu’elle signifie bien que l’opinion des catholiques, le poids de l’Eglise, ne sont pas indifférents à Nicolas Sarkozy. A mon sens, cela dépasse le seul socle de l' »électorat catholique ». J’ai dans l’idée qu’en effet, l’Eglise, les catholiques et de façon générale l’impact d’une désapprobation des catholiques dépassent ce seul cadre.

    Après tout, il semble que cet électorat catholique soit majoritairement à droite : du coup, les non-catholiques peuvent se dire que, pour qu’ils manifestent leur mécontentement, c’est qu’il doit y avoir un vrai problème. Bref, il y a une capacité d’influence qui dépasse les quelques % de l’électorat catholique.

    L’idée, c’est qu’il faut faire quelque chose de cette influence. Il n’y aura pas de « président catholique », c’est de toutes façons un fantasme que peu entretiennent. Alors, il faut peser. Et il n’est pas impossible qu’un candidat plus catho-compatible s’annonce, qui puisse exercer une influence sur le positionnement de Sarko.

    Quant à Sarko, il me semble surtout avoir à faire face à une vraie crise de confiance, là-dessus comme sur d’autres sujets : personne ne croit à la sincérité de ce déplacement.

    *

    Bon, autre chose : je n’ai jamais cru que Nicolas Sarkozy soit un « président catholique ». Son style, le style de ses supporters, son parcours, ne le laissaient pas entendre. Mais ses positions laissaient tout de même penser qu’il avait une certaine sensibilité à cet égard. Quant à son discours sécuritaire, il n’était guère surprenant pour un Ministre de l’Intérieur. Je me souviens en revanche d’avoir regretté qu’il retourne à l’Intérieur, quand il était, en somme, en position de choisir. C’était peut-être un signe. Rétrospectivement, tout devient toujours plus évident.

    *

    Dernière chose : il y a un principe, sur le net, « don’t feed the troll ». Je sais que c’est désobligeant, mais c’est sain. Quand un troll passe par là, il ne faut pas se sentir dans l’obligation de lui répondre.

    Et tant que je suis dans les messages périphériques, Gatien, s’il faut 2 retours à la ligne, c’est que le deuxième permet de créer un espace entre les paragraphes. Ca me semble assez naturel.

  • Irfan, merci de rappeler à Koz pourquoi il vaudra toujours mieux revoter Sarko plutôt que pour vos amis… Je rêve du moment où Martine nous passera aux 32h en faisant gagner plus aux ouvriers (en concurrence avec les chinois et autres roumains) tout en remettant la retraite à 60 ans (meme si on vit tous les ans plus longtemps), vraiment, merci pour votre contribution!

    Si pour vous etre une bonne personne c’est de raconter n’importe quoi aux gens, alors nous ne sommes effectivement pas d’accord sur la definition. Cela dit on a bien compris que vous vous erigez en donneur de leçon sur la simple base de votre debaptisation qui fait de vous un bienfaiteur de l’humanité. Ou non, c’est parce que vous etes de toutes les « luttes ». Pathetique…

  • @ Koz:
    Désolé si mes critiques étaient un peu virulentes, et merci d’avoir expliqué pour les sauts de ligne, je ferai attention si je laisse à nouveau des commentaires chez vous. Dommage que vous n’ayez relevé que de rapides passages concernant un de vos billets qui, oui, à mon sens, était mal écrit et se trompait d’objet. Beaucoup d’autres billets que vous avez écrits sont très intéressants et me rassurent sur l’état moral d’une partie de la droite, quand la partie la plus visible en est arrivée au point où elle en est. Votre adresse à Étienne Mougeotte, pour ce dont je me souviens, m’avait beaucoup plu.

    Mea culpa si j’ai donné l’impression de « troller » mais je pense que les commentateurs habitués de ce blog reçoivent très mal les interventions de commentateurs incrédules/non-croyants.

    S’il est vrai que j’ai pu faire dériver le fil des commentaires par rapport au billet, mea maxima culpa, mais il me semble comme à vous que l’analyse centrale est globalement partagée ici : cette opération de communication de Sarkozy sur le dos de Benoît XVI est tellement grosse (au moment même où d’autres preuves que la police et la gendarmerie visaient nommément les Roms sortent dans la presse) qu’elle n’aura sans doute pas ou peu d’effet sur « l’électorat catholique qui ne se reconnait pas dans le discours de Grenoble et le bling-bling » qui était visé.

    @ PMalo:
    Je ne pense pas être un « déçu de l’Église », je n’en ai finalement jamais attendu beaucoup, même si elle a abrité beaucoup de personnes porteuses de grands espoirs, et modèles pour tous. Quant à la « pensée magique » je suis désolé, mais s’il ne s’agit pas de cela, qu’appelez vous un « saint » ? Un individu remarquable quel qu’il soit, ou quelqu’un qui a réalisé des « miracles » ?

  • @ Xerbias

    A propos du politologue (dont je n’ai pas le nom), ma source la plus récente est le Nouvel Obs de cette semaine, mais j’avais déjà entendu parler auparavant de ce calcul, dont j’avoue ne pas avoir les détails. A partir des chiffres du sondage (qui donne également 55/45 pour Royal chez les 45-59 ans, 50/50 chez les 35-44 ans, 57/43 pour Sarko chez les 25-34 ans et 52/48 pour Royal chez les 18-24 ans), il suffit de pondérer avec le nombre de Français pour chaque catégorie d’âge (des données qu’il doit être facile d’obtenir et que les sondeurs connaissent). Quoi qu’il en soit, les scores de Sarkozy chez les plus de 60 ans suffisent à eux seuls pour comprendre la stratégie marketing actuellement à l’oeuvre.

    A noter également que Chirac réalisait le même type de scores chez les personnes âgées et utilisait (dans un autre style, moins « poussé » et moins « systématique ») le même type de méthodes (remember la campagne de matraquage de TF1 sur l’insécurité avant le premier tour des élections de 2002, avec le résultat que l’on sait le fameux 21 avril).

    Les sondages montrent également (mais est-ce si surprenant ?) que plus on vieillit, plus le sentiment d’insécurité est grand (cela se vérifie tout au long des différentes catégories d’âge).

    @ Koz

    Pour abonder dans votre sens, sur « l’influence des catholiques », il y aurait (en 2009) 64% de Français se déclarant « catholiques » : 43,5% de « catholiques non pratiquants », 16% de « catholiques pratiquants occasionnels » et 4,5% de « catholiques pratiquants réguliers » (ces derniers votant à 80% à droite, ce qui m’étonnera toujours, même s’il y a à l’évidence des explications historiques, géographiques et sociologiques).

  • Koz a écrit : :

    L’idée, c’est qu’il faut faire quelque chose de cette influence. Il n’y aura pas de « président catholique », c’est de toutes façons un fantasme que peu entretiennent. Alors, il faut peser. Et il n’est pas impossible qu’un candidat plus catho-compatible s’annonce, qui puisse exercer une influence sur le positionnement de Sarko.

    Tout à fait d’accord avec toi, sauf pour la dernière proposition subordonnée. On peut espérer qu’un candidat plus catho-compatible s’annonce, oui. Mais si c’est juste pour peser sur le positionnement de Sarko, c’est une perte de temps. Comme les trois ans qui viennent de passer l’ont montré, le positionnement de Sarko ne l’engage à rien de substantiel. On peut par contre espérer qu’un candidat plus catho-compatible soit… élu. À défaut, on peut espérer qu’il pèse sur le positionnement des adversaires de Sarko. Mais du côté de ce dernier, je ne vois pas ce qu’on pourrait récupérer.

  • Il n’y aura pas de « président catholique », c’est de toutes façons un fantasme que peu entretiennent.

    Ecrit par quelqu’un qui exècre et fait campagne contre Bayrou, ça vaut son pesant de cacahuète. 😉

  • Bonjour,

    C’est marrant, parce que comme la plupart je n’attends pas grand chose de cette rencontre. Par contre, je trépigne d’impatience, c’est bête, hein ?

    Juste un petit mot positif sur cette rencontre, c’est que cela a été pour beaucoup l’occasion de reparler des valeurs non négociables. Le point négatif qui va avec, c’est qu’on les ampute. On parle à juste titre de l’avortement, de la défense de l’embryon (encore que, pas toujours), du mariage monogame et hétérosexuel, et de la liberté d’éducation. On parle aussi parfois de la liberté religieuse, même si on ne l’évoque que peu, probablement pour signifier que la situation serait satisfaisante sur ce point (admettons…).

    C’est fort bien, mais la note de Joseph Ratzinger dont sont tirés ces principes non négociable ajoute un petit truc dans sa liste, en précisant bien d’ailleurs, et ça c’est assez comique j’avoue, qu’on ne peut pas l’exclure de la liste, ce qu’on fait pourtant systématiquement, comme si la question était réglée en France. Je cite ce petit passage qu’on ne semble jamais réclamer au président de la république française et qui aurait pourtant bien besoin de se le faire rappeler :

    On ne peut exclure de cette liste le droit à la liberté religieuse et le développement dans le sens d’une économie qui soit au service de la personne et du bien commun, dans le respect de la justice sociale, du principe de solidarité humaine et de la subsidiarité.

    Ben dis donc, une économie solidaire et subsidiaire, le respect de la justice sociale… ce sont des principes non négociables ! Je laisse les catholiques qui sont dans le flou aller se renseigner sur ce que recouvre le concept de justice social. Vous aurez presque à relire tout le compendium de la DSE tant c’en est l’un des concepts majeurs. Pêle-mêle on peut dénoncer comme contraire à la justice sociale, en France, les écarts de revenus complètement disproportionnés qui peuvent exister entre les hauts et les bas revenus. Je n’invente rien, c’est dans la DSE. Ces écarts n’ont cessé de se creuser ces 30 dernières années, et j’ai l’impression que ce n’est pas sous la présidence Sarkozy qu’on verra se profiler le mouvement inverse. Mais aussi, ce qui va avec, rappeler la nécessité d’une juste rétribution du travail, non plus fondée sur la rentabilité ou l’efficacité seulement, mais sur la dignité des personnes. En gros, ça veut dire que les revenus et les prix de vente ne doivent pas être conditionnés par des questions d’offre et de demande, mais par une juste représentation des couts de production et une forte valorisation du travail humain qui en est la base. Et, puisque c’est un peu le sujet du précédent billet de Koz, vous verrez concernant le libéralisme économique, ce que la DSE rappelle : « La liberté des échanges n’est équitable que soumise aux exigences de la justice sociale ». Bon voilà l’idée générale de ce principe non négociable. Si quelqu’un a une explication sur le pourquoi il n’est jamais énuméré dans la liste qu’on ressort en ces occasions, je suis preneur.

    Koz a écrit : :

    L’idée, c’est qu’il faut faire quelque chose de cette influence. Il n’y aura pas de « président catholique », c’est de toutes façons un fantasme que peu entretiennent. Alors, il faut peser. Et il n’est pas impossible qu’un candidat plus catho-compatible s’annonce, qui puisse exercer une influence sur le positionnement de Sarko.

    Normalement c’est le moment où je reparle du parti Solidarité – Liberté, Justice et Paix et où je vous invite à vous y joindre pour contribuer concrètement, par la réflexion et la communication, à son développement Je vous laisse quand même l’adresse du site, même si j’ai toujours un peu honte parce que je le trouve vraiment pas pro (et pas beau non plus). Si ça peut vous rassurer, je suis en train de le refaire. Le problème c’est que c’est déjà difficile de trouver des catholiques qui veulent bien arriver à la même conclusion que Koz ou Gwynfrid, encore plus difficile d’en trouver parmi eux qui sont prêts à passer de l’espoir que ça se fasse sans eux à l’idée qu’ils peuvent agir concrètement pour contribuer à ce miracle. Mais alors dans ce petit peu qui reste, trouver un bon infographiste, ça relève du miracle statistique !!! Si vous êtes de la partie n’hésitez pas, parce que moi là-dessus, je ne fais que dépanner. Bref, tout ça pour dire, ne vous occupez pas de la forme, lisez les textes, prenez le temps. Il n’y a qu’un mot pour dire la raison d’être de ce parti politique : Espérance. Ah oui, mince, le site : http://www.solidarite-france.fr/

    Et puis, si il y a vraiment quelque chose que je vous recommande de lire (c’est vraiment pas long) c’est une présentation qui avait été écrite par son président, Axel de Boer, qui n’a jamais été mise sur le site (j’ai jamais bien compris pourquoi), mais qui sert un peu de tract de présentation. A défaut de l’avoir sur le site de Solidarité, je l’ai mis sur mon blog : http://pneumatis.over-blog.com/pages/solidarite-liberte-justice-et-paix-1976968.html

    Bref, l’idée de mon petit passage prosélyte aujourd’hui, c’est juste de dire que le projet de ce parti, c’est exactement de répondre à l’idée de Koz dans son dernier commentaire, et peut-être, avec l’aide de Dieu, de répondre à celle de Gwynfrid dans son dernier message. Je vous invite donc tout naturellement à vous joindre à ce projet. J’ajoute aussi que ce parti n’a aucun intérêt à se servir lui-même ou à s’auto-justifier. Il ne défend pas ses propres idées, mais la DSE. Il ne défend pas son propre succès/intérêt mais le bien commun. Il n’est qu’un outil, un moyen pour faire exister un vote catho-compatible sur la scène électorale, et donc donner aux fidèles de la DSE (chrétiens ou toutes personnes de bonne volonté) tout le loisir de peser démocratiquement sur la vie politique de leur pays.

  • Bien noté, Pneumatis, bien noté 😉 Le tout, c’est d’être prosélyte en toute transparence.

    Bon, sinon, passage sur RND. J’ai été plutôt cash. Il me semble que c’est nécessaire si l’on veut être entendus. Vous devriez trouver ça par là quand ce sera bouclé. J’ai dit mon mot ici aussi. Et parce que je ne vais pas laisser du boulot en déshérence, allez, je vous mets ici les idées que j’aurais pu aussi caser s’il ne fallait pas faire de choix.

    • montre que l’influence de l’Eglise dépasse le seul cadre du socle électoral des catholiques : Sarko pense peut-être trouver plus d’électeurs en courtisant l’extrême-droite mais il n’avait probablement pas anticipé une réaction si forte de l’épiscopat français (comme de l’impétueux Père Arthur d’ailleurs). Il doit réaliser que draguer l’extrême-droite au prix d’une réprobation continue de ceux qui représentent malgré tout l’autorité spirituelle du pays ne sera pas si aisé;

    • Il ne suffit pas d’enchainer les séquences, une séquence stigmatisation puis une séquence absolution. Pour une bonne contrition, il faudrait la ferme volonté de ne pas recommencer;

    • le vrai problème de Nicolas Sarkozy est un problème de confiance. Il enchaine tellement les coups que, s’il lui arrive d’être sincère, on ne sait plus quand c’est;

    • le désamour (si amour il y a eu) est ancien, il s’est fait progressivement, et il s’est simplement cristallisé cet été. Il y a eu le Fouquets, le monastère transformé en yacht, le bouclier fiscal, la tentative de suppression de la carte familles nombreuses, l’éviction de Christine Boutin suivie immédiatement de l’entrée de Nadine Morano, le travail dominical, l’affaire de l’Epad suivie immédiatement de l’affaire Frederic Mitterrand qui a fait de gros dégâts, l’attitude de Roselyne Bachelot sur l’avortement, je mettrais même la légalisation des paris en ligne, et puis un an passé à vivre dans la crispation et la dénonciation de l’autre avec ce débat sur l’identité nationale. Après les régionales, Nicolas Sarkozy avait l’occasion de tenir compte de la distance prise par les électeurs de centre droit. Or il fait le choix inverse (peut-être pour y répondre) de repartir dans une quête de l’extrême-droite. C’est peut-être électoralement judicieux mais il ne faut pas s’étonner qu’une part notable des catholiques et spécialement des catholiques de droite constatent que c’est une droite qui n’est pas la leur;

    • le désamour a été progressif et il prend ses racines loin dans le quinquennat. On ne reconquiert pas cet électorat, surtout pas l’électorat catholique, avec une visite à une basilique, un film et une photo.

  • Quelques petites infos supplémentaires, piquées dans Le Monde d’hier :

    « Les catholiques qui se disent pratiquants, 14% de la population, sont un électorat âgé, conservateur, sensible au thème de la sécurité, inquiet face à l’islam. Le danger est qu’ils s’abstiennent, pas qu’ils votent à gauche ; ou alors marginalement, et seulement si elle est incarnée par une économie sociale-libérale à la Strauss-Kahn », souligne Jérôme Fourquet de l’Ifop.

    Mais un autre élément pourrait inquiéter la droite classique. Alors que la « catholicité » était jusqu’alors un rempart contre le vote Front national, les enquêtes de l’Ifop montrent que désormais les catholiques pratiquants et non pratiquants votent davantage à l’extrême-droite que l’ensemble des Français (13,8% pour les premiers, 11,3% pour les deuxièmes et 10,3% pour la troisième catégorie).

    Ce qui m’amène à une réflexion personnelle inquiétante (mais qui pourrait servir d’argument aux sarkozystes) : est-ce Sarkozy qui se droitise toujours plus, ou est-ce la France ?

  • Koz a écrit : :

    Bien noté, Pneumatis, bien noté 😉 Le tout, c’est d’être prosélyte en toute transparence.

    Tu veux dire que je ne suis pas assez transparent ? ou que je suis plutôt parano ? Si c’est la première idée, il ne faut pas hésiter à me le dire, car ce n’est vraiment pas volontaire. Au contraire, j’aspire à la plus grande transparence, mais simplement dans le respect des uns et des autres, avec une modération qui est loin d’une volonté de cacher quoique ce soit, y compris mon identité.

  • Je ne voulais rien dire de tout ça.
    Mais là, je dirais que t’es parano 😉

    J’en profite pour dire que l’émission est en ligne. Voir lien donné dans mon com’ ci-dessus, ou là.

  • Koz a écrit : :

    Mais là, je dirais que t’es parano

    C’est clair, c’est bien ce que je pensais ! Mais je me soigne, remarque. Comme ça au moins j’ai bien montré à quel point je suis à l’aise à venir faire du prosélytisme chez les autres. Bon, fin de la parenthèse.

  • Jeff a écrit : :

    Ce qui m’amène à une réflexion personnelle inquiétante (mais qui pourrait servir d’argument aux sarkozystes) : est-ce Sarkozy qui se droitise toujours plus, ou est-ce la France ?

    Nous avons probablement déjà la réponse à cette question en regardant les Etats-Unis, où un mouvement de droite dure s’est beaucoup développé ces dernières années: il semble que face au consensus mou que partagent la gauche et la droite sur le modèle social et sur la liberté des moeurs, il y ait un besoin d’une droite franchement libérale et conservatrice, qui ne sera pas forcément fascisante comme notre extrême droite, et qui respectera parfaitement les règles de la démocratie. Je ne partage pas forcément les opinions de la droite dure, mais leurs idées ont une place dans le débat politique, et cette branche de l’opinion qui va de développer a vocation à mon avis à devenir un parti de gouvernement. A un moment donné, il n’est pas exclu que ce courant soit majoritaire dans la droite française.

  • Jeff a écrit : :

    Ce qui m’amène à une réflexion personnelle inquiétante : est-ce Sarkozy qui se droitise toujours plus, ou est-ce la France ?

    En France, comme ailleurs en Europe, j’ai l’impression que le vieillissement de la population, et le formatage de beaucoup de médias, avec des reportages totalement bidonnés dans le sens qui fait peur, qui stigmatise l’autre (voir les polémiques récentes sur Le Point, sur Doc en Stock, sur les passages télévisés d’Hugues Lagrange), jouent dans le sens d’une certaine droitisation.

    oim a écrit : :

    Irfan, merci de rappeler à Koz pourquoi il vaudra toujours mieux revoter Sarko plutôt que pour vos amis… Je rêve du moment où Martine nous passera aux 32h en faisant gagner plus aux ouvriers (en concurrence avec les chinois et autres roumains) tout en remettant la retraite à 60 ans (meme si on vit tous les ans plus longtemps), vraiment, merci pour votre contribution!

    Je vous conseille alors, le plus aimablement possible, de mieux vous renseigner à partir par exemple des sources suivantes :

    Comme vous, j’ai d’abord pensé que si l’on vit plus longtemps, on peut travailler plus longtemps. Seulement, l’espérance de vie passé 60 ans n’augmente pas du tout de la même façon que l’espérance de vie tout court, et surtout l’espérance de vie en bonne santé est, en France, de 63 ans pour les hommes, 64 ans pour les femmes (et 59 ans en moyenne pour les ouvriers). En vingt ans, 10 points de PIB, c’est à dire 10% de la richesse produite par notre pays, sont passés des salaires vers le capital : les salaires finançant bien plus la solidarité des retraites et de la sécurité sociale que le capital, vous avez là l’explication majoritaire du (faible) déficit structurel que notre pays rencontre pour payer ses retraites – le déficit était de 3G€ avant la crise, soit le cadeau de la TVA aux restaurateurs par exemple, et bien moins que la « niche fiscale Copé ». Augmenter les salaires, réduire le chômage (par le partage du temps de travail, et pas en augmentant la durée de celui-ci !), régulariser les travailleurs sans-papiers (avec en contrepartie des taxes allégées au besoin !), augmenter les cotisations patronales qui n’ont pas changé depuis 1995, taxer les bénéfices du CAC 40 à hauteur des taxes acquittées par toutes les autres entreprises… voilà autant de solutions de rétablir bien plus facilement la balance des retraites, qui n’est pas aussi déséquilibrée qu’on veut bien nous le faire croire !

    Je pense que j’ai peut-être été un peu agressif ou péremptoire dans mes premiers messages et que ça a donc brouillé ce que je voulais dire, ce qui était stupide de ma part, et je présente à nouveau mes excuses à Koz, mais si vous vous intéressez vraiment à ce sujet, je vous encourage à ne pas caricaturer mes propos. Non, refuser de repousser de 2 ans l’âge légal de départ à la retraite n’est ni révolutionnaire, ni réactionnaire, ni contraire aux réalités : c’est une question de justice sociale, d’équité, et de progrès vers un pays moins pauvre, plus sûr, . Si vous avez le temps de lire les livres conseillés plus haut ou d’écouter les émissions, je pense que vous changerez peut-être d’avis.

  • « Ce qui m’amène à une réflexion personnelle inquiétante (mais qui pourrait servir d’argument aux sarkozystes) : est-ce Sarkozy qui se droitise toujours plus, ou est-ce la France ? »

    La France s’extrêmise doucement par ses deux bouts.

    Il y a 20 ans rares étaient ceux qui se disaient clairement « de droite », on était « modéré », et maintenant une droite décomplexée affiche brutalement des idées tranchées.

    Parallèlement à gauche le ton est monté de plusieurs crans, le chef de la droite n’est pas désigné comme l’adversaire politique contre lequel il convient d’argumenter mais comme un quasi délinquant qu’il faut abattre par tous les moyens.

    Où tout cela va-t-il nous mener ?

  • OK Koz, c’est chez vous et je me suis laissé emporter. Le ferai plus.

    Bon, pour Sarko, comme déjà énoncé dans grosse fatigue, les hommes politiques ne sont pas très honnêtes avec nous, dont acte (pas plus ceux qui promettent la retraite à 60 ans pour l’éternité que ceux qui promettent que la racaille, elle va voir ce qu’elle va voir). Qu’est-ce qu’on fait une fois qu’on a dit ça? On vote pour celui dont on estime que les décisions qu’il va prendre constitueront le meilleur arrondi de ce que l’on souhaiterait dans l’idéal…? La limite de cette vision assez technicienne du choix politique est que l’image d’un président impulse sans doute un petit quelque chose dans la psyché collective qui fait avancer un pays, ou qui le tient ensemble, ou pas.

    Alors Sarko et les cathos, manipulation totale? Je n’y crois pas, pas uniquement du moins. Je trouve qu’il lui faut des guts pour dire ce qu’il a dit à Latran ou ailleurs. Mais voilà, c’est aussi un beauf dans sa relation à la religion et il en est clairement à un niveau très éloigné, ceinture blanche en cathé. Qu’il puisse avoir du respect pour le Pape ne me parait pas inconcevable. Un gars qui explique sans coup férir que Carla fait son éducation en lui faisant regarder… des DVDs, c’est pas impossible qu’il soit impressionné par un autre gars qui est quand même un grand intellectuel. Je suis régulièrement surpris par le nombre de personnes complexées par leur culture générale…

    Et puis cette visite, soyons constructifs, après la séquence sur les roms et l’indignation de l’Eglise, n’est-ce pas tout simplement logique qu’il la fasse, qu’il calme le jeu? N’était-ce pas approprié de faire retomber le soufflé (ok la prière pour la France c’était too much…) ne serait-ce qu’en tant que chef d’Etat?

  • @ Pneumatis:

    Merci pour votre transparence (mais si, vous êtes remarquablement transparent, voyons…) et votre sincérité. Toutefois, je voudrais souligner que pour ma part j’espère non pas un candidat catho revendiqué et étiqueté comme tel, mais un candidat catho-compatible. Fine nuance.. Je me rappelle que nous avions déjà débattu de cette question lors des régionales. En bref: je pense que le candidat catho-compatible a une chance de peser, contrairement au candidat catho-étiqueté.

  • Gwynfrid a écrit : :

    Toutefois, je voudrais souligner que pour ma part j’espère non pas un candidat catho revendiqué et étiqueté comme tel, mais un candidat catho-compatible. Fine nuance..

    Oui, je comprends. Toutefois… Je ne sais pas trop comment dire, mais vraiment très honnêtement, au final j’ai du mal à y voir autre chose qu’une espèce de discours : « catho-en-politique-ça-fait-pas-sérieux ».

    Soyons réalistes : avoir un candidat catho-compatible qui n’est pas catho, vous pouvez l’attendre longtemps le miracle, et surtout ça risque de vous faire rejeter un paquet de personnes pleines de richesses et de possibilités. Je vous aurais bien demandé si c’est un Gandhi que vous attendez, mais même pas, en fait : Gandhi, la première chose qu’il a faite quand il a été un personnage public (alors que religieusement il était plutôt du genre vraiment pas communautariste, comme religieux) ça a été de vivre sa religion à fond et de bien l’afficher. Et puis, si vous cherchez un non-catho, si donc vous placez plus d’espérance dans des non cathos que dans des cathos, j’ai l’impression, sans vous froissez, que ça témoigne d’une espérance un peu… malade. On a tous une espérance malade, hein, nous ne sommes pas saints. Mais là, espérer plus dans ceux qui ont accueilli la grâce de Dieu que dans ceux qui ont plutôt eu tendance à la rejeter, c’est simplement espérer dans la force d’un homme, plutôt que dans ce qu’il a reçu de Dieu. C’est, par déduction, espérer en l’homme seul, plutôt qu’en Dieu.

    Mais peut-être que ce n’est pas ce que vous avez voulu dire non plus. Vous n’attendez peut-être pas un non-catho qui serait catho-compatible, mais plutôt un catho discret sur sa foi. Ou un parti discret sur ses fondations spirituelles. Admettons. Sauf que si vous êtes catho – j’entends un catho pas identitaire, juste un baptisé cohérent dans sa foi et soucieux du bien commun – et que vous vous engagez en politique, vous ne cessez pas d’être un baptisé, membre du corps du Christ, et vous le faites aussi dans un soucis d’évangélisation. Votre engagement au service du bien commun, c’est votre appartenance à l’Eglise universelle qui le féconde, et votre mission d’évangélisation qui le justifie.

    Nos évêques nous l’ont assez rappelé en France : nous cathos de France, on a un gros souci avec la visibilité : on fait plein de choses bien, on s’engage, mais on a honte de dire que c’est par amour pour le Christ. Résultat, évangélisation zéro. Y a un moment, cette espèce de fausse pudeur, il faut essayer de la dépasser, je crois. (je peux vous rechercher le discours du cardinal André Vingt-Trois, de l’année dernière, qui dit ça, si vous avez besoin). S’engager au service des autres, c’est essentiel, mais dire pourquoi on le fait et témoigner de sa foi, ça l’est tout autant.

    Il ne s’agit pas de faire comme la branche identitaire et d’appeler à la sainte croisade pour le retour de la chrétienté en occident, ni de régresser dans une sorte d’augustinisme politique complètement incompatible, dans le fond, avec l’espérance chrétienne et l’universalité du message chrétien. Il ne s’agit pas non plus de porter atteinte à la laïcité : au contraire, il s’agit de la vivre pleinement cette laïcité. Ca fait un siècle qu’une conception biaisée de la laïcité, à la française, nous apprend à avoir honte de notre foi en public, particulièrement dans les affaires qui gouvernent le pays. Commençons donc par purifier ce rapport de notre foi à notre engagement citoyen. La foi qui reste à la maison, tapie dans l’ombre, réduite à la sphère privée, c’est un discours de laïcard. Pas un discours de chrétien laïc.

    Et puis si vous avez un candidat catho-compatible qui est un jour élu à la présidentielle, et qui doit devenir chanoine, et aller prier devant les reliques de Sainte Pétronille, il y a bien un moment où ça va se voir qu’il est catho, hein ! 😉

  • En fait, Gwynfrid, après réflexion, je crois comprendre mieux ce que vous voulez dire, et qui serait une explication plus rationnelle à votre dernier message : je crois, arrêtez-moi si je me trompe, que ce n’est pas tant ce qu’est ou n’est pas le candidat, mais plutôt ce pourquoi vous voulez vous engagez. Vous voulez soutenir un candidat non pas parce qu’il se dit catho, mais parce que les valeurs qu’il défend sont les vôtres. Vous craignez peut-être, et c’est légitime d’être entrainé malgré vous dans un soutien identitaire plutôt que dans un vrai soutien politique. Si c’est ça, c’est tout à fait compréhensible, mais là il ne tient qu’à vous de faire la part entre l’étiquette et les valeurs. Dire non : je ne vote pas pour lui parce qu’il se dit catho, je vote pour lui parce que ce qu’il dit et ce qu’il fait (ou propose de faire) correspond à mes convictions. Personne ne peut assumer ce discernement à votre place.

    Je sais que ce serais un beau rêve, comme dans un film à passer à nos enfants plus tard, d’avoir un candidat qui un jour se fait élire et s’engage pleinement au service de nos idées, sans que personne ne sache qu’il est chrétien, et qu’après coup, coup de théatre, tatata : on découvre que c’était un pieux catholique, humble et discret, qui a « relevé la France ». On n’a pas voté pour lui à cause de ça, mais finalement y a pas de mystère : c’est bien sa foi qui l’a conduit vers le bien commun, et mon espérance qui l’a conduit à le soutenir, sans qu’on puisse nous accuser d’avoir eu, à aucun moment, une quelconque préférence communautaire. Mais bon voilà, vous ne m’enlèverez pas de la tête qu’on fantasme là-dessus parce qu’on a peur d’encaisser les préjugés de communautarisme.

    Ceci dit, depuis un an et demi que je suis engagé au sein de Solidarité – Liberté, Justice et Paix, je commence sérieusement à me dire que je vais arrêter de draguer dans les milieux catholiques pour avoir du soutien, et que je vais plutôt essayer de convaincre des musulmans, des hindoux, des agnostiques, etc… qui auront la même logique (et les mêmes valeurs). Non seulement eux, en soutenant un parti « affiché catho » n’auront pas l’impression de faire du soutien « communautaire », mais en plus en s’engageant ils témoigneront de ce que notre mouvement n’a rien d’un mouvement identitaire. Et alors peut-être que des catholiques ensuite y reviendront en se disant que finalement ce n’est pas un « parti étiqueté catho ». M’enfin, c’est plutôt décevant de devoir en arriver là. Nous avons un tel patrimoine de valeurs politiques en commun, d’emblée. Si on ne doit pas les fédérer parce qu’on a tous en commun d’aller à la messe le dimanche, c’est vraiment dommage, je trouve.

  • @ Pneumatis

    J’ai du mal avec une logique qui semble impliquer que seul un catho peut se soucier d’oeuvrer pour le bien commun, ce qui me semble être le critère en politique. Vous citez pourtant Gandhi, quid du dernier prix Nobel de la Paix, etc.

    Vous ai-je bien compris ? Votre constat est-il d’ordre général oui limité à la situation particulière de la France en 2010 ?

  • Aristote a écrit : :

    J’ai du mal avec une logique qui semble impliquer que seul un catho peut se soucier d’oeuvrer pour le bien commun, ce qui me semble être le critère en politique.

    Vous avez raison, et ce n’est pas vraiment ce que j’ai voulu dire. Simplement j’ai voulu surtout pointer une espèce de névrose noyautant l’espérance. La recherche du bien commun au niveau politique et social, a pour objectif de bâtir une civilisation de l’Amour. L’Amour se rencontre uniquement dans la Vérité. Et la Vérité se reçoit du Christ par son Eglise. Cela ne signifie que tel non chrétien ne pourra pas lutter pour la démocratie dans son pays, ou que tel autre ne pourra pas lutter pour la reconnaissance d’une égale dignité entre tous les hommes. D’ailleurs en France, vous trouvez des idées chrétiennes aussi bien dans certaine propositions des partis écologistes, que dans certaines propositions de l’extrême-droite dans la défense de la famille. Mais la cohérence globale qu’on est en droit d’attendre d’une politique, il faut être un peu réaliste : si ça se reçoit du Christ par l’Eglise, on est tout à fait en droit d’attendre, comme l’indique d’ailleurs la DSE, que cela vienne d’un non chrétien, mais enfin ça mérite quand même de s’interroger sur les raisons qui nous poussent à attendre ce miracle.

  • Pneumatis, désolé de vous avoir conduit à envisager autant d’hypothèses pour interpréter mon objection, qui était en effet quelque peu cryptique – c’est parce que je manquais de temps pour la développer. Temps que je n’ai toujours pas, d’ailleurs. Il se peut que je vous fasse patienter jusqu’à lundi, mais je vous répondrai, promis.

  • @ Irfan,

    « En vingt ans, 10 points de PIB, c’est à dire 10% de la richesse produite par notre pays, sont passés des salaires vers le capital ».

    C’est possible même si ces chiffres sont peut-être exagérés et parfaitement explicable sans avoir besoin de crier « au loup » capitaliste.

    Il faut aujourd’hui 20 heures pour produire une voiture et beaucoup de robots sophistiqués. Il y a 20 ans, il fallait 35 heures mais moins de machines. Il est donc économiquement logique qu’en pourcentage dans le PIB, les salaires pèsent moins.

  • Pneumatis a écrit : :

    Vous voulez soutenir un candidat non pas parce qu’il se dit catho, mais parce que les valeurs qu’il défend sont les vôtres.

    Je souhaite, quand je choisis un candidat, trouver d’abord quelqu’un qui a la carrure pour le travail complexe qu’est le gouvernement d’un grand pays moderne et divers. Un imbécile qui a mes idées n’ira nulle part. Parmi les qualités nécessaires figurent à mon avis l’honnêteté et le sens du dévouement. Cela ne me dérange pas du tout que ces qualités prennent leur racine dans la foi chrétienne.

    Évidemment, je souhaite que cet homme politique ne m’empêche pas de pratiquer ma religion et mes rites, tant qu’elles ne dérangent raisonnablement personne. Il me semble qu’à part quelques illuminés d’extrême gauche, personne ne souhaite d’ailleurs empêcher les catholiques en France de pratiquer comme ils le souhaitent leur religion.

    Par contre, je pense qu’une homme politique doit forcément prendre en compte la diversité des opinions qui existent dans un pays, et permettre à toutes ces opinions d’avoir leur place. Son rôle est à mon avis de fixer des règles pour que toute cette diversité puisse vivre ensemble, plutôt que de choisir un camp ou l’autre. Les catholiques pratiquants et ‘militants’ devraient souhaiter cela plus que tous les autres, d’abord car c’est à mon avis en phase avec de nombreux messages de tolérance des évangiles. Et surtout, ils constituent une petite minorité, et qui plus est, qui est détestée cordialement par certains autres groupes de la population probablement plus nombreux: il y a sans doute probablement plus d’homosexuels que de messalisants en France. Les catholiques militants doivent donc à mon avis se donner des objectifs réalistes, faute de quoi il pourrait bien y avoir un retour de baton assez violent.

    Bref, cela ne me dérange pas du tout qu’un homme politique soit catholique pratiquant de façon ouverte, et qu’il applique pour lui même assez strictement la morale chrétienne. Par contre, que cet homme politique n’ait pas le recul nécessaire pour diriger un grand pays complexe me semble dangereux. Je n’aurais eu aucun problème pour voter pour le général de Gaulle, mais je pense que je ne voterais jamais pour les candidats catholiques militants actuels.

  • Excellente émission sur RND qui a réuni un panel d’intervenants d’une qualité exceptionnelle. Elle a apporté un certain éclairage sur un nombre de points qui conduisent à penser que la visite de Sarkosy au Vatican a été une réussite.

    Un grand bravo, bien sûr, à Koz d’être parmi les personnes de haut niveau qui ont participé à cette émission.

    @Koz : j’ai trouvé que tu n’a pas été très inspiré sur cette visite dès le départ. Je ne sais pas si ton intervention a été très convaincante et qu’elle impression tu as donné à ceux qui ne te connaissent pas qui écoutaient sur RND. Heureusement que tu as précisé sur l’émission que pourtant tu n’étais pas un antisarkosyste de principe. Sinon, ça aurait été que du Sarko bashing dans le sujet. Je ne peux pas non plus te reprocher que tu dises ce que tu penses.

  • Irfan, c’est bien parce que c’est vous et que koz semble laisser d’autres débats déborder. La richesse qu’on partage c’est celle qu’on produit. On travaille moins, on aura moins de confort (on peut rever augmenter la productivité horaire inversement proportionnellement mais pas pour tous les métiers, en particulier les peu qualifiés). Ce confort c’est du matériel, mais aussi de l’intangible (sous forme d’assurances au sens large, sécurité, confiance dans le fait qu’on sera soigné, éducation des enfants, durée de vie, production culturelle etc…). Il n’est pas interdit de dire: je bosse moins et j’aurai moins de confort, mais il ne faut pas se mentir, ni aux autres, éventuellement moins éduqués : ils ont le droit de faire ou pas le meme choix que vous en connaissance de cause, c’est aussi ca la justice.

    Sur les retraites, on vit plus longtemps donc on touche ses allocations plus longtemps donc le déficit augmente, qu’on soit en bonne santé ou non. Il faut choisir, on continue et on fait payer à toute la communauté (chomeurs, bénéficiaires des minimas sociaux qu’on ne pourra plus maintenir, générations futures inclus…), ou on repousse l’age, ou on baisse les pensions ou on consacre moins d’effort à la santé des plus agés et on fait redescendre l’esperance de vie. A vous de voir.

    La clé derrière tout ça et ce dont vous ne semblez pas conscient un seul instant, c’est la mondialisation : la France a besoin du monde pour vivre, pas l’inverse. Notre confort actuel tient à ce que le monde s’est spécialisé et est devenu plus efficace de la sorte. Si on remonte les frontières, on sera tous alcooliques rapidement s’il faut ecluser toute la production viticole française, alors que les plus modestes ne pourront plus s’offrir les vetements et meubles bon marché car produits en Chine.

    D’ailleurs votre souci de justice sociale devrait en tout premier lieu vous pousser à vous interesser au sort des chinois, admettre que sauf à etre raciste, il est plus urgent d’ameliorer le niveau de vie des paysans chinois que defendre 2 ans de retraite d’un francais. Et tout cela est lié car le travail nécessite des investisseurs qui ne sont pas très sensibles à vos considérations et fuiront si vous proposez des redistributions trop éloignées de ce qui se pratique ailleurs.

    La conclusion c’est tout à fait d’accord avec vous pour lutter contre certains aspects comme la répartition capital travail (avez vous cependant bien conscience que le capital c’est l’Occident, le travail, la Chine?), ou les distorsions salariales, mais au bon niveau: contraignant international ou librement consenti individuel, mais pas contraignant national seuls contre tous. Pas d’accord pour ne pas assumer mes responsabilités : j’accepte de vivre plus longtemps avec le meme niveau de pension, je travaille plus longtemps. Et enfin d’accord pour me detacher du confort materiel dont, en tant que croyant, je suis convaincu qu’il n’est pas une condition d’un sens à ma vie, pas d’accord pour cacher la vérité aux autres sur le fait qu’ils font le choix de sacrifier le leur.

    Désolé c’est touffu mais je ne me résouds pas à vous renvoyer simplement à J.Fourastier.

    Désolé Koz mais j’avais une réponse ad hominem…

  • oim a écrit : :

    c’est bien parce que c’est vous et que koz semble laisser d’autres débats déborder.

    Ce n’est pas vraiment ça. C’est plus que je ne peux pas jouer les garde-chiourmes en permanence, et juger si un commentaire se rattache directement, un peu indirectement ou trop indirectement au débat pour l’écarter. Dans l’idéal, et comme je l’avais écrit ici,j’ai affaire à des personnes responsables, qui ont l’amabilité de considérer qu’un formulaire de commentaires est destiné à commenter le billet que j’écris, un blog n’étant pas un forum. Si chacun pouvait avoir la gentillesse de m’épargner les rappels laborieux à ce que je considère comme étant, somme toute, de la courtoisie, ça me simplifierait la vie.

    Puisque je suis dans les rappels, @ tous, et même si je suis le premier à savoir qu’il n’est pas toujours facile de faire court, essayez de prendre garde à la longueur de vos commentaires. Certains finissent par être plus longs que les billets. En théorie, ce n’est pas absurde mais, en pratique, je crains que ça ne nuise à la lecture et, surtout, qu’in fine les gens ne les lisent pas (comme certains me l’ont déjà dit, voire écrit).

    @ Pepito: et encore, ne te plains pas, car mon jugement est plus négatif aujourd’hui qu’il ne l’était vendredi. Sarko a encore vraiment chaussé les gros sabots, et risque en plus de nuire aux intérêts des catholiques. Je ne suis pas un excité de la laïcité, comme vous l’aurez compris, mais je ne considère pas qu’un président doive apparaître en prière ou se signant x fois. Surtout lorsqu’on sent un fort parfum d’instrumentalisation. Le résultat, c’est que, comme à son habitude, il va parvenir à crisper les uns et les autres et, en l’occurrence, crisper les tenants d’une laïcité dure. Or, encore une fois, comme au Latran, les catholiques ne lui ont rien demandé. On ne lui a pas demandé d’aller voir le pape mais soit… Mais surtout, on ne lui demande pas, en tant que président de la République, d’enchaîner les signes de croix. C’est même assez ridicule. Qu’il prenne donc exemple sur Fillon : les catholiques en ont une bonne opinion, surtout parce qu’il est plus proche de leurs valeurs et, pourtant, on ne le voit pas faire de génuflexions.

  • « Essayez de prendre garde à la longueur de vos commentaires. Certains finissent par être plus longs que les billets.  » Ça te titille au niveau de l’ego que certains écrivent plus que toi ? 😉

    Toute plaisanterie écartée, lire de longs commentaires ne me dérange pas, au contraire ! Je n’apprécie guère cette culture zapping du net. Si je viens chez toi, c’est aussi justement parce qu’il est possible d’avoir des débats de fond, sans limites autres que celles de la décence. C’est comme lire un bon bouquin, avec l’aspect participatif en plus. Cette force du net, il faut la cultiver ! Ceux qui reculent devant un long commentaire, tant pis pour eux ; s’ils veulent du pré-mâché, ils peuvent très bien se renseigner sur yahoo news.

  • PMalo a écrit : :

    Ça te titille au niveau de l’ego que certains écrivent plus que toi ? Toute plaisanterie écartée, lire de longs commentaires ne me dérange pas, au contraire ! Je n’apprécie guère cette culture zapping du net.

    Je suis un peu d’accord avec Koz. Je pense qu’il est plus agréable pour les lecteurs, et plus difficile, de faire court que long. La brièveté est un but difficile à atteindre, mais louable, et n’exclut pas la profondeur. « La perfection, ce n’est pas quand il n’y a plus rien à rajouter, mais quand il n’y a plus rien à enlever ».

  • PMalo a écrit : :

    Ça te titille au niveau de l’ego que certains écrivent plus que toi ?

    C’est plutôt quand c’est plus intelligent que ce que j’ai écrit, que ça pourrait me titiller au niveau de l’ego. Plus long, c’est à la portée de tout le monde.
    Joyeux Acier a écrit : :

    Je pense qu’il est plus agréable pour les lecteurs, et plus difficile, de faire court que long.

    Oui, si on veut maintenir un échange. Je ne compte pas le nombre de personnes qui m’ont dit ou écrit : « je lis le billet, mais après, les commentaires, quand ils sont trop longs, je ne les lis pas« . C’est dommage de participer, d’avoir des choses à dire, et qu’elles ne soient pas lues. Et ce n’est pas une question de zapping, c’est une question de temps.

  • Je comprends la règle que Koz « assigne » à son blog, même s’il m’est arrivé de ne pas la respecter. C’est vrai qu’un blog n’est pas un forum, c’est Koz qui propose au débat un sujet et c’est à nous de rester dans les « rails », ce qui n’empêche pas d’ouvrir avec tact des possibilités d’aiguillages.

    Sur la longueur des commentaires, je partage aussi, d’ailleurs quand c’est trop long, je ne lis pas ou en travers.

  • Ce qui est désolant, selon moi, c’est que Sarkozy est peut-être, en France, le seul homme politique qui ait senti que « la question religieuse » était redevenue centrale à notre époque (on pourrait soutenir qu’en un sens, elle n’a jamais cessé de l’être depuis le baptême de Clovis, ou depuis la conversion de Constantin, ou même, tout simplement, depuis la venue du Christ, mais c’est une autre histoire). Il me semble qu’il a fait preuve d’une certaine clairvoyance et d’une indiscutable audace en s’emparant du problème de l’organisation de l’islam en France pour le résoudre (à la différence d’un Pasqua ou d’un Chevènement, qui l’avaient laissé en plan), en disant que la foi n’est pas interdite de séjour dans la société, mais qu’elle y est, au contraire, bienvenue, et encore en contredisant par des actes, des gestes et des mots la pantalonnade de la dénégation des racines chrétiennes de l’Europe.
    Mais voilà, entre ce qu’une part de lui-même a pu entrevoir (avec l’aide, sans doute, d’Emmanuelle Mignon) et… tout le reste – son appétit de pouvoir, son narcissisme infantile, son hédonisme invétéré, le tout aggravé par l’inculture qu’il partage avec 99,99% de sa corporation -, la petite politique bêtassonne l’a emporté. Hélas, hélas, hélas!

  • Je suis bien d’accord avec vous, Victor. Il avait montré des signes plutôt encourageants, et avait un discours appréciable sur la « laïcité positive ». Maintenant, il y a un peu trop de distance du discours aux actes (voir plus haut la liste – assez complète mais non-exhaustive – des points qui ont gêné), pour ne pas y sentir un fort parfum d’instrumentalisation. Et sur le programme de vendredi, qu’il assiste à une prière pour la France, très bien. D’autres présidents l’ont fait. Ce qui est gênant, c’est le sentiment que ces moments ont été mis en scène, utilisés. Je ne me souviens pas d’avoir vu des photos d’autres présidents passant à table avec les cardinaux. Pourquoi avoir fait entrer des photographes si ce n’est pour utiliser les photos ?

  • J’ai entendu sur une radio que cette prière aurait été imposée au président par le Vatican.
    En gros, on aurait dit à NS, tu peux venir mais à condition de te recueillir.

    Je ne sais pas que penser de cette info qui semble plausible.

  • Bonjour Pneumatis,

    Comme promis, je vais essayer d’expliquer mes réserves à l’égard un candidat « catho-étiqueté » (par opposition au candidat « catho-compatible » que je souhaite voir émerger).

    Pour commencer, je précise que si l’objectif de la candidature est de simplement témoigner, je ne vois guère d’inconvénient au choix de l’étiquette catholique. Mais je pense que vous vous engagez avec plus d’ambition que cela. Peser politiquement, c’est être élu, ou au moins imposer aux élus de réagir à vos propositions.

    Si c’est là votre but, une étiquette catholique pose problème. Si vous expliquez comme vous l’avez fait ci-dessus que votre parti « ne défend pas ses propres idées, mais la DSE », alors vous placez vos décisions dans la dépendance d’une source extérieure à la nation, et c’est inacceptable de la part d’un élu de celle-ci (encore une fois, si vous n’offrez qu’une candidature de témoignage, ce n’est plus un problème).

    Autre objection: la notion de principes non négociables; ces principes sont ceux de l’Église et je crois profondément qu’elle est dans le vrai en les défendant. Mais un parti, un candidat ne peuvent ni ne doivent se permettre une position aussi impeccable. Par définition, la négociation est inhérente à la politique. Vous pouvez avoir des principes intangibles, mais vous devrez en négocier l’application et définir des priorités – sans quoi vous vous condamnez à avoir des mains toujours propres, faute d’avoir jamais mené quelque action que ce soit.

    Pour finir, j’estime qu’une étiquette catholique, si votre candidat avait du succès, mettrait inévitablement l’Église dans l’embarras, car on viendrait lui demander son avis sur ce candidat – une question à laquelle il n’y aurait que de mauvaises réponses.

    Pneumatis a écrit : :

    je commence sérieusement à me dire que je vais arrêter de draguer dans les milieux catholiques pour avoir du soutien, et que je vais plutôt essayer de convaincre des musulmans, des hindoux, des agnostiques, etc… qui auront la même logique (et les mêmes valeurs).

    Je trouve que c’est une excellente idée, et vous auriez tort de ne la retenir que comme un pis-aller. Au contraire, je pense que c’est une voie prometteuse: cela ne peut qu’enrichir vos idées et élargir vos perspectives à tous points de vue.

  • Et la DSE n’est pas un programme politique. Plusieurs options politiques sont envisageables au sein de la DSE. Ce n’est pas celle-ci qui vous dira s’il faut ou non nationaliser les banques ! Sur ce point, les évêques n’ont pris position ni en 1981, ni en 1993.

    Il faudrait donc plusieurs candidats catholiques…

  • En effet, Aristote. Mais voilà un débat qui m’intéresse, d’autant que je suis amené à rencontrer quelques personnes dans le petit monde politique catho. J’avoue ignorer ce que peut être la bonne stratégie.

    Je préférerais, bien évidemment, un politique « inspiré » qui mène une politique compatible, sans avoir besoin de se réclamer du catholicisme. C’est d’autant plus vrai qu’il ne peut pas s’agir d’avoir un parti chrétien (ou disons-le franchement : catholique, en France, pour des questions numériques) qui paraîtrait placer l’Eglise à droite ou à gauche selon les alliances. Mais je n’en vois pas beaucoup, à cette heure, se profiler à l’horizon.

    Être catho dans un parti qui ne l’est pas a sa logique : peser de l’intérieur. Mais cela conduit aussi à la situation actuelle de l’UMP : être membre d’un parti indifférent aux valeurs cathos et être, somme toute, compté comme un soutien. Par ailleurs, depuis que cette stratégie est menée, par le FRS puis PCD, ont-ils vraiment réussi à peser sur les orientations politiques ? Je ne dis pas ça pour dénier leurs capacités mais simplement parce que je m’interroge sur la possibilité de le faire.

    N’est-ce pas, d’une certaine manière, une stratégie inadaptée à la situation actuelle ? Si le nombre de politiques et militants prêts à se réclamer du christianisme diminue, quid de la capacité d’influence ?

    N’est-il pas légitime de porter dans le débat politique la voix des chrétiens, de façon identifiée, quitte à faire des choix concrets (puisqu’effectivement, comme le dit Aristote, l’Eglise ne fournit pas la DSE appliquée et ce, fort heureusement) ?

    Dernière question : faut-il en passer par les partis politiques ?

  • Mon intuition est la suivante :

    Si je suis chrétien de gauche, mon souci devrait être de témoigner auprès de mes compagnons de route politiques, de faire en sorte que l’on comprenne en quoi être chrétien est important quand on est à gauche, qu’est ce que cela change par rapport à être simplement de gauche. Le libéral que je suis admet parfaitement qu’un chrétien soit de gauche.

    Pari passu, si je suis chrétien de droite, mon souci doit être, etc.

    Mais je trouve insupportable la prétention des uns ou des autres, car c’est une attitude que l’on trouve dans les deux bords, de penser qu’ils sont meilleurs chrétiens parce que de droite ou meilleurs chrétiens parce qu’ils sont de gauche.

    Il y a des limites aux positionnements politiques globaux compatibles avec la DSE. Trotskiste ? FN ? On peut en discuter. Mais dans un spectre raisonnable, il me semble que l’important est plus de témoigner auprès de ses camarades que de définir « la » position catho. Et sur bien des sujets on ne pèsera pas, du moins à court terme, ou alors à travers des regroupements centrés sur une problématique, comme l’Alliance pour la Vie. Les chrétiens des premiers siècles ne pesaient pas beaucoup sur les choix politiques…

  • Bonjour Gwynfrid,

    Je vais tenter de vous répondre, en vous citant les passages de la note doctrinale concernant l’engagement des chrétiens en politique.

    Gwynfrid a écrit : :

    Pour commencer, je précise que si l’objectif de la candidature est de simplement témoigner, je ne vois guère d’inconvénient au choix de l’étiquette catholique. Mais je pense que vous vous engagez avec plus d’ambition que cela.

    L’ambition de départ est juste celle de participer au débat politique, pour promouvoir le bien commun.

    les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la ‘politique’, à savoir à l’action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun

    La note indique aussi que :

    Les sociétés démocratiques actuelles, dans lesquelles, à juste titre, tous sont appelés à participer à la gestion des affaires publiques dans un climat de vraie liberté, requièrent des formes nouvelles et plus larges de participation à la vie publique de la part des citoyens, qu’ils soient chrétiens ou non. En effet, tous peuvent contribuer, par leur vote, à l’élection des législateurs et des responsables de gouvernement, et, par d’autres moyens aussi, à l’élaboration des orientations politiques et des choix législatifs qui, selon eux, servent le mieux le bien commun.

    De là il nous appartient d’interpréter pour notre temps et notre société, ce qu’il en est.

    • Peut-on contribuer par son vote à l’élection de législateurs ou de responsables de gouvernement si aucun « bon candidat » ne se présente ? Vous avez là la légitimité de notre stratégie.

    • Peut-on participer à l’élaboration des orientations politiques et législatives sans être élu ? Peut-être, par le lobbying ou la « pression de la rue ». Mais toujours est-il qu’on peut reconnaitre là une certaine légitimité d’une autre stratégie, qui est celle de l’entrisme (ex du PCD comme de tous les hommes de bonne volonté qui à titre individuel s’engagent au sein de mouvement auxquels ils n’adhèrent pas forcément complètement, et sans renier de leurs principes, mais pour « contribuer »).

    Gwynfrid a écrit : :

    Si c’est là votre but, une étiquette catholique pose problème. Si vous expliquez comme vous l’avez fait ci-dessus que votre parti « ne défend pas ses propres idées, mais la DSE », alors vous placez vos décisions dans la dépendance d’une source extérieure à la nation, et c’est inacceptable de la part d’un élu de celle-ci (encore une fois, si vous n’offrez qu’une candidature de témoignage, ce n’est plus un problème).

    Non, il ne s’agit pas de faire intervenir une autorité spirituelle, mais de s’en inspirer en cohérence avec sa conscience. Traduisez ma phrase comme ceci :

    La légitime pluralité des options temporelles garde intacte la source d’où provient l’engagement des catholiques dans la politique, et cette dernière se réfère directement à la doctrine morale et sociale chrétienne. C’est à cet enseignement que les laïcs catholiques doivent toujours se conformer pour avoir la certitude que leur participation à la vie politique est empreinte d’une responsabilité cohérente à l’égard des réalités temporelles.

    Gwynfrid a écrit : :

    Autre objection: la notion de principes non négociables; ces principes sont ceux de l’Église et je crois profondément qu’elle est dans le vrai en les défendant. Mais un parti, un candidat ne peuvent ni ne doivent se permettre une position aussi impeccable. Par définition, la négociation est inhérente à la politique. Vous pouvez avoir des principes intangibles, mais vous devrez en négocier l’application et définir des priorités – sans quoi vous vous condamnez à avoir des mains toujours propres, faute d’avoir jamais mené quelque action que ce soit.

    Sur la négociation des principes non négociables, voici comment nous l’entendons (toujours de la même note doctrinale de J. Ratzinger) :

    Dans la droite ligne de l’enseignement constant de l’Église, Jean-Paul II a maintes fois répété que ceux qui sont engagés directement dans les instances législatives ont «une obligation précise de s’opposer» à toute loi qui s’avère un attentat contre la vie humaine. Pour eux, comme pour tout catholique, il est impossible de participer à des campagnes d’opinion en faveur de telles lois, et il n’est permis à personne de les soutenir par son vote [19]. Comme l’a enseigné Jean-Paul II dans l’encyclique Evangelium vitae à propos du cas où il ne serait pas possible d’éviter ou d’abroger totalement une loi permettant l’avortement déjà en vigueur ou mise au vote, cela n’empêche pas qu’«un parlementaire, dont l’opposition personnelle absolue à l’avortement serait manifeste et connue de tous, pourrait licitement apporter son soutien à des propositions destinées à limiter les préjudices d’une telle loi et à en diminuer ainsi les effets négatifs sur le plan de la culture et de la moralité publique».

    Gwynfrid a écrit : :

    Pour finir, j’estime qu’une étiquette catholique, si votre candidat avait du succès, mettrait inévitablement l’Église dans l’embarras, car on viendrait lui demander son avis sur ce candidat – une question à laquelle il n’y aurait que de mauvaises réponses.

    Vous avez raison. Et c’est le point délicat. Le nom de notre parti « Solidarité – Liberté, Justice et Paix » n’est d’ailleurs pas étiqueté chrétien. Mais il explique aussi avec honnêteté, et rend ainsi témoignage, que c’est la vocation de ses membres fondateurs, enracinés dans leur foi qui les meut dans leur engagement, et que c’est la DSE qui les inspire. C’est une facilité dans la mesure où cela permet déjà d’indiquer clairement l’idéologie sous-jacente au parti politique. C’est aussi un garde-fou : expliquez-moi en quoi telle mesure proposée par notre parti s’écarte de la DSE, et vous aurez trouvé un argument pour nous faire rectifier le tir. La DSE indique très clairement ses réserves quant aux partis qui se réclameraient de l’Eglise, en indiquant qu’aucun parti ou mouvement ne saurait embrassé la totalité de la foi, ni même de la morale chrétienne, et donc la représenter. Elle est plurielle. En revanche, le terme de « chrétien » a aussi pris avec le temps une dimension politique (« démocratie chrétienne ») et signifie quelque chose dans ce domaine.

    Bon il faut que je m’arrête (je suis en transit). Je reviendrai plus tard pour finir. J’essaierai de ne pas être trop long.

  • Re, (si mon précédent commentaire de ce matin est encore en attente de validation et que celui-ci passe, vous risquez de ne pas bien comprendre)

    Dans mon précédent message, quand j’ai parlé de la légitimité de « l’entrisme », il faut tout de même le prendre avec réserve. Ainsi (ibid) :

    L’engagement politique en faveur d’un aspect isolé de la doctrine sociale de l’Église ne suffit pas à répondre totalement à la responsabilité pour le bien commun.

    Gwynfrid a écrit : :

    Je trouve que c’est une excellente idée, et vous auriez tort de ne la retenir que comme un pis-aller. Au contraire, je pense que c’est une voie prometteuse: cela ne peut qu’enrichir vos idées et élargir vos perspectives à tous points de vue.

    Je suis d’accord. C’est une excellente perspective et qui n’est pas qu’un « pis-aller ». Cela n’a juste pas été notre première priorité. Dans la mesure où (ibid) :

    Les catholiques ne peuvent pas non plus songer à déléguer à d’autres l’engagement qu’ils ont reçu de l’Évangile de Jésus Christ, pour que la vérité sur l’homme et sur le monde puisse être annoncée et atteinte.

    D’autant que la difficulté n’est pas négligeable, et parallèlement, je pense que vous comprenez bien ce qu’il peut y avoir de frustration que des catholiques, auxquels on ne demande même pas de se rallier à un programme politique totalement arrêté, mais de contribuer à le construire en partant des inspirations que nous avons a priori en commun, se refusent presque systématiquement à s’agréger autour d’un tel projet. Dans un petit parti politique, tout est à faire. Je ne me suis pas engagé dans ce parti parce que son programme me suffisait, mais pour contribuer à son projet : traduire la DSE en un programme politique, et proposer ce programme politique à la démocratie française. Et en attendant, témoigner par la communication, et la représentation électorale, de ce que des hommes et femmes de bonne volonté se reconnaissent dans un tel projet de Solidarité, de Liberté, de Justice et de Paix autour de la personne humaine.

    Maintenant, vous pourrez nous poser certainement des milliers de problématiques auxquelles nous ne saurons pas encore répondre. Si vous vous savez y répondre, selon les principes de la DSE, votre contribution est la bienvenue. Ca ne peut marcher que si nous sommes plusieurs à se dire : « OK, on y va », dans le respect des libertés de chacun, et du débat démocratique (même en interne). Aujourd’hui, quand on écrit un texte, il y a des débats avant sa publication. Nous ne sommes pas tous d’accord. De même pour notre participation à tel ou tel événement. Nous n’avions par exemple pas grand chose à proposer de suffisamment concret et sérieux sur la question de la réforme des retraites (ceci dit, j’ai l’impression que nous n’étions pas les seuls) et nous n’avons donc pas communiqué sur le sujet. Nous n’y arriverons que si d’autres personnes compétentes s’agrègent à ce projet et mettent leurs compétences au service de cette volonté commune. Mais justement, quelle joie quand il ressort de tout cela quelque chose de concret, avec la conviction que c’est l’enrichissement des idées et des talents des uns et des autres qui a permis d’affiner une idée et de la rendre plus fidèle à la DSE qu’une personne seule aurait pu faire. C’est un peu comme débattre sur le blog de Koz avec des interlocuteurs aussi passionnant que vous, mais d’en faire émerger un « résultat » en terme de programme, de parole ou d’action ; pas un résultat consensuel, mais plus riche au contraire. C’est extrêmement stimulant !

    Aristote a écrit : :

    Et la DSE n’est pas un programme politique. Plusieurs options politiques sont envisageables au sein de la DSE.

    Précisément oui. L’idée c’est de commencer par en bâtir au moins une, et pas d’attendre que ça se fasse tout seul, sans nous.
    Aristote a écrit : :

    Il faudrait donc plusieurs candidats catholiques…

    Je suis tout à fait d’accord. Et je l’ai dit plusieurs fois ici, ou aussi sur le site des Sacristains en commentaire de la démocratie chrétienne. Comme l’indique le compendium de la DSE, la démocratie n’est pas une fin, c’est un outil. Il n’est ni bon ni mauvais en lui-même, il est rendu bon ou mauvais selon la manière dont il est utilisé. Si la démocratie, comme c’est le cas aujourd’hui, est utilisée comme expression du relativisme éthique (toutes les opinions se valent a prori, et c’est la majorité qui fait d’une opinion une vérité morale), cette démocratie est inique. En outre si je ne suis pas libre de participer sans renier ma conscience à la vie politique de mon pays par le vote, par exemple, cette démocratie n’en est pas vraiment une.

    Mais la démocratie, c’est aussi le choix. Il ne suffit donc pas d’une seule proposition moralement acceptable pour faire une démocratie, mais de plusieurs.

    Koz a écrit : :

    Dernière question : faut-il en passer par les partis politiques ?

    Il faut en passer par l’association de personnes, un travail collaboratif. D’abord parce que c’est un travail titanesque de proposer quelque chose d’un tant soit peu sérieux. Et ensuite, parce que c’est au minimum une manière de pratiquer la démocratie au sein même d’un groupe a priori en communion d’idées.

    Ensuite, pour ce qui est de se présenter sans parti c’est toujours possible, surtout à des échéances comme les prochaines cantonales, où tu peux te présenter par exemple avec ta femme dans ta circonscription. Sauf qu’entre affiches, bulletins et professions de foi, ça coute les yeux de la tête. Les présidentielles je ne t’en parle même pas. Ce n’est pas pour rien qu’aux régionales, le FN nous a accusé d’avoir été financé par l’UMP pour le plomber (ce qui illustre d’ailleurs assez bien le monopole qu’ils pensent avoir sur la DSE) : ils n’arrivaient pas à croire qu’on ait pu financer la campagne sur nos deniers personnels. Ils ont quand même demandé une enquête sur nos finances ! (LOL) Tout ça pour dire qu’on a aussi besoin de sous 🙂

    Voilà, le parti c’est juste une « formalité » administrative, notamment pour bénéficier de comptes de campagnes permettant certaines catégories de dons, de remboursements aussi, etc… Et puis, c’est aussi le moyen de centraliser des moyens de communication permettant de fédérer autour de plusieurs candidats dans différentes circonscriptions, ou de rassembler une « liste » comme pour les régionales.

    Aristote a écrit : :

    Mais je trouve insupportable la prétention des uns ou des autres, car c’est une attitude que l’on trouve dans les deux bords, de penser qu’ils sont meilleurs chrétiens parce que de droite ou meilleurs chrétiens parce qu’ils sont de gauche.

    Oui, tout à fait d’accord. Penser, comme me l’avait écrit un ex-futur-candidat de Solidarité : « je suis résolument de droite parce que sincèrement catholique », est très agaçant. Comme je le disais à Koz récemment sur Facebook, vouloir faire rentrer une politique inspirée de la DSE dans les catégories imposées par ce clivage droite/gauche, c’est penser en hémiplégique. Si on veut absolument se positionner dans un clivage, par rapport à d’autres, alors il faut au moins redéfinir les termes de ce clivage. Il pourrait par exemple opposer ceux qui mettent la personne humaine au centre de la politique… et les autres.

    PS : Koz, je te promets que je fais des efforts pour essayer de faire court. Je fais des coupes dans ce que j’ai écrit avant d’envoyer (ça donne une idée du volume de départ) et j’essaie d’aller à l’essentiel, mais l’esprit de synthèse n’est pas ma première qualité, je le reconnais. J’essaie, d’autant plus que, ce matin, je suis venu lire ton blog depuis mon téléphone, et que j’ai passé un bon moment à faire défiler tous les commentaires ou à remonter en haut de page.

  • C’est drôle , de Plunkett écrit les mêmes choses en ce moment sur son blog. Sauf qu’il assume clairement son abstentionnisme et pencherait pour une candidature Paul Ariès en 2012.

    En tous cas, Sarko a le mérite de tous nous déniaiser sur les relations catho/politique.

  • Je suis bien d’accord avec ce que dit Aristote : nous avons le devoir de jouer un rôle dans la vie politique de notre pays. Mais la vie politique ne se résume pas à la machinerie des partis ; comme il est dit plus haut (par Koz, je crois), on voit ce que l’influence par l’intérieur a donné : soit des compromissions, soit un échec patent. Les compétences et les bons sentiments de ces personnes ne sont pas mis en cause, mais la machinerie politique qui aujourd’hui interdit tout réel débat de fond. Tout cela est aujourd’hui mécanique.

    Comment jouer alors ? En sortant de ces étiquettes droite/gauche, en sortant de la logique partisane. L’ADV en est en effet un excellent exemple : but hautement politique mais non étiqueté, indépendance vis-à-vis des partis. Et je crois aussi -pour en connaître- qu’un élu très local, maire sans étiquette d’un petit village par exemple, peut faire un excellent travail tout ce qu’il y a de plus concret en s’inspirant de la DSE ; et bizarrement, quand on s’inspire de la DSE, on se rend compte que chaque personne, quel que soit son « bord », peut apporter et participer : tout simplement parce que la DSE est en accord profond avec la loi naturelle, accessible par la raison à tout homme de bonne volonté.

    JPII : »Pour une animation chrétienne de l’ordre temporel, dans le sens que nous avons dit, qui est celui de servir la personne et la société, les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la «politique», à savoir à l’action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelle, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun. Les Pères du Synode l’ont affirmé à plusieurs reprises: tous et chacun ont le droit et le devoir de participer à la politique; cette participation peut prendre une grande diversité et complémentarité de formes, de niveaux, de tâches et de responsabilités. »

    A souligner : « action multiforme », « grande diversité et complémentarité de formes », etc.
    Si passer par le décor des partis n’est plus opérant, choisissons d’autres formes d’action. Quand prendre sa carte du parti empêche justement cette « diversité et complémentarité de formes » (les exemples sont nombreux de ceux qui se sont encartés et par là-même bridés dans leur expression !) ne pas mettre le doigt dans cette machinerie est recommandé.

  • Oui, J’aime beaucoup les analyses de Plunkett, et les sujets abordés ici le sont aussi en ce moment sur son blog. Sa radicalité et son tempérament peuvent parfois gêner, mais je le trouve le plus souvent très pertinent. (Et je lui dois beaucoup dans mon parcours personnel.)

    Sinon, cet article de Liberté Politique me semble aussi très lucide :
    http://www.libertepolitique.com/politique-et-bien-commun/6263-a-propos-du-congres-de-lyon-l-quel-agir-politique-pour-les-catholiques-dici-2012-r

  • Je partage au moins une interrogation avec de Plunkett : comme je l’ai écrit plusieurs fois ici, moi non plus, je ne comprends pas « en vertu de quoi les catholiques français votent plus à droite que la moyenne de leurs concitoyens ».

    Qui osera, comme lui, s’affranchissant des traditions, l’abstention en 2012 ?

  • Effectivement, « en toute innocence et sans aucune arrière-pensée politique » : chaque catholique français peut apporter sa petite pierre à l’édifice pour éviter un second quinquennat de Nicolas Sarkozy. Et toutes les bonnes volontés sont les bienvenues. Que valent quatre génuflexions et un pater face à un bilan que vous n’êtes pas le dernier à trouver plutôt « lourd », en termes de justice sociale, d’humanité et d’accueil de la diversité, de style de vie et de façon d’habiter la fonction, de vision et de convictions, etc. ?

  • Jeff : « Chaque catholique français peut apporter sa petite pierre à l’édifice pour éviter un second quinquennat de Nicolas Sarkozy. »

    Je ne m’abstiens pas « pour éviter un second mandat de Sarko » ou de n’importe qui. Je ne suis pas dans le « vote-protestataire », mais dans le « non-vote productif » (du moins je l’espère !). Il faudra bien un jour qu’ils se rendent compte qu’être élu par un dixième de la population ça la fout un peu mal.
    Ils sont tous d’accord sur le projet de société, ils ont fait les mêmes écoles, ils font partie du même milieu et ne se battent que sur la couleur des volets quand la maison menace ruine. C’est aux fondations qu’il faut s’attaquer, or ce débat est interdit par ceux-là mêmes qui prétendent guider la France.
    Tel que je vois les choses aujourd’hui, mais peut-être, qui sait, la situation aura changé dans 1 an et demi, je ne peux voter en conscience pour personne ; donc abstention.

    Il n’y a pas de discours anti-Sarko (ou anti-qui-vous-voulez) dans mes paroles. Je sais critiquer Sarko quand il le faut, mais là n’est pas le sujet de ce commentaire : c’est au-delà : c’est cette mécanique politicienne que je refuse.

  • Pneumatis, merci pour l’effort de précision que vous avez mis dans votre réponse… et aussi pour avoir tenté, même sans grand succès, de la faire concise. Je sais, pour en faire moi-même l’expérience à chaque commentaire, que ce n’est pas facile. C’est pour cela que je ne vous répondrai que sur les points où j’ai une remarque ou quelque chose à ajouter. Considérez que je suis d’accord avec vous sur tout le reste.

    Pneumatis a écrit : :

    C’est aussi un garde-fou : expliquez-moi en quoi telle mesure proposée par notre parti s’écarte de la DSE, et vous aurez trouvé un argument pour nous faire rectifier le tir.

    C’est commode pour assurer la cohérence, mais j’y vois aussi un risque, celui de l’absolutisme. Vous pouvez utilement vous référer à l’histoire d’autres idées. Prenez l’exemple des Verts. Il se sont scindés en deux tendances, l’une (relativement) pragmatique, et l’autre absolutiste, incarnée entre autres par Antoine Waechter. Seule la première a réussi à s’imposer, faisant évoluer les positions de tous les partis. La seconde n’aujourd’hui plus aucune influence.

    Pneumatis a écrit : :

    je pense que vous comprenez bien ce qu’il peut y avoir de frustration que des catholiques […] se refusent presque systématiquement à s’agréger autour d’un tel projet.

    Demandez-vous pourquoi. Certes, il y a le scepticisme général face à cette forme d’engagement. Mais je crois qu’il y a, aussi, la méfiance face à ce qui peut ressembler à un repli identitaire, même si vos clarifications montrent que ce n’en est pas vraiment un. Devoir clarifier, c’est déjà être sur la défensive. L’intérêt de commencer par vous adresser explicitement à un public plus large est de lever automatiquement cet obstacle.

    Pneumatis a écrit : :

    Si vous vous savez y répondre, selon les principes de la DSE, votre contribution est la bienvenue.

    Je n’ai pas d’expertise particulièrement utile à vous proposer, mais le débat que nous avons ici même est déjà une – très modeste – contribution. En tout cas j’espère qu’il vous aide à affiner vos réflexions.

    Pneumatis a écrit : :

    En outre si je ne suis pas libre de participer sans renier ma conscience à la vie politique de mon pays par le vote, par exemple, cette démocratie n’en est pas vraiment une.

    Sur ce point, qui est peut-être relativement mineur, je suis en net désaccord. Votre vision de la démocratie est très (trop ?) idéaliste, nous ramenant à l’absolutisme dont je parlais plus haut. Considérer qu’il n’y a pas de vraie démocratie parce que votre avis est minoritaire est une déformation classique du débat politique, surtout en France. Au delà des envolées rhétoriques un peu ridicules que cela génère, c’est aussi un moyen redoutable de tuer tout débat.

  • @PMalo : le passage de Jean-Paul II que vous citiez, et qui est repris dans la note de J. Ratzinger que j’ai cité dans un de mes précédents commentaires (avec les effets de modération des messages, on se retrouve à citer plusieurs fois les mêmes passages) est justement une invitation à ne pas renoncer à la participation à la vie politique.

    Je suis 100% d’accord que ça n’implique nullement de prendre sa carte d’un parti existant, mais en aucun cas cela me semble une invitation à ne pas participer aux élections, bien au contraire même. Et surtout, quand on n’a plus d’autre choix, en conscience, que de voter blanc, on n’est pas tenu de participer aux élections QUE en votant. On peut aussi s’y présenter, aux élections. Sans quoi, veuillez m’expliquer comment participer à l’action législative, comme indiqué dans le propos de Jean-Paul II.

    Alors bien sur, les partis politiques ne sont pas toujours nécessaires pour accéder par exemple à la mairie d’une petite ville. Mais quid des plus grandes circonscriptions et des postes à plus hautes responsabilité du gouvernement ? Puisque nous ne pouvons pas non plus déléguer à d’autres l’engagement que nous avons reçu de l’Evangile…

    Toutes les critiques sur les appartenances aux grands partis politiques actuels voient juste, de la part des chrétiens, de même que sur le clivage gauche/droite. Mais si on met un peut le dispositif actuel, vieillissant et inopérant, de côté, qu’est-ce qui empêche des personnes de bonne volonté de s’associer pour présenter ensemble des candidats aux élections, qui ne soient ni de droite ni de gauche, ni d’un des grands partis existants ? Dans ce cas, pardon, mais la notion de parti est une simple notion administrative, qui permet notamment la gestion financière de « campagnes électorales » (nécessaire si on veut faire connaitre un candidat). Sans quoi ça peut juste être une asso loi 1901 (histoire d’avoir quand même un portail d’information), voire même rien de formel. Mais c’est un peu bête de ne pas utiliser les dispositifs prévus par l’état justement pour permettre à chacun de s’engager dans le débat démocratique.

    Sinon, dites-moi comment prôner le contraire ne s’appelle pas renoncer à s’engager dans l’action politique multiforme, en particulier ici dans l’action législative ?

  • @ Pneumatis : Pardon pour cette réponse (ci-dessous) un peu lapidaire et au ras des pâquerettes, mais parfois faut savoir mettre un peu de pragmatisme là dedans 😉

    Voilà la liste de formes donnée dans le texte : « économique, sociale, législative, administrative, culturelle » , et je pense que cela n’est bien sûr pas exhaustif. Sans vouloir cloisonner ces formes et les rendre étanches les unes aux autres, j’agis directement par ma vie de tous les jours dans les formes économique, sociale et culturelle. Quant au législatif et à l’administratif, il est vrai que ne je peux pas vraiment vous dire mon influence… 😉
    Si : niveau législatif : mon soutien -aussi symbolique soit-il- à des associations comme ADV, par exemple, qui font un hénaurme travail. Bon, reste « administratif », et là je ne vois pas trop, effectivement.

    Voilà, ça peut paraître couillon, mais je n’ai pas eu besoin de voter pour tout cela. « Tout est politique », disait quelqu’un, je crois ; et par chez nous, on revendique que d’avoir un potager et des toilettes sèches est déjà un acte politique. D’abord.

  • @PMalo : attention, je n’ai pas dit que vous deviez vous engager dans tous les domaines. Nous agissons là où nous nous sentons appelés à agir, chacun d’entre nous. Simplement, si tout le monde fait comme vous, il n’y a plus personne pour s’occuper du législatif et de l’administratif.

    Voilà, je ne comprends pas les discours qui consisteraient à vouloir faire de vos choix d’engagement, ceux à faire par toutes les personnes de bonne volonté. Ou autrement dit, les discours disqualifiant les engagements sur le terrain législatif et administratif. Je ne dis pas que tout le monde doit s’engager sur le terrain électoral, mais je dis juste qu’il faut bien que certains d’entre nous s’y collent quand même.

    @Gwynfrid : Merci pour votre réponse. Je manque de temps ce soir, donc je vous répondrais plus tard, et plus posément. Veuillez m’en excuser.

  • Petite contribution au débat tirée de l’histoire politique récente des Etats-Unis:
    1) le Parti républicain, avec Reagan dans les années 1980 et Bush fils dans les années 2000, est allé chercher les voix de l’électorat évangélique en lui promettant la remise en question du droit d’avorter, le refus du « mariage » homosexuel, accessoirement la légitimation du créationnisme et un soutien inconditionnel d’Israël: clientélisme légitime ou subordination de l’intérêt national à un bloc de croyances extra-politiques? (cette deuxième analyse inspira à certains, en France, un parallèle entre bushisme et islamisme);
    2) pour des raisons historiques (poids des immigrants irlandais, puis italiens, aujourd’hui mexicains), les catholiques américains votent plutôt démocrate; quand John Kerry fut désigné comme candidat démocrate contre Bush, en 2004, certains évêques dirent que les électeurs catholiques ne devaient pas voter pour lui parce qu’il était pro-choix: défense légitime d’un principe essentiel pour les catholiques ou abus de pouvoir de l’autorité ecclésiale?

  • @ Victor

    Quand les équivalents américains du MLF disent qu’il faut voter Kerry parce qu’il est pro-choix, est-ce un abus de pouvoir de lobbys non représentatifs, ou une expression légitime dans le jeu démocratique ?

    La discussion sous le billet de Koz montre bien que la question des chrétiens en politique est complexe.

    Mais il me semble que l’on peut au moins demander de la cohérence aux tenants du « débat démocratique » : au nom de quoi s’offusquent-ils de ce que l’Église joue de son influence sur les électeurs, alors que c’est le propre de toutes les parties prenantes au débat démocratique ?

    Est-ce la meilleure façon pour l’Église de témoigner des exigences de l’Évangile, c’est un débat qui agite les catholiques, mais non je ne vois pas d’objection recevable de la part des « démocrates ».

  • @ Victor: pour moi, ces exemples correspondent au fonctionnement normal de la démocratie. S’ils donnent à débattre, par contre, c’est du point de vue interne de l’Église: on peut se demander si les évêques américains ne sont pas allés trop loin en menaçant de refuser la communion à certains politiciens catholiques. Mais c’est là une question qui ne concerne que les catholiques.

    Par ailleurs, l’exemple américain est très intéressant sous un autre angle: les chrétiens « pro-vie » américains n’ont en fait jamais obtenu ce qu’ils souhaitaient – prioritairement, que l’on revienne sur Roe vs Wade (la décision de la Cour Suprême qui a éliminé les lois interdisant l’avortement). Tout simplement parce que Reagan et Bush, au pouvoir, n’ont pas vraiment essayé de revenir dessus. Leur intérêt politique était de conserver le statu quo, tout en se servant de cette question pour mobiliser ce segment de l’électorat. Ils l’ont fait de façon très habile, et imposé ce sujet clivant (« wedge issue« ) comme un élément unique motivant le vote de gens qui par ailleurs n’auraient pas volontiers soutenu une politique étrangère guerrière ni une politique économique largement pilotée par les grandes entreprises.
    J’y vois une illustration du risque, pour les chétiens qui veulent s’engager en politique, de verser dans l’absolutisme dont je parlais plus haut dans mes commentaires en réponse à Pneumatis.

  • @ Hervé:
    Le problème est que les machines ne consomment pas et que la richesse non distribuée se concentre et n’irigue plus les échanges. Et cela nous conduit dans la situation actuelle de richesse de plus en plus concentrée et d’arrêts des échanges…

  • Gwynfrid a écrit : :

    Je n’ai pas d’expertise particulièrement utile à vous proposer, mais le débat que nous avons ici même est déjà une – très modeste – contribution. En tout cas j’espère qu’il vous aide à affiner vos réflexions.

    Tout à fait, et il m’a bien aidé à préciser ma pensée que je couvais pour un article. D’une certaine manière, vous, de même que Koz et les autres commentateurs, aurez aussi aidé Solidarité en m’aidant moi 😉

    En attendant de répondre à vos autres remarques, je vous laisse le lien vers mon billet : http://pneumatis.over-blog.com/article-depasser-les-clivages-pour-s-engager-en-politique-58885100.html

  • Aristote a écrit : :

    @ Victor
    Est-ce la meilleure façon pour l’Église de témoigner des exigences de l’Évangile, c’est un débat qui agite les catholiques, mais non je ne vois pas d’objection recevable de la part des « démocrates ».

    Bonsoir Aristote,

    je pense que l’église a parfaitement le droit de s’exprimer en politique, dans le sens qu’un prélat ne doit avoir aucun ennui judiciaire s’il donne son avis directement sur une élection ou sur un problème de société. L’église a le droit de choisir un candidat à l’élection présidentielle américaine comme j’ai le droit de tromper ma femme, une action qui n’est pas illégale non plus, en France en tout cas.

    Cela ne veut toutefois pas dire que l’église fasse des choix judicieux en s’engageant. Soutenir un candidat, c’est à la fois faire un pari sur un programme et sur une personne et son entourage, un exercice qui n’a plus grand chose à voir avec la religion. C’est aussi envoyer des messages beaucoup plus forts: être contre l’avortement, c’est une chose, privilégier l’avortement à tout le reste, c’en est une autre.

    Enfin, si l’église a le droit de s’exprimer, je pense que les citoyens ont le droit d’avoir une opinion sur les opinions de l’église, et de l’exprimer. Même parmi les ayatollah de la laïcité à la française, je ne crois pas que beaucoup demandent l’interdiction de l’église, ou une restriction de sa liberté d’expression.

  • @ Joyeux Acier

    Nous sommes d’accord :

    Les représentants de l’Église ont le droit de s’exprimer.

    Rien ne garantit qu’ils s’expriment toujours de façon judicieuse, ce qui ne veut pas dire qu’ils ne s’expriment jamais de façon judicieuse, bien au contraire.

    Mais si on limitait le droit d’expression aux quidams qui ne s’expriment que de façon judicieuse, le silence serait assourdissant !

  • @ Aristote: quand vous interpellez les démocrates (même avec guillemets), à qui les opposez-vous? Aux théocrates? C’est bien là que je vois le problème. Les évangéliques américains dont je parlais, ou du moins une partie d’entre eux, rêvent d’un ordre inspiré par leur théologie ou leur vision de l’humanité et de son histoire si vous préférez. Je crois qu’il faut distinguer les vérités de foi et les vérités de raison, et que si chacun est libre de se gouverner lui-même selon les premières et de les prêcher aux autres, il ne doit pas chercher à les leur imposer par la loi. Qu’un évêque ou un curé donne une consigne de vote relève de la même problématique, avec cette donnée supplémentaire que, dans l’Eglise, le sacerdoce confère au prêtre une autorité acceptée et même désirée par les fidèles. Il me semble que le choix politique peut être influencé par l’Eglise – et il appartient à celle-ci d’assumer sa responsabilité dans ce domaine -, mais qu’il ne peut pas être dicté par elle.

    @ Gwynfrid: l’autorisation de l’avortement, aux Etats-Unis, ne résulte pas d’une disposition législative mais d’une décision de la Cour suprême, c’est-à-dire d’un jugement prononcé par des juges indépendants. Ni le président, ni le Congrès ne peuvent l’inverser; seul la Cour le peut. Mais le poids des électeurs chrétiens évangéliques s’est fait sentir – davantage sous Bush 2 que sous Reagan, d’ailleurs – au travers de décisions relevant du président, comme l’interdiction des recherches sur les cellules souches embryonnaires, ou du Congrès, comme le financement de programmes promouvant l’abstinence pour lutter contre les grossesses précoces et les MST.

  • Victor a écrit : :

    @ Gwynfrid: l’autorisation de l’avortement, aux Etats-Unis, ne résulte pas d’une disposition législative mais d’une décision de la Cour suprême, c’est-à-dire d’un jugement prononcé par des juges indépendants. Ni le président, ni le Congrès ne peuvent l’inverser; seul la Cour le peut.

    On peut l’inverser en modifiant la Constitution. C’est très difficile, toutefois, beaucoup plus qu’en France. Mais de toute façon, ni Reagan ni Bush père ni Bush fils n’ont essayé de le faire, car ce n’est pas dans leur intérêt.

    Victor a écrit : :

    Mais le poids des électeurs chrétiens évangéliques s’est fait sentir – davantage sous Bush 2 que sous Reagan, d’ailleurs – au travers de décisions relevant du président, comme l’interdiction des recherches sur les cellules souches embryonnaires, ou du Congrès, comme le financement de programmes promouvant l’abstinence pour lutter contre les grossesses précoces et les MST.

    C’est là l’expression normale de la démocratie, même si ces décisions ne nous plaisent pas ou se révèlent absurdes.

  • Bonjour Gwynfrid,

    Enfin je vous réponds :
    Gwynfrid a écrit : :

    C’est commode pour assurer la cohérence, mais j’y vois aussi un risque, celui de l’absolutisme. Vous pouvez utilement vous référer à l’histoire d’autres idées. Prenez l’exemple des Verts. Il se sont scindés en deux tendances, l’une (relativement) pragmatique, et l’autre absolutiste, incarnée entre autres par Antoine Waechter. Seule la première a réussi à s’imposer, faisant évoluer les positions de tous les partis. La seconde n’aujourd’hui plus aucune influence.

    C’est vrai, mais si je vous pose la question : grâce à quel travail en amont les questions écologiques se sont invitées dans le débat démocratique ? Grâce à quel travail de cohérence de fond et de persistance cela a pu donner naissance à différents mouvements, et à des idées audibles et même adaptables et adoptables par des membres du gouvernement ? En réalité l’exemple des Verts est excellent, et c’est exactement sur l’ambition politique qu’ils pouvaient avoir il y a 30 ou 40 ans que nous nous positionnons. Il est probable que pendant une trentaine d’année, nous fassions sourire, jusqu’au jour où la providence fera que les idées et problématique que nous portons d’une voix libre commencent à peser dans le débat politique. Le problème c’est que si nous ne commençons pas maintenant, nous ne commencerons jamais.

    Gwynfrid a écrit : :

    Demandez-vous pourquoi. Certes, il y a le scepticisme général face à cette forme d’engagement. Mais je crois qu’il y a, aussi, la méfiance face à ce qui peut ressembler à un repli identitaire, même si vos clarifications montrent que ce n’en est pas vraiment un. Devoir clarifier, c’est déjà être sur la défensive. L’intérêt de commencer par vous adresser explicitement à un public plus large est de lever automatiquement cet obstacle.

    Vous avez en parti raison, mais la clarification peut s’inscrire aussi dans une logique d’éducation ou d’éveil des consciences, je crois. Ce n’est pas nécessairement être sur la défensive, surtout quand au contraire nous essayons d’être plutôt pro-actifs en matière de communication. Je vous parle de frustration, parce que moi, tout frais et tout naïf c’est ce que j’ai ressenti. Parce que je suis un éternel impatient aussi.

    Gwynfrid a écrit : :

    Sur ce point, qui est peut-être relativement mineur, je suis en net désaccord. Votre vision de la démocratie est très (trop ?) idéaliste, nous ramenant à l’absolutisme dont je parlais plus haut. Considérer qu’il n’y a pas de vraie démocratie parce que votre avis est minoritaire est une déformation classique du débat politique, surtout en France. Au delà des envolées rhétoriques un peu ridicules que cela génère, c’est aussi un moyen redoutable de tuer tout débat.

    Ce point, je vous l’accorde. Je sais que la démocratie, objectivement, reste une démocratie dans la mesure justement où elle ne m’empêche pas de me présenter moi-même si aucun candidat existant ne correspond à mes convictions… Encore que, concrètement, pour les régionales, nous avions fini avec les autres listes minoritaires, par organiser une manif pour une vraie démocratie médiatique : vous n’êtes pas sans savoir l’influence des grands médias lors des élections, et le fait qu’ils servent de relais incontournable entre les électeurs et les candidats, ce qu’ils font souvent de manière très partiale et très inégale. Mais ce n’est pas le débat. Ce dont je voulais plus parler ce n’est pas de ce qu’est ou n’est pas la démocratie dans sa forme institutionnelle, mais plutôt ce que nous en faisons. Si nous sommes 50% de la population à ne nous reconnaitre dans aucun candidat, et que ces mêmes 50% de la population s’y résignent en ne faisant émerger aucun candidat alternatif, alors nous bradons totalement la démocratie. Elle n’en est plus une qu’en théorie, dans sa forme et ses principes. Mais plus vraiment dans la pratique.

  • @ Victor

    « Les libertaires dont je parlais, ou du moins une partie d’entre eux, rêvent d’un ordre inspiré par leur philosophie ou leur vision de l’humanité et de son histoire si vous préférez ».

    Quelle différence avec votre phrase :

     » Les évangéliques américains dont je parlais, ou du moins une partie d’entre eux, rêvent d’un ordre inspiré par leur théologie ou leur vision de l’humanité et de son histoire si vous préférez. »

    Le statut de l’embryon n’est-il pas un problème de raison ? Chacun doit-il être libre de définir l’homme comme il l’entend ?

  • @ Gwynfrid: outre que je ne n’aime pas trop votre vision complotiste de « présidents qui font semblant de vouloir faire quelque chose mais ne la font pas parce que le statu quo les arrange », mon propos était seulement de signaler que le vote des chrétiens évangéliques, aux Etats-Unis, a eu des conséquences sur la politique menée par les présidents (Reagan et Bush 2, pas Bush 1) et les parlementaires qu’ils ont fait élire. Je citais cet exemple parce qu’il est de bon ton, en France, y compris chez les catholiques, de critiquer la place de la religion dans la société et dans la vie publique américaines (vous n’avez d’ailleurs pas manqué, dans vos réponses, de sacrifier à l’anti-américanisme de rigueur dans notre pays). Mais en quoi ce que vous proposez est-il différent de la démarche des évangéliques américains qui ont investi le Parti républicain, à partir des années 1980, pour l’amener à défendre des valeurs en grande partie identiques aux miennes et, je suppose, aux vôtres?

    @ Aristote: vous avez raison, que la vie commence à la conception est une vérité de raison. Que cette vie ne puisse être sacrifiée que dans quelques cas extrêmement rares et tragiques est une vérité de foi. Je pense que la foi se partage et s’enseigne plutôt qu’elle ne s’impose par la loi.

  • @ Victor: Complotisme et anti-américanisme mélangés, me voilà habillé pour l’hiver , dites donc. Mais il faudrait peut-être que vous trouviez, dans mes commentaires, au moins un bout de citation à l’appui de ces fantaisistes accusations?

    Pour en revenir à la partie intéressante de la discussion, celle où ne volent pas les noms d’oiseaux: je voulais simplement indiquer que les évangélistes n’ont pas gagné grand-chose de concret en trente ans de soutien quasi inconditionnel au camp conservateur. Il en est de même de ceux des catholiques – y compris des évêques – qui se sont impliqués dans le même sens, par exemple lors du débat sur la réforme de la santé. Ça ne veut pas dire que tout est mauvais dans leurs efforts. Simplement, il faut être lucide quand on essaie d’appliquer des principes non négociables dans le champ politique. Le risque d’instrumentalisation est toujours présent.

  • @ Pneumatis: merci encore pour cet intéressant échange, à l’issue duquel je crois que nous convergeons sur l’essentiel. En effet, l’exemple des Verts est excellent. Si je vous comprends bien, vous pensez commencer par établir des bases solides pour votre nouveau parti sur le plan des idées et convaincre un minimum de personnes sur vos fondamentaux, avant de chercher les moyens politiques de leur mise en oeuvre. Vous avez, en effet, un peu de temps devant vous avant de devoir vous poser des questions politiques plus concrètes: jusqu’à quel point négocier l’application de vos principes, passer ou non des alliances, etc.

    Cela a marché pour les Verts, et en effet cela nous donne une bonne idée de la patience nécessaire.

    Pneumatis a écrit : :

    la clarification peut s’inscrire aussi dans une logique d’éducation ou d’éveil des consciences […]

    Voyez-vous, je ne suis pas sûr que les consciences aient besoin d’être éveillées. Dans le cas des Verts, il fallait commencer par convaincre de la réalité des problèmes environnementaux (je me souviens très bien de ma propre réaction initiale face à la notion de réchauffement climatique dû à l’effet de serre, qui paraissait parfaitement invraisemblable à l’époque). Mais pour les problèmes que vous voulez évoquer, ce n’est pas le cas: ils ne sont pas nouveaux, c’est le moins qu’on puisse dire. Les obstacles à vaincre sont plus la résignation et la lassitude par rapport à ces questions: la conscience de la plupart des gens est éveillée, mais la tentation est forte de la faire taire en lui disant, tout a déjà été essayé, à quoi bon ? En ce sens, le défi pour les chrétiens en politique est plus rude encore que celui auquel ont fait face les écologistes des origines. Dans ce contexte, vous obliger à apporter d’entrée de jeu une clarification sur la question identitaire, c’est ajouter un obstacle dont vous pouvez très bien vous passer.

  • Gwynfrid a écrit : :

    Mais pour les problèmes que vous voulez évoquer, ce n’est pas le cas: ils ne sont pas nouveaux, c’est le moins qu’on puisse dire. Les obstacles à vaincre sont plus la résignation et la lassitude par rapport à ces questions: la conscience de la plupart des gens est éveillée, mais la tentation est forte de la faire taire en lui disant, tout a déjà été essayé, à quoi bon ?

    Eh sans blague, vous êtes sérieux ? Bon OK pour certains points, comme ce qui peut toucher au noyau de la justice social, on est d’accord. Mais la défense de la vie, lutter contre le « droit à pratiquer l’avortement », les manipulations génétiques sur les embryons, la stabilité du mariage monogame et hétérosexuel, etc… ? Vous croyez franchement que les consciences, dans leur grande majorité, n’ont pas besoin d’être éduquées par exemple sur la nature de ce qu’est un embryon et sur sa dignité ? Vous trouvez que d’une manière générale nous avons dans la société un ordre moral satisfaisant et auquel il ne manquerait plus qu’une certaine efficience ?

    Même sur un truc aussi basique que la liberté d’éducation, inscrite dans les droits de l’homme, fait un tollé en France quand vous parlez non plus de l’école publique gratuite, mais de scolarisation gratuite quelque soit le choix de scolarisation des enfants par leurs parents (pour pratiquer une véritable équité dans le choix éducatif), vous faites sauter tout le monde au plafond. J’ai des potes qui ont failli me fusiller quand je leur ai parlé du chèque scolaire, tellement ils y voyaient une privatisation de la sacro-sainte école publique laïc et obligatoire. Et pourtant on sait à quel point l’éducation est mise à mal dans notre pays et en déstabilise tous les fondements. Je trouve dingue que même des partis comme le PCD, qui ont des parlementaires et des élus, n’en parlent jamais alors que le chèque scolaire serait une avancée considérable des droits de l’homme dans notre pays, qu’il ferait faire un bon de géant pour la jeunesse de notre pays et la responsabilisation des parents, qu’il a déjà été expérimenté avec succès dans d’autres pays, et que c’est vraiment loin d’être la mort à mettre en oeuvre, même économiquement. Mais non, silence radio.

    Alors bon, en matière d’éducation des consciences je continue de penser qu’il y a un peu de boulot.

  • @Gwynfrid : Ooooh je suis désolé ! Nous parlions d’éveil des consciences sur la nécessité de l’engagement politique, et je suis parti complètement en sucette – hors sujet total ! Désolé, j’ai honte.

  • Pneumatis a écrit : :

    C’est vrai, mais si je vous pose la question : grâce à quel travail en amont les questions écologiques se sont invitées dans le débat démocratique ? Grâce à quel travail de cohérence de fond et de persistance cela a pu donner naissance à différents mouvements, et à des idées audibles et même adaptables et adoptables par des membres du gouvernement ? En réalité l’exemple des Verts est excellent, et c’est exactement sur l’ambition politique qu’ils pouvaient avoir il y a 30 ou 40 ans que nous nous positionnons.

    Pneumatis et Cie,

    c’est amusant que vous citiez l’écologie: pour moi, la plupart des écologistes politiques soulèvent de vraies questions (le réchauffement climatique), mais les abordent avec une telle certitude idéologique qu’ils proposent la plupart du temps des réponses inadaptées, excessives et peu efficaces, en plus d’être parfois très arrogants, et souvent plein de rancoeur. Je pense que c’est aussi le plus gros risque qui guette les catholiques politiques: quand j’entend Christine Boutin, elle me rappelle beaucoup dans le ton Cécile Duflot ou Dominique Voynet.

  • Pneumatis, il ne faut pas être désolé, en fait mon commentaire mélangeait allègrement les deux aspects, celui qui vous indigne tant comme celui qui vous dérange moins. Je n’ai pas été suffisamment clair. Je pourrais essayer de m’exprimer mieux, mais en fait je crains fort d’ajouter à la confusion, et de partir à mon tour en sucette sur un sujet annexe. Je m’abstiens donc, et reviens sur le point en débat, qui était celui-ci:

    Pneumatis a écrit : :

    Vous avez en parti raison, mais la clarification peut s’inscrire aussi dans une logique d’éducation ou d’éveil des consciences, je crois. Ce n’est pas nécessairement être sur la défensive, surtout quand au contraire nous essayons d’être plutôt pro-actifs en matière de communication.

    Je rappelle que la clarification que vous avez obligé à faire plus haut porte sur la nature identitaire ou non d’un parti politique qui s’affiche « chrétien ». Mon argument est que cet affichage rend plus difficile une communication qui se veut pro-active. Ma proposition de solution consiste à chercher explicitement des convergences d’idées au-delà du cercle chrétien que vous voyez (à tort selon moi) comme un terrain plus facile.

    Cela dit, je me rends compte que nous monopolisons ce fil en descendant de plus en plus dans le détail. Je ne suis pas certain que cela passionne les autres lecteurs. Je vais donc me reporter à votre blog pour en savoir plus.

    @ Joyeux Acier: je croins que Mme Boutin a fait des dégâts durables à l’idée qu’on peut se faire du catholique engagé en politique. Il y a heureusement de meilleurs exemples, avec des gens moins connus comme par exemple M.Étienne Pinte.

  • @ Gwynfrid: « Leur intérêt politique était de conserver le statu quo, tout en se servant de cette question pour mobiliser ce segment de l’électorat. Ils l’ont fait de façon très habile, et imposé ce sujet clivant (« wedge issue« ) comme un élément unique motivant le vote de gens qui par ailleurs n’auraient pas volontiers soutenu une politique étrangère guerrière ni une politique économique largement pilotée par les grandes entreprises. »
    C’est ce que vous avez écrit. On peut discuter ma manière de caractériser ces propos. Parlons alors, si vous préférez, de machiavélisme pour la première affirmation et de caricature pour la seconde.

    Mais, en effet, laissons cela. La question qui m’intéresse dans vos réflexions et celles de vos amis est celle de l’application de la morale chrétienne à la vie politique. Il y aura à la fin du mois, à Lyon, un colloque à ce propos. Comment faire pour que les tentatives pour former un « un vote chrétien » ou un « vote catholique » sur des sujets spécifiques – comme on parla d’un « vote juif », jamais démontré d’ailleurs, contre Giscard d’Estaing, en 1981, en raison de son attitude au sujet d’Israël -, comment faire, donc, pour qu’une telle entreprise ne soit pas ressentie – et de ce fait rejetée – comme celle d’un groupe de pression cherchant à imposer ses convictions à ceux qui ne les partagent pas?

    Une des difficultés réside, selon moi, dans la distinction entre différents ordres de réalité. La politique a pour objet l’intérêt général ou commun. De ce point de vue, vaut-il mieux permettre aux femmes qui le désirent d’interrompre leur grossesse dans des conditions médicalement sûres ou bien, comme c’était le cas avant 1974, ne leur laisser d’autre choix que de recourir à des moyens dangereux ou aller à l’étranger? Et ceux à qui une telle conduite – l’avortement volontaire – fait horreur et qui tenteraient de se liguer (je n’emploie pas ce verbe au hasard) pour inverser la législation en cours (à supposer que ce soit imaginable) ne seront-ils pas inévitablement accusés de chercher à imposer dans l’ordre politique un principe qui relève de l’ordre spirituel ou, dans la laïcité à la française, de la « vie privée »?

    A mes yeux, c’est un problème très important et difficile. Il y va, en un sens, du ralliement des catholiques à la République. Quand vous refusez ce que vous appelez l’absolutisme, vous voulez sans doute dire qu’il faut accepter et même rechercher des compromis. Sur ce point, je suis d’accord. La démocratie est le règne du compromis, et qui refuse le compromis refuse la démocratie (sachant que si l’adversaire refuse lui-même le compromis, et donc la démocratie, sur des questions vitales, il peut devenir nécessaire de faire sécession). Mais la démocratie à la française, c’est-à-dire la République telle qu’elle s’est instaurée et telle qu’elle se développe en France, n’exclut-elle pas par principe la prise en compte d’impératifs d’ordre religieux? Et si oui, comment faire?

  • @ Victor

    C’est une décision politique qui a fait de l’avortement une décision « privée », et certainement pas une évidence commune. L’argumentation des catholiques n’est pas : « Dieu interdit l’avortement », mais : « qu’on le veuille ou non, il s’agit déjà d’une vie humaine, et une société qui la passe par pertes et profits parce que cette vie ne peut pas manifester sur les boulevards est une société qui règle ses problèmes sur le dos des plus vulnérables. »

    Vous avez le droit de ne pas être d’accord, pas de dire que l’argument se situe sur un plan religieux en tant que tel.

  • @ Victor: je crois bien qu’en matière de machiavélisme, je ne suis guère qu’un observateur débutant, qui s’intéresse un peu plus que la moyenne aux mécanismes politiques, mais c’est bien tout. Si vous voulez en savoir plus sur la notion de wedge issue, je vous recommande ce papier, académique, mais lisible (en anglais).

    Victor a écrit : :

    comment faire, donc, pour qu’une telle entreprise ne soit pas ressentie – et de ce fait rejetée – comme celle d’un groupe de pression cherchant à imposer ses convictions à ceux qui ne les partagent pas?

    Pour résoudre le problème d’image, c’est-à-dire pour éviter d’être ressentie comme illégitime, l’entreprise en question devra à mon sens dépasser, et ceci aussi visiblement que possible, le cadre strictement religieux ou communautaire; c’est ce que j’ai essayé d’expliquer dans mes échanges avec Pneumatis.

    Victor a écrit : :

    Et ceux à qui une telle conduite – l’avortement volontaire – fait horreur et qui tenteraient de se liguer (je n’emploie pas ce verbe au hasard) pour inverser la législation en cours (à supposer que ce soit imaginable) ne seront-ils pas inévitablement accusés de chercher à imposer dans l’ordre politique un principe qui relève de l’ordre spirituel ou, dans la laïcité à la française, de la « vie privée »?

    Accusés ils seront, c’est inévitable en effet, tant le débat politique affectionne les hommes de paille. Cela ne rendra pas l’accusation juste pour autant. Si un jour la législation en question se trouvait inversée (ce qui est hautement improbable à mon avis) ce serait alors l’expression de la volonté de la majorité, exactement comme le fut la loi Veil. Il n’est pas question d’imposer quoi que ce soit, mais bien de faire marcher la démocratie normalement.

    Victor a écrit : :

    La démocratie est le règne du compromis, et qui refuse le compromis refuse la démocratie

    D’accord sur le premier point, moins sur le second. Qui refuse le compromis se condamne à rester éternellement minoritaire. Ce peut être un choix tout à fait respectable.

    Victor a écrit : :

    Mais la démocratie à la française, c’est-à-dire la République telle qu’elle s’est instaurée et telle qu’elle se développe en France, n’exclut-elle pas par principe la prise en compte d’impératifs d’ordre religieux?

    Aristote vous a répondu, fort justement, sur l’avortement: ce n’est pas un sujet d’ordre religieux. Plus généralement, oui, l’Église est séparée de l’État, ce que pour ma part je ne remets pas en question, bien au contraire. Cela ne doit pas empêcher les catholiques de s’exprimer en tant que tels et de faire valoir leurs idées, à l’égal de tout autre groupe rassemblant des intérêts, des idéologies, ou quoi que ce soit qui mérite d’être défendu dans le champ politique.

  • @Aristote,
    Pour un catholique, la vie est sacrée donc l’avortement selon vous devrait être interdit par la loi quelles que soient les circonstances.
    En suivant une même logique, participer à une guerre, tuer un ennemi vulnérable dans la mesure où l’on a la possibilité de le tuer ne devrait-il pas aussi être interdit par la loi ?

  • @ Hervé

    Non, pour un catholique la vie « biologique » n’est pas sacrée. Le Christ a donné sa vie, bien des chrétiens ont donné la leur. La légitime défense, et surtout la légitime défense des autres, des plus faibles, peut justifier de prendre la vie d’un agresseur.

    Mais il n’accepte pas de faire de l’embryon innocent un « agresseur ».

    Encore une fois, vous pouvez ne pas être d’accord, mais l’argumentation n’est pas fondée sur le « sacré » ou la « foi ».

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