Passage de relais avec François Miclo, son amertume et sa colère. Dans cette affaire libyenne, il ne nous reste qu’une maigre chance de ne pas nous borner à ressasser notre honte pendant 20 ans, ce en quoi nous excellons au plus haut point. Oh oui, nous aimons cela, invoquer rétrospectivement la honte de n’avoir rien fait, excuse de minables : nous n’avons rien fait pour les libyens, mais notez bien qu’au moins j’en ai honte. Comme si l’on pouvait faire autrement qu’avoir honte d’être lâches, hypocrites et inconséquents ! Ajoutons-y le ridicule puisqu’au passage, on laisse penser que, nous au pouvoir, ça ne se serait pas passé comme ça.
Tant qu’il s’est agi de bavasser sur les révolutions tunisienne et égyptienne, nous avons fait très fort. Et sont tombés les régimes les moins déterminés à massacrer leur peuple. Victoire (pas les nôtres), mais petites victoires. Face à un vrai despote, on ne prend pas la mesure de la situation. Collectivement : politiques, journalistes et citoyens, nous sommes en-dessous de tout. Et tous les « plus jamais ça » du passé sont ridiculisés. Résignés, soulagés de nous planquer derrière la légalité internationale, nous nous réfugions dans une démocratie munichoise.
« …Ils auront la guerre et le déshonneur ». Ah, pas les troupes libyennes sur les Champs, certes, mais le terrorisme, peut-être, et le discrédit sur l’Europe et l’idée même de démocratie. Quelles « valeurs occidentales » pouvons-nous prétendre universaliser ? La surdité opposée à ceux qui crient vers les démocraties ? Un légalisme sclérosant cache-misère de notre trouille, notre confort, notre égoïsme et nos vies couchés ? Nous illustrons la faiblesse de la démocratie, faiblesse méprisable et méprisée que les peuples arabes auront bien du mal à nous envier.
Et tous les « machins » ont fait long feu. Les enceintes internationales sont autant d’éteignoirs aux ambitions démocrates. On s’y réunit pour enterrer doctement toute action sous une caution internationale : chacun pourra dès lors se défausser de ses propres responsabilités.
Vendredi, notre presse nationale, qui n’a d’autre horizon de pensée que Nicolas Sarkozy, enterrait les libyens sous la polémique nationale, tout en lui reprochant sans scrupules ni lucidité de se servir de l’international à des fins de politique interne. Nicolas Sarkozy n’aurait pas l’art et la manière.
Alors quoi ? L’Europe ? L’éclat de Nicolas Sarkozy à l’encontre de l’ectoplasme diplomatique qui sert de Haute Représentante est bienvenu, et démontre d’ailleurs que sa lettre commune avec David Cameron n’était pas une défausse. On le soupçonnera même d’avoir anticipé – c’était facile – l’immobilisme européen.
C’est sévère mais, comme l’écrit François Miclo,
L’Europe intégrée a, dès lors, suivi la même ligne : se gourer toujours. Sarajevo en guerre, le général Mladic encerclant Srebrenica : Bruxelles discute de critères de convergence, comme si de rien n’était. Il y a quinze ans, le massacre des habitants de la « zone de sécurité » de l’ONU en Bosnie sous les yeux des casques bleus néerlandais amorçait le processus de destruction européenne.
Aujourd’hui, il y a fort à parier que l’Europe n’interviendra pas en Libye. La boucle sera alors bouclée. Le processus entamé en 1995 lorsque l’Europe a abandonné la question des Balkans aux Américains atteindra son but. L’Europe est en train de se perdre dans les environs de Benghazi.
Qu’on ne s’y trompe pas : ce n’est pas son âme qu’elle perd. Ce n’est pas seulement au nom des droits de l’Homme que l’Europe devrait intervenir en Libye, mais au nom de ses intérêts stratégiques essentiels. La Méditerranée est une affaire européenne et l’Union ne peut refuser d’y exercer sa pleine influence sans courir le risque de ne plus exister du tout.
Si on aime l’Europe, il faut la secouer. S’il est encore temps.
L’ONU ? Quelle blague ! Ainsi, on attend le bon vouloir de la Russie, qui n’a sollicité l’aval de personne avant d’envahir la Géorgie ou de buter le tchétchène jusque dans les chiottes ? On attend l’aval de la Chine sur les droits de l’Homme ? On attend l’aval d’une institution au fonctionnement si vérolé qu’elle a confié la présidence de la Commission des droits de l’Homme à la Libye ? Au point où nous sommes, pourquoi snober la Corée du Nord ? Elle a peut-être un avis.
Les Etats-Unis ? On ne se souvient pas qu’ils aient attendu le feu vert pour mettre le dawa en Irak ni, dans des circonstances plus louables, pour bombarder Belgrade. La ligue arabe ? Les pays arabes sont trop occupés à mater le peuple Bahreïni pour venir en aide au peuple libyen, même si les choses semblent évoluer.
Une fois encore : le Conseil de Sécurité de l’ONU a d’ores et déjà évoqué l’hypothèse de crimes contre l’humanité. Maintenant que les puissances internationales ont fait étalage de leur impuissance internationale, maintenant que les journalistes quittent Benghazi, on sait quelle rivière de sang va se répandre, et dans quel silence. Celui qui l’a promise déclare aujourd’hui : « dans quarante-huit heures, tout sera fini ». Allons-nous assister, coupables, aux massacres annoncés ?
Sur son blog, Alain Juppé indique que la France et l’Angleterre, avec quelques pays arabes, sont encore à la recherche du mandat onusien.
Il est souvent arrivé dans notre histoire contemporaine que la faiblesse des démocraties laisse le champ libre aux dictatures. Il n’est pas encore trop tard pour faire mentir cette règle. Ce sera l’honneur de la France d’avoir tout tenté pour y parvenir.
Alors, après avoir tout tenté pour l’obtenir, « tout tenter pour y parvenir », cela implique d’intervenir aussi sans mandat onusien. Seuls ou avec les pays arabes volontaires. Ce sera l’honneur de la France, l’honneur de la Grande-Bretagne. Et sa pénitence pour nous avoir infligé Ashton[1].
- à moins que, ce faisant, elle n’ait atteint son but [↩]
En savoir plus sur Koztoujours
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Et si on créait un mandat EU-sien et un mandat FR-sien, après tout?
bon, cela dit, vu ce qui se passe en cote d’Ivoire,
où la France a armé des rebelles depuis 2002 pour pouvoir mettre le poulain de Sarko
(celui qu’il a marié et dont la femme gère aussi … les finances de Omar Bongo, tiens tiens…)
ça fait un peu peur aussi, de le laisser s’en occuper, après avoir invité Kadhafi à dormir chez lui.
il faudrait faire ce que demandent les libyens, une NFZ,
mais en même temps, même si les médias officiels libyens ne le disent pas (sic)
il semblerait que les aviateurs de Kadjafi font de plus en plus défection
…et utilisent l’absence de No Flying Zone dans un sens très avantageux:
l’un d’eux se serait écrasé volontairement sur le bunker de Kadhafi hier
et deux des fils de K seraient au service grands brûlés à l’hôpital,
encerclé pour l’occasion de toutes les forces de sécurité.
peut-être que ces révolutions gagnent à être l’oeuvre d’un peuple souverain, après tout.
peut-être que leurs manifestations ponctuées de prières valent mieux que notre aide franco-française.
Par contre, j’aimerais trop qu’on prenne le fils de Kadhafi au mot quand il dit qu’on devrait restituer
l’argent que son père a donné à la France (pour les rafales et les armes) …au peuple libyen! on leur livrerait des armes pour XXXX €, ce serait trop bien.
Ce que j’aime bien chez toi, Koz, c’est le goût du contre courant. Très élégant. (ça n’est pas ironique, ça m’était déjà venu à l’idée à propos des chrétiens d’Orient) Qu’il est troublant que ce Nicolas Sarkozy qu’il est si amusant de vouer aux gémonies se soit tout d’un coup fait l’allié improbable de BHL, aient reconnu des rebelles si inférieurs en nombre, si démunis, tellement mal partis face à ce dictateur sanguinaire et semble chercher des alliés pour mener une intervention que la Realpolitik déconseille. Il est déconcertant qu’il ait fait ce choix, mais il l’a fait ! Et nous autres Français, obsédés par l’idée que nous nous faisons de notre propre supériorité, nous avons bien failli ne pas avoir honte…. voire, quasi, être fiers de notre Président (pas gagné). Fiers ? Que dis-je ? Ah mais non, on ne nous la fera pas, à nous. On se rabattra sur ses intentions, forcément malhonnêtes, pour avoir honte. On est sauvés !
(j’aime aussi beaucoup le titre, très ancien régime)
Il y a plus à dire sur ce post, mais les mots me manquent, parce que la situation de la Libye est bouleversante.
que l’ Egypte nouvellement libre aide les démocrates libyens voisins, que les pays arabes prennent position, que nous allions les aider, soutenir militairement les insurgés, livrer des armes, ce qui ne devrait pas être trop difficile…
mais nous ne devons y aller que si nous y sommes invités par la, par une communauté, ligue arabe, OTAN (il sert à quoi ?), Conseil Européen, ou par un « appel des vieux sages » ….
koufra…quel plus beau souvenir pour la de la 2éme GM pour la 2eme DB !
Je suis totalement d’accord avec toi. Je ne comprend pas pourquoi on parle toujours du mandat de l’ONU alors que nous avons le droit de censure au conseil de sécurité.
Théoriquement la France pourrai envahir tous les pays arabe et reconstruire une Algérie française (la blague) et ne subir aucune sanction de l’ONU.
Je crois qu’attendre le mandat de l’ONU c’est une façon de dire « vous voyez, on veux faire quelque chose, mais on peut pas, on a les mains liés ! ».
Pour une fois que j’ai une occasion de félicité l’ambition de notre gouvernement.
Quelque soit la décision de la France et de l’Europe elle sera mauvaise.
En effet si on y va en Libye (encore faudrait il en avoir les moyens financiers car une guerre cela coûte cher) cela sera très mal vue par le rue arabe et les régimes vacillants pourront de nouveau jouer la carte anti occident pour raffermir leurs pouvoirs. De plus il y a le corollaire de voire une recrudescence de la menace d’attentats.
Si on y va pas nous aurons la honte comme le décrit si bien Koz. L’Europe, ayant perdu son âme et le sens de l’Histoire et de son histoire, ira de plus en plus vers un certain immobilisme au service du marché. Sans être un anti capitaliste je regrette que la vison des Pères Fondateurs de l’Europe d’en arriver à une certaine unité politique , un « État » européen se soit perdu en chemin et que seule l’idée d’une libre marché soit resté ou presque.
J’aimerai aussi souligner la passivité des États arabes. Passe encore que l’Arabie Saoudite n’intervienne pas de peur d’être la prochaine sur la liste (encore que elle puisse y trouver un moyen de redorer son blason) mais que ni l’Égypte, ni la Tunisie ne fasse rien pour renverser le régime de Tripoli alors qu’ils viennent de faire une révolution là je dois avouer que je ne comprend rien. Pourquoi est ce seulement l’Occident qui doive agir alors que ceux qui ont la plus belle légitimité qui soient ne font rien???
Pour conclure je dirai qu’entre deux mauvaise solutions je préfère encore que mon pays soit mal vu pour avoir agit que pour n’avoir rien fait. La France ayant une politique pro-arabe depuis plus de 60 ans j’avoue que je me berce d’illusions….
@ fanette: le goût du contre-courant ne doit pas être systématique, au risque de se tromper. Mais… il n’y a que les poissons morts qui nagent dans le sens du courant.
Je ne me fais pas de grandes illusions quant à Sarko. Mais la presse commence à m’horripiler. Certains titres sont désormais clairement engagés contre lui, et en oublient les vrais enjeux. Parce que le pli est pris, il faut nécessairement le critiquer. Et lorsqu’ils lui reprochent d’instrumentaliser la politique internationale, ils ne se rendent même plus compte qu’ils font de même, en oubliant les libyens pour se consacrer à pinailler sur le style de Sarko, et se gargariser du fait que d’autres titres en Europe le critiquent.
Sarkozy a fait le choix de soutenir la rébellion. Je ne doute pas que ce choix se soit notamment imposé pour faire contraste par rapport à notre empressement très relatif en Tunisie, et également en Egypte. Mais faut-il vraiment s’arrêter à cela ? Que les politiques bornent leur appréciation de la situation internationale à une analyse coûts/avantages pour Sarkozy est une chose – et comment s’assurer qu’il n’en tire pas bénéfice – mais que la presse fasse de même est horripilant.
@ francis : c’est à peu près ce que je dis…. On monte sur nos ergots, on dit que c’est mal, et on se met en situation de nous lier les mains.
Tairusu a écrit : :
C’est un peu ça. C’est ce que j’entends quand j’écris : « On s’y réunit pour enterrer doctement toute action sous une caution internationale : chacun pourra dès lors se défausser de ses propres responsabilités. »
Condé a écrit : :
En est-on si sûrs ?
Il me paraît très facile de justifier une intervention de la France et du Royaume-Uni en Libye sans mandat de l’ONU. Il serait mieux d’intervenir avant d’attendre le résultat du vote du Conseil de sécurité. Je crois que cela ne tient pas à grand-chose pour inverser le cours des évènements, mais le temps est compté en heures et non pas en jours. La ligue arabe a donné un mandat. Ce n’était pas si évident que ça qu’elle soit d’accord pour une NFZ.
Le courage du peuple libyen s’accroît d’heure en heure inversement proportionnel à celui des dirigeants des pays les plus puissants de la planète. L’attitude de ces derniers est incompréhensible. L’Europe, qui devrait être un groupe plus au moins homogène dans lequel il devrait y avoir un minimum de bon sens, est la plus décevante de toutes ces organisations. A force de voir de la complexité dans n’importe quelle situation, elle ne voit pas ce qui est simple et saute aux yeux.
J’ai aussi entendu qu’un des fils de Kadhafi serait mort. J’ai encore de l’espoir que le peuple libyen va s’en sortir, il est plus que méritant.
La rue arabe est nourrie depuis des années à l’anti occidentalisme. Même si cela ne marche pas toujours il y a quand même un impact. Ainsi, la résistance libyenne refuse une intervention au sol mais juste une exclusion aérienne. Cependant, au vue de la situation, cela ne suffira pas.
La résistance libyenne avait des raisons de le faire tant qu’elle avait des raisons d’espérer se séparer seule de Khadafi. Mais elle n’était pas contre une intervention occidentale, et maintenant que l’alternative, c’est cela ou crever, je pense qu’elle a pu reconsidérer sa position.
Par ailleurs, la rue égyptienne et la rue tunisienne verront-elles vraiment d’un mauvais oeil une intervention ?
Et entre l’intervention au sol et l’exclusion aérienne, il y a l’intervention aérienne, qui pourrait déjà ralentir la progression des pro-khadafi.
Il faut intervenir militairement pour arrêter Kadhafi et les massacres. Cela pourrait avoir une autre forme qu’une no-fly zone au sens strict. Cette zone se mettrait en place ultérieurement avec évidemment le concours des « nombreux pays arabes prêts à intervenir » dont parle Juppé.
On se demande si l’épuration dans les zones reprises par Kadhafi ne risque pas d’être pire encore que les bombardements. Dénonciation par quelques voisins, exécutions sommaires… Cauchemardesque.
Do a écrit:
C’est un problème en effet de laisser une seule personne décider d’interventions militaires ou d’orientations diplomatiques majeures. Pourquoi, par exemple, l’assemblé n’aurait pas son mot à dire? Un vote sur une NFZ aurait vraisemblablement obtenu une majorité large, au delà de l’UMP. Ce serait à la fois un garde-fou et une manière de renforcer la position du PR face à nos partenaires. Je rêve, évidemment, la Vème république n’est pas prévu pour ça.
Je ne m’étendrai pas sur la CI pour ne pas dériver, mais par curiosité: d’où tenez vous que la France a armé les rebelles, Do?
Bravo !
Le billet de Miclo est magnifique (*). Mais notons quand même cette curiosité historique, ce sont des catholiques qui admettent qu’il faudrait faire la guerre. Le monde reprendrait sa logique ?
(*) le votre n’est pas mal non plus hein.
Mon Dieu, que vous arrive-t-il ? Voilà que vous endosser la défroque du va-t-en-guerre !
Ce tragique épisode aura au moins le mérite de montrer que les machins que sont l’ONU et l’UE sont inutiles. Et la Ligue Arabe ne vaut pas mieux, de même que l’O.U.A. comme l’épisode ivoirien qui n’en finit pas de s’éterniser le démontre. Il ne suffit pas de se draper dans de bons sentiments pour servir à quelque chose. Faire les gros yeux, menacer ça n’a qu’un temps. Lorsque le type en face sait que malgré votre doigt sur la gâchette vous n’aurez pas les tripes de faire feu, votre arme ne sert à rien.
Pour ma part, je ne vois pas 36 solutions. Soit on décide d’y aller en se passant de quelque mandat que ce soit et on fait ce qu’il faut pour dégager le clown sanglant et ses séides. Et les armées françaises et britanniques peuvent le faire, d’autant que de par leur histoire elles savent gérer le contact avec les populations étrangères. Mais si le but est de gagner, il faudra un engagement au sol. On ne gagne jamais une guerre par les airs. Soit on reste sur notre bord de la Méditerranée à regarder sans rien faire. De toute manière, quelle que soit l’option choisie nous devrons faire face aux reproches des uns et des autres. Le tout est de savoir si on a envie de pouvoir se regarder le matin dans la glace sans avoir à rougir.
Merci, merci, merci. Ça fait du bien de lire ce que vous écrivez, que je n’ai entendu clairement nulle part. Le silence navré de l’Europe est insupportable — mais je finissais moi-même par me laisser contaminer, à force de ne rien entendre d’autre. Merci.
il est bien ce texte.
j’aime aussi ce petit passage : « L’ONU ? Quelle blague ! Ainsi, on attend le bon vouloir de la Russie, qui n’a sollicité l’aval de personne avant d’envahir la Géorgie ou de buter le tchétchène jusque dans les chiottes ? On attend l’aval de la Chine sur les droits de l’Homme ? On attend l’aval d’une institution au fonctionnement si vérolé qu’elle a confié la présidence de la Commission des droits de l’Homme à la Libye ? Au point où nous sommes, pourquoi snober la Corée du Nord ? Elle a peut-être un avis. »
et d’accord avec Tairusu.
Comme Pepito, je crois que c’est encore possible.
L’urgence pourrait justifier une intervention sans aval de l’ONU, ainsi que de frappes aériennes sans doute plus larges qu’une simple paralysie de l’aviation de Khadafi, qui ne suffirait plus désormais. Je me berce peut être d’illusions, mais j’ai l’impression que la prise à témoin solennelle de l’ONU par Sarkozy dans sa dernière lettre va dans ce sens, de même que les prises de positions de Cameron. L’ONU pourrait toujours ensuite faire la seule chose qu’elle sait faire: envoyer des casques bleus une fois que le film sera terminé (ce qui ne sera pas inutile).
Tiens, Ban Ki Moon vient d’exiger « un cessez-le-feu immédiat ». Peut être l’a-t-il même dit d’une voix forte, sait-t-on jamais.
Ce qui me désespère le plus, c’est l’impression que tout ceci ne serait pas si compliqué que cela à mettre en œuvre. Peut être suis-je naïf. Mais la France et la Grande-Bretagne ne sont pas seules. Il y a aussi les petits gars sans officiers, en treillis disparates dans les pickups. C’est sûr qu’ils ne font pas le poids. N’empêche qu’ils ont fait de grandes choses, déjà. Un général sur Atlantico à l’air de penser qu’ils pourraient encore en faire d’autres.
http://www.atlantico.fr/decryptage/benghazi-ne-tombera-pas-en-jour-56125.html
Pour cela ils ont besoin d’armes, de soutien, et surtout d’espoir. C’est surtout à ça que servent les jets de Khadafi actuellement. Ils déversent des bombes certes, mais surtout de la terreur et du desespoir. Il faut commencer par faire changer la peur de camp. Ensuite, tant que la rébellion a des troupes au sol, les précédents militaires (Afghanistan, Kosovo) montrent que Khadafi est condamné s’il subit des frappes aériennes suffisamment déterminées. S’il écrase Benghazi, tout deviendrait plus compliqué.
Le Monde avait pondu il y a quelques jours un éditorial ridicule sur « le mauvais usage de la diplomatie de perron » (corrigé depuis par leur édito d’hier, par exemple).
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/11/du-mauvais-usage-de-la-diplomatie-du-perron_1491669_3232.html
Cet édito parlait entre autre, « de la fin des solutions simples ». Nul doute que ce que je prône serait vu par une Mme Ashton comme une solution simple, beaucoup trop simple. Mais je ne saurais me résoudre comme elle à la fin des solutions tout court.
Je laisse de côté le Sarko qui est un zéro. Je constate surtout que les Européens ne font rien, que la Russie joue au plus malin, que les Etats-Unis sont restés en retrait, que les pays arabes n’interviennent pas, que l’Afrique ne fait rien. Nous n’avons pas à nous sentir « coupables » de l’inaction générale.
Votre franchise est admirable, vos opinions sont estimables, mais décidément, non, je ne parviens pas à être d’accord. Dans un précédent commentaire sur un précédent billet, j’avais évoqué le problème de la « guerre juste », je ne suis toujours pas convaincu qu’une intervention franco-britannique (+ tous ceux que ça intéresseraient) en serait une, je n’y reviens pas.
Revenons au sujet. Admettons que la France et le Royaume-Uni et leurs alliés intéressés aient le « droit » d’intervenir en Libye, en violation du droit international onusien, comme au bon vieux temps de la politique de la canonnière, au nom du droit naturel divin supérieur, par définition, au droit positif. Malgré les apparences, je ne me moque pas, je reconnais que c’est possible. Admettons que ces puissances, donc, considèrent qu’elles ont le droit de violer le droit international au nom d’un plus grand bien. Elles seraient alors justifiées à intervenir, à une condition, cependant : dénoncer unilatéralement la Charte des Nations Unies ainsi que tous les autres traités internationaux qu’ils devraient violer pour intervenir, quitter l’ONU et les diverses autres organisations internationales.
Ceci fait, ces puissances pourraient donc intervenir pour renverser par la force, au nom du droit du plus fort, le gouvernement libyen et y substituer par les armes un gouvernement à leur convenance (belle leçon de démocratie au peuple libyen : aux premières élections libres, le parti vaincu saurait quoi faire : se plaindre auprès de ces puissances pour obtenir leur soutien dans un coup d’Etat).
Et ensuite ? Mon principal problème, mon vrai problème c’est que je réfléchis et que je suis incapable de me rappeler d’une seule intervention militaire occidentale (au sens strict : Amérique du Nord + Europe de l’ouest + dominions britanniques) dans un pays non-occidental, quelqu’en furent les motifs (justes et bons ou infâmes), quelqu’en fut le résultat militaire (succès ou échec) qui ait eu des conséquences positives sur le pays envahi : Suez (désolé, mais l’équipée envisagée en Libye me rappelle énormément celle de Suez), Vietnam, Iraq (2 fois), Afghanistan, même Balkans (les ex-Etats yougoslaves semblent, de loin, se « normaliser » mais au prix du dépeçage de la Serbie, avec un Etat kosovar extrêmement critiquable, du prochain éclatement de la Bosnie-Herzégovine, du conflit entre l’ARYM et la Grèce, etc), etc.
Imaginons la situation la plus favorable : les armées françaises et britanniques envahissent la Libye, renversent le pouvoir en place et installent au pouvoir les rebelles. Plein succès militaire. Immédiatement les ennuis commencent. Parce que, en toute honnêteté, qui de vous, de moi, de qui que ce soit à la moindre idée de ce que pensent et veulent les rebelles, de leur orientation politique et idéologique en dehors de « pas Khadafi » ? Et qui sait si ces orientations politiques ont le soutien de la majorité du peuple libyen ? Nous mettons donc les rebelles au pouvoir. Et les rebelles, ou en tout cas les chefs que nous avons mis au pouvoir, se révèlent avoir des opinions politiques qui nous déplaisent. Que faisons-nous ? Nous organisons une 2ème invasion pour renverser ce 2nd gouvernement ? Imaginons même un scénario plus favorable : les chefs rebelles installés par nous au pouvoir se révèlent de parfaits démocrates : ils forment un gouvernement provisoire, organisent des élections libres et… le peuple libyen se révèle être en désaccord avec ces parfaits démocrates, les désavoue et porte au pouvoir des hommes et des idées qui nous déplaisent. Là encore, ne sommes-nous pas contraints, en vertu de la logique qui nous a fait intervenir une 1ère fois, à intervenir une 2nde fois ? Et cette logique ne nous conduit-elle pas en fait à intervenir en permanence, à conclure que les libyens ne sont décidément pas prêts à se gouverner eux-mêmes et à en faire à nouveau une colonie ?
Pour résumer : je ne suis pas certain de la légitimité d’une invasion franco-britannique et si cette invasion est légitime, alors il en résulte nécessairement qu’il faut supprimer l’ONU, déchirer tous les traités internationaux et conclure que certains Etats doivent devenir des colonies (perspective que je ne rejette pas par principe, mais je doute qui que ce soit soit prêt à l’assumer et pourtant elle résulte nécessairement du postulat de la légitimité d’une invasion en violation du droit international) ; même si cette invasion était légitime, je suis absolument certain qu’elle n’aurait pas de conséquence positive.
@ robespierre: cette curiosité ne m’échappe, même si je peux difficilement me l’expliquer.
@ jean316: Physdémon vous a en effet déjà soumis ce passage du Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise dont je vous redonne quelques extraits.
Par ailleurs, non, il n’est pas nécessaire de quitter l’ONU et déchirer tous les traites internationaux. Relisez donc mon billet à cet égard : Russie, Chine et Etats-Unis se sont déjà passés de l’aval de l’ONU et ce, pour des raisons bien moins légitimes et, que je sache, ils sont toujours au Conseil de sécurité. On pourrait aussi faire la liste des pays membres, et conclure tranquillement que non, définitivement, cela ne nous mettrait pas au ban des nations ni ne nous obligerait à déchirer les traités.
Par ailleurs, une intervention visant à tout le moins à réduire les colonnes armées des pro-Khadafi pourrait être entreprise. Faut-il, parce que ce serait un entre-deux, s’en abstenir ? Poser l’alternative intervention terrestre ou inaction est une manière facile de forcer la main pour l’inaction.
Par ailleurs les exemples que vous donnez ne sont aucunement comparables. Vietnam, Irak, Suez ? Quel rapport avec la situation en Libye ?
Et j’aimerais comprendre en quoi un mandat de l’ONU changerait fondamentalement la donne militaire.
Vivien a écrit : :
Je n’ai pas vu l’édito d’hier. Je n’ai vu que l’édito ridicule. Et c’est notamment en pensant au Monde que je pense à une presse dont le seul horizon de pensée est Nicolas Sarkozy. J’aurais même pu parler d’une presse en campagne.
Bon, à la place, j’ai trouvé ça : Oui, il faut intervenir en Libye et vite !
Ce n’est pas je pense re écrire l’Histoire si j’affirme qu’au moment de la guerre d’Espagne notre pays s’est coupé en plusieurs morceaux : ceux qui pensaient qu’il fallait aider les Républicains espagnols, ceux qui pensaient qu’il fallait aider Franco, ceux qui ne savaient trop quoi penser, ceux qui ne pensaient pas ou pensaient à autre chose. A la libération les Républicains espagnols engagés dans la résistance ont cru qu’après avoir aidé notre pays à se libérer on les aiderait à libérer le leur. Il n’en a rien été. Le rideau de fer est tombé, la guerre froide a « sauvé » le régime de Franco. Alors je sais bien que comparaison n’est pas raison. Que la situation aujourd’hui est compliquée, complexe, que je l’analyse avec une grille du passé mais je ne peux pas m’empêcher de penser à la guerre d’Espagne en voyant ce qui se passe en Lybie. La peur du communisme a été remplacée par la peur de l’islamo-fascisme et à mon avis surtout par la peur des masses populaires arabes qui font le ménage et perturbent l’ordre mondial. Je crains que les Lybiens en révolte contre Khadafi ne soient pas plus aidés que les Républicains espagnols en lutte contre Franco. Je souhaite bien entendu avoir tout faux.
Je ne croie pas que le peuple libyen et besoin de l’intervention de la France ! La droit française a toujours était une bande d’hypocrites aller demande aux républicains espagnols ! Les libyens ont besoin d’arme pas de votre compactions calculer. D’ailleurs se sont des armes américaines russes et françaises qui massacrent le peuple libyen ! Un président qui méprise les arabes et qui veux maintenant les sauvés ? Non pas d’intervention, armer les résistants libyens personne ma le droit de leurs voler leur victoire qui arrivera de touts façon !
L’ édito du Monde d’avant hier, enfin, hier… Le Monde quoi :-).
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/03/15/il-est-temps-d-aider-la-rebellion-libyenne_1493249_3232.html
Ils se sont quand même fendus d’un « Nicolas Sarkozy a raison ». J’ai d’autant plus de respect pour eux que ca doit effectivement leur arracher la gueule.
La Libye et son dictateur c’est l’Irak sans les armes de destruction massive, mais avec les tribus muselées par le dictateur et qui auront à coeur de faire l’union comme en Irak une fois le dictateur chassé.
Ne pas intervenir à cause d’une éventuelle réaction des pays arabes ? Mais ils ne souhaitent que ça sans pouvoir le dire et l’intervention des Saoudiens contre le dangereux éveil des Chiites à Bahreïn le montre bien. A propos, ils n’ont pas hésité eux, et les américains en coulisse non plus qui savent ce qui est en jeu là bas.
L’europe n’est pas nulle, elle représente au contraire très bien ses membres , leur veulerie, leur sympathie compassée pour les révolutions arabes qui ne coûtent rien sauf les bonnes et nobles paroles. On a l’Europe qu’on mérite.
L’intelligence pour les insurgés eut été d’appeler à l’aide leurs voisins, discrètement épaulés par des tiers, comme Bahrein appelle les Saoudiens et comme Khadafi utilise des mercenaires.
Dommage ils ont loupé le coche. La guerre est cynique mais c’est la guerre. peut on encore espérer ?
Nous, nous démontrons une fois de plus que la nullité ne gagne qu’aux élections démocratiques.
jean316 a écrit : :
Vous ne cherchez pas assez. Japon 1945. Corée 1950-1953. Panama 1989. Koweit 1991. J’en oublie sans doute.
Mais bon, si vous trouvez que la situation actuelle de l’ex-Yougoslavie ne représente pas une évolution « positive » par rapport à une guerre civile tournant au génocide, peut-être que votre principal problème n’est pas que vous réfléchissez.
@Koz,
Beau billet. Ce légalisme cache-sexe est insupportable. La Chine et la Russie disposent d’un droit de veto au CS de l’ONU, jamais une résolution autorisant une intervention armée ne sera adoptée. Jamais. Quiconque prétend être en faveur d’une intervention à la condition qu’elle recueille l’approbation de l’ONU est d’une hypocrisie crasse. Exemple Juppé, dans le billet que tu lies : « A deux conditions: obtenir un mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, seule source de droit international en matière d’usage de la force ; agir non seulement avec le soutien mais aussi la participation effective de pays arabes. «
Alain Juppé, autorité morale rescapée de correctionnelle, autant que fin politique – qui ne se souvient de la brillante dissolution de 1997 ? – conclut très heureusement par son galimatias ce déplorable exposé. Les « démocraties » laisseraient-elles trop souvent le champ libre aux « dictatures » ? Comme s’il était dans la nature des démocraties de passer au lance flammes tous les régimes de la terre qui n’en sont pas. Mais au nom de quoi ? Le colonel fantasque des bords de la Syrte n’était, si je ne me trompe, ni plus ni moins un dictateur au mois de janvier, quand il ne semblait pas que M. Koz ni personne d’ailleurs appelât alors à la croisade libyque. Suffit-il donc qu’un soulèvement se produise, et que le pouvoir en place ne décampe pas aussitôt, pour que le droit international impose qu’on traite en délinquant celui qu’on embrassait la veille ? On nous oppose des images insoutenables, des « fleuves de sang », etc… Mesuré selon ce critère, un Abraham Lincoln est un Kadhafi affecté d’une bonne puissance de dix. Si vous connaissez des révoltes réprimées sans violences, informez en nous.
Que vérifions nous aujourd’hui, sinon que le « droit d’ingérence » est ni plus ni moins le droit que s’arroge les grandes puissances (qui sont depuis le procès de Nuremberg, et par une heureuse coïncidence, le camp du Bien), de se mêler des affaires intérieures des petites ? On doit à Vladimir Volkoff cette définition. Apparemment, la Libye de Kadhafi n’en était pas une si petite.
Enfin, par pitié, qu’on nous épargne l’antimunichisme rebouilli. Evidemment, les temporisateurs de 1938 étaient lucides, et la triste affaire de 1940 l’a hélas abondamment prouvé. Je soupçonne d’ailleurs que la hargne épuratrice postérieure, qui n’épargna pas même le pauvre Giono, tenaient à ce que, dans les ruines de 1944, on leur pardonnait pas d’avoir eu raison.
C’est marrant, ça me rappelle – quoiqu’en un peu moins fort – un slogan de l’association Survie: « Donner valeur de loi au devoir de sauver les vivants » (http://www.assorennes.org/Survie-35-Donner-valeur-de-loi-au). Devinez quoi: l’ancien président était un fiéffé catholique.
Tirez sur l’ONU et tout ce qui est international est chose aisée par les temps qui courent. Cependant, personne n’explique comment les choses iraient mieux si l’ONU n’existait pas, si la justice internationale n’existait pas, si la possible éventuelle possibilité que Khadafi soit un jour traduit un tribunal international n’existait pas. Sur ce point, Jean316 pose une vraie question.
Par ailleurs, ce n’est pas l’ONU qui empêche la France et/ou les UK d’intervenir.
Bonsoir Koz,
je partage l’indignation de ton billet, même si, pour être honnête, je suis plus inquiet des catastrophes qui touchent le Japon en ce moment. J’ai déjà largement dit ce que je pensais, entre autres que si on ne comptait pas y aller, il était mieux de ne pas parler du tout.
Je souhaiterais évoquer un point dont on n’a peu parlé pour l’instant. La France, et encore plus l’Europe, a fait le choix d’une armée sous équipée. Avec un demi porte avion, il n’est pas facile pour la France d’entreprendre une opération aérienne, même en Libye. Comme les américains nous le reprochent souvent, nous avons préféré dépenser de l’argent pour nos petites médiocrités (par exemple les 35 heures, les magasins fermés le dimanche, les vacances) plutôt que pour nous donner les moyens de nous défendre.
Lib a écrit : :
C’est pas faux. J’aimerais être persuadé que tout ceci n’est pas calculé d’avance, qu’on ne se contente pas de se dire qu’ainsi on ne pourra pas leur reprocher d’avoir essayé, en sachant qu’ils n’y parviendraient pas.
Cela étant, là-dessus, le coup de colère de Sarko contre Ashton, pointé sur twitter par les anti-sarko, me paraît intéressant puisqu’il souligne une volonté effective d’obtenir ce qu’il demandait.
Gatien a écrit : :
Là non plus, c’est pas faux. Ce sont effectivement des pays européens ainsi que la Chine et la Russie. Et les modalités de fonctionnement de l’ONU qui, certes, sont établies par les pays membres. Mais, une fois la paralysie actée, on fait quoi ?
« … que s’arrogent les grandes puissances… ». Nos lecteurs auront corrigé d’eux-mêmes, mais au moins l’auteur aussi.
Oui, il faudrait intervenir rapidement en Libye. Le fait que la ligue arabe le demande et propose de participer fait sauter un verrou important.
Le verrou de l’ONU ne sautera pas, en revanche. Il a été bien rare que le conseil de sécurité autorise l’usage de la force… et il le fera de moins en moins. Juppé le sait très bien.
Hélas, le manque de lisibilité de la politique extérieure française n’aide pas à convaincre.
On a bien regardé, en 1991, les insurgés se faire massacrer en Irak après la défaite de Saddam à la suite de l’opération Tempête du désert. On a laissé se perpétrer une épuration sanglante. Tout ça parce qu’il ne fallait pas aller au delà de ce qui avait été prescrit par l’ONU. Et puis il y a eu le Rwanda et bien d’autres encore. Heureusement que l’ONU est là, quel bordel ce serait le monde sans cette magnifique instance qui a eu assez d’humour pour fourguer la présidence de la commission des droits de l’homme à la Lybie en 2003, puis l’a introduite au conseil des droits de l’homme en 2010. Fort heureusement l’honneur est sauf puisque l’ONU a courageusement débarqué la Lybie de ce conseil dont on se demande bien à quoi il peut bien servir.
Un peu plus de honte ne devrait plus déranger qui que ce soit en Occident.
Les deux diplomates libyens aux Nations Unies à New York sont contre Kadhafi et pour un mandat de l’ONU et une intervention militaire le plus vite possible. C’est un bon signe. Le gouvernement de Kadhafi a dit depuis février que l’ambassadeur de Libye auprès des Nations Unies n’avait plus le droit de parler au nom de la Libye. J’espère que l’ONU ne va pas lui enlever son badge pour entrer dans le bâtiment.
Je salue aussi le courage des journalistes qui sont en Libye, certains (hommes et femmes) travaillant sous les bombardements de Kadhafi (malheureusement on est sans nouvelles de 4 journalistes du NY Times qui étaient hier à Ajdabiya). Le fait qu’on n’entend rien du côté des militaires britanniques et français est peut être bon signe. On ne va pas tout de même téléphoner à Kadhafi avant de frapper.
« Si on aime l’Europe, il faut la secouer. S’il est encore temps. ». Pourquoi s’acharner à considérer vivant ce qui est mort en Bosnie en 1994 ? Vous avez compris que l’ONU était ontologiquement mauvais, et c’est par rapport à cela que j’ai toujours approuvé l’intervention unilatérale de Georges W. Bush en Irak pour déboulonner Saddam. Mais on ne peut pas comparer l’Europe actuelle, celle que vous nous demandez de sauver, et les USA. L’Europe actuelle qui est définitivement antichrétienne (l’affaire symbolique du calendrier des fêtes en est un symptôme remarquable). L’Europe actuelle est un soutien systématique aux palestiniens, et condamne systématiquement l’état d’Israël, ce qui est obscène quand on se souvient ce dont elle est responsable. L’Europe refuse de façon quasi névrotique de reconnaître ses racines chrétiennes. Elle est antidémocratique : qui a voté pour l’amateur de poèmes japonais qui nous sert de président ? Elle essaie de nous faire croire que la Turquie où l’on maltraite les minorités chrétiennes a sa place en Europe. Je vous épargne cette monnaie qui nous appauvrit chaque jour. Je me permet donc de reformuler ainsi : « Si on aime l’Europe, il faut la secouer. Pour qu’elle crève. Vite ».
hipparkhos a écrit : :
Il ne s’agit apparemment que de certains pays de la ligue arabe. Les autres sont au Bahreïn, j’imagine.
L. Chéron a écrit : :
Je vous accorde le bénéfice du doute sur cette réflexion, même si je n’en vois aucune interprétation fondée. Vous avez le droit d’avoir une autre vision de l’Histoire, et nul ne peut la réécrire, mais nombre d »historiens s’accordent à penser – et l’étayent – que Munich a achevé de convaincre Hitler que la France et la Grande-Bretagne ne feraient rien pour entraver ses conquêtes.
lkloeble a écrit : :
Vous êtes passé un peu vite sur la première proposition : « si on aime l’Europe ».
Beau billet, oui. Celui de François Miclo est beau aussi, dans un style plus romantique. Ah, de Gaulle, Jeanne d’Arc, Gambetta… vibrante évocation de ceux qui ont choisi de ne pas être raisonnables. Il a raison, Miclo, la France c’est ça. Mais le roman national a ses limites, quand il s’agit de définir une politique autrement que pour les livres d’histoire. Je préfère donc, tout compte fait, les arguments de ton billet, avec lesquels je suis entièrement d’accord, sauf pour l’allusion à Munich, qui est très excessive, car la situation présente est loin d’être comparable. Mais quand même d’accord à 99%.
Oui, ne rien faire serait à la fois honteux et contraire à nos intérêts. Évitons pour une fois le cynisme, qui consisterait à dire que nous n’avons qu’à nous y habituer (cf le commentaire de Harald).
Maintenant, j’ai quand même un problème. Oui, intervenir en solitaire, ou en tandem avec les Anglais, ça aurait de la gueule. Ça pourrait marcher. Mais ça pourrait aussi planter, probablement pas sur le plan militaire, mais sur le plan politique. Si on parvient à éjecter Khadafi, on prend la responsabilité de ce qui se passe après: « if you break it, you own it » comme disait un certain Colin Powell qui aurait mieux fait de relire ses propres textes.
Or, autant j’ai confiance en nos militaires pour faire le job, autant je n’ai pas confiance en Nicolas Sarkozy pour mener la barque nationale dans les eaux libyennes. Tu me diras que, tel un éditorialiste du Monde, je ramène tout à Sarkozy, et tu n’auras pas tort. N’empêche. La solidité des dirigeants nationaux fait partie des atouts indispensables pour réussir un coup aussi risqué. Non, il n’inspire pas confiance, et je crois que la majorité de nos compatriotes partage ce sentiment.
De plus, je ne suis pas certain du tout qu’il souhaite sincèrement intervenir. Le coup de gueule contre Ashton, la lettre à l’ONU, etc, tout ça est peut-être bien juste pour la galerie. Dans son billet, Alain Juppé conclut ainsi: « Ce sera l’honneur de la France d’avoir tout tenté pour y parvenir. » Quand on parle de sauver l’honneur, c’est qu’on prépare déjà les esprits à l’échec.
Il se peut que je me trompe, et je souhaite que ce soit le cas. D’autant plus que je n’ai pas des tonnes d’options de rechange à proposer, ni grand-chose de valide à répondre à la remarque: « Mais, une fois la paralysie actée, on fait quoi ? »
Mon père avait un rôle de « diplomatie » dans le privé au Maroc (relations avec les syndicats, les administrations, le personnel) et souvent ses amis marocains lui disaient » ne t’occupes pas, tu ne t’y retrouveras pas, c’est des histoires d’arabes ! » Il y a de cela de nombreuses années, mais les « prudents » en occident semblent bien décidés à se raccrocher à cette recommandation !
Mais les temps ont changé et ceux qui reprochent à notre gouvernement d’avoir voulu jouer les va-t-en guerre et se présentent tous les jours comme des donneurs de leçons « de progrès » ne semblent pas l’avoir intégré :
En vérité, Ils ne reconnaissent pas sincèrement le chemin parcouru par ces peuples arabes et particulièrement les jeunes (education, internet etc…) qui VEULENT et MERITENT la liberté !
Et ils ne veulent pas voir en revanche ce qui est une constante dans les peuples arabes : le mépris pour les couards !
D’ailleurs les Khadafi qui sont des gens méprisables mais retords et (surtout le fils) fin manoeuvriers ont compris que le seul qui ne portait pas dans cette ‘ »archouma » (orthographe non garantie mais qui veut dire la « honte ») c’était Sarkozy donc ils vont essayer (et c’est assez facile dans notre pays qui lui déverse son tombereau de critiques et d’injures quotidien) de le salir (cf prétendues aides pour sa campagne etc…) .
Bref, réjouissons nous, nous allons pouvoir nous flageller (en paroles) et les vrais loyaux à la liberté ceux que l’on appelle « les rebelles » libyens, vont pouvoir mourir dans le silence ! ARCHOUMA ! N…
@ L. Chéron:
Il me semble que ladite dissolution était une idée d’un certain Villepin. J’dis ça, j’dis rien.
Gwynfrid a écrit : :
Et c’est vrai que c’est un problème. Oui, je suis d’accord, nous aurions une responsabilité si nous intervenons. Toutefois, l’intervention peut être plus ou moins intense. Enfin, nous n’échapperons pas non plus à la responsabilité si nous n’intervenons pas et que le massacre prévisible se produit.
Il y a des vies de civils en jeu et, en face, un « dictateur sanguinaire ». Ce serait malheureux qu’on se plante, mais il y a malgré tout une urgence incontournable.
J’en profite pour signaler l’intervention de Guy Verhofstadt :
Sur France Inter, il a ajouté :
azerty a écrit : :
C’est le problème avec le moyen orient, si vous pensez que vous comprenez la situation, c’est qu’on vous a mal expliqué!
LElfe : Juppé était premier ministre quand la dissolution de 1997 fut décidée. Je ne me souviens pas qu’il se soit alors démis de ses fonctions. Mais ce n’est qu’un détail. Je veux bien croire que Villepin fit aussi partie de l’état-major qui arrêta la géniale manoeuvre. Cela confirme la stature de sauveur du pays du bonhomme.
Koz : Je vais vous éclairer sur certaines fondations : entre le 10 mai et le 22 juin 1940, la France connut la plus grave défaite de son histoire. Donc, Daladier aurait mieux fait d’écouter un peu plus Maurras, qui fin août 39 l’encourageait encore à bien réfléchir. Comme disait Petit Gibus, « si j’aurais su… ». Je persiste à ne pas voir le charme qu’il y aurait eu à avancer d’un an cette triste affaire. Ceux qui sont sûrs qu’en septembre 38 la France seule (car les Anglais ne voulaient pas la guerre) aurait pu « convaincre » Hitler de ne plus ambitionner des conquêtes, sont aussi ceux qui sont sûrs qu’elle pouvait le vaincre tout court. Pour moi, c’est cela qui s’appelle « réécrire l’histoire ». Et puis voir Hitler derrière Kadhafi, après l’avoir dénoncé dans Saddam (à qui le tour ?), révèle surtout la puissance hypnotique du mythe 39-45.
Il ne faut pas regarder dans le passé pour comprendre ce qui se passe en ce moment dans le nord de l’Afrique. C’est un phénomène nouveau, mais cela ne veut pas dire qu’on soit incapables de comprendre.
Je n’ai pas le moindre doute qu’une intervention militaire est de loin la meilleure solution comparé à laisser Kadhafi continuer à massacrer tout ce qu’il trouvera sur sa route jusqu’à Benghazi. La population de Benghazi est à 100% contre Kadhafi. Celle de Misrata aussi. Syrte est peut-être la seule ville qui est vraiment pro-Kadhafi car Kadhafi vient de là et a toujours été très généreux avec cette ville. Mais c’est une ville minuscule. Tripoli est sous l’influence de Kadhafi car tout y est contrôlé par ses gens.
Le peuple libyen est plutôt pacifique et tranquille avec la sagesse du berger qui s’occupe de ses moutons et de nourrir sa famille. Il n’est pas particulièrement matérialiste, mais cela fait des années qu’il ne comprend pas pourquoi un pays aussi riche en pétrole avec une population aussi faible ne peut pas se développer. La Libye devrait avoir de bonnes écoles pour instruire sa jeunesse, de bons hôpitaux, des écoles professionnelles, mais se n’est pas le cas. Ce sont les entreprises étrangères avec de la main d’œuvre étrangère qui construisent les routes, les bâtiments publics, les rares hôtels (la Libye a un potentiel touristique énorme: le littoral, les anciens sites de la Libye antique comme Leptis Magna, Apollonie, etc.). Toute construction neuve se délabre en deux à trois ans parce qu’il n’y a pas d’entretien après la construction. Le ramassage et le traitement des déchets fonctionne à peine par endroits. Il y a de l’eau et de l’électricité, mais tout ce qui est communication par téléphone, fax et Internet est contrôlé. Cela fait des années que le peuple libyen (du boulanger jusqu’au médecin) vit dans la peur de Kadhafi et préfère se taire. Il veut sa liberté maintenant et il veut avoir l’impression que son pays lui appartient et pas à Kadhafi et son clan. Il veut finir avec la corruption qui est devenue galopante depuis quelques années. Le gâteau est assez grand pour tous les Libyens et il y aura du travail pour tout le monde. Les femmes sont plutôt bien traitées et participent pleinement dans la société et vont à l’université. Je ne vois pas quels peuvent bien être les problèmes de l’après Kadhafi.
@ L. Chéron: il aurait fallu écouter Maurras en 39… C’est bien ce que je craignais. Je ne perds pas mon temps à argumenter sur ce genre de discours. Il y a des sites pour ça, vous les trouverez sans peine et y serez bien accueilli.
Ca a l’air de s’accéllerer singulièrement au machin.
Le Conseil de Sécurité doit voter ce soir 23h00 heure française. la résolution prévoierait l’intervention d’avions américains, français, anglais et arabes. Cette résolution prévoierait « toutes les mesures nécessaires » et nottament une zone d’exclusion aérienne. La France se dit quand à elle persuadée d’obtenir le Feu vert du Conseil. Source Direct du Monde, citant Reuters.
A confirmer evidemment, mais ça devrait l’être assez rapidement dans un sens ou dans un autre.
Merci pour l’info. On peut suivre le direct ici.
Des opérations militaires aériennes pourraient intervenir dans les heures suivant le vote.
Intervenir, ne pas intervenir, telle est la question, …A priori ce qu’il a en moi d’affectif, le coté bon samaritain que les cyniques voient comme belle âme voguant sur la nef droit-de-l’hommisme, me pousse à souhaiter l’intervention, ne me demandez pas comment, je ne suis pas expert militaire, mais vous pouvez me demander pourquoi. Le côté positif de mon esprit me convainc que la liberté n’est pas négociable, que la dictature khadafiste est insupportable pour ceux qui la subissent et pour le reste du monde, que seules de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de division que les peuples européens portent en eux mêmes.
Foin de paraphrase. Pour moi une seule chose ne se discute pas; dès lors qu’une promesse a été faite, quand des gens risquent leur peau, elle doit être tenue. Si on ne sen sent pas capable, on la ferme.
Qui se souvient d’octobre 1956, de la révolte de Budapest, des promesses de radio free europe puis du lachâge des combattants de la liberté et qui se souvient du peuple hmong et qui se souvient du sort des harkis ?
N’a t-on déjà pas trop promis pour ne pas avoir dépassé le point de non retour ? Telle est la question ?
Pour ceux qui par manque d’imagination ou pour toute autre raison ne voient pas bien les problèmes qui peuvent se poser, il y a ceci.
Par contre, avec un peu de chance, ce genre de menace va forcer la main des pays qui préféreraient attendre. Il ne faut peut-être pas complètement désespérer du Conseil de Sécurité.
Intéressant, Gwynfrid. Peut-être cela rappellera-t-il aux US ce qu’ils ont su faire quand ils étaient encore faibles, il y a plus de deux siècles.
J’avoue ne pas bien comprendre ce qui se dit à propos de cette possible intervention militaire dans les heures qui viennent : aller d’emblée survoler la Libye, c’est s’exposer à la défense anti-aérienne qui reste dangereuse, contrairement à l’aviation libyenne maigre et désorganisée ; et je ne vois pas les Occidentaux aller se faire canarder et perdre des hommes, et la face, pour une opération de police aérienne.
Et pour un chasseur armé, la Libye c’est un peu loin, même en partant du plus bas de l’Europe : il faut mettre en place une organisation, on ne peut pas faire faire des incursions rapides à quelques chasseurs aussi facilement.
D’un autre coté, annihiler cette défense anti-aérienne, c’est mettre en oeuvre les gros moyens : beaucoup d’avions simultanément, des bombardements sur les missiles soviétiques, les radars, sans compter les défenses mobiles. Je ne vois pas d’organisation occidentale qui se soit mise en place récemment. Et puis c’est une déclaration de guerre.
Ou peut-être un raid-éclair comme en 1986, où les Américains avaient opéré en moins de cinq minutes ? mais alors c’est Kadhafi et ses proches qui sont visés.
Ou alors il y a anguille sous roche, avec ces déclarations, mais quoi ?
Deux mots : dès lors qu’elle est conforme au droit international et s’effectue dans le cadre de l’ONU, j’approuve pleinement une intervention militaire française.
Je ne me fais aucune illusion sur les conséquences positives de cette intervention. J’affirme même (absolument persuadé de ne pas me tromper) que (à vue humaine) la démocratie ne s’installera pas en Libye. Et si elle s’installe, les libyens éliront de mauvais hommes et feront de mauvais choix. Cette affirmation ne doit pas absolument être comprise comme révélant un sentiment de supériorité : nous, français, ne sommes absolument pas meilleurs que les libyens, et sans doute à bien des points de vue, bien pires. Mais rien ne changera en Libye, ou alors en pire.
Mais Kadhafi mérite d’être châtié dans cette vie avant d’être damné dans l’autre (sauf si il se repent).
Montjoie Saint-Denis !
Serge, les frappes aeriennes de nuit viseront vraisemblablement la DCA libyenne je pense. Après, de jour, l’apport de l’aviation pourrait etre la no fly zone, pour interdire le soutien de l’aviation libyenne aux troupes au sol, eventuellement des frappes sur les colonnes de kadhafi. Quant à la possibilité de frappe, entre les porte avions et les ravitailleurs en vol, ca doit quand meme etre faisable. Les renseignements doivent tourner depuis un certain temps et sont donc sans doute deja prets, d’autant que ca fait longtemps que kadhafi est sous surveillance (le missile americain, les soupcons sur les armes de destruction massive…)
En revanche votre precedent commentaire est toujours d’actualité : qui est la rebellion? Quelle legitimité? Seront-ils les bourreaux de l’ethnie d’en face? A tout prendre il n’y a qu’une facon d’avoir une partie de ces reponses : le vote democratique, qui s’averera compliqué tant qu’il y aura un dictateur au pouvoir. La premiere etape est donc à mon sens suffisamment claire pour que nous soyons justifiés à intervenir.
C’est voté! J’avoue que je ne m’y attendais absolument pas. Je me demande comment ils ont obtenu l’absention des Russes et des Chinois… En tout cas, c’est incontestablement une victoire diplomatique, claire et nette, pour Sarkozy et Juppé. Tous mes compliments.
Les risques sont toujours là, mais avec un authentique soutien international, c’est beaucoup moins aventureux que je ne le craignais.
Maintenant, bonne chance aux aviateurs qui, si j’ai bien compris, sont sur le point d’aller se frotter directement aux défenses libyennes.
Autre élément favorable : il y a, je crois, très peu de chrétiens en Libye (à part des travailleurs immigrés), donc si cette opération est au bout du compte, comme c’est probable, un désastre comparable à l’Iraq et à l’Afghanistan, au moins ce ne sont pas les chrétiens qui prendront.
@jean316 : Vous êtes inimitable 🙂 !
Dix votes oui, cinq abstentions, zéro non. Ouf ! C’est déjà une belle victoire contre Kadhafi.
Je suis confiant que la campagne militaire de la coalition contre le colonel MK va bien se dérouler. La coalition peut intervenir de différentes manières et elle n’est pas obligée de s’occuper uniquement de mettre en place une NFZ. Cela va de soi que les pilotes ne vont pas s’exposer inutilement aux missiles sol-air libyens. L’armée du colonel et sa ligne logistique par contre est bien exposée. Les moyens technologiques militaires de la coalition sont énormes. Awacs, drones, missiles longue portée très précis, brouillage électronique, stealth technology, etc. L’artillerie lourde et les avions de Kadhafi vont maintenant devoir réfléchir à deux fois avant de bombarder le peuple libyen. Mais le colonel est fou et il faudra être très vigilant.
Wow, c’est donc ça un blog influent 🙂
Tiresias a écrit : :
Je me souviens des Hmongs, des harkis, des peuples viet-namiens auxquels on a assuré fièrement que jamais l’armée française ne les abandonnerait, avant de remballer nos affaires. Comme vous dîtes, si l’on n’est pas capable de tenir nos promesses, on la ferme. Et nos promesses, elles sont explicites mais elles sont implicites aussi : l’Europe prétend soutenir la liberté, la démocratie. Bien sûr, cela ne peut pas signifier, matériellement, que l’on attaque militairement tous les pays dictatoriaux (tiens, au fait, la Biélorussie ?). Mais lorsqu’il y a massacre de la population civile… Et comme je le lisais ailleurs, il y a eu un facteur d’entraînement évident, dans les pays arabes. Si on laissait Kadhafi écraser dans le sang la rébellion, c’était aussi risquer le facteur d’entraînement inverse : c’était Kadhafi sifflant la fin de la récré. On reprend les vieilles habitudes. Déjà qu’ils n’ont pas tellement besoin de ça, en Tunisie et en Egypte, pour les reprendre…
@ Serge : je ne suis pas un expert militaire. Je ne crois pas non plus que ce ne soit qu’une balade de santé. Mais je lis aussi que nous pourrions mettre facilement hors d’état les défenses anti-aériennes simplement parce que nous en avons « les codes ». Je ne suis pas assez renseigné et j’attends de voir, moi aussi.
Gwynfrid a écrit : :
Oui, et l' »option farfelue » selon Miclo a peut-être eu gain de cause. L’option raisonnable aurait voulu que l’on pèse le pour, le contre, le contre, le pour et puis aussi les risques. Je ne dis pas qu’on ne l’a pas fait ici, mais qu’on se serait clairement endormis. Même cette réunion du Conseil de Sécurité n’aurait pas été obtenue sans l’insistance de la France, et de la Grande-Bretagne.
Yogui a écrit : :
Oui, il l’est. Entre approuver un » désastre comparable à l’Irak » parce qu’il y a un accord de l’ONU et s’inquiéter du sort des chrétiens qui, en effet, puisqu’il n’y en a pas ou si peu, ne sont pas en jeu, je cherche la pertinence.
Pepito a écrit : :
Oui. Ses menaces de s’en prendre au trafic aérien et surtout maritime doivent être prises au sérieux. Pour faire sauter un paquebot de croisière sur la Méditerranée, il suffit de quelques hommes déterminés et d’un canot à moteur. Je ne suis pas certain qu’on puisse s’en tenir à une frappe limitée, et je ne serais pas surpris qu’on réfléchisse à la façon de le mettre vraiment hors d’état de nuire, la résolution de l’ONU étant rédigée d’une manière qui peut laisser place à l’interprétation.
Lib a écrit : :
Oh, n’exagérons rien. Le blog ne fait pas tout.
J’ai aussi passé quelques coups de fil, tu t’en doutes.
Commentaire inutile mais… Lib, vous m’ôtez les mots de la bouche.
La prochaine fois que j’aurai quelque chose à demander au machin, je saurai où faire du lobbying!
Depuis le vote de l’ONU, Kadhafi a déjà versé pas mal d’eau dans son vin. Il dit que son armée est là pour des raisons humanitaires. Il ne menace plus de mettre Benghazi à feu et à sang. Il a compté sur les tergiversations de la communauté internationale en espérant prendre Benghazi avant que l’ONU prenne une décision. C’est raté. Dans l’immédiat, il ne peut rien faire. Maintenant, il va faire semblant que rien ne s’est passé en Libye, qu’il n’a tué personne. Il va essayer de se maintenir au pouvoir.
Je pense que les libyens ne sont pas dupes et sont assez solidaires pour prendre conscience qu’ils ne peuvent pas s’entretuer pour Kadhafi. Les défections seront massives. Ceci était inimaginable il y a seulement une année. Quant à attaquer le trafic aérien et des cibles en Méditerranée, je n’y crois pas, ce serait signer sa propre condamnation à mort.
Amis catholiques, réjouissons-nous avec Jean316 qu’aucun militaire ne risque le salut de son ame à casser du muz sans mandat légal. Sinon, c’est aussi le moment d’avoir une pensée ou une prière pour tous ceux qui vont laisser leur peau dans cette histoire, en particulier les Libyens de tout camp.
L’histoire n’est pas finie, loin de là. Du point de vue du déroulement des opérations militaires, evidemment, mais aussi du point de vue diplomatique. L’enjeu est maintenant que le Brésil, l’Allemagne, l’Inde, la Chine et la Russie n’aient pas l’impression que l’on ait abusé de leur abstention. Le mandat n’autorise après tout que « la défense des populations civiles », et l’intervention au sol est exclue. Les risques d’enlisement ou de polémiques sur l’outrepassement du mandat restent réels.
Un peu tôt donc pour célébrer une victoire diplomatique et politique pour la France et pour Sarkozy, mais c’est tout de même une première bataille. J’ai en particulier une pensée pour un certain électorat: pendant que Marine Le Pen faisait dans le Grand Guignol à Lampedusa, Nicolas Sarkozy s’atelait à trouver une vraie solution au problème libyen. J’espère que cela sera plus qu’un symbole.
Sinon, comme ce billet vise aussi à célébrer le panache de nos alliés d’Outre-Manche, et que l’on n’est pas rancuniers:
France expects that every men will do his duty.
Ah ça alors, les guerres maghrébines des Etats-Unis au début du XIXe… Je n’avais JAMAIS entendu parler de ça. Merci Lib.
@ Gwynfrid : « Évitons pour une fois le cynisme, qui consisterait à dire que nous n’avons qu’à nous y habituer (cf le commentaire de Harald).«
Ce n’est clairement pas ma position. Je dis seulement que beaucoup de gouvernants ont été opérés de la honte depuis bien longtemps et qu’un peu plus d’infamie ne devrait pas les déranger.
Bon, heureuse surprise l’ONU a bougé. C’est bien, mais si je ne me trompe pas le mandat est limité à la mise en place d’une « no fly zone ». C’est un début, mais ça ne suffira pas. On a vu que la « no fly zone » n’a pas gêné Saddam dans son entreprise d’épuration après Desert Storm. Kurdes, chiites et chrétiens ont payé le prix fort et personne n’a bougé parce que la sacro-sainte ONU ne voulait pas faire plus. Sans aviation Khadafi réussira à reprendre les rênes, ça sera plus long, mais au final le sang coulera tout autant.
Non, cela va plus loin. La résolution autorise également des frappes, et c’est bien précisément ce qui est envisagé. La seule chose qu’elle exclut, c’est l’occupation terrestre. Elle autorise :
Sur ce, Kadhafi, qui est fou mais qui a oublié d’être con, joue finement sa partition avec l’annonce du cessez-le-feu immédiat. Difficile de bombarder un mec qui a arrêté les combats.
Mais faut-il s’en plaindre ? L’urgence n’était-elle pas d’éviter un massacre prévisible à court terme ? Si cela dégage du temps pour trouver une solution politique voire armer la rébellion, pour qu’elle ne se fasse pas massacrer quand on tournera le dos…
Wait and see donc, bien que je ne me fasse pas vraiment d’illusions sur l’issue.
Ceci dit, il y a un truc qui me gonfle énormément dans les infos qui sont distillées par les médias, c’est cette manière de pipeauter, de présenter des belles fictions. Je pense entre autres à ces articles qui exaltent la soif de liberté du peuple lybien. Comme si le peuple lybien avait une quelconque réalité : 150 tribus plus ou moins réunies dans le cadre de trois grandes régions : Tripolitaine, Cyrénaïque et le Fezzan.
En 1969 Khadafi fut porté au pouvoir à la suite de l’alliance des deux principales tribus : les Warfallah (Cyrénaïque) et les Megahra (Tripolitaine). En 1993, la tentative de coup d’Etat des Warfallah fut liquidée dans le sang et a sérieusement bouleversé les alliances. Lorsqu’on regarde un peu les cartes on s’aperçoit vite que les insurgés sont très localisés, globalement sur les aires naturelles des quelques tribus qui ont fait le choix de suivre les Warfallah début février. Si les Megahra restent fidèles à Khadafi ce sera plié sans engagement au sol des troupes occidentales.
Au delà de ces évènements à venir, se pose la question du post-Khadafi si jamais il est déboulonné – ce dont je doute. Qu’est-ce qui va maintenir en place la fiction lybienne ? L’éclatement du pouvoir central ne risque-t-il pas comme en Yougoslavie de créer une tentation de la partition chez certaines tribus (surtout les plus puissantes) ? Inutile de préciser que ce sera du pain bénit pour les islamistes.
Je m’étais toujours demandé d’où venaient vraiment les « gens de Megara », dans Capitaine Flam.
Va peut-être falloir le tenir à l’oeil, lui d’ailleurs.
Je préfère Flaubert : « C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar.«
Question de génération, probablement. 🙂
@ L. Chéron: En effet. Je ne pouvais simplement pas résister. Etrange rapprochement entre nos ministres des affaires étrangères des moments de crise (Irak, Libye), que cette « réussite » commune – même si c’est hors-sujet.
@ Koz: C’est bizarre, la question ne m’avait jamais empêché de dormir. Je sens que maintenant, je vais en perdre le sommeil. C’est malin…
@ Koz: En fait, je trouve que la réaction de Kadhafi est plutôt confortable pour nous (même si je n’y connais rien) ; si nous permettons aux insurgés de se reprendre et de recevoir de l’aide sous-terraine en ayant fait cesser le massacre provisoirement et sans s’exposer en première ligne (avec les risques de récupération en terme de chocs des civilisations qu’on pourrait se prendre en boomerang), c’est déjà pas mal…
Chouette ce blanc-seing de l’ONU. Comme mandat « spécial », il est flou à souhait!
Tiens, tient, on peut repenser à l’édito du Monde, qui m’avait tant énervé, et qui n’était pas pour rien dans mon précédent billet, « du mauvais usage de la diplomatie de perron« . Titre andouille, en plus, puisque je ne vois guère de bon usage d’une diplomatie qualifiée « de perron« .
Eh ben, nouvel edito du Monde. La résolution semble un peu leur arracher la gueule. Il faut donc la qualifier de « laborieuse » mais… :
Ben ouais. Donc, à tout hasard, la prochaine fois, on réfrène l’antisarkozysme réflexe, et on essaie d’analyser, mes ptits lapins.
LElfe a écrit : :
Oui, en effet. La Libye joue pas mal son coup, mais nous pouvons aussi tirer notre parti de ce cessez-le-feu. Et, une fois encore, l’objectif premier était bien d’éviter que nous assistions comme des cons de démocrates à un massacre en règle à Benghazi. Il semblerait que cet objectif soit en bonne voie d’être atteint, même si tout ceci est très temporaire et à prendre avec énormément de pincettes.
Je reviens sur le vote du Conseil de sécurité : les abstentions de la Chine et de la Russie ne sont pas étonnantes. L’abstention de l’Allemagne, pour des Français par exemple, fait mal (un parallèle Hitler -Khadafi qu’on ne peut évacuer). Surtout quand on a écouté (ce que je fis) les attendus prononcés au Conseil. Quant au Brésil son abstention est pénible (mais je n’en attends pas d’avantage de ce grand pays retors). Ce qu’on voit dans les déclarations d’abstention c’est un étalage indigne d’hypocrisie (vilain Khadafi, liberté chérie, blablabla et des menaces : attention attention aux conséquences). Ce n’est pas la première fois mais c’est réaffirmé « haut et fort ».
Enfin le succès de Sarkozy ne change rien à mon opinion : cet homme est dangereux (on ne gagne pas forcément au poker).
Les forces de Kadhafi savent qu’ils sont en ce moment très exposées et dès qu’ils tireront le premier obus ils vont se prendre une grosse bombe dans la gueule. A part la Green Mountain, qui est sous pavillon tricolore libyen, et le Tibesti, à plus de 2000 km au sud, la Libye est plate comme une crêpe bretonne (et à peu près de la même couleur) donc il n’y pas le moindre obstacle pour empêcher les tirs des missiles de la coalition multinationale envoyés depuis l’autre côté de l’horizon (vu du point de vue des libyens) de toucher leurs cibles.
Je crois qu’on pourrait même faire valoir qu’un cessez-le-feu implique un repli et donc un ultimatum pourrait être donné : vous reculez immédiatement ou on vous explose.
Koz a écrit : :
C’est pas ça qu’il faut dire, malheureux. Tu as reçu des coups de fil, plutôt 🙂
Plus sérieusement, et ce n’est pas pour faire ma mauvaise tête mais les quelques articles de Gil Mihaely sur la couverture médiatique anti-Khadafi sont assez troublants.
Etonnant pour Sarkozy d’avoir réussi à faire progresser la vision américaine sur le sujet Lybien.
Bon, les pays émergents ou qui sont sur une pente ascendante économique en ce moment jouent le drapeau blanc, parce que ce genre de tension, bon… c’est mauvais pour les affaires.
Je note avec amusement que ce qui était qualifié de mauvaise diplomatie, de perte d’influence de la France se conclut sur une bonne note.
Maintenant, c’est sûr on ne manquera pas de nous critiquer, de propager le soupçon de néo-colonialisme. Nous allons connaître, à un degré moindre certes, les rebuffades qu’on pu subir les Etats-Unis lorsqu’ils se mettaient en tête d’agir.
Comptons sur Le Monde, Libération, Rue89, Médiapart pour saisir toutes les bonnes occasions dans cette période nécessairement troublée qui s’annonce, pour critiquer l’action diplomatique ou militaire française, être à l’affût du moindre couac… Seront-ils majoritaires dans le pays ? j’en doute…
😉
Lib a écrit : :
Oui et non. Le fait que la Libye reste une terre de tribus ne change pas grand-chose à l’affaire.
Ses articles n’enlèvent rien au fait qu’il y a de fortes présomptions que la Libye s’apprête, ou s’apprêtait, à massacrer sa population civile :
Bref, il fallait manifestement en arriver à ce vote du Conseil de sécurité pour stopper l’armée de Kadhafi. Pour le moment, c’est ce qu’il prétend faire. Eh bien très bien. L’urgent était d’éviter un massacre.
@ Mone MENO:
On pourrait lâcher la grappe aux Allemands avec Hitler, si vous me passez la trivialité de l’expression? J’ai comme l’impression de n’avoir aucune difficulté à ne pas faire le parallèle, moi.
LElfe: +1. D’autant plus que la réticence traditionnelle des Allemands devant ce genre d’intervention est due à un pacifisme qui doit beaucoup à leur histoire. Ils n’ont définitivement plus envie de faire la guerre, notamment quand il s’agit d’aller la faire dans d’autres pays. On peut se moquer, mais certainement pas prétendre que c’est là une complicité entre dictateurs. C’est une accusation aussi gratuite que malsaine.
@ Gwynfrid:
E-XA-CTE-MENT
La position de l’Allemagne ne s’explique pas non plus par le pacifisme, parce qu’on peut voter pour cette résolution, en tant que démocratie opposée aux dictatures, tout en disant que d’après la tradition pacifiste de l’Allemagne moderne, on se refuse à y faire autre chose que du secours médical ou de l’assistance.
Mais là l’abstention désigne une opposition, car lorsque l’on n’a pas la position de veto au conseil de sécurité, on préfère voter non lorsqu’après consultation on estime qu’on ne serait pas majoritaire, il vaut mieux pour maintenir l’esprit de cohérence de ce conseil, poser l’abstention.
Le fait de ne pas trop s’investir dans la contestation permet de garder en réserve ses amitiés potentielles avec les autres, pour d’autres sujets qu’on juge plus important.
L’abstention est ici là pour marquer qu’on n’est pas d’accord avec la décision, mais comme on ne veut blesser personne, sachant qu’on est minoritaire, on signifie simplement qu’on ne veut pas participer à la décision.
Bon, c’est tout simple, il y a de plus grands liens économiques entre la Lybie et l’Allemagne (l’Italie aussi) qu’entre la France et la Lybie. Les autorités allemandes font simplement le pari que le Colonel Kadhafi se maintiendra dans un pays affaibli où il gardera sa capacité de contrôle sur des lieux et des affaires industriels qui concernent l’Allemagne.
Et ce n’est pas une critique des allemands, c’est simplement que leur intérêt national à un moment donné leur rend cette position plus facile.
Bon je sais que lorsque la France montre son intérêt national on est beaucoup plus sourcilleux. Il n’y a pas de raison ici de ne pas le faire remarquer. Pourquoi ferait-on deux poids de mesures et placerions nous l’Allemagne dans une position d’angélisme qui est absurde lorsqu’il s’agit d’affaires internationales ?
@ Thierry Lhôte:
Nul ne prétend que l’Allemagne a voté ainsi par pacifisme, ni ne conteste votre appréciation de l’abstention.
Mais pourquoi faut-il qu’après cette fine analyse, vous agitiez nettement moins finement le spectre d’Hitler?
La décision a été prise par opportunisme ou conformité à la real-politik, comme vous voudrez. So what? Agir en conformité avec son intérêt nationale, c’est du nazisme?
Si nous invoquons le pacifisme légendaire des Allemands, c’est parce qu’ilr eprésente bien l’état d’esprit des Allemands en règle générale, et la distance qu’ils ont pris et continuent à prendre avec le régime nazi, qu’on ne leur laisse pas oublier et dont ils s’éloignent toujours davantage pour s’en libérer enfin.
La prochaine fois que nous (la France) serons opportunistes, ce sera à cause de notre passé collaborationniste?
Désolé, mais il me semble dans mes propos que je n’ai pas parlé de nazisme, ni d’Hitler.
Je dis que ce sont des considérations économiques nationales.
L’Allemagne a tout autant le droit que d’autres pays de jouer sa carte stratégique.
Mais parler de pacifisme pour expliquer cette abstention, c’est prêter vraiment un angélisme ridicule à une décision bien prosaïque.
Donc je ne crois pas, bien entendu à l’explication nazi-machin-chose, ni à l’explication pacifisme-truc-muche, mais bien à des intérêts économiques nationaux.
Est-ce que vous pouvez comprendre cela ?
Au passage, je vous demanderais des excuses pour ce que vous avez écrit. Surtout de ne pas m’avoir lu, Surtout d’avoir voulu donner dans le Godwin dans un troll ce qui n’est que rarement mon cas. Et pour finir de m’attribuer des propos qui ne sont pas les miens ni en écrit, ni en pensée.
Calmons-nous, cher Monsieur.
Vous obtiendrez d’autant plus aisément les excuses en question que tout cela provient d’une redoutable méprise.
Mone MENO, comme vous le constaterez, écrivait : « L’abstention de l’Allemagne, pour des Français par exemple, fait mal (un parallèle Hitler -Khadafi qu’on ne peut évacuer). »
Je lui ai répondu de laisser Hitler où il est, c’est-à-dire vraisemblablement en enfer (sans préjuger de la chose, après tout je n’en sais rien).
M’appuyant, Gwynfrid a rappelé à Mone MENO le pacifisme des Allemands.
Et vous lui avez répondu que ce n’était pas du tout une explication à la résolution, nous accusant de faire preuve d’angélisme envers les Allemands en refusant de voir qu’ils agissaient dans leur intérêt national. Bref, si vous ne parliez pas de nazisme, vous aviez l’air de prendre le parti de ce cher Mone MENO à qui nous répondions.
De surcroît et au passage, je n’adhérais à cette évocation de leur pacifisme que parce qu’il est réel dans la population et pour nier ses assimilations scandaleuses à l’Allemagne nazie, pas pour expliquer par là l’abstention des Allemands. Je reconnais cependant à seconde lecture que Gwynfrid, lui, l’expliquait ainsi, et suis assez d’accord avec vos propos sur ce point.
J’ajoute à ma décharge que j’ai un léger souci d’affichage du blog, de sorte que je met de longues minutes à remonter le fil des commentaires si je souhaite les relire et ne vois pas bien le nom des commentateurs (qui s’affiche en très pâle). Je vous ai pris, vous m’en excuserez, pour Mone MENO… Ca m’apprendra à passer en vitesse sur ce blog entre deux dossiers…
Bref, les propos de Mone MENO sont sur ce point nauséabonds, ceux de Gwynfrid peut-être bien angéliques, et je retourne à mes dossiers!
Eviter le massacre, tout le monde souscrit à cette idée, mais ne nous illusionnons pas ne s’agit-il pas de gagner un peu de temps. Comment croire que quelques frappes aériennes vont résoudre le problème au fond ? Les Allemands ne sont-ils pas simplement sceptiques quand au succès réels de l’opération, c’est-à-dire l’installation d’un régime paisible en Libye ? L’analyse de affaire Afghane leur donne des arguments.
Et histoire de finir un mea culpa qui sied plutôt bien au vendredi de Carême qui vient de s’achever, j’aurais effectivement dû me rendre compte que la finesse d’analyse que je reconnaissais moi-même n’allais guère avec les propos de M. M. Finalement, je ne me suis pas bien sûre que vous me pardonniez cette méprise!
Je ne suis pas coutumière de ce type de précipitations (même si peu vous chaut, je me dois de le préciser), mettez cela sur le compte du surmenage (réel) et j’espère que l’incident sera clos.
Mille excuses à mon contradicteur ainsi qu’au Maître de ces lieux pour le squat de commentaires et, au passage, merci à M. M. d’avoir occasionné par ses propos trollesques (je ne sais s’il en est coutumier mais là, vraiment…) ma brève fureur!
Allons bon, voilà que deux commentateurs se réconcilient en se mettant d’accord pour me déclarer angélique. Me vlà frais. Quoique, mieux vaut être angélique que diabolique, je suppose.
Je vais le refaire autrement: Mme Merkel, qui est fort mal en point dans les sondages comme dans les élections récentes, ne tient pas à s’aliéner des électeurs qui font traditionnellement preuve d’une certaine allergie à l’envoi de troupes. Ça va là, pas trop angélique ?
Cela fait, vous pourrez peut-être nous expliquer sur quels faits vous vous basez pour estimer que le gouvernement allemand souhaite le maintien au pouvoir de Khadafi. Au passage, dois-je comprendre que le gouvernement français, lui, n’a aucun intérêt économique à défendre dans cette affaire ?
S’agissant d’une guerre tribale, je crains que si les insurgés l’emportent ils soient aussi sanglants que Khadafi une fois au pouvoir. Qui aura l’air malin alors ? Ne rien faire nous aurait rangés dans le camp des salauds, mais nous engager risque également de nous faire basculer dans ce camp. Je me demande si ces options ont été envisagées en haut lieu, je ne me pose même pas la question quant aux journalistes.
@ Gwynfrid
Ce qui prouve, si besoin était, qu’avant d’ « envoyer la patate », il faut y réfléchir à deux fois. Elle peut être chaude.
Angélique, c’est plutôt gentil, non? Et j’ai écrit « peut-être bien », pour ma part. Ce qui prouve que M. Lhôte était assez vite monté sur ses grands chevaux au mot de « pacifisme », tandis que je montais sur les miens au nom d' »Hitler ».
Etant donné le pacifisme des électeurs sur lequel nous nous accordons, l’intérêt de Mme Merkel était de ne pas se les aliéner et de sauvegarder ses positions en Libye.
Comme l’intérêt de M. Sarkozy était sans doute de réagir quelles que soient nos positions en Libye. Réjouissons-nous donc de ce que les intérêts bien compris de nos deux pays aient abouti au vote de cette résolution, et regardons donc ce qui se passe là-bas. Apparemment, le bruit des bottes résonne à Benghazi.
Résolution de l’ONU obtenue avec courage et détermination par la France : Kadhafi doit ordonner un cessez-le-feu ou la communauté internationale interviendra.
Kadhafi : D’accord.
L’Empire Américain : Mince en fait y a du pétrole en Libye ! Bon alors nous interviendrons pour défendre la démocratie, tout ça. Quoi ? La résolution de l’ONU ? On en a eu besoin pour envahir l’Iraq et détruire le christianisme irakien ? Bon donc voilà.
Ca me paraît compliqué d’invoquer des grands principes humanitaires pour justifier cette intervention. Kadhafi n’est pas le seul dictateur à faire tirer sur son peuple ces jours-ci – il va falloir se les taper un par un ? Evidemment non, mais si on invoque des principes universels (droit de l’H etc.), il faut ensuite les imposer universellement, sinon où se trouve la cohérence ? Embarras…
Il me semble qu’ici on a envie de se faire Mouammar, pour les raisons prosaïques que c’est une belle tête à claque de tyran, qu’on a un contentieux pas totalement réglé avec lui, et qu’en plus il est à la portée des armées européennes. D’autre part les intérêts immédiats de l’Europe sont visibles en Lybie ; sans doute moins au Soudan ou en Corée du Nord. Je ne pense pas qu’il faille douter des bonnes intentions gratuites des uns, mais objectivement, toute cette indignation et agressivité sélectives justifiées uniquement à coup de grands principes, c’est plus du théâtre à la BHL et autres indignologues.
Peut-être cependant est-ce le bon pari – Alea jacta est. (et je me serai bien référé à la DES de l’Eglise pour me faire une opinion, mais pour le coup toute la partie guerre & paix me semble béatement, iréniquement et confusément formulée, assez peu utile – je fais donc comme les Allemands : je m’abstiens par principe sur les principes invoqués, je soutiens prosaïquement pour le pari 🙂
@ Courlaïus
Demander d’une décision, non seulement qu’elle soit a priori la bonne eu égards aux circonstances, mais en plus que les motivations de ceux qui la prennent soient pures et que cette décision soit en parfaite cohérence avec d’autres décisions prises dans d’autres contextes, me paraît au mieux de l’enculage de mouches, au pire du pharisaïsme de la part de commentateurs dont les motivations et la cohérence dans leurs décisions quotidiennes n’ont rien à envier à celles de ceux qu’ils critiquent.
Mais de fait, un peu moins de rhétorique serait de mise.
@jean316
Khadafi semble avoir oublié une des composantes essentielles d’un cessez-le-feu: il a oublié de cesser le feu. Fallait-il rassembler une commision d’enquête pour vérifier les dires du régime libyen selon lequel les attaques d’aujourd’hui sur Benghazi et Misrata (par des blindés et des avions…) serait le fait « d’al Qaeda »?
Ce détail illustre bien pourquoi Khadafi va devoir donner de sérieux signes de bonne volonté avant que l’on considère son peuple en sécurité. Voire dégager, purement et simplement.
« On en a eu besoin pour envahir l’Iraq et détruire le christianisme irakien ? »
Ca commence à devenir assez désagréable cette « priorité » dans votre compassion pour les gens qui crèvent. Voire franchement répugnant.
jean316 a écrit : :
J’ai lu des thèses particulièrement farfelues sur les motivations américaines vis-à-vis de l’Irak, mais celle-ci emporte le pompon. J’allais dire « avec les honneurs », mais ce serait plutôt le contraire. Ce n’était pas la peine de nous sortir la notion de guerre juste: l’argument juste, déjà, ce serait un bon début.
Plus sérieusement, sur la politique américaine: il faut regarder aussi les motivations des uns et des autres. La France avait grand besoin de redorer son blason diplomatique vis-à-vis du monde arabe et des défenseurs de la démocratie. Au passage, il est habile de s’affirmer face aux Américains, tout en se faisant bien voir d’eux: on leur rend service en se mettant en première ligne, alors qu’ils ne sont pas encore sortis de leurs engagements en Irak et en Afghanistan qui ont consommé d’énormes ressources militaires, financières et politiques. Au passage, on efface une fois pour toutes le souvenir de la violente bisbille Bush-Chirac: la symétrie entre le discours de Juppé au Conseil de Sécurité, et la célèbre intervention de Villepin dans la même enceinte en 2003 n’est certainement pas due au hasard. Dans le même souffle, Sarkozy peut se présenter comme celui qui a obligé Obama à s’engager.
Du point de vue américain, Obama n’a pas si mal joué non plus: il a appliqué une pression, mais avec discrétion, obligé la Ligue Arabe à se mouiller politiquement avant de bouger, réaffirmé son engagement pour la démocratie, mais laissé d’autres prendre l’essentiel des risques militaires et politiques. Et il peut raisonnablement espérer l’élimination d’un ennemi de très longue date . Si quelqu’un se met à accuser les Occidentaux de colonialisme ou de vouloir récupérer le pétrole, ce reproche sera adressé d’abord à d’autres. Tout le monde est content.
Bonjour,
j’ai pensé et beaucoup dit ici que l’on avait trop traîné, et j’ai probablement eu tort. Alors que les premières salves viennent d’être tirées, nous nous trouvons maintenant dans une situation très favorable avec l’aval du conseil de sécurité, les américains engagés avec nous, les canadiens, les danois et même certains pays arabes. On critique assez les gouvernements pour signaler qu’Alain Juppé et Nicolas Sarkozy ont fait du bon travail sur ce dossier.
Les insurgés ont de plus suffisamment eu peur de l’arrivée des troupes gouvernementales pour nous soutenir sans ambiguïté. Et le faux cessez-le-feu avec bombardement de Benghazi a sans doute été l’erreur de trop pour le gouvernement libyen, puisqu’il a donné à tout le monde un sentiment d’urgence.
Reste maintenant à espérer que tout se passe bien, et que la fortune sera au côté de nos marins et de nos aviateurs qui, il ne faut pas l’oublier, risquent leur vie en opération. Au passage, je suis un peu inquiet de nos capacités de bombardement tant que les américains ne sont pas là: il faudra probablement des B52 et des missiles de croisière pour faire la différence sur une bataille au sol. Ou peut-être peut-on se servir de l’artillerie des bateaux.
Courtlaïus a écrit : :
La plupart des dictateurs ne tirent pas sur leur peuple. Mais même si on ne va pas partout, faire un exemple ne peut qu’aider les négociations dans d’autre cas. De plus, l’argument de la distance a une vrai légitimité: il est logique de commencer par faire le ménage dans notre arrière cour, ne serait ce que parce qu’il est plus facile de le faire.
S’il y a accord pour une intervention qui est, enfin intervenue, j’ai une analyse différente sur tout seul, avec quelques-uns ou avec l’ONU; de même sur l’absence de l’Europe: à qui la faute? Si vous le voulez, vous pouvez aller sur mon blog, ce billet a été écrit le 18 http://direetredire.unblog.fr/2011/03/18/aucune-action-militaire-nest-supportable-mais/
Le NYT rapporte que selon certains diplomates, l’attaque aurait été différée jusqu’à samedi du fait de l’insistance des Français de tenir une réunion hier. La diplomatie française dément.
http://www.nytimes.com/2011/03/21/world/africa/21libya.html?_r=1&hp
Logopathe a écrit : :
Je n’y crois pas un instant évidemment. Comme si l’on avait voulu tirer les premières salves juste au moment idéal pour les élections.
Pourrait-on éviter de retomber mécaniquement dans une polémique politicienne nationale ? Que la réunion se soit tenue ou non, est-ce que cela a vraiment une influence sur des cantonales ? Si Sarko devait tirer parti de son action internationale vis-à-vis de la Libye, les électeurs avaient-ils vraiment besoin de cette réunion pour relever son implication ? En l’occurrence, les résultats de ce soir ne tendent pas à attribuer une grande influence de la situation internationale sur les cantonales ? Alors, ne peut-on pas penser surtout qu’il s’agissait de montrer que la France était en première ligne et qu’elle prenait des initiatives ? Ok, c’est Sarko, alors ça ne plaît pas à tout le monde. Mais cessons de dire que l’on veut que la voix de la France porte si, quand elle porte, on préfère s’abîmer en polémiques politiciennes. A Benghazi, la population porte le drapeau français et remercie la France, et j’avoue que c’est une image qui me plaît.
Je ne sais pas du tout quoi penser de l’info en soi, je la relayais juste parce que je ne l’ai pas lue dans les médias français. Il se peut qu’il s’agisse seulement d’un renvoi mutuel de responsabilité pour le retard de l’intervention, qui a permis à Khadafi de commencer à entrer dans Benghazi. Je dois dire que je n’avais absolument pas pensé aux cantonales, et je doute qu’elles aient joué un rôle quelconque dans l’affaire.
Maintenant que chacun s’accorde à reconnaitre que la France a joué un rôle déterminant , commence à surgir l’idée que finalement le moteur serait Juppé .Ou je fais dans la paranoia ou force est de reconnaitre que le travail de sape au quotidien est magistralement fait par des journalistes créatifs
Les insurgés eux mal briefés ont remercié Sarkozy , que c’est bête !
@ Logopathe: certes. Il ne faut pas oublier, non plus, que le NYT est pro-Obama, et a toutes les raisons d’attribuer le mérite (même si c’est un peu déplacé comme terme, et plutôt anticipé) de l’intervention à Obama et que, par ailleurs, on peut compter sur les Américains pour s’agacer encore des prétentions françaises à compter dans le monde.
Cela ne signifie pas que tout soit inexact, mais ça m’incite à relativiser et ce, d’autant plus que les US ont été pas mal en retrait sur la Libye, ce qui n’était d’ailleurs pas une mauvaise idée, mais je trouve malvenu d’affirmer ensuite que ce soit la France qui retarde les évènements.
Bon point pour Sarkozy dans cette affaire, incontestablement. La France a été à la pointe et a su convaincre ses partenaires. Bien joué ! (même si tout est loin d’être réglé en Lybie).
Est-ce que Sarkozy va tenter de surfer sur cette réussite de la diplomatie française sur la scène nationale ? Bien sûr et ce n’est pas vraiment étonnant, n’importe quel dirigeant ferait la même chose, surtout s’il n’a pas grand-chose d’autre à quoi se raccrocher et s’il n’en finit plus de plonger dans les sondages. En tout cas, je préfère qu’il surfe là-dessus que sur les thèmes du FN (avec les résultats que l’on sait aux cantonales, débouchant sur une consigne de vote nationale hallucinante !).
Pingback: France : le rendez-vous Libyen « J'ai rarement tort …
Quand on envoie des concitoyens risquer leur peau :
1) sur un autre continent 2) là où les intérêts vitaux de la France ne sont pas en jeux
3) pour éventuellement donner la mort à des types qui se trouvent du mauvais côté de la rivière..
ça vaut le coup de martyriser quelques insectes auparavant. Histoire d’éviter ensuite d’avoir à expliquer la notion d’enculage de mouches aux proches des militaires français qui auront éventuellement sacrifié leur vie dans cette histoire (rappelons que les militaires français sont des soldats, non des mercenaires ; on ne les paye pas pour risquer leur vie dans des aventures irréfléchies).
Bref, réfléchir à faire en sorte que le remède ne soit pas pire que les maux qu’il est censé guérir est tjs une bonne chose – ne serait-ce que pour éviter les couillonnades comme au Kosovo, où l’Occident n’a réussi qu’à mettre en place en régime maffieux, fortement soupçonné de trafic en tous genres. Au prix de qqs massacres de civils, soit dit en passant.
Oui, la reflexion est nécessaire… plus je me renseigne et en apprends sur la Libye,
plus je me dis que notre conception de la démocratie est étrangère à ce peuple,
et que nous ne réfléchissons pas comme eux. Dites-moi si je me trompe à ce point.
Bien sûr, beaucoup de jeunes hommes on bien compris les enjeux, comme ce jeune bloggeur
qui couvrait les événements ; hélas : il vient de se faire tuer. Je suis persuadé que beaucoup souhaitent
plus de libertés ; mais la majorité, la masse, je doute qu’elle y soit sensible,
prise dans les habitudes claniques de soumission à une structure tribale avec ses chefs et ses lois.
Ce qu’ils veulent, c’est un chef fort qui impose sa présence ; et s’il est riche ou très riche et
puissant, c’est vu comme la confirmation de son statut de chef de tribu : il est donc légitime.
Le sursaut pour changer ces structures mentales me semble tellement énorme à faire, que je vois mal
ce qui peut les changer en quelques années.
Ou alors c’est le frémissement, et la route est encore longue ; mais dans un monde qui évolue
à une vitesse jamais vue, avec des enjeux économiques, techniques, sociétaux urgents à résoudre,
ont-ils le luxe de prendre 1 ou 2 siècles pour atteindre une organisation de société qui protège
les plus faibles, incite les plus entreprenants, et établit des relations internationales fructueuses ?
j’ai l’impression que cette violence résulte de leur constat inconscient qu’ils ne rattraperons pas
l’histoire qui court devant eux.
Et puis je m’étonne de la réaction de Poutine, de la ligue arabe…, qui, après 24H, dit son opposition
aux actions militaires.
Ils ne savaient pas que l’interdiction aérienne passerait par la destruction des défenses aérienne ?
ils croyaient que des tracts appelants les mercenaires à la modération et à la charité suffiraient ?
ou en appeler à la conscience de Muammar ? je tombe des nues, là…
entre parenthèses, quand je vois cet homme, je vois la reviviscence de Mahomet : ignare, cupide et violent,
dont le but est de rassembler et tenir sous sa coupe le plus d’Arabes possibles, afin créer un système
lui permettant de maintenir son emprise, en désignant l’ennemi : le christianisme.
J’espère que nos dirigeants savent ce qu’ils font, mais parfois j’en doute ; bien sûr qu’il faut empêcher
les massacres de civils, mais quand on aura remis les forces en présence à égalité de nuisance réciproques,
on fait quoi ?
Jamais je postulerais pour le rôle de chef d’état …
Serge a écrit : :
Je ne comprends pas que vous vous permettiez d’insulter ainsi le Prophète de 1,3 milliards de personnes.
La stratégie de Kadhafi, qui est loin d’être idiot, consiste à démontrer à la population arabe que l’attaque de la coalition, essentiellement occidentale, est une croisade chrétienne en terre musulmane.
Le commentaire de Serge (haineux vis à vis des musulmans) et relevé par Yogui, dans la mesure où il est publié sur un blog défendant le catholicisme, me semble donner des arguments à cette thèse, alors j’aurais préféré ne pas le lire.
Je m’interrogeais plus haut sur l’étonnant but de guerre que se donnait le gouvernement français en exigeant le « retrait des forces libyennes ». J’avais compris qu’on invitait celles-ci à se faire interner (en Tunisie ? au Tchad ? en Egypte ?), telle l’armée de Bourbaki passant la frontière suisse en 1871. J’avais mal compris. On presserait seulement les troupes kadhafistes de rentrer « chez elles », c’est-à-dire « dans leurs casernes ».
Ensuite, les Libyens seraient invités à « se parler ». Autrement dit, l’Etat français ayant reconnu le parti insurrectionnel comme seul pouvoir légitime en Libye, on demanderait à ce dernier de discuter avec Kadhafi qui, si nous comprenons bien, est donc officiellement devenu le rebelle, mais à charge pour celui-ci de ne plus faire sortir ses forces de leurs « casernes », afin d’éviter « des tueries ».
Remarquezx, tenir en France le « front républicain », ou le contourner par un audacieux mouvement tournant (plan Schlieffen-Coppé), n’a pas l’air plus simple.
Source : http://www.marianne2.fr/blogsecretdefense/
@ Serge : votre commentaire sur Mahomet est tout à fait déplacé. Dans la mesure où il y a été répondu, je ne le modère pas, mais je vous remercie de faire plus attention à vos propos.
Hervé a écrit : :
Il fallait pas la chercher bien loin, cette stratégie. C’est bien la raison pour laquelle la France s’est efforcée d’impliquer au maximum les pays arabes. Quant à la population arabe, elle semble, au minimum, divisée sur le sujet.
Hervé a écrit : :
Considérer qu’une ânerie sur un blog puisse renforcer la position de Kadhafi me semble pour le moins hasardeux.
Jeff a écrit : :
Bonsoir,
ce n’est pas le sujet, mais il me semble que les arguments de l’UMP méritent au moins d’être évoqués, à savoir:
– qu’il ne s’agit pas d’élections si importantes que cela, et que quelques conseillers généraux FNs ça et là ne nuiront pas spécialement à la démocratie française (contrairement par exemple à un second tour d’élection présidentielle);
– que les insultes systématiques de certains socialistes envers Nicolas Sarkozy les excluent de fait d’un quelconque pacte républicain.
Tout ceci sans ouvrir le sujet de l’alliance du PS avec le PC, un parti au moins aussi chargé historiquement que l’extrême droite française.
Koz a écrit : :
Il parait aussi que l’armée égyptienne arme massivement les rebelles.
Je ne fais pas mien le commentaire de Serge, faute de connaissances suffisantes, mais il me semble néanmoins tout à fait essentiel dans un pays libre que l’on puisse se permettre « d’insulter ainsi le Prophète de 1,3 milliard de personnes ». Si on pense que 1,3 milliard de personnes vénèrent une erreur, il doit être possible de le dire – quitte à ce qu’on nous démontre le contraire, ou une partie du contraire. Il fut un temps où des dizaines de millions d’Européens respectaient le droit de l’Eglise à nous dire ce que nous avions à faire de notre quéquette, entre autres. Il est heureux, finalement, que certains se soient permis d’insulter notre propre prophète. C’était excessif, mais il fallait en passer par là.
Il n’y a pas de liberté de conscience sans blasphème.
Ceux qui veulent se fritter autour du débat : « l’islam est-il compatible avec la démocratie? », que Koz ne semble pas avoir très envie d’accueillir ici, peuvent aller jeter un coup d’oeil sur les commentaires qui suivent ce toujours excellent billet de Philarête :
http://lescalier.wordpress.com/2011/02/27/les-hirondelles-de-tunis/#more-1359
On y joue un remake du « Bon, la Brute et le Truand », avec le Coran à la place du magot, au milieu d’un carré musulman.
(Désolé, Koz, pour ce trolling indélicat. Mon but est simplement de vous aider à vous défaire de certains fâcheux..)
Après avoir fait observé à Jean 316 que la doctrine sociale de l’Eglise ne condamnait pas nécessairement et de manière évidente le type d’intervention engagé en Libye, l’honnêteté intellectuelle m’oblige à faire part de l’opposition du Nonce apostolique en Libye aux bombardements engagés.
http://www.zenit.org/article-27353?l=french
Erratum : Mgr Martinelli est « vicaire apostolique » de Tripoli et non pas nonce.
Pour vous ! http://ca.wikipedia.org/wiki/Jos%C3%A9_Antonio_Aguirre_i_Lecube
Physdémon a écrit : :
Un Vicaire apostolique qui n’est pas suicidaire, quelle surprise !
Le commentaire sur Mahomet ne construit rien dans le cadre de cette discussion, il y était donc déplacé.
Le blasphème doit être légal, mais une personne responsable doit se l’interdire. Par ailleurs il est probablement imprudent de chercher à décrire le caractère de Mahomet : la critique du texte de Coran, l’histoire de sa rédaction et les, rares, trouvailles archéologiques que l’époque posent très sérieusement la question de l’existence même de Mahomet.
julio a écrit : :
Moltes gràcies, però no comprenc, on és la informació ?
(Merci beaucoup, mais je ne comprends pas, où est l’information ?)
A Aristote,
Je ne crois pas que l’intervention du vicaire apostolique (équivalent d’un évêque) s’explique par les motivations que vous semblez lui prêter.
En revanche, que ce soit un vicaire apostolique et non un nonce qui s’exprime est peut-être significatif. Le vicaire est d’abord un pasteur: il exerce sur les fidèles la fonction d’un évêque. En revanche, un nonce est un interlocuteur diplomatique auprès d’un État, l’équivalent d’un ambassadeur. D’un côté le pouvoir spirituel, de l’autre le pouvoir temporel.
Or, contrairement à ce qui s’est passé dans plusieurs cas antérieurs (par exemple les deux guerres du golfe ou l’intervention au Kosovo, que le Vatican avait désapprouvées clairement et fermement), la diplomatie vaticane est restée discrète jusqu’à maintenant sur l’intervention en Libye.
Cela ne veut pas dire qu’elle l’approuve. Mais cela veut sans doute dire qu’on n’est pas confronté à un cas contredisant de manière flagrante ce qu’enseigne la doctrine sociale de l’Église… En revanche, il est normal que l’évêque local, parlant pour ses ouailles, déplore les violences auxquelles elles se trouvent exposées et appelle à une issue diplomatique rapide du conflit.
C’est la deuxième chose que je voulais faire observER, sachant qu’évidemment mes analyses ne sont pas forcément beaucoup plus fiables que mon orthographe…
@Aristote:
Ca c’est rigolo…
« Le blasphème doit être légal, mais une personne responsable doit se l’interdire. »
Et juste après:
« la critique du texte de Coran, l’histoire de sa rédaction et les, rares, trouvailles archéologiques que l’époque posent très sérieusement la question de l’existence même de Mahomet. »
Comment pensez-vous qu’un musulman prendra cette assertion?… C’est le pire des blasphèmes que vous venez d’énoncer…
Ce n’est pas le blasphème que vous souhaitez qu’un individu responsable s’interdise, c’est l’insulte… Et là je suis plutôt d’accord, l’insulte n’est généralement pas constructive. Sauf si on a en face de soi quelqu’un de suffisamment mature pour en retirer quelque chose, ce qui est rarement le cas.
Aristote a écrit : :
Très juste. Une société saine interdit peu mais ses membres s’interdisent beaucoup. Notre société tourne le dos à ce modèle : le domaine de ce qui est interdit s’étend (sous l’effet de l’omniprésence de l’Etat) et le domaine de ce qui est « mal vu » diminue (sous l’effet de l’érosion des valeurs morales traditionnelles). Ainsi la zone grise, le domaine de la libre conscience, ce qui est autorisé mais non recommandé tend à se réduire comme peau de chagrin.
Pardon pour ce HS.
à Aristote, Lib et Logopathe,
Puisque vous parlez « blasphème », je ne peux m’empêcher de vous renvoyer à l’analyse qu’en a fait Philarête dans un commentaire du blog d’Aliocha, à propos de John Galliano:
Extrait :
« À mon avis, les propos de Galliano relèvent d’une logique du blasphème. Je veux dire: quand on veut vraiment déverser sa bile, emmerder les gens, dire au monde qu’on s’en moque, on fait quoi, depuis que l’humanité existe? On transgresse. Deux options. Le combat singulier: je veux vous humilier, vous faire sortir de vos gonds. Je m’en prends à votre maman en lançant des hypothèses sur sa profession. Deuxième option: la haine du monde en général. Là, pas trop le choix. Il faut s’en prendre au bon Dieu, à l’harmonie cosmique, aux vérités éternelles. Histoire de dire qu’on n’est pas solidaire de ce monde de merde. Problème: le bon Dieu, Jésus, les sacrements, tout le monde s’en fout. Alors si on veut blasphémer, y a plus qu’une solution: attenter aux tabous suprêmes. Donc: dire qu’on est fan de Hitler, et d’une façon générale, dire, le plus fort possible, tout ce qui est interdit — vraiment interdit. Galliano a blasphémé, normal c’est comme ça exactement qu’on se défoule. Et la preuve que c’est bien un blasphème, c’est que toutes les autorités chargées de veiller sur les valeurs suprêmes lui tombent dessus. »
C’est le com. 69 du billet ci-dessous :
http://laplumedaliocha.wordpress.com/2011/03/01/faut-construire-des-prisons-a-cons/
Pas si facile de construire un ordre social tolérant le blasphème… Aristote déconseille le blasphème mais blasphème aux yeux des musulmans. D’autres croient tolérer le blasphème mais jugent normal de réprimer les propos racistes ou antisémites… Le blasphème toléré, c’est d’abord le blasphème des valeurs des autres. Voilà le hic…
@Physdémon: Voilà qui est fort bien dit, et par Philarète et par vous. J’ai exactement la même analyse pour Galliano.
@Serge
Le bombardement de blindés et de transports de troupe, c’est aussi pour l’interdiction aérienne?
Hervé écrit:
D’un autre côté, al-Qaeda a appelé au renversement de Kadhafi, ce qui limite sa capacité de faire prendre des vessies pour des lanternes.
Lib écrit:
Est-ce le même Lib qui regrette régulièrement que le l’hétérophobie soit « mal vue ». C’est troublant.
@ Koz, à tous,
C’est vrai que cette phrase m’a échappé, et qu’à la relecture, je ne l’aurais pas laissée ;
réelle ou supposée, la vie du modèle n’était pas le sujet.
Je ferai attention à l’avenir, car je ne souhaitais pas provoquer un frittage, bien sûr.
@ Physdémon
Ce qui me trouble ici, c’est que vous laissiez aux musulmans le soin de définir le blasphème. En ce qui me concerne, seul un chrétien peut blasphémer le Dieu des chrétiens, et seul un musulman peut blasphémer Allah ou Mahomet. Quelqu’un qui est extérieur à une foi ne peut blasphémer l’objet de cette foi. Il peut insulter les croyants, mais il ne peut blasphémer.
Peut-être les musulmans pensent-ils autrement, c’est leur problème, et ce serait un vrai problème. On n’a pas attendu Aristote pour poser la question de l’historicité du Mahomet de l’Islam. Il a peut-être existé un chef de guerre nommé Mahomet au début de la conquête arabe, mais il existe une thèse assez solide qui tient que le gros du Coran lui était très antérieur, sous la forme d’un argumentaire développé par une secte judéo-chrétienne devenue arienne. Et c’est bien après la disparition de ce Mahomet éventuel que cet argumentaire aurait été remanié comme légitimation des nouveaux maîtres arabes.
C’est une thèse, elle peut être discutée, mais il serait inconcevable qu’on ne puisse en discuter parce qu’elle constituerait un « blasphème », alors qu’on trouve normal, et je trouve normal, que l’on discute de l’historicité de Jésus et de celle de ses paroles telles que rapportées dans les Évangiles, etc.
@ Serge:
J’ai comme l’impression que les commentaires de ce post auront donné l’occasion à beaucoup de présenter des excuses.
@ Aristote:
Je vois d’ici le nombre de citations étranges d’Aristote sur le blasphème que l’on retrouvera un jour, peut-être, dans les copies du bac ou les livres de BHL. Parce qu’en consultant Saint Google, on aura trouvé : « Aristote a écrit : Le blasphème doit être légal, mais une personne responsable doit se l’interdire. »
@ LElfe:
Être cité par BHL, c’est mon Graal !
Gatien a écrit : :
C’est aussi ce qui limitera notre joie lors de son renversement s’il a lieu.
Gatien a écrit : :
Que vous soyiez troublé, voilà ce qui me trouble. Votre perplexité me laisse perplexe. Si vous aviez saisi le sens de la phrase que vous citez (ce dont je ne doute pas mais l’autre option étant la mauvaise foi, je vous laisse donc le bénéfice du doute), tout ceci vous apparaîtrait pour ce que c’est : cohérent.
Sans entrer dans la polémique de fond, je me permets de simplement mettre en exergue ladite cohérence du raisonnement de Lib.
Le domaine de ce qui est mal vu diminue sous l’effet de l’érosion des valeurs morales :
L’homosexualité était mal vue.
L’érosion des valeurs morales conduit à l’accepter et surtout, à l’intégrer à la norme sociale (je ne connais pas la position de Lib sur ce point et ne sais donc s’il réprouve l’homosexualité – choix individuels – ou les choix sociaux que l’on cherche actuellement à faire passer – c’est très différent)
Sous l’effet de cette érosion, le domaine du « mal-vu » diminue.
Vosu prenez le problème à l’envers : mal voir l’ « homophobie », c’est mal voir l’interdit. Comme interdire d’interdire. Cette prohibition de l’homophobie étant une prohibition de l’interdit, ce qui n’est donc nullement incohérent avec les propos de Lib suscités.
(Sans se prononcer sur le point de savoir si l’interdiction de ce qu’on appelle l’homophobie ne recouvre pas, comme celle du racisme, une police de la pensée et des moeurs qui réprime bien plus que les laides réalités qui ont justifié ladite interdiction. Combat liberticide pour la « liberté »).
Pensez-vous que les interventions de la coalition seront conformes à la résolution de 1973?
@ Aristote:
Sacré Graal!
@LElfe
« Hétérophobie » désigne le rejet de qui est différent, pas à une orientation sexuelle. J’ai promis d’utiliser ce terme à la place de « racisme » (https://www.koztoujours.fr/?p=11410).
Donc je reprends:
Le racisme était mal vu
L’érosion des valeurs morales conduit à l’accepter et surtout, à l’intégrer à la norme sociale
C’est très vrai.
Je vous laisse le soin de définir la différence entre les « ce qui est mal vu sur la base de valeurs morales », et la « police de la pensée et des moeurs »… Pour moi c’est la même chose. Or, Lib (et vous aussi semble t’il) dénonce régulièrement la réprobation morale qui entoure le racisme (ou disons, l’hétérophobie…).
« Donnez, et vous recevrez : une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera versée dans votre tablier ; car la mesure dont vous vous servez pour les autres servira aussi pour vous. » Luc 6,36-38
Les musulmans respectent Jésus, alors chaque chrétien doit respecter Mahomet.
Cette posture de principe, n’interdit pas de critiquer et de combattre les actes contraires aux valeurs chrétiennes commis à cause d’une interprétation particulière du Coran, texte qui comme L’Evangile a été rédigé sans voyelles, (donc sujet à interprétation) bien après la mort de son inspirateur.
@Aristote: en somme, vous avez une définition chrétienne du blasphème, et vous voulez l’imposer aux musulmans! Impérialiste!
En tout cas c’est comme ça que risquent fort de le prendre les autorités pakistanaises, à l’issue de votre conférence sur Mahomet à Karachi.
Logopathe a écrit : :
Pas vraiment. Blasphémer, au sens strict, c’est vouloir insulter Dieu, ce qui suppose, au minimum, de croire au Dieu que l’on veut insulter.
Cette définition est logique, elle n’est pas chrétienne en tant que telle.
Elle est logique en mettant l’accent sur la subjectivité. Mais la définition objective a sa logique aussi. Vous aurez beau expliquer au croyant que pour vous, il n’y a pas blasphème puisque vous ne croyez pas, il croit, lui, et son Dieu est offensé. Il doit le défendre. C’est tout aussi logique.
@Gatien,
Franchement, votre néologisme « hétérophobie » n’apporte que de la confusion.
Pour le reste, il n’y a pas de contradiction. Je trouve très bien que la xénophobie soit « mal vue », tout comme la jalousie, l’égoïsme, l’hédonisme ou nos autres petits et grands travers. Ce qui me déplaît, c’est que la réprobation spécifique de ce travers particulier ait atteint de tels sommets qu’elle interdit tout débat contradictoire et qu’elle a quitté le domaine social pour entrer dans le domaine juridique. Et c’est très précisément ce que je dis dans le commentaire que vous reprenez plus haut.
Le jour où on collera au tribunal les gens qui regardent dans l’assiette du voisin, qui refusent de partager leur casse-croûte ou qui baisent avec trop de partenaires différents, j’aurais la même position.
@ Hervé
Hum ! L’Evangile, dites-vous, a été rédigé sans voyelles ???? Cela m’étonnerait beaucoup étant donné qu’il a été écrit en GREC et qu’écrire le grec sans voyelles relève de l’exploit…
En revanche, il est vrai qu’une grand partie de l’Ancien Testament (tout, peut-être) a effectivement été écrit au départ sans voyelles, mais en HEBREU.
Quant au parallèle : « les musulmans respectent Jésus, alors chaque chrétien doit respecter Mahomet », il me laisse dubitative. Entre Jésus qui donne sa vie pour sauver le monde, et Mahomet qui use et abuse des armes pour étendre sa domination, il y a une petite différence, non ? L’un est vraiment respectable (et d’ailleurs généralement respecté par nombre d’incroyants), quant à l’autre, à chacun de voir. En revanche, il est évident qu’il faut respecter les croyants musulmans.
Logopathe a écrit : :
C’est tout aussi logique,… si vous refusez la liberté religieuse et la liberté de conscience.
Le vrai problème n’est pas le « blasphème ».
@ Gatien:
(Je viens de vous écrire une réponse qui vient de passer à la trappe. Dommage. Reprenons en moins inspiré.)
Au temps pour moi. Deux fois en une semaine, c’est fabuleux. Vous ne me croirez plus quand j’écrirai que je ne suis pas coutumière du fait. Je songe donc sérieusement à essayer de passer mes nuits ailleurs qu’au cabinet. D’ailleurs, un doute me saisit : de quoi mes derniers mémos sont-ils truffés??? Argh.
Reprenons donc sur l’hétérophobie. Qui, comme la phobie, consiste dans le rejet de quelque chose, ce qui fait que le raisonnement tient (si, si, vous allez voir. Je compte sur la solidité de la branche).
D’où tenez-vous que le point de départ du raisonnement serait « le racisme était mal vu »?
Reprenons donc en choeur, voulez-vous?
La différence était mal vue. (Ben oui. Racisme institutionnel, antisémitisme d’Eglise, bla bla bla)
L’érosion des valeurs morales a conduit (selon votre citation de la pensée de Lib) à accepter cette différence et à faire produire à ce principe d’acceptation certains effets désapprouvés par ledit cité. Cette évolution s’oppose de plus en plus à l’hétérophobie (j’imagine que c’est plutôt là que le bât blesse, mais je n’entre pas dans votre débat que je n’ai pas le temps de me farcir, soyons francs).
L’évolution (qualifiée d’érosion des valeurs morales) a donc conduit à faire reculer le « mal vu » pusique ce qui est mal vu, c’est de mal voir.
Dès lors que l’on a un terme en « phobie », mal voir le concept qu’il désigne consiste à promouvoir ce qui précède cette terminaison.
Le raisonnement est le même que pour l’homophobie, CQFD.
Bien évidemment, je ne sais pas si Lib considère l’érosion morale comme étant en cause lorsqu’il s’agit d’une « hétérophobie » qu’il trouverait injustement mal vue, mais je ne vois pas d’incohérence dans la structure. (Le lien était plus simple avec l’homophobie.)
La seule chose qui demeure mal vue, c’est de mal voir ; d’être « contre ». Quel que soit ce contre quoi on serait. Plus que mal vu, c’est interdit (voir les lois mémorielles, les procès pour racisme à tort et à travers, etc.). Il est interdit d’interdire et tout le monde est contre le fait d’être contre : vous êtes sommés de faire de même.
Je cite Lib : « Ainsi la zone grise, le domaine de la libre conscience, ce qui est autorisé mais non recommandé tend à se réduire comme peau de chagrin. »
Pour répondre à votre question :
les valeurs morales condamnent des comportements qu’elles estiment mauvais. Elles posent le bien et le mal (dont on peut dicuter, mais elles posent ces pôles en vertu desquels elles autorisent ou interdisent). C’est en caractérisant ce qui est bien ou non, et en choisissant ou non de le choisir, que l’individu exerce sa liberté.
la pensée unique actuelle, c’est l’hypocrisie orwellienne. On n’interdit rien, sauf d’entraver la liberté d’autrui. On l’entrave en posant les idées de bien et de mal. Le bien et le mal sont définis par chaque individu, personne n’a le droit d’en juger pour autrui. Poser quelque chose comme bien ou mal, c’est mal! Et c’est le seul mal qui reste admis (à quelques exceptions près, c’est-à-dire les trucs vraiment dégueulasses, qui sont honnis par tout un chacun). Le plus drôle, c’est que pour les quelques trucs qui sont interdits, nul n’a le droit de constester que c’est mal ou de se défendre et nul pardon n’est possible : celui qui transgresse est le diable, la peine de mort c’est trop peu. La pensée unique au nom de la liberté, ça m’amuse. Parce que je n’aime pas pleurer.
Bizarrement, je préfère la morale avec la rédemption que l’absence de morale sans pardon.
Lib a écrit : :
PS: je préfère prévenir, je répondais au raisonnement de Gatien. Qui travestissait la pensée que vous exprimez ci-dessus. Laquelle, malgré ce travestissemnt, restait cohérente, je persiste.
« C’est tout aussi logique,… si vous refusez la liberté religieuse et la liberté de conscience.
Le vrai problème n’est pas le « blasphème ». »
Mais si, justement. La logique de la dénonciation du blasphème est opposée à celle de la liberté de conscience.
On peut continuer longtemps comme ça…
@ Lib
Même si je ne vois plus bien le rapport avec le sujet de départ, je ne crois pas que l’on puisse mettre la jalousie ou l’égoïsme sur le même plan que la xénophobie. Non, la xénophobie n’est pas seulement l’un de nos petits travers largement partagés. La xénophobie ou le racisme (qui va souvent avec), surtout quand il devient « collectif » (c’est plus difficile de tirer dans le même sens en agrégeant des jalousies ou des égoïsmes individuels), a toujours été un poison qui porte en germe le crime ou la guerre. L’enjeu est spécifique et majeur en termes de cohésion sociale, de « vivre ensemble », d’image de notre pays, de dynamisme économique et culturel, etc. Dans nos sociétés ouvertes d’aujourd’hui, cela devient en plus une tare complètement « anachronique », en plus d’être un « mauvais sentiment ».
Alors oui, il faut lutter sans concession contre le racisme et la xénophobie (difficile de faire de même avec la jalousie ou l’égoïsme). Est-ce qu’il faut pour cela des lois, des délits, une pénalisation ? Et si oui, à partir de quand ? J’avoue que mon avis n’est pas complètement tranché sur le sujet. Dans une société idéale, sans doute pas. Mais dans notre société telle qu’elle est, ces lois ont au moins une forte de valeur de pédagogie, pour les jeunes générations et pour les « brebis égarées » (que l’on trouve parfois jusque sur les bancs du gouvernement). Elle marque une limite, un tabou, indispensable (quand on voit comment certains « libèrent leur parole » nauséabonde dans ce contexte contraint, on frémit à l’idée de ce que cela pourrait donner si la loi ne posait pas des limites). Mais j’admets que tout cela peut se discuter, car il s’agit aussi d’une restriction de la liberté d’expression…
Par contre, considérer la xénophobie juste comme un petit travers personnel largement partagé, non, non et non.
Quant à nos politiques, s’ils doivent clairement répondre aux problèmes posés par l’immigration, ils ne devraient pas, à mon avis, flatter les bas instincts de la population, même pour être élus. Il y va de leur responsabilité et, je pense aussi, de leur honneur.
@LElfe
Ah, oui, vu comme ça on peut considérer que l’antisémitisme se perd à cause de l’érosion des valeurs morales. C’est cohérent.
@ Gatien:
Bah oui, vu comme ça c’est cohérent. Et comme c’est ce que vous attribuiez comme pensée à Lib, j’ai gagné mon pari de vous en démontrer la cohérence, non?
Trêve de plaisanteries (mon humour ne semble pas très compris. Je dois avoir un côté Achille Talon) : des fois que vous tentiez de faire passer ceci (« l’antisémitisme se perd à cause de l’érosion des valeurs morales ») pour mon opinion personnelle, et donc de m’embastiller sur le champ, je vous renvoie à ce que j’ai écrit, j’ai mis pas mal de précautions de langage, non?
Je vais m’auto-citer : « L’érosion des valeurs morales a conduit (selon votre citation de la pensée de Lib) ». Voir la partie entre parenthèse. Ou comment TENIR UN RAISONNEMENT PAR L’ABSURDE (celui que vous attribuiez à Lib, apparemment au prix de quelques amalgamessi j’ai bien lu sa réponse) pour montrer sa cohérence rhétorique (que vous remettiez en cause), ET NON SE L’APPROPRIER ou le justifier au fond. Bref.
Je veux bien réexpliquer (j’ai comme l’impression que vous m’avez prise au mot) mais je pense que ça va lasser.
Vous prétendez que Lib promeut l’hétérophobie et s’émeut de ce que celle-ci serait mal vue.
Et vous trouvez ça incohérent avec le fait de dire que ce qui est mal vu diminue avec l’évolution des moeurs.
En un mot (maintenant) comme en cent (ci-dessus) : si l’évolution des moeurs (que l’on qualifie ou non d’érosion des valeurs morales) conduit à mal voir une « phobie » quelconque, c’est bien qu’elle est plus permissive, donc que ce qui est « mal vu » diminue. C’est le fait de « mal voir » qui est mal vu. Donc la contradiction que vous releviez n’est qu’apparente.
Le raisonnement était donc EN STRUCTURE cohérent et ça m’amusait juste de le relever, pour le plaisir de la rhétorique. Si vous l’interprétez au-delà, je maintiens mon accusation de mauvaise foi, mon cher. 🙂
Il se trouve que Lib semble également ne pas estimer qu’il soit mauvais de « mal voir » l’hétérophobie définie à votre sauce. Donc la question de la cohérence, hormis rhétoriquement, ne se pose même pas.
Il semble au contraire nous dire que cela rentre dans les choses interdites (par la loi) et non plus « mal vues » (par la morale), ce qui restreint le champ de la liberté individuelle. On peut être d’accord ou non sur le fait que ça doive être sanctionné mais on ne peut pas en déduire qu’il souhaite que la morale approuve ces travers. Donc, de surcroît, votre remarque concernant la pertinence ne porte pas.
Hervé,
du point de vue chrétien, les musulmans ne respectent pas Jésus, puisqu’ils transforment sa vie. le Issa dont ils parlent n’a plus grand chose à voir avec le Jésus des chrétiens (surtout la divinité!)
et on peut tout à fait critiquer un homme qui tuait à tour de bras quand même, fut-il suivi par presque un grand nombre de croyants! après, il y a des mots à choisir selon les gens devant qui on se trouve…
(C’est aussi ce qui permet au journal Libération de faire un article douteux sur Jésus en lui prêtant des intentions pédophiles à cause des paroles « laissez venir à moi les petits enfants ».)
Loupiot a écrit : :
Ah oui, quand même… merci de l’info.
Loupiot a écrit : :
Et une fois que tu as critiqué, à quoi cela sert-il ? Tu n’as de toute façon pas beaucoup de chance de convertir un musulman au christianisme par les temps qui courent, et critiquer Mahomet est sans doute la moins bonne méthode pour arriver à cet objectif, puisque, très probablement, ton interlocuteur se braquera.
Et s’il s’agit de se convaincre que nous, bons chrétiens, sommes meilleurs que ceux d’en face, cela ne sert pas à grand chose non plus.
C’est moi, ou bien est-ce que tout le monde ici est en train de joyeusement s’étriper sur la base de:
1) Une phrase hors sujet, un peu rapidement lâchée, et retirée depuis par son auteur ?
2) Un mot venu droit d’une discussion antérieure, sans aucun rapport ni avec le hors sujet mentionné en 1) , ni bien sûr avec le sujet du billet, et n’y apportant rien du tout hormis une couche supplémentaire de confusion ?
Même un troll chevronné n’y retrouverait plus ses petits…
Cardabelle a écrit : :
Bonsoir,
j’imagine que si on voulait critiquer Jésus, on pourrait surtout contester le fait qu’il ait sauvé le monde. On pourrait penser qu’il a en particulier été trop vague dans sa doctrine religieuse (assez largement transformée par l’église des premiers siècles), et peut être pas assez ambitieux dans sa doctrine sociale. Quand on veut critiquer, on peut toujours.
Très drôle, je regarde en ce moment la séquence Hanity sur FoxNews, ils critiquent abondamment Obama pour ne pas être un leader sur la coalition et d’avoir laissé les français prendre la main.
Ils lui reprochent de ne pas avoir assez d’esprit de décision pour reprendre le contrôle de la situation.
Ici les anti-sarkozystes, mettent l’accent sur autre chose, qu’en fait les américains reprennent la main sur la direction des affaires en Lybie, ou que la France n’a rien à faire dans ce genre d’aventure.
Ce qui est bien lorsque l’on voit les news partisanes dans d’autres pays, eh bien, la recette est toujours la même, trouver un angle de critique pour attaquer celle ou celui qui est aux affaires.
Etre dans l’incapacité de faire la part des choses, ou plutôt si, être capable au point de ne pas le dire et de distordre la réalité car on ne peut vraiment supporter d’avoir à dire quelque chose de bien sur quelqu’un qu’on hait.
Très éclairant, c’est la même chose dans les guéguerres politiques au sein des organisations. On balance des notions psychologiques ou des visions déformées sur un ennemi politique (même potentiel) sans argumentation avec tout le sérieux du monde.
Et dire qu’il y en a qui croient qu’ils font leur boulot démocratique en agissant systématiquement de la sorte. On a de plus en plus besoin de constructeurs, ou au moins de personnes qui mettent en exergue les bonnes interrogations. Mais cet abus du commentaire pour ses propres intérêts dégrade vraiment la situation de la liberté d’expression dans les pays libres. Une parole usée de fiel n’est plus une parole écoutable. Et si on fait en sorte de ne plus lire ou écouter l’autre…
« Les musulmans respectent Jésus,bla bla bla«
Incroyable que ce genre de baratin puisse encore fonctionner aujourd’hui. Sur le Jésus des muslims, Loupiot a répondu clairement. Je me demande si ceux qui tiennent ce discours bienveillant, à propos de ceux qui trucident du chrétien dès qu’ils le peuvent, ont lu le Coran. Je suppose que ceux qui viennent ici sont chrétiens, plutôt pratiquants, donc normalement convaincus qu’en tant que chrétiens ils possèdent la vérité. Je ne m’explique donc pas cette position, comme je ne m’explique pas le fait que l’Eglise ait abandonné tout prosélytisme.
Logopathe a écrit : :
Eh bien continuons. Je suis bien d’accord avec ce que vous dites ci-dessus. Mais la logique de la liberté de conscience n’est pas spécifiquement chrétienne. Ergo ma définition du blasphème, qui s’inscrit dans une perspective qui admet la liberté de conscience, n’est pas spécifiquement chrétienne. CQFD, si vous vous souvenez du début de notre échange !
J’ajoute que la « sensibilité » musulmane au blasphème n’est pas plus spécifique à l’Islam. C’est celle de toutes les visions du monde qui refusent en pratique la liberté de conscience.
Joyeux Acier a écrit : :
Tout à fait d’accord.
Joyeux Acier a écrit : :
Je serais plus nuancé. Les quelques musulmans qui se convertissent insistent sur la découverte qu’a été pour eux le contraste entre le Dieu des chrétiens et Allah, entre Jésus et Mahomet. Les chrétiens vivent dans des sociétés où la contestation du christianisme est forte et constante, ceux qui restent sérieusement chrétiens le choisissent. La plupart des musulmans vivent dans des sociétés où ils n’ont pas accès à la réflexion critique sur l’Islam et son fondateur.
Vous pouvez trouver aujourd’hui des ouvrages d’exégèse, d’histoire du christianisme, écrits par des non-croyants sans polémique systématique contre la foi. Les meilleurs d’entre eux rendent un grand service aux croyants en les obligeants à faire la part de ce qui appartient à la foi et de ce qui appartient à l’histoire. Il me semble qu’on rendrait un vrai service aux musulmans en leur rendant plus accessible ce type de démarche.
Aristote, je vous aime!
Gwynfrid a écrit : :
@ Loupiot:
Votre commentaire et d’autres suscite pour moi deux réponses :
-En tant que chrétien, je retiens comme principal enseignement moral de l’Evangile découlant du fait que nous sommes tous frères, l’obligation de respect. Je dois respecter l’autre dans toutes ses dimensions, notamment dans sa dimension de croyant (surtout si je ne partage pas la même foi, sinon c’est facile).
-En tant qu’homme doué je l’espère d’un peu de raison, j’observe que la très grande majorité des croyants, qu’ils soient musulmans ou chrétiens ou autre, le sont parce qu’ils ont reçu cette croyance de leurs parents. Je respecte la fidélité des enfants aux valeurs reçues de leurs géniteurs même si les miennes sont un peu différentes.
A ce propos je vous conseille l’écoute des très bonnes émissions récentes de France Culture sur Montaigne qui était chrétien et tolérant.
@ Aristote:
bien d’accord avec Aristote.
Joyeux Acier, votre dernière phrase ne concerne que vous, elle n’était pas dans mon commentaire. Dire ce que je pense de Mahomet ne va pas automatiquement chez moi avec « croire que les Chrétiens sont meilleurs ». ça, ça se juge sur des actes.
et, oui, il faut choisir les personnes à qui on le dit et choisir les termes employés. Et oui, cela peut servir quand on est face à des musulmans ayant déjà raisonné sur tel ou tel aspect de la vie de Mahomet.
Et oui, la raison et la déraison existent dans un même peuple/groupe. c’est pour cela qu’il faut choisir sa façon de parler selon son interlocuteur…
Le problème du commandement militaire n’est pas un vrai problème et va se résoudre, même si l’on va entendre pas mal d’âneries pendant le processus et voir beaucoup de gens mettre des bâtons dans les roues. On va finir par faire semblant que le commandement se fait par d’autres que les Etats Unis et l’OTAN, quand ce sera en fait eux qui vont faire 99% du boulot.
Militairement, il y a un vrai défi, comment sauver rapidement certaines populations civiles qui se font massacrer par les pro-K en ce moment, comme à Misrata, sans déployer des troupes au sol ? Soit on trouve une solution avec des hélicoptères, bateaux, livraison d’armes à la rébellion et autres moyens astucieux, soit on débarque des unités spéciales. Le débarquement ponctuel d’unités spéciales à Misrata, par exemple, permettrai de venir en aide à la population très rapidement (en plus de se faire descendre, elle n’a pas d’eau, d’électricité, et j’imagine bientôt, plus de pain), mais cela va faire hurler comme des putois tout le monde (sauf les Libyens qui se font tuer en ce moment et qui demandent désespérément de l’aide). Pour certains, il est plus important de respecter à la lettre la résolution de l’ONU que de sauver des vies. Toutefois, compte tenu des différentes contraintes, l’opération militaire se déroule admirablement et sans bavures.
Sur le court à moyen terme, il y aura des défections au sommet et les fils K vont craquer. Quant au colonel lui-même, c’est un psychopathe sans espoir.
@Aristote: sur le blasphème et le christianisme, je suis un peu perdu, je laisse tomber. Vous devez avoir raison. Sur la suite de votre post, je suis à fond d’accord.
@Jeff: Non, je crois que c’est une erreur fondamentale de diagnostic. On peut tuer au nom de n’importe quelle idée, fût-elle généreuse, et on l’a fait abondamment. S’en prendre spécifiquement à la xénophobie en pensant qu’on va empêcher le retour de la violence, c’est illusoire. C’est contre la violence elle-même qu’il faut être vigilant. Pas contre les idées, quelles qu’elles soient.
Certaines personnes ont besoin, pour se sentir bien dans leurs baskets, de se définir par rapport à un Autre qu’ils rejettent. Je dirais même que c’est le cas d’à peu près tout le monde. Ce mécanisme peut dégénérer en violence. Et il le peut quelle que soit la définition de l’Autre: ethnique, nationale, sociale, culturelle, souvent politique en France… On n’a pas tué davantage au nom de la Nation qu’au nom de la Classe, au XXe siècle.
Organiser la coexistence pacifique d’individus aux représentations différentes: c’est ça la démocratie. Et j’y crois. Et ça marche si on fait respecter le tabou de la violence. La xénophobie est, comme les autres erreurs, à combattre sur le terrain des idées. Dans le débat. Ce qui suppose, bien sûr, qu’on essaie d’entendre ce que veut dire le xénophobe, qu’on cesse de le considérer comme simplement un malade. Qu’on cherche la part de vérité qui existe, inévitablement, dans son propos. On cherche à comprendre les jeunes violents des banlieues, et on a raison. Pourquoi n’essaie-t-on pas de comprendre le xénophobe?
Quand une catégorie d’idées et leurs porteurs passent pour une incarnation du Mal, il faut toujours se faire violence et se poser des questions. En l’occurrence, ne pas faire au xénophobe précisément ce qu’on lui reproche, à savoir de ne pas chercher à comprendre l’Autre. La xénophobie n’est pas une faute morale: c’est avant tout une erreur méthodologique.
Or la xénophobie et le racisme font aujourd’hui l’objet d’une condamnation morale qui échappe en partie à la rationalité, et qui, plutôt que de réduire les fractures entre communautés, les aggrave. On demande, en somme, aux gens de ne pas être racistes, non pas parce qu’ils ont été amenés librement à reconnaître que ça n’était pas une attitude pertinente, mais parce que c’est interdit moralement et légalement. C’est sans doute en partie inévitable, l’humanité étant ce qu’elle est, mais ça n’est pas sain, et ça n’est pas satisfaisant. Il faudrait commencer à réduire progressivement l’arsenal répressif, et permettre au débat de reprendre ses droits. On ne résout pas un problème en décrétant qu’il est résolu. Or celui de la xénophobie et des identités collectives n’est, à l’évidence, pas résolu, à moins d’être sourd et aveugle.
@ Joyeux Acier
Je suis effectivement allée un peu vite en disant que la différence principale était que Jésus a sauvé le monde. C’est une remarque de chrétien, pas du tout évidente pour ceux qui ne le sont pas. Je dirais donc qu’en face de Mahomet chef de guerre (souvent très cruel) on a un homme qui a dit : « aimez-vous les uns les autres », « faites du bien à ceux qui vous haïssent », « si quelqu’un te frappe, présente lui aussi l’autre joue », etc. Que les chrétiens n’aient pas toujours suivi (et ne suivent pas toujours) ces conseils, et qu’ils aient bien souvent fait exactement le contraire (et hélas continuent parfois de le faire), je ne le conteste pas. Je dis simplement qu’il est impossible de tuer en se référant à l’Evangile. Que je sache, il n’y est pas écrit « massacrez les infidèles ».
Quant à la « doctrine sociale » de Jésus, je ne pense pas que c’était l’objectif de l’incarnation… L’Evangile n’est pas un manuel englobant vie personnelle, vie sociale et politique, comme l’est le Coran.
@ Logopathe,
Je suis sensible à votre argumentation. Mais j’opposais, suite aux propos de Lib, la xénophobie à l’égoïsme et à la jalousie, pas à d’autres idées (y compris généreuses a priori au départ) qui ont pu effectivement tuer (il y a le nationalisme aussi).
Nous sommes notamment d’accord sur ce point : « On demande, en somme, aux gens de ne pas être racistes, non pas parce qu’ils ont été amenés librement à reconnaître que ça n’était pas une attitude pertinente, mais parce que c’est interdit moralement et légalement. C’est sans doute en partie inévitable, l’humanité étant ce qu’elle est, mais ça n’est pas sain, et ça n’est pas satisfaisant ».
Je persiste à penser que pour les jeunes générations, et d’abord les enfants, cette morale et cette loi ont une vertu pédagogique, qui leur apprend très tôt l’une des bases fondamentales pour « vivre ensemble ». Cette morale et cette loi ont aussi le mérite d’encadrer les déparapages et notamment les incitations à la haine raciale (qui malheureusement, par les temps qui courent, ne manqueraient pas de se produire). Dans nos sociétés complexes et troublées, je pense qu’il n’est pas mauvais en certaines circonstances de dire le bien et le mal (idem vis-à-vis de l’homophobie).
Je vous laisse imaginer le beau spectacle auquel on assisterait si l’on décidait aujourd’hui d’abroger ces lois et de considérer la xénophobie et le racisme comme une opinion comme une autre…
Cela n’empêche pas parallèlement d’expliquer à ceux qui n’en seraient pas encore convaincus, avec des arguments scientifiques et philosophiques, illustrés de quelques exemples concrets, en quoi la xénophobie et le racisme ne peuvent être défendus ni sur le plan rationnel ni sur le plan moral. Et pourquoi ces lois existent.
@LElfe
Bin non.
Ma surprise initiale, qui apparemment vous échappe encore, venait du fait que Lib réprouve régulièrement la condamnation morale du racisme, mais regrette par ailleurs l’érosion des valeurs morales dans la société. Vous retrouvez de la cohérence en supposant que Lib prône le racisme comme valeur morale, hypothèse que je ne fais pas.
Se rabattre sur l’interdit légal est une manière habile de botter en touche (et sur ce point je suis assez d’accord: inutile de multiplier les amendes pour racisme…).
@Logopathe
Assez d’accord avec vous. Je ne demande qu’à pouvoir appeler « racistes » les choses (idées, propos, politiques, etc.) qui le sont sans que ce soit perçu comme un anathème, pour pouvoir en discuter calmement. Reste quand même un problème de taille: pour discuter, encore faudrait-il avoir quelques interlocuteurs. Or, personne ne se déclare raciste, vous avez remarqué? Il suffit d’évoquer l’idée pour déclencher querelles sématiques sans fin, bras levés au ciel, et faux-fuyants. Les électeurs du FN ne sont pas forcément racistes, untel a des amis noirs, etc. Et si je dis que la politique du gouvernement est raciste, on va tout de suite me parler de guerre mondiale…
Jeff a écrit : :
Logopathe vous a remarquablement répondu et je l’en remercie. Fondamentalement, vous et moi sommes en désaccord profond (qui n’interdit pas le débat courtois, je m’en réjouis) sur 2 points distincts :
La loi doit-elle dire le bien et le mal? Je ne crois pas. Pour moi, la loi doit dire le droit. Si elle s’occupe de morale, elle tourne bien vite totalitaire. Par exemple, elle interdit de tuer, ce qui est bien. Doit-elle interdire de haïr?
La haine de race est-elle plus grave que la haine de classe, la haine politique ou la haine liée à quelque détermination de l’Altérité que ce soit? Je ne crois pas. Tout mécanisme qui conduit à découper la société en catégories et à détester une personne a prirori en raison de son appartenance à telle ou telle catégorie est dangereux.
Gatien a écrit : :
Non, c’est l’essence de mon commentaire de 5 lignes qui a initié votre réponse. Il était d’ailleurs résumé par la phrase qui l’entamait : « Une société saine interdit peu mais ses membres s’interdisent beaucoup. «
C’est bien vous qui vous plaigniez il y a peu ici-même qu’on vous accuse trop souvent d’avoir voulu dire B quand vous avez écrit A?
Gwynfrid a écrit : :
Tu as vu des gens s’étriper? Je trouve pour ma part que la tenue de cette discussion est exceptionnelle, compte tenu de son sujet.
Mais ça reste hors sujet, la perfection n’est pas de ce monde 🙂
@ Gatien:
Je vois bien la nuance. En somme, l’érosion des valeurs morales devant conduire selon lui au rétrécissement du domaine du mal-vu, pourquoi l’évolution des valeurs morales conduit-elle à mal voir le racisme (sans qu’on puisse parler d’érosion) ? Et si l’on regrette l’érosion des valeurs morales, pourquoi regretter qu’une morale s’exerce à l’encontre du racisme?
En fait, à part ma partie « ergotons sur les mots », autorisée soit dit en passant par votre néologisme en « phobie » et qui, mon erreur de lecture relevée, était plus pour le fun qu’autre chose, il est évident que l’érosion des valeurs morales ne peut être considérée comme étant à la base du (très sain) bannissement moral du racisme.
Mais ce n’est pas parce qu’il y a quelques évolutions positives, qui permettent de mal voir des comportements mauvais, que globalement ce n’est pas le phénomène inverse qui se produit. A ce stade, n’ayant pas lu vos anciens débats, je ne peux me prononcer, mais ce que nous écrivait ici Lib n’avait rien à voir le fait de regretter une réprobation MORALE du racisme. Ce qui ne botte pas en touche mais ôte au coeur le paradoxe apparent.
Enfin, si vous dites que ce n’est pas le fond du débat et que ça consiste à botter en touche, je ne vais pas plus loin, je ne sais pas de quoi vous parlez d’ordinaire.
J’irai juste un pas plus loin que le débat consistant à savoir ce qui doit être juridiquement interdit ou non. C’est mon histoire de pensée unique. L’évolution des mentalités conduit à ne plus avoir de morale qu’en creux, en négatif, en termes d’interdiction d’avoir un avis et de juger du bien et du mal. On n’aurait plus le droit de « mal voir » quelque comportement que ce soit. Mais beaucoup d’interdictions de penser différemment.
Non, je ne dénonce absolument pas la réprobation qui entoure le racisme. Le racisme est moralement répréhensible et me parait juridiquement condamnable dès lors qu’il mène à l’insulte ou à la discrimination. Je dénonce en revanche le verrouillage de pensée que l’on fait au nom de l’interdiction du racisme et qui n’a rien à voir celui-ci, qui est très laid.
Ainsi, on stigmatise entre autres tout débat sur l’immigration car ‘raciste’ (ou on le rend raciste, ce qui facilite l’amalgame), comme on stigmatise par exemple tout débat sur l’homoparentalité au nom de la lutte contre l’homophobie, comme on diabolise le débat sur la bioéthique au nom de la douleur des parents sans enfants ou comme on paralyse le débat sur l’avortement au nom de la liberté de la femme, pour prendre des thèmes sensibles et les premiers qui me passent par la tête ; je ne suis pas fan du tout d’entendre Marine tous les 4 matins sur des médias comme France info parler l’immigration mais les amalgames faciles et les accusations additionnées d’étiquettes infamantes, ça me gonfle. On empêche les uns de penser, au nom de la liberté des autres – que le but poursuivi soit ou nom louable.
Proférer des insultes racistes mène en taule, mais injurier quelqu’un en le traitant de raciste vaut des félicitations…
@ Lib,
Désolé, mais je trouve que vos comparaisons, certes habiles sur le plan de la rhétorique, ne tiennent pas la route. On ne peut pas considérer de la même façon la xénophobie / le racisme et la jalousie et l’égoïsme, comme autant de défauts humains largement partagés. De même, on ne peut pas non plus considérer la « haine de race » comme la « haine de classe » ou la « haine politique » (la « haine de classe », j’imagine que dans votre esprit cela veut dire la « haine des patrons » ; la haine politique, je ne vois pas trop ce que cela pourrait être, la haine des gens qui votent à droite, c’est-à-dire la haine de la moitié de la population ?).
Les enjeux ne sont pas du tout les mêmes et vous le savez bien. Même si vous êtes sensible sur le sujet, je ne pense pas que vous puissiez aller jusqu’à affirmer par exemple que la critique des patrons ou des banquiers s’apparente à la haine des immigrés ou des étrangers. Ni d’un point de vue qualitatif ni d’un point de vue quantitatif.
Jeff a écrit : :
Certes, mais alors la logique commande également de ne pas confondre critique des immigrés et haine des immigrés.
Jeff a écrit : :
Vous voyez critique des patrons et haine des étrangers et moi je vois haine des patrons et rejet des étrangers. C’est très différent.
Lib a écrit : :
Donc vous voyez mal. Parce que la haine des patrons n’est clairement pas le sujet qui fait débat et pèse aujourdhui. Je ne crois pas avoir entendu récemment qu’il faudrait mettre les patrons sur un bateau ou qu’avec tous ces patrons, on ne se sentait plus chez nous, etc.
Maintenant si quand vous entendez quelqu’un dire que les salaires de certains patrons sont indécents, vous diagnostiquez immédiatement chez lui une « haine des patrons » ou une « haine de classe »…
Jeff a écrit : :
Il y a très peu de gens qui disent qu’il faut virer les étrangers, même au FN. En tout état de cause, si un tel discours traduit assurément un rejet des étrangers, ce n’est pas un discours de haine. Il n’y a pas, fort heureusement, d’affirmation que les étrangers sont nos ennemis, qu’ils nous veulent du mal ou qu’ils méritent qu’on leur en fasse.
Si vous voulez des discours de haine, allez lire les tracts syndicaux dans les entreprises, c’est absolument effrayant. Il y a également une abondante littérature dans les grands journaux ou en tête de gondole à la Fnac qui explique très clairement que le patron est l’ennemi, qu’il n’hésitera pas à nous nuire et que rien ne doit être exclu pour le combattre.
La violence de race est fort heureusement très faible en France. Il n’y a pas de ratonnade. Réjouissons-nous-en plutôt qu’agiter des dangers inexistants.
Mais la violence de classe est très forte. Il y a des séquestrations de patrons.
@ Lib : Je ne comprends pas bien où mènent vos perpétuelles provocations. Vous feignez toujours d’ignorer le point de fond : à tort ou à raison, beaucoup estiment que dans l’équilibre client / actionnaire / salarié, la balance (de la plupart) des patrons penche (beaucoup) trop en faveur de l’actionnaire.
Nier ce ressenti et tenter plutôt de faire passer les patrons pour des petits êtres sans défense et injustement opprimés ne fait pas avancer votre cause. Le patronat ferait mieux de profiter des opportunités médiatiques dont il peut disposer pour prouver à tous l’erreur de cette perception.
Mais curieusement, au fil des apparitions de Serge Dassault, sa profonde humanité, le souci de son prochain et son petit coeur meurtri ne sont pas encore pleinement ressortis. Voilà qui est proprement inexplicable.
@Lib
C’est une blague? Personne n’évoque un risque d’islamisation ni n’évoque la « dihimitude »?
@ Gatien:
Il y a des patrons voyous, mais les patrons ne sont pas des voyous.
Il y a des étrangers qui sont nos ennemis et nous veulent du mal, mais les étrangers ne sont pas nos ennemis.
Et oui, il y a des étrangers qui aimeraient bien nous islamiser. Non, les étrangers ne veulent pas nous islamiser.
D’après Plunkett, le pape aurait demandé l’arrêt des hostilités.
http://plunkett.hautetfort.com/archive/2011/03/27/libye-le-pape-demande-l-arret-immediat-des-combats.html#more
@ Physdémon:
Le contraire aurait été surprenant ! Mais pour cesser les hostilités, il faut être deux…
Un chrétien devait-il regarder la population civile se faire massacrer à Benghazi, comme ce fut le cas à Srebrenica, ou au Rwanda ? Que le pape s’exprime maintenant, soit, mais je ne me souviens pas l’avoir entendu désapprouver une intervention qui relève du devoir de protection des populations civiles. La situation aujourd’hui peut éventuellement se prêter à un cessez-le-feu, la situation il y a dix jours ne se prêtait pas à l’inaction.
@Yogui,
Dans un sondage réalisé l’an dernier pour le compte de l’association « j’aime ma boîte », 69% des gens ont répondu qu’ils aimaient leur boîte et 75% qu’il ne voudraient pas être à la place de leur patron.
Ca, c’est la réalité des PME avec lesquelles je travaille quotidiennement. PME qui représentent en France 60% des emplois et plus de 100% des créations d’emplois. PME auxquelles ne s’intéressent ni les politiques, ni les media, ni les syndicats.
Maintenant, si vous cherchez à justifier votre hostilité à l’égard du « patronat », vous y parviendrez sans peine. Au fond, votre intervention va dans le sens de ma démonstration : les préjugés négatifs sont beaucoup plus forts, répandus, assumés, revendiqués à l’encontre des patrons qu’à l’encontre des étrangers. La haine de classe fait plus de mal à la France que la haine de race.
Gatien a écrit : :
Les mots ont un sens, Gatien. On peut regretter ou redouter le développement de l’islam en France sans considérer les musulmans comme des ennemis. Tout comme on peut regretter ou redouter la mondialisation sans considérer les entreprises comme des ennemies.
@Lib
Bien sûr qu’on le peut, mais il suffit d’aller voir par exemple les commentaires sur le site du Figaro pour trouver des gens qui ne s’embarassent pas de telles nuances. On peut aussi trouver tout un tas d’idéologues pour lesquels les musulmans sont un problème. C’est pour celà que le passage « Il n’y a pas, fort heureusement, d’affirmation que les étrangers sont nos ennemis » m’a fait bondir.
Je maintiens mon bond: si il y a de telles affirmations.
@Lib : Désolé, je ne comprends pas votre intervention. Ce sondage traite de l’attachement des français à leur lieu de travail, et non des sentiments qu’ils nourrissent à l’égard de leur patron – et encore moins « du patronat » – que je tentais de vous rendre moins mystérieux ; quoique les patrons séquestrés le soient peut-être sans aucune raison.
Il est par ailleurs possible que les effrayants tracts syndicaux et les manuels de combat auxquels vous faisiez référence visent plus les patrons de grands groupes que de PME : s’il y a risque de confusion vous ne devriez pas l’entretenir. Mais on commence à être loin du sujet du billet.
à Koz
« Un chrétien devait-il regarder la population civile se faire massacrer à Benghazi »
Je ne pense pas ! Mais un catholique doit s’informer respectueusement de ce que dit le saint père, qui en ce domaine ne prétend à aucune infaillibilité, puis assumer ses responsabilités d’homme engagé dans le siècle, avec crainte et tremblement, ce qui ne veut pas dire sans fermeté..
@ Yogui
Vous avez le droit de penser ce que vous voulez des patrons, ceux des PME comme ceux du CAC 40, je ne pense pas que le point de Lib soit là.
Critiquer le patronat ne vaut pas en France l’accusation de haïr les patrons, et c’est bien ainsi.
Critiquer l’immigration vous vaut immédiatement l’accusation de haïr les immigrés.
Pourquoi cette asymétrie ?
@ Physdémon: nous sommes d’accord.
Je pense que l’asymétrie entre patrons et immigrés, entre blancs et non-blancs, entre chrétiens et non-chrétiens, etc, vient essentiellement du fait que patrons, blancs et chrétiens sont perçus comme des catégories dominantes, et qu’en conséquence la haine qui les vise est vécue, à tort ou à raison, comme plus légitime, moins « dangereuse », moins grave, moins susceptible de dégénérer en massacre. Ce sont des haines socialement permises (même si elles sont critiquées, bien sûr). Le discours haineux apparaît comme une sorte de contre-pouvoir, justifié par la recherche d’un certain équilibre. C’est ce qu’on constate, notamment, dans le discours de justification du racisme anti-blanc.
D’une certaine manière, on pourrait argumenter que passer d’un bouc émissaire faible à un bouc émissaire fort, c’est déjà un progrès. Même si, en pratique, le bouc-émissariat des forts aboutit fréquemment, dans l’histoire (peut-être davantage encore que celui des faibles), à des massacres.
Le vrai progrès, en fait, c’est que le bouc-émissariat (celui des étrangers par l’extrême droite ou celui de l’extrême droite ou des patrons par la gauche, etc) est de plus en plus médiatisé par la parole, traduit dans une critique qui se veut raisonnée, au lieu de donner lieu à une action violente. Mais il emprunte toujours énormément au domaine de l’affectif, d’un côté comme de l’autre. Et le retour de la violence n’est jamais loin.
L’étape suivante, ça serait de parvenir à dépasser le couple victimisation/bouc émissariat. Ce qui suppose, bien évidemment, d’abandonner toute diabolisation du FN, et d’arrêter de se poser des questions oiseuses comme de savoir si ce parti en pose de bonnes ou pas. Les gens se les posent, il faut y répondre, c’est tout.
Assez d’accord avec Logopathe. J’ajouterai que le racisme est opposé aux personnes en raison de ce qu’elles sont tandis que la haine des patrons leur est opposée en raison de ce qu’ils font, ce qui me semble être une perspective différente : à tout prendre, on peut toujours cesser de faire ce que l’on fait, ou l’assumer pleinement mais ce que l’on est…
@ Koz
Je souscris assez aux remarques de Logopathe.
Il me semble cependant que la distinction entre ce qu’ils font et ce qu’ils sont est ici oiseuse. Un raciste vous dira qu’il n’a rien contre les… et que d’ailleurs certains de ses amis sont…, mais que beaucoup, la plupart des …, etc. Symétriquement, la haine du patron ne doit pas grand chose à une vision analytique de ce qu’ils font et beaucoup à une vision réductrice de de leurs motivations, de ce qu’ils sont.
Gatien a écrit : :
Inutile de sautiller, il suffit de lire le contexte. Dans le discours prônant de virer les étrangers, il n’y a pas de telles affirmations. Ces affirmations existent par ailleurs, mais elle sont fort heureusement fort rares.
Yogui a écrit : :
Intéressant dérapage, vous vous appliquez à démontrer ma thèse avec sollicitude. Quand la catégorie que vous n’aimez pas subit une violence, c’est sans doute qu’elle en est responsable.
@ Logopathe : +1. Et de la même façon que la liberté d’expression est surtout utile pour protéger les opinions impopulaires, les haines les plus dangereuses sont celles qui sont populaires.
Koz a écrit : :
Pas vraiment. La haine des patrons leur est opposée en raison de ce qu’on présume qu’ils font, en raison de ce qu’ils sont. Et tout élément à charge vient renforcer le préjugé. Tout comme le racisme en somme.
J’avais pensé faire cette distinction entre font et sont, qui me parait essentielle. Précisons que, contrairement à ce que disent Aristote et Lib, la plupart d’entre nous sait au moins les conséquences de ce que fait son patron sur son propre travail, et ça n’a pas l’air de déclencher des bouffées d’amour (mais bon on est d’accord, toute généralité est fausse par essence).
D’autre part, être patron, c’est faire (organiser le travail des salariés, décider de leur salaire, décider aussi de leur embauche ou de leur licenciement, faire des choix stratégiques pour l’entreprise). Etre arabe, non. Patron est bien un métier, avec toutes les implications sociales que ça comporte. Du coup, je peux dire des choses sur un patron, sans le connaitre (« il fixe le salaire de ses employés »). D’un arabe, sans le connaitre, je ne peux rien dire, à part qu’il est arabe.
@ Liberal : Je ne poursuivrai pas cet échange. S’acharner à présenter le système actuel comme fondamentalement juste et les décisions des patrons comme toujours optimales pour les salariés, me paraît vain.
Si la perception générale du patronat vous paraît erronée je vous invite plutôt à retrouver les facultés d’argumentation factuelle et de pédagogie dont vous avez déjà su, dans des temps lointains, faire preuve sur ce blog.
Mais à mon humble avis votre attitude présente ne fait que renforcer le vote FN, et on en a déjà assez comme ça.
@ niamreg
Du temps du petit père des peuples, vous seriez passé pour fieffé révisionniste ! 🙂
Votre distinction est analytiquement juste, mais n’est pas pertinente pour décrire le ressort de la haine.
M’est avis que la haine est première, et qu’elle arrive toujours à trouver une raison pour se justifier.
Aristote a écrit : :
J’espère bien !! Mais cette remarque ne suggèrerait-elle pas que vous avez une vision quelque peu archaïque et stalinienne du marxisme en général, et de la lutte des classes en particulier? Notez bien que je sais que certains à gauche aussi, même si ils se font franchement rares.
Aristote a écrit : :
La haine dont vous parlez ne peut concerner que des extrémistes pour qui la raison n’a pas beaucoup d’importance. Pour les autres, la raison devrait avoir une influence sur les émotions, au moins autant que l’inverse.
niamreg a écrit : :
Vous avez raison là-dessus. Le descriptif « patron » fournit plus d’information comportementale que le descriptif « arabe » par exemple. Mais si on pousse votre raisonnement, force est de constater que les choses qu’on sait sur un patron, sans le connaître, ne permettent pas de nourrir une quelconque hostilité à son égard.
Il fixe le salaire de ses employés. Oui, et alors? Est-ce mal? Comment peut-on en vouloir à quelqu’un pour cela?
Bien sûr, il y a le très sensible : il licencie des salariés. Ca c’est mal. Mais d’abord, même si la probabilité de l’avoir au moins fait une fois tend vers 100% avec le temps, on ne peut pas être certain qu’un patron pris au hasard l’aie déjà fait. Et surtout, il embauche des salariés aussi. Ce qui est bien. Mieux, on peut même dire qu’en moyenne, il embauche plus qu’il ne licencie, sinon il n’aurait plus de salariés (et partant, ne serait plus un patron et cesserait d’être un salaud ontologique aux yeux de Yogui)
Bref, je concède bien volontiers un biais favorable envers cette catégorie, mais il me semble que les choses qu’on peut dire a priori, sans le connaître, d’un patron sont plutôt positives : il crée plus d’emplois qu’il n’en détruit, il fournit un environnement permettant à ses salariés de vivre du fruit de leur travail, il apporte une formation à ses salariés, il paie des impôts et des charges sociales…
Non, pour avoir un préjugé négatif sur les patrons, il faut intégrer des a priori absolument pas objectifs. Les patrons fraudent les assedic, pratiquent l’évasion fiscale, exposent leurs salariés à des risques d’accident, les harcèlent, cherchent à les spolier etc… Choses qui sont parfois vraies, chez certains, mais qui ne permettent certainement pas de qualifier tous les patrons, ni même la majorité.
Et on retombe sur le paralèlle avec le racisme. Un raciste pensera par exemple que les arabes sont voleurs, menteurs, tricheurs… Choses qui sont parfois vraies chez certains, mais qui ne permettent certainement pas de qualifier tous les arabes, ni même la majorité.
Yogui a écrit : :
Je n’ai jamais dit cela et je ne le pense pas.
D’abord je pense que le système actuel est fondamentalement injuste. Le droit du travail est partisan en défaveur de l’employeur. Des principes fondamentaux tels que la présomption d’innocence ne s’appliquent pas aux employeurs dans de nombreux domaines. Comme toujours, l’injustice ne fait que créer les conditions d’un conflit, qui finalement ne bénéficie à personne.
Ensuite, je ne pense absolument pas que « les décisions des patrons soient toujours optimales pour les salariés ». Il y a parmi les patrons des salauds, des incompétents, des gens qui se trompent. Par ailleurs, bien évidemment, les intérêts d’un patron ne coïncident pas exactement avec ceux de ses salariés (les intérêts des différents salariés ne coïncident pas exactement non plus, d’ailleurs).
Ce que je pense et écris, c’est qu’en général, les employeurs et leurs salariés ont beaucoup plus d’intérêts convergents que divergents. Que cette espèce de « guerre civile sociale » que j’ai toujours connue en France n’apporte rien de bon. Que des pays voisins, proches, ont des relations sociales beaucoup plus apaisées que nous et s’en portent mieux à tous points de vue. Que ce qu’il faut souhaiter aux salariés, c’est qu’il y ait plus d’employeurs, pas moins. Et que ceux qui, pour des motifs politiques ou idéologiques, dressent ces catégories les unes contre les autres font beaucoup de tort aux employés, aux employeurs et à la société toute entière.
Maintenant, si mon discours vous déplaît au point que vous préférez le caricaturer plutôt que risquer de l’entendre, cette discussion est effectivement mal partie.
@Lib
J’affirme au contraire que de telles affirmations sont présentes ou suggérées dans la plupart des discours xénophobes, FN en tête.
Pour une raison très simple d’ailleurs: pour bien rejeter l’autre, il faut d’abord se représenter en victime.
Nous ne vivons pas dans le même pays apparemment.
Gatien.
Oui, il y a des gens qui pensent que les étrangers sont nos ennemis. Oui, ils sont sans doute surreprésentés au FN. Oui, ces gens-là pensent généralement qu’il faut mettre les étrangers dehors.
Mais on peut souhaiter que les étrangers restent (ou retournent) dehors sans pour autant les considérer comme des ennemis. Il ne faut pas se tromper dans le sens de l’implication logique.
En écrasant systématiquement cette distinction sous la botte de l’antiracisme officiel, on a artificiellement créé une identité entre l’authentique raciste et le brave type qui souhaite simplement vivre dans un environnement familier, qui souhaite se sentir chez lui pour reprendre un propos interdit.
Cela a eu deux effets : (i) interdire l’expression du malaise par le brave type et donc interdire sa prise en compte par la société, (ii) créer chez le brave type un solide sentiment d’injustice, ce qui nous amène à votre deuxième point.
Gatien a écrit : :
Eh non, à nouveau raté. La causalité fonctionne là aussi dans l’autre sens. C’est quand on se représente en victime qu’on rejette l’autre et qu’on en vient à le haïr.