Mare Nostrum

bateaurefugies
Vous passez votre week-end au soleil, dans les bois, avec les petites têtes heureuses et joyeuses de vos enfants qui courent au devant, vous essayez le cerf-volant dans un ciel uniformément bleu. Dans la nuit, des personnes, nées ailleurs, sont de nouveau mortes dans les hurlements, la nuit et l’eau glacée qui vous gagne. Des hommes, des femmes et leurs enfants, l’innocence sur laquelle ils posent leurs yeux. Les cales verrouillées du bateau sont leur cercueil dans le cimetière de Méditerranée.

Nous ne pouvons pas nous défausser derrière les chiffres, les statistiques. En une nuit ou presque, mais assurément en une semaine, c’est dix fois la catastrophe aérienne de la GermanWings, qui nous a occupés une semaine entière. Eux, il n’y aura personne pour nous raconter qui ils étaient. Il n’y aura pas de reportage dans leur village, leur école, auprès des voisins. De toutes façons, on ne connaît pas leurs noms. Ils resteront des migrants, amalgamés, et différents de nous. Pire, beaucoup d’entre nous étoufferont, passagèrement honteux, leur compassion sous la « marche du monde » tout en voyant ces milliers de personnes comme des menaces sur notre stabilité, notre identité, et notre confort.

L’émotion est nécessaire, elle est encore une fois indispensable, par simple humanité, pour réaliser, pour refuser de ne voir que des grands ensembles et la globalisation. Avoir bien conscience que sont mortes des personnes aussi désespérées que déterminées. Ce matin, l’émotion devant l’horreur semble avoir réveillé quelques politiques et quelques medias. L’émotion n’est jamais suffisante et elle l’est encore moins cette fois.

Nous ne pouvons nous exonérer de notre responsabilité, certes pas exclusive, dans cette situation. Même si l’on peut imaginer que la Libye de Khadafi, dirigée par un homme dont les derniers discours révélaient la folie profonde, n’aurait pas tenu éternellement, l’intervention militaire précipitée de la France l’a plongée dans un chaos dont nous n’avons pas encore subi toutes les conséquences. La politique française en Syrie n’est pour sa part pas étrangère au pourrissement de la situation, à la désagrégation du pays et à l’émergence de la barbarie ignoble de l’Etat islamique – qui s’est encore illustrée ce week-end avec la mise en scène de l’assassinat de chrétiens. Si la France est relativement exempte de responsabilité en Irak, les pays européens ne le sont pas tous et là encore, les Occidentaux ont plongé un pays dans une totale confusion. Ce n’est que justice que nous payions le prix de nos interventions.

C’est Notre Mer : nous sommes moralement et concrètement responsables.

Aujourd’hui, puisque cela était nécessaire, l’exigence de sécurité vient suppléer notre charité défaillante. La Libye si proche n’est pas qu’un carrefour de migrations, elle est aussi une implantation de l’Etat Islamique et la jonction des deux, à défaut semble-t-il d’être encore effective, n’est pas un fantasme. Ce qui est effectif en revanche, c’est le trafic d’êtres humains par des groupes criminels qui, lorsqu’ils enferment hommes, femmes ou enfants dans les cales verrouillées d’un bateau, sont les derniers des assassins. Le responsable de Frontex souligne d’ailleurs assez bien qu’il ne s’agit plus seulement de questions migratoires. Le problème est profondément géopolitique.

Les dirigeants de l’Union Européenne vont se réunir. Peut-on espérer qu’ils aillent jusqu’au bout de leurs responsabilités ? Auront-ils le cran d’aller aux racines du problème ? Si aller aux racines du problème suppose une intervention militaire en Libye, l’Europe y est-elle prête matériellement et psychologiquement, en est-elle capable ? Nos dirigeants sont-ils aptes à dépasser les rustines et autres solutions conjoncturelles, rassurant temporairement leurs populations, avant de transmettre le dossier à un autre ? Alors que l’Union Européenne a drastiquement réduit les moyens destinés au secours des migrants il y a même pas six mois, François Hollande a évoqué la mise à disposition de nouveaux bateaux ainsi que le renforcement de la coopération avec les pays d’origine et de transit. Chacun aura maintenant compris que ce n’est pas à la hauteur de l’enjeu lorsque l’on a affaire à un pays en lambeaux et, potentiellement, à une organisation armée, structurée et terroriste.

Entre-temps, rétablir et dépasser l’opération Mare Nostrum, comme certains le réclament, et en répartir la charge effective entre les pays de l’Union Européenne, est le minimum de ce que nous pouvons et devons faire, pour secourir ces hommes, ces femmes et ces enfants. Par humanité, par responsabilité, pour ne pas nous renier.

 


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82 commentaires

  • Il me semble que notre devoir est, particulièrement à nous autres Français, de demander des comptes à Nicolas Sarkozy, ainsi que son ministre de l’Intérieur, Alain Juppé. Et en justice s’il le faut.

    Il me semble qu’ils sont directement responsables du chaos libyen.

    Autre point sur lequel il faudra se pencher sans mièvrerie: l’art de dissuader les migrants et les passeurs. L’Australie semble être parvenue à interrompre totalement le flux de navires poubelles chargés de migrants par une politique très ferme, qui pouvait sembler scandaleusement inhumaine au premier abord, mais qui, in fine, évite ce genre de drames humains.

  • « Ce n’est que justice que nous payons le prix de nos interventions. C’est Notre Mer : nous sommes moralement et concrètement responsables. »

    Heu, ben non, en fait.

    Nous avons peut-être destabilisé des régimes en place, mais c’était à l’appel de populations locales qui n’en pouvaient plus de se faire massacrer par les dits régimes. Je ne suis pas vraiment favorable à l’interventionnisme, mais il faut quand même arrêter de nous mettre en supériorité par rapport à ces pays. A eux de gérer, pas à nous. On ne peut ni tout faire, ni tout gérer, vu que de toute façon, il n’y a que des mauvaises décisions à prendre, et que des conséquences néfastes. Et que nous sommes trop ignorants, de loin, pour pouvoir discerner de manière appropriée.

    S’il faut une intervention militaire, les mêmes causes produisant les mêmes effets, on sera accusé de néo-colonialisme, etc, bref, c’est perdu d’avance.

  • @ Polydamas : nous pouvons, aussi, apprécier les conséquences de nos interventions. J’étais, moi aussi à l’époque, plutôt favorable à l’intervention en Libye, mais je pouvais présumer que nous avions une idée de ce que nous ferions ensuite. Au lieu de cela, nous sommes intervenus et sommes repartis précipitamment, alors que le moindre spécialiste militaire (et j’en ai en l’occurrence entendu trois sur le sujet, en public ou en privé) souligne qu’une action militaire ne peut être correctement engagée que dans une politique d’ensemble. Manifestement, il n’y avait personne qui soit en mesure de gérer le pays ensuite. En Syrie, nous n’avons visiblement pas été capables non plus d’adapter notre politique à la réalité du terrain, et de constater qu’il n’y a pas de force politique susceptible de faire pièce d’Al Assad.

    Polydamas a écrit :

    S’il faut une intervention militaire, les mêmes causes produisant les mêmes effets, on sera accusé de néo-colonialisme, etc, bref, c’est perdu d’avance.

    C’est un risque, en effet. Mais sauf à mettre les côtes libyennes sous blocus, nous risquons fort d’être très immédiatement concernés par les développements dans ce pays. Quant aux mêmes causes qui produiraient les mêmes effets, il faudrait s’entendre sur les causes. Si la cause, c’est une action militaire décidée dans la précipitation, sans présence par la suite ni vision politique, oui, cela produira les mêmes effets. Nous ne sommes pas forcément condamnés à reproduire ce schéma.

    Enfin, je ne crois pas que la question soit celle d’une supériorité / infériorité. Plus une question de lucidité : aujourd’hui, il n’y a plus rien en Libye. Et si une entité émerge, cela risque bien d’être l’Etat Islamique, déjà implanté d’ailleurs.

  • Koz a écrit:

    Par humanité, par responsabilité,

    pour ne pas nous renier

    C’est bien là un aspect essentiel du problème. L’Europe n’attire pas par hasard.
    Notant que Koz a auréolé du même titre latin que moi son article sur le sujet, j’en profite pour rebondir.
    On a ici un choc de civilisations qui implique nécessairement une prise de position claire pour apaiser la situation. Et je me pose la question: bien en mal d’être nous-mêmes (cf mon analyse), comment aider efficacement autrui à régler ses problèmes?

    J’agrée bien sur à ton analyse: le chantier est immense et notre devoir.

    http://jenesuispasseul.fr/2015/04/mare-nostrum/

  • La politique d’ensemble sur le terrain, je suis d’accord, mais soyons réalistes trente secondes, je ne vois aucune politique d’intervention récente permettant de rééquilibrer un pays après destitution du dictateur en place. Même les Américains, avec leurs moyens exceptionnels, n’y arrivent pas vraiment en Afghanistan et en Irak, les attentats continuant régulièrement là-bas. Et nous aurions la prétention d’y parvenir là où les USA n’ont pas non plus franchement réussi ?

    Désolé, mais à moins de remettre une armée en mode détection du terrorisme, genre Algérie Française (dont on a vu le magnifique résultat), j’y crois pas.

    Au contraire, je pense qu’il est temps d’engueuler copieusement les institutions stables des pays d’émigration (je pense à l’Afrique noire, là, comme indiqué sur Twitter), voire d’entamer des mesures de rétorsion. Quant aux pays en guerre, à moins de parquer les réfugiés dans des pays intermédiaires et rémunérés pour, malheureusement, je ne vois pas vraiment de solutions.

    On ne fait pas le bonheur des gens à leur place.

  • Je partage l’essentiel de votre analyse, en particulier sa conclusion et l’observation, dans vos commentaires, que, si il fallait sans doute aller en Libye, il fallait y aller avec une vision et la mobilisation de moyens à long terme. Las, comme dans la plupart des sujets c’est surtout le temps médiatique qui fut la mesure de notre engagement.
    Je mettrais un bémol sur le regard que vous portez sur les victimes : « personnes aussi désespérées que déterminées ». L’une des clés, justement, n’est-elle pas dans ce fol espoir projeté sur « notre » monde qui fait d’elles des personnes déterminées et pleines d’espoir. Ne devrait-on pas tout faire pour largement faire connaître à travers l’Afrique, non seulement les risques du voyage mais la dureté de la réalité de la vie des migrants en Europe ? Notre devoir, et la seule solution pérenne, reste de faire naître l’espoir d’une vie meilleure par le développement en leur donnant les outils pour faire fructifier cette incroyable détermination.

    Difficile de ne pas faire le lien, politique, avec l’absence de réforme de l’Etat qui nous empêche de libérer les moyens pour une stratégie de long terme d’aide au développement : encore une opposition manifeste entre temps long et temps médiatique.

  • Et si on mettait à écouter, infiltrer, neutraliser, les organisateurs de ces trafics, les moyens que notre gouvernement se propose de mettre en oeuvre pour surveiller la société française, espérant au passage quelques dividendes politiques et fiscaux ?

  • Polydamas a écrit :

    Même les Américains, avec leurs moyens exceptionnels, n’y arrivent pas vraiment en Afghanistan et en Irak, les attentats continuant régulièrement là-bas. Et nous aurions la prétention d’y parvenir là où les USA n’ont pas non plus franchement réussi ?

    Je te trouve soudain bien pessimiste sur nos capacités. Oui, de fait, je pense qu’il y a des choses que l’on peut réussir là où les Américains se plantent. Mon souvenir est ancien, les faits le sont aussi, mais il me semble bien me souvenir que, précisément, les US arrivés avec leurs gosses godillots en Somalie pour Restore Hope ont passé le flambeau à l’armée française dans pas mal de zones, parce qu’elle savait mieux y faire avec les populations locales. Les US ont imposé une vision communautariste à l’Irak, qui n’existaient pas avant eux. Ils se sont comportés avec le parti Baas comme s’il s’agissait du parti nazi, et ont décimé tous les cadres civils et militaires. Alors, la France et/ou l’Union Européenne sont-elles vraiment incapables de ne pas commettre les erreurs des US ? J’avais encore un espoir que cela soit possible.

    Polydamas a écrit :

    Au contraire, je pense qu’il est temps d’engueuler copieusement les institutions stables des pays d’émigration (je pense à l’Afrique noire, là, comme indiqué sur Twitter), voire d’entamer des mesures de rétorsion. Quant aux pays en guerre, à moins de parquer les réfugiés dans des pays intermédiaires et rémunérés pour, malheureusement, je ne vois pas vraiment de solutions.

    Ah oui. Ce n’est pas toi qui me parlais, plus haut, du fait que nous ne devions pas nous mettre en supériorité ? Mais nous irions, en revanche, les « engueuler copieusement » ? Et entamer des mesures de rétorsion, ça a l’air intéressant. On fait quoi, on les met sous embargo ? Ca résoudra le problème, tiens… Soit dit en passant, il y a bien des cas où nous sommes assez contents de tirer bénéfice et de leur corruption et de leurs ressources.

    Il faut prendre la situation réelle. Bien sûr, il serait préférable que ces pays sachent mettre en place des régimes stables et démocratiques, ainsi que les politiques économiques qui permettent leur développement. Ce serait formidable. En attendant, ce n’est pas ce qui se produit et nous sommes directement concernés par cela puisque nous sommes des pays d’immigration. Evidemment, on pourrait envisager de les repousser violemment mais, de fait, ils bravent déjà la mort pour venir. J’ai peur qu’un peu plus, un peu moins…

    Il n’y a évidemment pas de solution miracle mais ton « on ne fait pas le bonheur des gens à leur place » ressemble un poil à un « qu’ils se démerdent« , que je trouve très irréaliste, y compris du point de vue de notre intérêt égoïste.

    François D a écrit :

    Ne devrait-on pas tout faire pour largement faire connaître à travers l’Afrique, non seulement les risques du voyage mais la dureté de la réalité de la vie des migrants en Europe ?

    Il y en a certainement qui ignorent les risques du voyage, mais il ne faut pas croire que tous ne soient pas au courant. Bien au contraire, certains tentent même la traversée à plusieurs reprises et ont largement l’occasion de constater personnellement les risques. Quant à la dureté de la vie des migrants en Europe, c’est une vaste blague au regard de ce que certains fuient.

    François D a écrit :

    Notre devoir, et la seule solution pérenne, reste de faire naître l’espoir d’une vie meilleure par le développement en leur donnant les outils pour faire fructifier cette incroyable détermination.

    Difficile de ne pas faire le lien, politique, avec l’absence de réforme de l’Etat qui nous empêche de libérer les moyens pour une stratégie de long terme d’aide au développement : encore une opposition manifeste entre temps long et temps médiatique.

    Notre aide au développement est en effet dérisoire et il est en baisse de 20% depuis 2012. Mais je doute que l’obstacle premier à une politique de développement soit l’absence de réforme de l’Etat. Je mettrais l’absence de volonté en premier, suivie de très près par le populisme.

    Aristote a écrit :

    Et si on mettait à écouter, infiltrer, neutraliser, les organisateurs de ces trafics

    Ça pourquoi pas. Ce serait une chose à court terme. Encore faut-il être prêt à des interventions armées sur le sol Libyen.

  • La lecture de ce billet me laisse un certain malaise.

    Pas en raison des drames qu’il évoque, car je n’ai pas attendu de vous lire pour avoir une conscience ou un semblant de compassion ou d’humanité…

    Mais en raison de la façon dont il est écrit, en abusant du « nous » dans l’idée sans doute de « responsabiliser » le lecteur, en lui faisant porter une part du poids de ce qui se passe aujourd’hui en mer. Est-ce au lecteur lambda ou à nos élites que ce texte est adressé? Ce n’est pas précisé…

    En quoi devrais-je me sentir responsable des mafias de passeurs qui abusent de la faiblesse de ceux qui se sentent acculés au départ ? En quoi serai-je responsable des guerres civiles qui déchirent certaines nations ? Ou encore des exactions de certains fondamentalistes ?

    Parce que je suis le citoyen d’un pays qui a pu avec d’autres mener à certaines époques une politique étrangère irresponsable, sans en mesurer ou prévoir les conséquences futures?

    Hélas ! Comment serai-je tenu pour responsable de choix faits avant ma naissance ? Comment serai-je tenu responsable des politiques menées par des hommes que je n’ai pas choisis ? Comment serai-je tenu pour responsable que ces hommes ne soient pas doués de dons de voyance ? Et lorsque j’ai pu voter pour certains de ces puissants, étais-je réellement tenu informé de leurs projets en matière de politique étrangère, point le plus opaque de toutes les gouvernances ? Est-ce à moi qui doit choisir entre payer mes impôts et partir en vacances qu’il incombe de mettre une fois de plus la main au portefeuille pour prendre en charge les coûts des préconisations aujourd’hui faites pour atténuer les conséquences des scandales provoqués par ceux qui ont provoqué tout cela en s’enrichissant ?

    Mon Dieu ! Quel égoïste je fais en osant parler de mes vacances là où d’autres meurent dans cette Méditerrannée où je n’ai pas les moyens d’aller l’été… sans doute par ma faute parce que je n’en fais pas assez!

    Suis-je donc un irresponsable chronique ou un égoïste sans cœur, rétif au yaka-fokon aux accents BHLiens, de me sentir avant tout impuissant avec la peine et l’angoisse qui m’étreignent en constatant à quel point le monde dans lequel nous vivons s’enfonce dans la barbarie, tandis que je suis de plus en plus pauvre?

    Moi je pensais simplement faire partie des sans dents à qui on ne demande leur avis qu’après l’avoir manipulé, et jamais pour faire davantage que semblant d’en avoir tenu compte… Voilà que j’ai une responsabilité dans tout ça, et que je dois encore contribuer à régler des problèmes que je n’ai pourtant pas contribué à créer…

    Je suis ravi d’être passé par là !

  • J’étais favorable en 2011 à l’intervention en Libye, et je crois toujours qu’elle était justifiée. Ceux qui la reprochent aujourd’hui à Nicolas Sarkozy oublient que l’alternative, ne rien faire, était pire dans l’immédiat, et avait des conséquences tout aussi incertaines sur le long terme.

    Cela dit, il est clair que les Occidentaux n’ont pas assumé leurs responsabilités dans une politique de suivi, après avoir aidé au renversement du dictateur. Mais, il faut l’avouer, la raison véritable de cette absence est que nous ne tenions pas du tout, nous l’opinion publique, à envoyer des soldats sur le terrain. En ne faisant rien de concret après la défaite de Khadafi, nos gouvernants n’ont fait que se conformer, sans courage, à la volonté du peuple.

    Aujourd’hui, nous sommes à court de solutions. La seule qui serait réellement humaine serait d’accueillir ces gens purement et simplement comme les réfugiés qu’ils sont. Je ne nous en crois hélas pas capables. Financièrement, nous le pourrions, mais politiquement, on dirait que nos sociétés se sont bloquées au point de rendre cela impensable.

    Un passant a écrit :

    Voilà que j’ai une responsabilité dans tout ça, et que je dois encore contribuer à régler des problèmes que je n’ai pourtant pas contribué à créer…

    La vérité est que nous sommes coupables collectivement de non-assistance à personne en danger de mort, et nous refusons de le voir. Il est tellement plus confortable de demander qu’on punisse les trafiquants de clandestins…

  • @ Un passant : Ah ça je vous accorde volontiers qu’il est un peu déplacé et présomptueux de ma part de solliciter mes contemporains sur leur esprit de responsabilité. Dès que l’on dépasse la responsabilité directe et individuelle, il n’y a plus personne. Il en serait autrement dans un pays qui aurait le sens du collectif et de la Nation, par exemple.

    Mais tout de même. Si l’on essaie de s’abstraire de la culture de l’irresponsabilité, nous avons tous une responsabilité dans la marche de notre pays. Précisément parce que nous sommes un pays et que, qu’on le veuille ou non, par exemple, le Président est celui de tous les Français. Et parce que nous sommes aussi responsables de ce que nous ne faisons pas, comme par exemple, s’efforcer de sensibiliser les autres ou agir concrètement avec une assoce.

    Aussi parce que nous avons la chance, sans y être le moins du monde pour quoi que ce soit, de vivre dans un pays prospère et que, avec ceux qui n’ont pas eu cette chance, nous faisons partie de la même humanité.

    Evidemment, on peut se contenter, quand quelqu’un vient crever de faim à notre porte pendant qu’on dîne, de dire qu’on n’y est pour rien s’il n’a pas bouffé. Mais on est responsable, alors, de ce que l’on ne fait pas pour l’aider.

    Gwynfrid a écrit :

    Cela dit, il est clair que les Occidentaux n’ont pas assumé leurs responsabilités dans une politique de suivi, après avoir aidé au renversement du dictateur. Mais, il faut l’avouer, la raison véritable de cette absence est que nous ne tenions pas du tout, nous l’opinion publique, à envoyer des soldats sur le terrain. En ne faisant rien de concret après la défaite de Khadafi, nos gouvernants n’ont fait que se conformer, sans courage, à la volonté du peuple.

    Je suis dans la même situation que toi, et tout à fait d’accord. Pour moi le problème est surtout là, dans le fait qu’il n’y a eu aucun suivi après l’opération. Nous nous sommes contentés d’aller bazarder un dictateur – dans un pays clanique – sans assurance suffisante qu’il y ait une alternative politique. D’ailleurs, il me semble qu’à la base, le mandat était de stopper Khadafi et que nous l’avons dépassé en faisant chuter le régime.

  • Il y a quand même un problème avec le monde arabo-musulman. Il paraît incapable de s’extraire du cycle maudit tyrannie – fanatisme religieux – intervention étrangère. Personne n’arrive à les aider à s’en sortir. La France n’y arrive pas, la Grande-Bretagne n’y arrive pas, les US n’y arrivent pas, Israël n’y arrive pas, la Chine non plus n’y arrive pas.

    L’histoire a montré qu’un pays pouvait se relever du génocide, du nazisme, du communisme, de la colonisation, de deux bombes atomiques… Je ne sais pas quelle malédiction a frappé le monde arabo-musulman, mais elle ne pardonne pas.

    De l’Atlantique à l’Océan Indien, à l’exception (croisons les doigts) de la Tunisie, il n’y a que des régimes plus ou moins horribles : Maroc, Algérie, Libye, Egypte, territoires palestiniens, Syrie, Jordanie, Irak, Koweit, Arabie Saoudite, Qatar, Emirats, Oman, Yemen… Au mieux des monarchies éclairées ; au pire… Et si on sort du monde arabe, vers le sud (Mauritanie, Mali, Niger, Nigeria, Soudan…) ou vers l’est (Turquie, Iran, Afghanistan, Pakistan…) ça ne s’arrange pas.

    Alors, que faire?

    Aucune idée. Mais dans la mesure où tout ce qu’ont fait nos dirigeants a eu un effet tellement catastrophique que tu juges que nous avons une responsabilité collective, j’aimerais autant que nos dirigeants ne touchent plus à rien.

    Gwynfrid a écrit :

    La vérité est que nous sommes coupables collectivement

    La culpabilité collective est un concept totalitaire. Au mieux il y a un ensemble de personnes qui sont coupables individuellement. Si tu penses que Un passant, ou moi ou toi ou koz sommes individuellement coupables, dis-le et nous aurons peut-être une discussion fructueuse.

  • Ce serait bien-fondé si cela ne virait pas à une forme d’irresponsabilité généralisée, Lib. Dans un système politique, les élus reçoivent un mandat de leurs électeurs. Et quoi que je pense du pouvoir en place, il a reçu mandat des électeurs. Nous déléguons à un niveau supérieur d’organisation ce que nous ne pouvons réaliser individuellement. En l’occurrence, aller sauver les migrants en mer méditerranée seuls est assez certainement improductif. S’il s’agit, avec le genre de raisonnement que tu nous proposes, d’aboutir à la conclusion que tant que l’on ne fait rien personnellement, individuellement, on n’a qu’à fermer sa … – une variante plus élaborée du classique : « et toi, tu accueilles des réfugiés dans ton jardin ? Non ? Alors ta gueule » – ce serait juste une bonne manière de se défausser, au final.

  • Il me semble faux de dire que nous devons devons agir parce que nous sommes responsables de la situation. Le Christ ne s’est pas incarné parce qu’il était responsable du « péché d’Adam ».

    Nous devons agir parce que nous voulons rester des êtres humains. C’est-à-dire que nous voulons faire ce qui est en notre pouvoir pour améliorer la situation.

    Encore faut-il que quelque chose soit en notre pouvoir. Il y a là matière à discussion et éventuellement à désaccord entre personnes de bonne foi.

    Faire quelque chose pour se sentir bien ne mène à rien. Faire quelque chose qui a quelque chance de les aider, oui.

  • Il me semble que le seul fait de ne pas s’assoupir sur la situation, faire en sorte que les décideurs soient un peu aiguillonnés dans leur si faillible volonté d’action, qu’ils aient un minimum le sentiment que cela reste « un sujet », c’est déjà faire quelque chose. On a beau jeu de dire qu’on ne fait que se donner bonne conscience – et, si vous me pardonnez la mise en abyme, penser que les autres se donnent bonne conscience est aussi une façon de… se donner bonne conscience – mais non, s’abstenir de dire sa préoccupation, c’est déjà porter une part de responsabilité.

    Soit dit en passant, ce serait excessivement optimiste de penser qu’il n’est pas nécessaire de le dire parce que tout le monde partagerait cette même préoccupation.

  • C’est @ Un passant:
    Ce n’est pas votre faute si des milliers de migrants fuient leur pays et meurent en mer. Mais ça le deviendra si vous ne faites rien. A notre niveau, il est impératif d’interpeller nos élus et d’élever la voix. IL faut que tous les moyens soient mis en œuvre pour sauver la vie de ces migrants. D’autres difficultés surgiront ensuite, mais pour l’instant, il faut éteindre l’incendie. Et pour la suite, je dois dire que je sèche : on ne peut plus accueillir tous ces migrants et aller les protéger sur place semble voué à l’échec (d’autant plus qu’une fois installé sur place, il est impossible de repartir).

  • Anne a écrit :

    on ne peut plus accueillir tous ces migrants

    Et même cela, ne soyons pas trop pressés à nous le dire. Vous voulez connaître la part de réfugiés dans la population totale au Liban, par exemple ? Chez eux, c’est un peu l’extrême inverse et il n’y a pas lieu de vouloir arriver à leur situation, mais pour autant, il y a des pays qui en font bien plus pour les réfugiés que nous ne le faisons. La seule question, c’est de savoir où une société place le curseur de sa capacité d’accueil. Et je doute que le facteur limitant soit avant tout économique.

    N’en déduisez pas que je considère comme illégitime toute limitation, ou le souci de l’intégrité du pays, mais je me méfie juste de ces certitudes un peu rapides.

  • « Nous devons agir parce que nous voulons rester des êtres humains. C’est-à-dire que nous voulons faire ce qui est en notre pouvoir pour améliorer la situation. »
    « et toi, tu accueilles des réfugiés dans ton jardin ? Non ? Alors ta gueule » Il y a partout en France des femmes et des hommes qui n’accueillent pas des réfugiés dans leur jardin mais chez eux. Et certains d’entre eux le font depuis la guerre d’Espagne. Ils le font avec détermination et constance et discrétion. Ils se gardent bien d’en parler. Je vous affirme qu’ils existent. Quant à nous, nous pouvons toujours aider la Cimade, RESF, le CCFD Terre Solidaire, l’AED. Nous aiderons ainsi à aider les réfugiés. Et il existe bien entendu d’autres organisations qui le font. Quand au monde arabo musulman il se pourrait bien effectivement qu’il ait un problème: nous et notre tendance à divorcer par consentement du plus fort. Voir les deux liens suivants: http://journaldeclasse.over-blog.com/article-2427021.html et http://fr.wikipedia.org/wiki/Exode_palestinien_de_1948

  • jfsadys a écrit :

    Quant à nous, nous pouvons toujours aider la Cimade, RESF, le CCFD Terre Solidaire, l’AED.

    Et qui vous dit que je ne les aide pas ?

    Le billet de Koz questionne la réaction des autorités gouvernementales et la pression que nous pouvons essayer de mettre sur celles-ci. En discuter ne préjuge pas de ce que nous pouvons par ailleurs faire à titre privé.

  • jfsadys a écrit :

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Exode_palestinien_de_1948

    je suis bien incapable de démêler les responsabilités dans la tragédie de l’exode des réfugiés palestiniens.

    Mais ce que l’on sait, c’est que dans les mêmes années d’après-guerre des millions de personnes ont été déplacées : Allemands des Suèdes, frontières de la Pologne déplacées de 200 km vers l’ouest, etc. On mentionnera seulement pour mémoire le retour des Français d’Algérie. Il n’y a plus de camps de réfugiés…

  • @ Koz:
    Je doute qu’on puisse en accueillir beaucoup plus…
    Et par ailleurs, il faut bien également régler les problèmes sur place et stopper la progression des terroristes qui depuis des années et des années, endoctrinent, violent, forment les garçons à la guerre, font des enfants aux femmes, pour encore engendrer des futurs terroristes. Il y a 20 ans, en Egypte dans un camp de lépreux près du Caire, j’ai assisté à cet endoctrinement par des islamistes très doués dans la manipulation qui débarquaient incognito sur les terrains de sport de fortune où les enfants de lépreux passaient leur journée. Que sont devenus ces enfants magnifiques et plein de vie? Les terroristes sont tellement en surnombre. Alors c’est vrai que les différents groupes finissent pas s’entretuer… mais ils progressent et s’étendent.

  • @ Aristote: Je ne doute pas que vous les aidiez, ceux que j’ai cités ou d’autres et je ne vois pas ce qui peut vous faire penser que j’en ai douté un instant puisque j’ai repris une de vos phrases que je partage et que je trouve juste. J’ai passé l’âge de faire pression sur les politiques pour qu’ils fassent à ma place. Mais si Koz et vous même y parvenez je n’y trouverai rien à redire bien au contraire. Et je ne trouve rien à redire à son billet ni à vos commentaires. Je n’ai fait aucune critique juste une série d’affirmations. Pour ce qui est des responsabilités concernant ce qui arrive aux Palestiniens peu importe ce que vous ou moi en pensons. Le problème c’est ce que les autres en pensent. Et le fait que des millions de personnes ont été déplacés depuis la seconde guerre mondiale ne justifie pas le sort qui est fait aux Palestiniens depuis plus de 60 ans. » On mentionnera seulement pour mémoire le retour des Français d’Algérie. Il n’y a plus de camps de réfugiés… » Aristote, je vis en Lot-et-Garonne et j’y ai travaillé en tant qu’instit. Un département qui a connu, qui connaît des camps de réfugiés indochinois et harkis: http://fr.reuters.com/article/topNews/idFRPAE88N02220120924
    Pour ce qui est de la situation présente des réfugiés de par le monde voir lien suivant: http://www.unhcr.fr/pages/4aae621e2ab.html Le plus grand camp de réfugiés actuellement se trouverait au Kenya: plus de 450 000 réfugiés.

  • @anne

    J’ai posté un autre billet qui étrangement n’a pas passé le cap de la modération…

    J’y disais que justement si je dois choisir entre partir en vacances et payer mes impôts c’est parce que je suis payé des nèfles à travailler dans un service social qui vient en aide à ceux « qui crèvent de faim à votre porte »…

    Et je demandais à Koz ce qu’il faisait concrètement lui à part interpeller la responsabilité du citoyen lambda qui n’est jamais qu’appelé à voter pour des gens dont on ignore toujours ce qu’ils feront une fois au pouvoir.

  • Bonjour,

    Je ne suis pas sûr de comprendre l’argument de la responsabilité européenne. S’il s’agit de personnes fuyant le chaos lybien ou irakien, alors je suis d’accord, l’Europe porte une responsabilité. Mais il me semblait que la Lybie était surtout une plaque tournante et donc que les migrants venaient majoritairement de pays d’Afrique sub-saharienne, attirés par les promesses d’une Europe riche (illusion qui se dissipera rapidement : pour accompagner des immigrés demandant le Baptême sur ma paroisse, je vois bien l’exploitation qu’ils subissent, souvent par leurs propres concitoyens installés en France : c’est de l’esclavage moderne et les esclavagistes sont leurs propres « frères »). Non pas que le drame humanitaire soit moins important, bien entendu, mais quelle est la responsabilité de l’Europe dans le fait que des personnes quittent leur pays pour chercher une vie meilleure en Europe ? N’y a-t-il pas une responsabilité plus grande des pays africains qui laissent partir leurs ressortissants dans de telles conditions ?

    Qu’il y ait une obligation morale d’agir pour arrêter cette hécatombe, cela va sans dire. Mais que l’Europe soit responsable, donc en un sens coupable, je ne le saisis pas.

    Cordialement,

  • Koz, tu mets le doigt là où ça fait mal.
    Nous, France et Europe, sommes face à un dilemme quasi-insoluble… et dont il va falloir se sortir.
    D’un coté, comment laisser périr en mer des gens par centaines et par milliers ? De l’autre, sommes nous en capacité d’accueillir les 500 000 migrants qu’on nous annonce pour cette année ?
    D’autant que les derniers incidents laissent supposer que ce ne sont pas des populations particulièrement calmes et pacifiques. Le risque d’importer tous les conflits est grand. Que ces populations posent d’énormes problèmes est plus qu’un risque.
    On nous présente l’exemple australien qui a réussi à juguler le problème. La différence, c’est qu’ils n’ont pas l’EI en face, qui utilise les flots de migrants comme arme de destruction massive.
    La réponse sera sans doute en partie militaire, peut-être essentiellement navale, ce qui limiterait les risques d’enlisement. Ce sera cependant une véritable guerre et ce ne sera pas propre. Sommes-nous moralement prêts à l’assumer ? Je l’espère car le risque est grand pour nos pays affaiblis d’être entraînés dans une spirale infernale.

  • On est quand même bien un peu responsables collectivement et individuellement de ne pas avoir fait pression, de ne pas faire pression sur nos gouvernements de leur complicité avec des régimes dictatoriaux et/ou mafieux (le clan des généraux en Algérie par exemple), juste pour assurer nos approvisionnements en gaz ou pétrole. On est bien un peu responsables collectivement et individuellement de ne pas vouloir changer notre mode de vie ultraconfortable qui appauvrit (accaparement des terres pour le soja, la canne à sucre, l’huile de palme = nourriture industrielle). On est bien un peu responsables collectivement et individuellement d’acheter des outils, du matériel produit avec des minerais du sang. On est bien un peu responsables collectivement et individuellement de ne rien faire en Erythrée, au Guatemala, au Honduras, ou les multinationales occidentales des minéraux, du pétrole exploitent, polluent sans vergogne, ne paient pas de royalties. On est bien un peu responsables collectivement et individuellement d’acheter des produits fabriqués dans des conditions lamentables. Les USA sont bien un peu voire beaucoup responsable du chaos économique qu’ils ont créé en Amérique Centrale, et qui leur revient en pleine face aujourd’hui avec les milliers de migrants qui quittent des pays où ils ont installé plein de maquilas… Bien sûr que si on est responsable, de notre cécité, de notre aveuglement face à un mode de vie insoutenable, qui crée de la violence et de la pauvreté dans les pays du Sud.

  • @ Xavier : comme je l’ai écrit dans le billet, cette responsabilité n’est « certes pas exclusive ». Simplement, je pense utile de se pencher sur nos responsabilités plutôt que de se borner à pointer celles des autres.

  • Lecteur de votre blog, et plein de compassion pour les victimes de ce drame humain, je demeure sans voix à la lecture de votre billet :

    • La France, ni l’Europe, ne peut accueillir toute la misère du monde, à partir d’un certain seuil, il en va de la survie de notre identité, que vous pensez préserver en nous laissant submerger par ce flot qui ne va aller qu’en s’accroissant…

    • Notre époque est soumise de façon aveugle à la dictature de l’émotion : je ne suis EN RIEN coupable de la mise à l’eau par des passeurs mafieux/islamistes de ces individus.

    • En tant que juriste, je ne comprends pas que ne vous arrêtiez pas un instant sur la notion de légalité, de frontière… Il me semble bien que ces personnes sont des clandestins, dont la vocation est de retourner de l’autre côté de la Méditerranée…

    A vous lire

  • Koz a écrit :

    @ Xavier : comme je l’ai écrit dans le billet, cette responsabilité n’est « certes pas exclusive ». Simplement, je pense utile de se pencher sur nos responsabilités plutôt que de se borner à pointer celles des autres.

    Oui, mais quelle est la responsabilité de l’Europe ? C’est cela que je peine à comprendre. L’Europe est-elle responsable que des hommes et femmes s’entassent dans des bateaux de fortune pour tenter de la rejoindre ? Si oui, pour quelles raisons ? L’Europe a-t-elle déstabilisé les pays d’où viennent ces personnes ? Les a-t-elle appauvris au point que leurs ressortissants doivent fuir pour assurer leur survie ?

  • @ Charlie : ah cette fameuse « misère du monde », que l’on demanderait à la France d’accueillir toute entière. Elle est si pratique, si commode, cette pauvre expression. Ainsi donc nous n’aurions pas d’autre choix : c’est soir fermer hermétiquement les frontières, soit accueillir toute la misère du monde ? Mais qui vous le demande ?

    Charlie a écrit :

    Notre époque est soumise de façon aveugle à la dictature de l’émotion : je ne suis EN RIEN coupable de la mise à l’eau par des passeurs mafieux/islamistes de ces individus.

    N’oubliez pas que la compassion n’est pas la seule émotion imaginable. La colère et la haine sont aussi des émotions, et l’on pourrait aussi, avec un peu de bonne volonté, y ajouter l’égoïsme. Vous verrez que cette dictature a certainement plus d’emprise que vous ne l’imaginez. Pour le reste, je vous laisse trouver ma réponse dans mes commentaires précédents. Idem pour @ Xavier.

    Charlie a écrit :

    En tant que juriste, je ne comprends pas que ne vous arrêtiez pas un instant sur la notion de légalité, de frontière… Il me semble bien que ces personnes sont des clandestins, dont la vocation est de retourner de l’autre côté de la Méditerranée…

    Parce que je n’en vois pas l’intérêt. Et que le fait d’être juriste n’implique pas d’être légaliste, de croire que le respect des lois est un absolu. Et, bien que juriste, quand quelqu’un se noie, je ne lui demande pas d’abord ses papiers. Ne m’en veuillez pas.

    De surcroît, il faudrait en outre que vous m’indiquiez où j’aurais dit que tous ces migrants devraient être régularisés.

  • Ah oui. Ce n’est pas toi qui me parlais, plus haut, du fait que nous ne devions pas nous mettre en supériorité ? Mais nous irions, en revanche, les « engueuler copieusement » ?

    Entre adultes, on peut s’engueuler copieusement, ça fait partie de la vie, la preuve, nous… 🙂
    Ce n’est pas pour ça qu’il y a une relation de supériorité, faut les considérer comme des adultes sur le continent africain, leur foutre la paix, leur laisser gérer le problème comme des grands. Et oui, nous, on se replie, on les laisse, quoi.

    les US arrivés avec leurs gosses godillots en Somalie pour Restore Hope ont passé le flambeau à l’armée française dans pas mal de zones, parce qu’elle savait mieux y faire avec les populations locales

    Je n’y connais rien sur l’Afrique. Tu as peut-être raison, je ne sais pas, mais dans cette région du monde, au contraire, la France est, parait-il, impliquée dans le génocide rwandais. Pas d’avis sur la question, mais, si à chaque fois qu’on intervient, on se prend un procès de la part du TPI, parce qu’on n’a jamais les mains propres (ce qui n’est d’ailleurs pas possible), autant s’arrêter de suite. D’autant que je me méfie comme de la peste des histoires auto-glorificatrices partant du principe que « Nous, nous savons mieux que les autres. » Souvent, ça sert l’idée inconsciente d’un principe de sauveur tout puissant.

    Concernant la corruption et les intérêts économiques, je n’aurais pas le moindre remord à tout couper si l’on pouvait arrêter le flux d’immigrés, faut les laisser décider les Africains, ça vaut sur tous les plans, même économique. On arrête la Françafrique, on arrête tout, oui.

    Sur la dureté de ce qu’ils vivent, ça dépend où. OK pour les syriens, pour les africains, j’aime bien ce tweet et la conversation s’ensuivant, montrant que c’est presque un truc de gens aisés, l’immigration.

    T’as le droit de laisser ta culpabilité te biaiser, mais tu n’as pas le droit de dire que si je fais confiance aux Africains, ils ne sauront pas s’en tirer. Je ne m’en lave pas les mains, je refuse juste d’être impliqué, sous quelque forme que ce soit, à part pour de l’humanitaire, suivie d’un rapatriement quand c’est possible.

    Première chose qu’on voit en psychothérapie : on ne sauve pas les gens, ce sont eux qui se sauvent eux-mêmes. On aide juste quand c’est absolument et rigoureusement indispensable, pour le reste, c’est à eux de voir.

    Vous voulez connaître la part de réfugiés dans la population totale au Liban, par exemple ? Chez eux, c’est un peu l’extrême inverse et il n’y a pas lieu de vouloir arriver à leur situation, mais pour autant, il y a des pays qui en font bien plus pour les réfugiés que nous ne le faisons

    Très bon exemple, le Liban, l’accueil des réfugiés palestiniens a viré à la guerre civile dès 1975, après que la Jordanie les ai violemment expulsés de son territoire. La guerre qui a suivi au Liban a duré 15 ans. Faudrait que tu te documentes sur la période, c’est instructif.

    @eczistenz

    N’oubliez pas qu’on est responsable aussi du niveau de vie qui s’accroît dans toutes les parties du globe, de l’amélioration des conditions de santé partout, etc. Il ne faudrait pas que votre culpabilité obsessionnelle soit aveugle à ce point. Merci.
    Enfin, ne vous inquiétez pas, les USA seront bientôt remplacés par le nouveau gendarme mondial qu’est la Chine. On ne va pas manquer de rigoler.

    @Gwinfrid :

    Si vous avez voté pour Sarko, vous pouvez vous estimer coupable. Mais ne venez pas nous inclure dedans, tout à fait d’accord avec Lib’ sur ce point. J’ajoute que faire payer les bêtises des gouvernants à toute une partie de la collectivité, notamment celle qui ne les a pas élus, c’est assez dégueulasse, mais bon, on finit par avoir l’habitude de payer pour les autres…

    Bref, j’en ai ma claque de ceux qui veulent me faire porter le chapeau d’une collectivité dont je refuse les politiques. Allez vous plaindre à Sarko, mais pas à moi, je suis pas responsable de ce bazar. La notion de « nation française » dont je serais solidaire a bon dos. A ce titre là, on pourrait presque me faire porter le chapeau des trucs contre lesquels je me suis toujours battus, uniquement parce que j’ai été vaincu dans les urnes.

    Désolé, mais non.

  • Lib a écrit :

    La culpabilité collective est un concept totalitaire. Au mieux il y a un ensemble de personnes qui sont coupables individuellement. Si tu penses que Un passant, ou moi ou toi ou koz sommes individuellement coupables, dis-le et nous aurons peut-être une discussion fructueuse.

    Voilà un argument bien faible pour essayer de se débarrasser d’un problème moral. La responsabilité collective existe en démocratie représentative. Si tu veux absolument la voir sur le plan individuel, il suffit de procéder à une division par le nombre de citoyens ayant le droit de vote. On pourrait à la rigueur la reporter sur nos élus… si ceux-ci avaient agi à l’encontre de la volonté populaire. Or, c’est exactement le contraire qui est vrai: majoritairement, nous ne voulons pas de ces gens chez nous, et nous aimerions mieux que ce soit le problème de quelqu’un d’autre. Le ton dominant des réactions sur ce fil l’illustre assez bien.

    Aristote a écrit :

    Nous devons agir parce que nous voulons rester des êtres humains. C’est-à-dire que nous voulons faire ce qui est en notre pouvoir pour améliorer la situation.

    Pas mieux.

  • Polydamas a écrit :

    la France est, parait-il, impliquée dans le génocide rwandais

    Eh bien, dis-moi, tu as vite fait de brader la France quand ça sert ton propos !

    Polydamas a écrit :

    Sur la dureté de ce qu’ils vivent, ça dépend où. OK pour les syriens, pour les africains, j’aime bien ce tweet et la conversation s’ensuivant, montrant que c’est presque un truc de gens aisés, l’immigration.

    Tu peux te fier à la conversation d’inconnus sur Twitter. Ou lire de vraies informations (voire même regarder la télévision – pas moins crédible qu’un fil twitter de francophones, donc a priori peu Erythréens, Nigerians ou Syriens). Ca t’évitera de dire des saloperies. Et de ramener la psychothérapie là où elle n’a rien à faire. Enfin, chacun ses obsessions…

    Et ne te planque pas derrière des grands discours sur la responsabilité des populations concernées, quand tu nous expliques sur Twitter que tu refuserais d’accueillir les chrétiens d’Orient, d’Irak ou de Syrie, et que tu préfères payer d’autres pays qui seraient prêts à le faire. Il serait un peu gros de venir m’expliquer que ce qui arrive aux chrétiens d’Orient, c’est dû à leur incapacité à se prendre en main, ou à leur irresponsabilité. Tu es dans un bon gros schéma « pas d’étrangers chez moi », faut l’assumer.

    Enfin, sois sympa de cesser de parler de culpabilité, là où je parle responsabilité. Je ne te ferai pas l’injure de t’aider à distinguer ces deux notions.

  • Merci. Enfin je trouve enfin dans votre billet les deux mots qui me semblaient évidents: responsabilité et humanité.

    Avant tout débat, il me semblait tellement évident que ces drames allaient réunir les gens pour une seule chose: faire cesser la mort de centaines personnes. J’ai l’impression d’être tellement naïf. J’entend bien les questions qui peuvent être posées par l’immigration mais des hommes, des femmes et des enfants meurent.

    Quel sens donner à l’Union Européenne si elle n’est pas capable de prendre ses responsabilités et de faire le maximum pour sauver la Vie?

  • Polydamas : ca n’a rien d’une obsession mais juste mon travail au quotidien, depuis 20 ans, et dans une association catholique en plus. J’ai un peu la prétention, étant en prise directe avec ces abus, d’en savoir plus là-dessus que sur la fabrication des opinels. Et je ne me sens pas coupable, justement parce que j’ai adapté mes modes de consommation au maximum pour participer le moins possible des acteurs qui profitent. Vous avez parfaitement le droit de vous en moquer, voire même d’être parfaitement égoïste et cynique, c’est juste que c’est difficile à défendre comme projet de société (surtout après disons 10.000 ans de civilisation humaine).
    Bref, je suis toujours frappé de voir que la communauté internationale est prête à faire ce qu’il faut et le temps qu’il faut (cycle de Doha) pour nous obliger à vendre ou acheter des belles marchandises, mais pour régler les conflits, sauver la planète et le climat, lutter contre la pauvreté, il n’y a plus tant d’empressement que ça…

  • Merci Koz.

    L’existence ou non d’une « responsabilité collective » est une question intéressante qui rappelle Bourdieu. Mais je crois qu’il ne s’agit pas de ça ici. Nous sommes tous concernés en tant que Français car nous disons dans notre Constitution, pour laquelle tant se sont battus et qui a traversé le monde et les siècles :

    « [Les droits imprescriptibles de l’homme] sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression. »

    Nous n’avons pas choisi notre lieu de naissance et ces migrants non plus. Nous devrions pas être pleinement satisfaits de notre état, vivre dans un pays en paix et en République, tant que ces droits ne sont pas garantis à tous. Il me semble que c’est de la simple humilité, plus que de l’humanité.

  • Le droit à l’existence et à un niveau de vie décent

    11 – Tout être humain a droit à la vie, à l’intégrité physique et aux moyens nécessaires et suffisants pour une existence décente, notamment en ce qui concerne l’alimentation, le vêtement, l’habitation, le repos, les soins médicaux, les services sociaux. Par conséquent, l’homme a droit à la sécurité en cas de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse, de chômage et chaque fois qu’il est privé de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté (8).

    Droits d’émigration et d’immigration

    25 – Tout homme a droit à la liberté de mouvement et de séjour à l’intérieur de la communauté politique dont iI est citoyen ; il a aussi le droit, moyennant des motifs valables, de se rendre à l’étranger et de s’y fixer (22). Jamais, l’appartenance à telle ou telle communauté politique ne saurait empêcher qui que ce soit d’être membre de la famille humaine, citoyen de cette communauté universelle où tous les hommes sont rassemblés par des liens communs.

    Extraits de « Pacem in terris », Jean XXIII, avril 1963.

  • @ jfsadys:

    On peut aller plus loin avec « Pacem in terris ».
    Que celles et ceux qui s’en inspirent, appliquent le paragraphe 97 aussi et aillent le dire clairement aux minorités de France :

    97 – On observera pourtant que ces minorités, soit par réaction contre la situation pénible qui leur est imposée, soit en raison des vicissitudes de leur passé, sont assez souvent portées à exagérer l’importance de leurs particularités, au point même de les faire passer avant les valeurs humaines universelles, comme si le bien de toute la famille humaine devait être subordonné aux intérêts de leur propre nation. Il serait normal, au contraire, que les intéressés prennent également conscience des avantages de leur condition : le contact quotidien avec des hommes dotés d’une culture ou d’une civilisation différente les enrichit spirituellement et intellectuellement et leur offre la possibilité d’assimiler progressivement les valeurs propres au milieu dans lequel ils se trouvent implantés. Cela se réalisera s’ils constituent comme un pont qui facilite la circulation de la vie, sous ses formes diverses, entre les différentes traditions ou cultures, et non pas une zone de friction, cause de dommages sans nombre et obstacle à tout progrès et à toute évolution.

    Bien que le domaine de « Pacem in terris » ne semble pas couvert par l’infaillibilité pontificale, j’aime bien ce passage, non ? Qu’attendez-vous pour montrer la voie aux minorités chez nous et qu’elles apprennent de nos richesses de civilisation… 😀

  • Je m’interroge sur cette notion de responsabilité collective. Qui de nos jours peut encore prétendre à la responsabilité collective du peuple allemand des atrocités nazies qui sont pourtant issues d’un choix démocratique?

  • En tout cas , les 28 membres de l’union européenne ont été saisis par l’
    Ensemble des armateurs et des syndicats de naviguants sur l urgence de la situation. 40 000 migrants sauvés par les navires de commerce en 2014, parfois 500 d un coup. les équipages ne sont pas préparés à l accueil d une population qui a parfois des réactions difficiles à gérer avec aussi des problèmes sanitaires.
    Croyez moi, la peur d ébola était très présente dans nos têtes par exemple, cela n empêche pas la solidarité des gens de mer, mais il faut que tous les états européens prennent leur part, pas seulement les riverains de la Méditerranée
    On est assez près de la situation du camp des saints de Jean Raspail

  • @ thierryl:
    « Qu’attendez-vous pour montrer la voie aux minorités chez nous et qu’elles apprennent de nos richesses de civilisation.  » Personnellement c’est ce à quoi j’ai travaillé quand j’étais instit. Avec la satisfaction du devoir accompli. La première récompense étant d’avoir pu le faire. Mais c’était facile sans doute parce qu’en Lot-et-Garonne il n’y a pas de grandes villes et que c’est une terre d’accueil depuis la nuit des temps. Donc les minorités se sont intégrées et se sont enrichies et nous ont enrichi. Quelques uns de mes anciens élèves d’origine étrangère ont particulièrement bien réussi. Grâce à eux bien sûr d’abord. Personnellement je ne m’arrête pas à l’infaillibilité ou non de Pacem in terris. Je considère plutôt les passages que j’ai choisis et celui que vous avez choisi comme des repères, comme des petites lumières d’humanité dans la tourmente actuelle qui montrent le chemin à suivre. 🙂

  • @ gonzo : vous négligez une donnée, et vous n’êtes pas le seul. Vous me parlez de la responsabilité collective, de nos jours, des Allemands pour le nazisme. Mais je ne vous parle pas de responsabilité collective à travers les âges, à travers le temps, mais contemporaine. En outre, vous, comme d’autres, êtes dans le « tout ou rien » habituel : de même qu’on n’aurait le choix qu’entre la fermeture hermétique des frontières ou l’accueil de toute la misère du monde, ce serait la responsabilité collective ou individuelle. Pourquoi la responsabilité collective excluerait-elle la responsabilité individuelle ?

    Oui, les Allemands avaient une responsabilité collective et individuelle face à la montée du nazisme. Oui, ils ont eu ensuite une responsabilité collective et individuelle après cela pour lutter contre toute résurgence.

    Et oui, nous avons une responsabilité actuelle, collective et individuelle. Nous formons un pays, une Nation. Et si nous ne devons pas être Français que pour se battre la coulpe, comme la gauche le fait, nous ne devons pas non plus ne l’être que pour les moments glorieux. Il est un peu facile de passer de la fierté nationale à la responsabilité individuelle selon les faits.

  • Dans les bureaux de l’Europe se prépare, en collaboration étroite avec l’Italie, des camps de jeunes pour aller servir les migrants. Voilà un début d’initiative concrète dont j’ai entendu parler lors de ce week-end que j’ai passé à Strasbourg avec la Communauté de Vie Chrétienne.
    Bon à savoir.

  • A la lecture des commentaires, je sens monter un certain agacement. Le débat disserte doctement de notre responsabilité ou culpabilité, individuelle ou collective.

    Mais ce n’est pas la question !
    Est-ce nous qui dépouillons les migrants en leur présentant ce miroir aux alouettes qu’est l’Europe ?

    Est-ce nous qui les entassons comme du bétail dans des rafiots pourris exposés aux fortunes de mer ?

    Est-ce nous qui les abandonnons à leur sort, avec pour seul espoir de survivre un hypothétique secours extérieur ?

    Non, dans cette affaire nous sommes plus victimes que coupables.
    Victimes, car les flot de migrants sont utilisés comme une arme de destruction par des organisations et des états terroristes qui ont jurés notre perte. Ils veulent nous faire subir le sort du Liban en 1975. L’Europe est plus vaste et plus robuste que le Liban ? Qu’à cela ne tienne, augmentons les flux de migrants, il y a bien assez de misère dans le monde pour fournir les contingents appropriés. Je n’en veux pas aux migrants, il ne sont que les instruments d’une stratégie perverse qui les dépasse.

    Nous sommes encore victimes car le choix entre regarder mourir des hommes ou importer les conflits qu’ils emmènent avec eux est odieux et aucune des alternatives n’est moralement soutenable.

    La méditerranée est désormais une zone de guerre, nous ne l’avons pas voulu, mais il faut en prendre acte. Cette guerre, nous pouvons la gagner, mais encore faut-il la mener.

    Les couches populaires de France et d’Europe ont compris le problème, ce sont les premiers à supporter le choc. Ce qui est attendu des élites, c’est d’assumer leur responsabilité face à l’adversité. Cela, et cela seulement, justifie leur position privilégié. Un discours moralisateur à bon compte, mêlant culpabilisation et principes abstraits est hors saison : ceux qui s’y complaisent sont, eux, coupable d’abandon de poste.

  • Blaise et Ignace : nous serons victimes ???? Vous êtes sérieux là….
    Pour faire suite à la réflexion de Koz sur la situation du Liban, un très très bon article qui remet les idées en place, notamment sur la réalité des migrations :
    http://www.cetri.be/spip.php?article3789&lang=fr
    et sinon l’excellent spot de Data Gueule sur les migrations :

  • C’est amusant de voir comme ce beau billet n’a fait que déclencher des réactions sur la notion de responsabilité collective, ou de culpabilité transgénérationnelle, ou que sais-je…

    La responsabilité collective n’est pas un concept totalitaire, elle n’est d’ailleurs même pas un concept: c’est une réalité juridique. Quand un Etat passe des conventions internationales, il s’oblige, et, sauf à ce que la convention prévoit des limitations de durée, il s’engage au-delà de l’espérance de vie des générations qu’il régit à l’instant de la signature. Dès lors que des sanctions pécuniaires sont prévues, si elles sont actionnées et respectées par l’Etat responsable, ce sont les finances publiques qui en supportent la charge. Si c’est 50 ans après, rien à foutre (en droit): une partie de votre patrimoine individuel sera ponctionné pour assurer le respect d’obligations contractées par des dirigeants politiques pour lesquels vous n’avez pas voté. Ça ne pose pas fondamentalement de problème moral, si?

    La difficulté, c’est que chacun semble ici comprendre « responsabilité collective » comme « responsabilité individuelle de chacun formant la responsabilité de tous ». Ce qui n’est pas le cas. C’est la responsabilité d’une personne juridique unique, appelée État, toujours en droit. Mais le fait est que cette personne juridique est, matériellement, une collectivité. Donc, fondamentalement, n’importe quel traité induit une responsabilité collective et transgénérationnelle. Cette façon d’envisager les RI comme des relations contractuelles est en soi le fruit d’une réflexion essentiellement morale, certes. Qui ne date pas d’aujourd’hui, non plus. Mais, juridiquement, elle existe bel et bien.

    Moralement, c’est certes autre chose. Mais la circonstance que, moralement, l’on puisse rejeter l’idée que dès lors que ça se passe à notre porte, il est difficile de s’en foutre royalement, me laisse un peu songeur…Il me semble que ce billet n’exprimait pas beaucoup plus que ça.

    On peut gloser sur la notion de mandat représentatif (dont je pense pis que pendre), sur la nuance entre responsabilité et culpabilité, etc… mais ce n’est pas l’essentiel du débat, si?

  • @ eczistenz:
    Ah, le CETRI… Désolé, mais un mouvement tiers-mondiste et alter-mondialiste n’inspire pas beaucoup de confiance, surtout sur les questions migratoires. D’ailleurs les présupposés idéologiques se font jour assez rapidement.

    Et oui, quand l’EI organise les transferts de migrants, c’est explicitement dans un but d’aggression, dont nous sommes victimes.

  • Vous me permettrez de recadrer deux choses :

    (1) Si vous cherchez les victimes dans l’affaire, je vous suggère plutôt d’aller chercher au fond de l’eau. Il serait d’assez bon goût de ne pas les oublier;

    (2) Que l’EI organise les transferts est une idée qui arrange bien certains milieux, dont je me demande d’ailleurs s’ils n’en sont pas à l’origine. Aujourd’hui, rien ne permet de l’étayer. Il y a eu un prétendu communiqué de l’EI mais des spécialistes s’accordent pour dire que cela ne dépasse pas la rumeur, et que cette « information » n’a aucune source. Je me souviens très bien des réactions de David Thompson ou de Romain Caillet, sur Twitter, au moment où cette prétendue info est sortie, et qui demandait aux medias où ils l’avaient trouvé. Eux scrutent en permanence les sources d’infos djihadistes et n’ont rien vu de tel. Ce qui est évoqué aujourd’hui, c’est la possibilité qu’une telle jonction se fasse. Rien d’improbable en effet, mais rien d’effectif.

    Alors, voyez-vous, je ne connais pas le CETRI, mais si vous voulez que l’on parle de présupposés idéologiques qui se font jour assez rapidement, je crois qu’on a de quoi soutenir la conversation.

  • Blaise et Ignace a écrit :

    Un discours moralisateur à bon compte, mêlant culpabilisation et principes abstraits est hors saison : ceux qui s’y complaisent sont, eux, coupable d’abandon de poste.

    C’est impressionnant, à quelle vitesse l’idée de secourir des gens de chair et d’os qui sont en train de crever devant notre porte peut devenir un « principe abstrait » dans la discussion.

    @ Braillard:
    Merci pour le rappel de la réalité juridique des relations internationales, c’est bienvenu, même si ce n’est pas central dans un débat qui relève principalement du domaine moral.

  • Koz a écrit :

    Nous déléguons à un niveau supérieur d’organisation ce que nous ne pouvons réaliser individuellement.

    Sans la moindre animosité Koz, on pourrait aussi se demander si cette délégation ne nous sert pas à décréter un peu vite que nous ne pouvons rien faire à titre personnel. Ou à présenter une alternative artificielle entre tout faire tout seul et tout demander à l’Etat. Car il y a une infinité de façon dont les gens peuvent s’organiser pour atteindre un but.

    Tu twittais au sujet de ce couple millionnaire qui a créé une association pour patrouiller la méditerranée et recueillir les migrants. Peut-être acceptent-ils les donations ou recherchent-ils des équipages pour passer quelques mois en mer.

    Pendant la guerre d’Espagne, 40000 étrangers ont pris les armes dans les brigades internationales. Aujourd’hui des millions de personnes twittent #BringBackOurGirls mais personne ne prend les armes contre l’EI.

    Aristote a écrit :

    Nous devons agir parce que nous voulons rester des êtres humains. C’est-à-dire que nous voulons faire ce qui est en notre pouvoir pour améliorer la situation.

    +1000

    jfsadys a écrit :

    Il y a partout en France des femmes et des hommes qui n’accueillent pas des réfugiés dans leur jardin mais chez eux.

    Oui, c’est admirable.

    jfsadys a écrit :

    Quand au monde arabo musulman il se pourrait bien effectivement qu’il ait un problème: nous

    Allons bon.

    eczistenz a écrit :

    Bien sûr que si on est responsable, de notre cécité, de notre aveuglement face à un mode de vie insoutenable, qui crée de la violence et de la pauvreté dans les pays du Sud.

    Quel que soit l’indicateur utilisé, espérance de vie, mortalité infantile, malnutrition, accès à l’eau potable, éducation… la pauvreté recule massivement dans le monde, particulièrement dans les pays qui commercent avec l’occident.

    Gwynfrid a écrit :

    majoritairement, nous ne voulons pas de ces gens chez nous,

    Si tu te comptes dans le nombre, dis « je »; nul besoin de mêler des inconnus à ta position. Sinon dis « vous ». Dans les deux cas, les choses seront plus claires.

    Pour ma part, ma position sur l’immigration est assez proche de ce qui est décrit dans ce remarquable article. Et je ne suis pas sûr du tout que la majorité de nos contemporains s’y opposeraient si on leur en parlait. Bref, je ne dis ni je, ni vous et je n’aime donc pas ton nous.

    Braillard a écrit :

    La responsabilité collective n’est pas un concept totalitaire, elle n’est d’ailleurs même pas un concept: c’est une réalité juridique.

    Que ce soit une réalité juridique n’atténue en rien son caractère totalitaire. Donner à un individu, quel qu’il soit et quel que soit son mode de désignation (héritage, tirage au sort, élection, combat nu dans la choucroute…) le pouvoir de violer la propriété des citoyens contrevient aux droits imprescriptibles dont un contributeur nous a rappelé plus haut qu’ils sont « la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression ». (Article 2 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen)

    Braillard a écrit :

    Mais le fait est que cette personne juridique est, matériellement, une collectivité. Donc, fondamentalement, n’importe quel traité induit une responsabilité collective et transgénérationnelle.

    Vous commettez le contre-sens classique qui consiste à assimiler la société et l’Etat. Dès lors, l’Etat cesse d’être au service des citoyens pour devenir leur maître, voire leur propriétaire. Le fait que vous justifiiez la responsabilité collective par votre conception de l’Etat devrait vous alerter sur votre erreur. La responsabilité collective est d’essence totalitaire puisqu’elle revient à punir une personne pour une faute qu’elle n’a pas commise. Si votre conception de l’Etat y aboutit, c’est qu’elle est viciée.

    Là où vous avez raison par contre, c’est que ce débat est effectivement totalement hors sujet. Comme l’a très bien résumé Aristote, inutile d’invoquer une fausse culpabilité pour agir.

    Ce qui est dans le sujet, mais que presque personne n’aborde, c’est la politique d’immigration.

    • Et, donc, vous êtes tous passés par le même bahut, celui où l’on vous apprend à faire une confusion entre responsabilité collective et culpabilité collective ?

  • @ Lib: J’ai lu l’article que vous mentionnez dans votre commentaire. Un peu rapidement. Je le relirai plus tard. Il me conforte dans une opinion que j’ai depuis longtemps maintenant. Vouloir contrôler l’immigration c’est comme vouloir contrôler le déplacement des nuages dans le ciel. Si ce que l’on nous dit est vrai l’Italie, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Russie ne renouvellent pas leur population. Nous finirons donc par faire appel à l’immigration. Par nécessité. Vous évoquez la guerre d’Espagne et les brigades internationales. J’y pense souvent aussi pour les deux raisons suivantes: une armée de métier peut-elle venir à bout de populations où tout le monde a une arme sur soi et à cause de ce qui s’est passé à la fin de la guerre civile espagnole. Pendant quatre semaines la France ferme ses frontières. Plus ou moins 400 000 personnes restent bloquées dans la montagne, la neige, le froid. Le France ne veut pas laisser rentrer sur son sol les communistes, les anarchistes et leurs armes. Mais celles et ceux qui sont ainsi bloqués ce sont surtout des civils. Parmi eux une jeune femme avec trois enfants de 5 à 9 ans. Ils n’ont sur eux que leurs vêtements, pas d’argent, pas de relations. Ils viennent d’un village près de Barcelonne. Elle n’a aucune nouvelle de son mari. Les enfants n’ont aucune nouvelle de leur père. Il se bat quelque part dans la vallée de Los Caïdos. Elle était l’arrière grand-mère de ma fille aînée. Et pour la petite histoire les communistes et les anarchistes espagnols qui parviendront à rentrer malgré tout en France avec leurs armes feront partie des premiers résistants des maquis de Corrèze et de Dordogne.

  • Pourrait-on mettre un peu de rationalité, qui ne se trouve pas vraiment présent depuis le départ puisqu’on parle de responsabilité collective.

    Il y a en fait deux interrogations et pas une seule qui lierait les deux.

    1. Faut-il sauver par tous les moyens techniques et organisationnels présents en Europe du risque de noyade pour des gens qui prennent la mer avec un danger maximal.
      AMHA oui. Nous savons le faire et nous pouvons le faire.

    2. Faut-il accueillir et héberger tous ces gens en Europe comme des immigrés légaux ? AMHA non. Car nous ne pouvons déjà en France plus le faire dû à l’impréparation, l’engorgement et la crise du logement qui est déjà présente. L’urgence ne transforme pas miraculeusement nos structures en meilleures et plus accueillantes qu’elles ne le sont. C’est un déni de justice pour tous les immigrés légaux qui font la démarche chez nous, et cela crée un appel d’air pour d’autres à continuer de franchir la Méditerranée => C’est là aussi une responsabilité morale, intellectuelle, collective et réelle de ceux qui veulent continuer d’accueillir quoiqu’il en coûte à m’importe qui, que ce soit les gens qui traversent que ceux au nom de qui on accueille sans les avoir consultés ni surtout avoir mis des moyens autres que ceux associatifs et de fortune nécessairement concernant l’ampleur de leur projet.

    Décider à la place des autres et sans préparation en se dédouanant sur une « urgence » qui mêle sournoisement deux problèmes distincts « Accueil » et « Sauvetage » me paraît difficilement soutenable d’un point de vue moral comme l’entendait Pascal c’est à dire du bien penser. C’est même un viol de la conscience et de la décision des autres qui pourraient avoir de meilleures propositions et des réflexions plus raisonnables.

    Quant à retourner la responsabilité pour tenter de faire levier de culpabilité sur les autres. Je me tairai, je n’ai pas envie d’apparaître pour un élégant petit mouton noir aux yeux de la bonne conscience.

  • A Agen, Lot-et-Garonne, l’association « Bienvenue » s’apprête à recevoir une famille irakienne et syrienne. Cette association type loi 1901 est mise en place par des membres des églises catholiques et protestantes de l’Agenais. L’association est soutenue par l’ACAT, le CCFD Terre Solidaire, la Pastorale des migrants et Solidarité Chrétienne.

  • Lib : c’est vrai la plupart des indicateurs s’améliorent, sauf dans les pays en conflit ou en Amérique Centrale. Cela dit, rien qu’en Amérique latine, il reste encore plus de 150 millions de pauvres… qui n’arrivent pas à s’alimenter avec vos taux de croissances à 5 %. 54 % de dénutrition infantile au Guatemala. C’est bizarre, ils ont signé des traités de libre commerce avec les USA, qui promettaient monts et merveilles… résultat, 10 ans plus tard, le commerce se porte bien certes (il n’y a pas que ça dans la vie) mais les économies restent dramatiquement primaire, exportations de matières premières, en échange de téléphones portables et de télés. Un beau paradis, avec des taux d’homicides les plus hauts dans le monde… des milliers de personnes quittent ces pays tous les ans, et de plus en plus de mineurs. Ou serait donc le problème puisque les « indicateurs s’améliorent » ?

  • Quand je suis mal à l’aise avec un problème, je reprends mon CEC ou les écrits de nos papes. Émigrer n’est pas un droit absolu, tout comme ma liberté est bornée. L’immigrant a des droits, qu’aucun catholique ne remet en cause, à epsilon près, mais il a aussi des devoirs : « L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges. » CEC 2241. Dans sa « Lettre à tous les jeunes », Jean-Paul II écrivait qu’il fallait : « défendre l’existence même et l’identité essentielle de la nation des risques de destruction provoqués de l’extérieur et d’une décomposition interne. »

    Tout est donc une question d’équilibre. Si l’on n’y prend garde, on finira par prouver que trop d’immigration va finir par tuer l’immigration (une sorte de courbe de Laffer). Ayant vécu en Afrique, ces phénomènes migratoires déstructurent complètement des États entiers : qui parle des violences xénophobes en Afrique du Sud (1) ou encore au Maroc (2) ? À ceux qui croient que ces scènes ne peuvent se produire en France, je leur conseille de reprendre n’importe quel livre d’histoire. Quant à savoir où se situe notre seuil de tolérance, je n’en sais strictement rien, c’est d’ailleurs pour cela qu’on doit avancer très prudemment dans ce domaine, parce qu’une fois dépassé, c’est déjà trop tard…

    (1) http://www.france24.com/fr/20150416-afrique-sud-vague-violences-xenophobes-durban-johannesburg/

    (2) http://observers.france24.com/fr/content/20140901-tanger-attaques-machette-noirs-africains-maroc-violence-racisme-migrants

  • @ jfsadys:
    Merci pour cet article. Outre le fait historique, ce sont les commentaires qui m’ont estomaqué, surtout venant d’un site de gauche.

  • @ François: On peut vite déraper sur internet… l’anonymat d’un pseudo… l’absence d’un modérateur et … ça peut vite partir en vrille… mais on y découvre alors la diversité des opinions pas toujours raisonnables, rationnelles, fraternelles… « Partout où il y a des hommes il y a de l’hommerie.  » (Saint François de Salles???):+(

  • @ François:

    D’où sortez-vous que ce site est de gauche?
    Et étant donné que ces 60 et quelque contributions montrent qu’il y a débat (y compris entre elles et pas toutes contre koz), pourquoi vous dites vous estomaqué par toutes?

    Je ne sais pas ce qu’il faut faire à part sauver les gens de la noyade, et en général quand je viens sur ce site c’est pour la diversité des points de vue mêlés à une empathie profonde qui se dégage, par delà les échanges parfois vifs entre les intervenants. J’ai appris grâce à Lib à mieux comprendre comment on peut se sentir chrétien et libéral ce qui pour moi n’est pas évident (et le lecteur s’en rendra vite compte!), et je pourrais citer, outre koz lui-même, bien des intervenants qui, s’ils ne me convainquent pas toujours, montrent une volonté d’expliquer leur positionnement avec sérieux et m’obligent à comprendre la diversité parmi les chrétiens (que les non chrétiens me pardonnent mais la proportion de chrétiens est plus élevée sur ce forum qu’ailleurs). Je trouve ici des éléments de réponse (par exemple ces placements via des associations chez des particuliers). Le débat est important entre recueillir (ça tout le monde ici est d’accord) et accueillir. Et si on valide ce point, comment le faire.

    Je me sens coupable de ne pas être capable aujourd’hui de répondre « oui » à une proposition par une association d’accueillir un immigrant en détresse parce que entre autres j’éprouve des difficultés à mener simplement une vie normale, mais il ne fait pas de doute pour moi que tout Etat qui tient un discours comme celui tenu par koz doit ipso facto mettre en oeuvre des procédures d’accueil de temps de guerre, c’est à dire imposer à chaque commune la répartition comme il le pourra de « X » réfugiés politiques en s’appuyant sur les associations existantes pour relayer les problèmes concrets ( entre autres celui de la langue!) permettant au citoyen requis et à sa famille de recevoir le réfugié sans mettre en péril leur travail à eux; le temps n’est pas extensible à l’infini, il ne s’agit pas que d’argent et de locaux quand on s’engage à accueillir autrui. S’agissant des réfugiés économiques, j’avoue que je suis plus circonspect: la plupart des problèmes de pauvreté relèvent de la présence de bandits de grands chemins (parfois au pouvoir) et non plus de l’impérialisme occidental; d’une certain façon, nous fortifions les brutes en leur permettant de vider le pays de ceux qui pourraient y revendiquer quoi que ce soit, à commencer par un partage minimal des ressources ou un respect du pluralisme religieux et politique. De plus, que des médecins et des ingénieurs quittent leur pays parce qu’y exercer leur métier est moins désirable que chez nous, je le comprends, mais c’est de leur part un acte qui n’aide pas leur pays et qui nous arrange (cf le statut des toubibs étrangers à l’hôpital qui nous permet d’économiser des postes de médecine hospitalière).

    Perso, accueillir seul dans mon coin ou à quelques-uns, non je ne m’en sens pas capable; mais être requis par la puissance publique pour le faire, avec les associations et les fonctionnaires « experts » en soutien, oui, cela je pourrais sans doute y arriver. Il est des actes qui supposent d’être imposés pour qu’ils soient massifs. Que chacun se sente participer à une oeuvre nationale plutôt qu’à une oeuvre de charité dont les dimensions requises excluent à mon sens l’efficience. Il n’y a d’ailleurs pas que sur l’immigration d’urgence mais sur la lutte contre la pauvreté que je pense ainsi.

  • @ Lib : j’ai lu l’article en question. Pas inintéressant, même si je souris quand, pour évacuer la question de l’islamisme qu’il soulève tout seul d’ailleurs, il propose de troquer une inefficacité pour une autre. Un peu étonné aussi qu’il propose de conditionner les aides sociales à une durée de séjour. En ce qui concerne déjà l’une des premières, le RSA, elle l’est déjà, puisqu’il faut avoir un titre de séjour depuis au moins 5 ans (et un immigré en situation irrégulière n’a pas de titre de séjour, par exemple). Je n’ai évidemment pas passé au crible toutes les aides, mais le RSA est tout de même assez symptomatique.

  • Mes plus plates excuses à François pour l’avoir mal lu, j’ai cru qu’il citait le site de Koz alors qu’il s’agissait sans ambiguïté de Rue 89.

  • « Que fait l’Europe ? », la question est sur toutes les lèvres. « Que fait l’Europe face à l’immigration et à ces affreux drames à répétition en méditerranée? ». La question vaut réponse : l’Europe ne fait rien. Mais que pourrait-elle bien faire, sinon faire semblant de faire, ce qu’elle fait très bien ? La question de l’immigration est essentiellement nationale. L’Europe en l’affaire est, une fois de plus, une échappatoire bien commode. Se construisant contre les nations et leur frontières, ne sachant toujours pas où sont ses propres frontières, ne sachant même pas ce qu’elle est sinon un objet politique sui-generis, se voulant a-nationale, universelle… comment pourrait-elle avoir une politique d’immigration ? Elle est le paravent de notre aveuglement, de nos égoïsmes, de nos lâchetés !
    La France se devrait d’avoir une politique véritable de coopération avec les Etats et d’avoir une politique généreuse d’accueil, d’asile et d’intégration vis-à-vis des individus.
    Elle devrait contrôler ses frontières, qui d’autre peut le faire à sa place ? Et le faire strictement. Mais sur des bases solides, claires, conformes aux principes de la République, c’est-à-dire généreuses.
    « Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde ». Non, sans doute, mais nous pouvons en accueillir beaucoup. Tous ces malheureux, poussés par une misère absolue et par des violences de la pire espèce, risquent leur vie pour venir chez nous et nous les repousserions, tous ou presque tous, pour préserver notre confort et notre sécurité ?… Ce n’est pas tenable. Nous professons bien la fraternité. Mettons-là en pratique.
    Le monde est en proie à une guerre d’un nouveau type, non déclarée, sans règles ni lois, sans début ni fin, de tous contre tous, faisant arme de tout, sans vainqueurs… Soit nous nous y abandonnons et nous y perdrons notre âme, et notre vie. Soit nous faisons un pas de côté, changeons notre regard, décidons de reprendre en mains notre destin, prenons le parti des victimes et choisissons la paix. Si les deux choix sont risqués, extrêmement risqués, l’un et l’autre, au moins le second n’est-il pas sans espoir.
    Que voulons-nous être, nous la France, qu’attendons-nous de l’avenir ? Répondons à ces questions et la politique d’immigration suivra. Et, qui sait ?, peut-être ferons-nous des émules parmi nos voisins et partenaires européens…
    Pour commencer cessons de nous demander ce que fait ou fera l’Europe, c’est inepte, honteux !

  • @ Denis Monod-Broca: si je partage le fonds de votre commentaire (la générosité ) je disconviens sur la diatribe anti européenne pour une seule raison: les moyens nautiques de la France ne peuvent assurer à eux seuls le sauvetage des migrants.il nous faut bien une action concertée et nos premiers partenaires sont européens .

  • MIGRANTS : LES ARMATEURS DÉÇUS DES MESURES EUROPÉENNES

    L’industrie du transport maritime trouve que les mesures européennes face à la crise des migrants en Méditerranée « apparaissent bien en deçà » de ce qui serait nécessaire. C’est ce que déclare l’European community of shipowners’ associations (Ecsa), représentant au niveau européen des armateurs. Certes, l’industrie du transport maritime salue le triplement du budget de l’opération Triton en Méditerranée ainsi que le déploiement de moyens navals et aériens supplémentaires. Mais elle s’interroge sur le fait que l’opération Triton reste pilotée par l’agence européenne Frontex chargée de la surveillance des frontières. Pour elle, cela soulève de & laquo; sérieux doutes » sur la portée des efforts menés pour prévenir les pertes de vies humaines, « qui doit être l’absolue priorité » .Patrick VERHOEVEN, secrétaire général de l’Ecsa, estime que l’Europe devrait déployer une mission de sauvetage à grande échelle, « capable d’opérer loin des eaux territoriales de l’Union européenne, c’est-à-dire là où se produisent la majorité des naufrages impliquant des migrants ». De son côté, Peter HINCHLIFFE, secrétaire général de l’International Chamber of Shipping, basée à Londres, s’interroge sur les capacités opérationnelles de l’opération Triton. « Nous comprenons que les moyens de Triton peuvent être déployés dans les eaux internationales à la demande des centres de coordination des secours maritimes nationaux. Mais il reste hautement improbable qu’ils puissent atteindre rapidement les zones proches des côtes libyennes, où se produisent la plupart des naufrages. Il semble que les navires de commerce, qui ne sont pas les mieux équipés pour porter secours à des centaines de personnes, continueront à être appelés fréquemment pour répondre à des demandes d’assistance. Un mandat clair pour des opérations de sauvetage humanitaires par les États européens apparaît toujours en suspens ».

    In lemarin.fr du 24 avril 2015

  • @ Un passant:
    Je partage avec « un Passant » l’usage mal adapté du NOUS. C’est l’effet que m’a fait immédiatement ce terme, rendant beaucoup d’entre nous responsables de situation sur laquelle nous n’avons pas prise. Cela ne signifie pas une insensibilité; mais, l’endroit où nous pouvons seulement agir est celui de notre proximité et cela humblement, sans trompette.
    Mais qu’on ne nous colle pas sur le dos des responsabilités qui ne nous appartiennent pas.
    Le billet vise des hommes politiques responsables et c’est à eux qu’il faut l’adresser et leur demander des comptes. Bien souvent, ils esquivent, voilà le problème. Croyez-vous que dans votre vie quotidienne vous pouvez esquiver ce qui vient à vous, tous les sujets de préoccupation qui se posent à vous, justement?

    • Je dis « nous » parce que, précisément, je vois dans le fait d’incriminer les politiques une autre forme d’irresponsabilité. Il est bien pratique de s’exonérer de toute responsabilité en la déchargeant sur eux. Mais nous sommes un collectif, un pays, une nation. Et les politiques font aussi souvent le job que nous n’avons pas envie de nous coltiner. Mais si vous avez l’espoir de faire mieux, lancez-vous, faites de la politique. Bien sûr, je le comprends, nous ne pouvons pas tous le faire, et nous ne le souhaitons pas tous mais, dans ce cas, ayons conscience que nous faisons partie d’une organisation sociale. C’est un peu facile de ne voir que le petit bout de sa responsabilité individuelle.

  • @ Exile

    Ne pas compter sur l’Europe ne signifie pas rejeter toute coordination avec les autres pays européen, c’est-à-dire au premier chef avec les autres pays européens riverains de la méditerranée. Tout au contraire.

    Mon commentaire est moins une diatribe anti-européenne qu’un cri de honte devant la façon dont nous nous défaussons, une fois de plus, nous la France, sur cet ectoplasme politique qu’est l’Europe.

  • Eh bien, dis-moi, tu as vite fait de brader la France quand ça sert ton propos !

    Je n’y connais rien, et en fait, je m’en tape un peu, je considère qu’il faut se barrer. Vite. Arrêter de rêver au destin universaliste de la France, accepter qu’on soit un pays comme un autre et non un empire, en tirer les conséquences en se taisant et en laissant faire ceux qui veulent et/ou qui ont les moyens. Mais faut arrêter de vouloir porter le malheur du monde et vouloir le sauver, en croyant qu’on sera meilleurs que les uns ou les autres.

    Tu peux te fier à la conversation d’inconnus sur Twitter. Ou lire de vraies informations (voire même regarder la télévision – pas moins crédible qu’un fil twitter de francophones, donc a priori peu Erythréens, Nigerians ou Syriens). Ca t’évitera de dire des saloperies. Et de ramener la psychothérapie là où elle n’a rien à faire. Enfin, chacun ses obsessions…

    Ah ? Parce que je ne les infantilise pas, je raconte des saloperies. Bien, bien. C’est pas un secret qu’ils payent très cher pour venir et que ce fric n’est pas à la disposition du premier venu en Afrique, donc, bon, si dire ça est une saloperie, alors oui, je l’admets tout à fait. (Sinon, pour ta gouverne, y a un paquet d’Africains qui parlent français en Afrique, qui sont plus intelligents que toi et moi réunis et qui commentaient ces événements récents, tu devrais les suivre, c’est instructif. 😉 )

    Désolé, mais non, tu ne me feras pas les considérer comme des gamins ce qui est le point de vue sous-jacent de tes idées depuis le début. Tu parles de nous responsabiliser, OK. Je te dis juste, et eux, où est-elle, LEUR responsabilité ? Ils en ont une, et ça serait une bonne idée d’agir dessus.

    Et ne te planque pas derrière des grands discours sur la responsabilité des populations concernées, quand tu nous expliques sur Twitter que tu refuserais d’accueillir les chrétiens d’Orient, d’Irak ou de Syrie, et que tu préfères payer d’autres pays qui seraient prêts à le faire. Il serait un peu gros de venir m’expliquer que ce qui arrive aux chrétiens d’Orient, c’est dû à leur incapacité à se prendre en main, ou à leur irresponsabilité. Tu es dans un bon gros schéma « pas d’étrangers chez moi », faut l’assumer.

    Nonnon, pas de souci, ils sont en train de se faire massacrer. Mais que veux-tu faire ? Crois-tu vraiment que les accueillir (au nom de quoi, de la solidarité catholique ? Pour des gens qui passent leur temps à critiquer les identitaires, c’est guignolesque.) soit une solution ?

    Et oui, je ne veux pas d’étrangers chez moi, pas de souci pour l’assumer, on en a déjà bien assez et on n’arrive déjà pas à les intégrer.

    Quant aux camps de transit, ils ont acquis mauvaise presse avec la shoah, mais il ne s’agit aucunement de tuer qui que ce soit, juste de traiter les flux d’êtres humains qui arrivent et de les renvoyer d’où ils viennent. Comme l’Australie, ni plus, ni moins, et ça ne me semble pas la réincarnation du régime nazi. Tiens, au fait, petite tweetstory qui m’est arrivé, qui devrait donner quelques leçons à ce qu’on peut entendre ici, et au « paradis » européen.

    Enfin, sois sympa de cesser de parler de culpabilité, là où je parle responsabilité. Je ne te ferai pas l’injure de t’aider à distinguer ces deux notions.

    Les accents que tu mobilises évoquent davantage la culpabilité que la responsabilité, c’est tout. Surtout quand tu parles de « Notre mer ». Là, pour moi, tu joues sur la culpabilité. Parce que cette mer n’est pas que la nôtre, qu’elle est la leur également, et que les bateaux coulent au large de la Libye, pas dans la baie de Cannes, hein. Tu joues sur la culpabilité quand tu oublies que eux, ont un rôle à jouer. Si je me noie sur la côte d’Opale, je ne vais pas demander aux Britannique de venir m’aider. La responsabilité serait de laisser les Africains régler le problème, pas nous.

    eczistenz a écrit :

    Polydamas : ca n’a rien d’une obsession mais juste mon travail au quotidien, depuis 20 ans, et dans une association catholique en plus. J’ai un peu la prétention, étant en prise directe avec ces abus, d’en savoir plus là-dessus que sur la fabrication des opinels. Et je ne me sens pas coupable, justement parce que j’ai adapté mes modes de consommation au maximum pour participer le moins possible des acteurs qui profitent. Vous avez parfaitement le droit de vous en moquer, voire même d’être parfaitement égoïste et cynique, c’est juste que c’est difficile à défendre comme projet de société (surtout après disons 10.000 ans de civilisation humaine).

    Ce serait une bonne idée de leur foutre la paix et de ne pas vouloir faire leur bonheur à leur place. Bref, leur laisser choisir les régimes qu’ils veulent, leur laisser vivre leur vie, quoi. Au lieu de nous ramener dans le cycle toutes les 30s.

    nous Français a écrit :

    Nous n’avons pas choisi notre lieu de naissance et ces migrants non plus. Nous devrions pas être pleinement satisfaits de notre état, vivre dans un pays en paix et en République, tant que ces droits ne sont pas garantis à tous. Il me semble que c’est de la simple humilité, plus que de l’humanité.

    Ça s’appelle du néo-colonialisme, de l’égocentrisme et de l’occidentalo-centrisme. Je n’ai pas à mal dormir si des gens décident de se mettre sur la figure à l’autre bout du monde. C’est leur affaire, pas la mienne, on crève de cet universalisme.

  • Koz a écrit :

    Un peu étonné aussi qu’il propose de conditionner les aides sociales à une durée de séjour.

    Je pense qu’il vise notamment la CMU, hors médecine d’urgence. Note aussi qu’il se prononce vigoureusement POUR ce qu’il est convenu de (mal) nommer la double peine.

    S’agissant de l’islamisme, j’en ai un peu discuté avec lui. Partant de deux constats (i) l’essentiel des actes de terrorisme islamique en France est le fait de la 2e ou 3e génération, (ii) les migrants qui tentent de traverser la méditerranée fuient précisément l’islamisme pour la plupart; on peut conclure que l’islamisme est plus une conséquence de notre incapacité à intégrer et à permettre aux gens de travailler (ie Education Nationale et modèle social) que de l’immigration proprement dite.

    A part les (rares) espions du KGB, les immigrés d’Europe de l’Est étaient rarement communistes; en tous cas largement moins que la population autochtone.

    @ eczistenz:
    Vous dites que le problème c’est l’occident. Je vous réponds qu’interagir avec l’occident ne dégrade pas les choses mais les améliore. Vous me répondez que c’est encore loin d’être parfait… Bien sûr, mais sommes nous d’accord pour dire que le problème ce n’est pas l’occident?

    A l’aune des résultats, il me semble qu’il vaut mieux suivre la voie du Chili que celle de l’Argentine ou du Venezuela.

  • Polydamas a écrit :

    Ah ? Parce que je ne les infantilise pas, je raconte des saloperies

    Non, non, tu te planques derrière ton petit doigt, et prétendre que tu ne les infantilises pas est d’une parfaite hypocrisie. Tu ne cherches pas à reconnaître leur légitime responsabilité personnelle, tu veux surtout qu’ils se démerdent et tu caches ça derrière des beaux discours pour te donner bonne conscience. Et tu réagis à l’affect, imputant aux autres arbitrairement des opinions puisées dans une vision binaire du sujet (oui, je pense aussi à Henry Le Barde, suspecté de vouloir laisser mourir sa culture simplement parce qu’à juste titre il trouve le « Camp des saints » raciste).

    Des raisons de laisser les autres se démerder et de ne se sentir responsable de rien, pas même de son frère, il y en a plein. On en trouve tous très facilement. Jusqu’à imaginer que ceux qui s’entassent dans les cales de bateaux, après être passés dans des camps de migrants aux conditions inhumaines, qui risquent la mort, sont les privilégiés de leurs pays. Ca, ça me fout hors de moi. Alors, franchement, démerde-toi avec ta conscience. Et ton confesseur.

    Tu me pardonneras ce ton un peu vif, j’en suis sûr : je ne voudrais pas t’infantiliser.

    Lib a écrit :

    Je pense qu’il vise notamment la CMU, hors médecine d’urgence.

    Je veux bien, et je ne suis pas un inconditionnel de la CMU mais elle me semble viser tout de même assez précisément à gérer la médecine d’urgence. Notamment parce que, pour déterminer ce qui relève ou non de la médecine d’urgence, il faut bien que le patient aille voir le médecin, ce qu’il ne fera pas s’il pense qu’au bout du compte, on va lui dire que ça n’en relève pas et lui réclamer un paiement qu’il ne peut pas fournir. J’aimerais assez que l’on chiffre aussi les bénéfices de la CMU, dont on chiffre surtout le coût dans la presse.

  • Je pense si je peux me permettre d’intervenir dans la discussion qu’aucun de nous n’a rien de bon à gagner à avoir de plus en plus de personnes dans notre pays sans accès à des soins médicaux. Le journal Le Figaro affirme que la tuberculose progresse en France. L’idée de la CMU me semble être une bonne chose.

  • @ Polydamas:
    « tu ne me feras pas les considérer comme des gamins ». Oui bien sûr beaucoup ne sont pas des gamins mais il y a eu des bateaux avec des enfants et des femmes. Et ce qui se passe actuellement arrive aussi parce que beaucoup de pays arabes et africains se taisent et laissent faire. Si vous en avez le temps et l’envie jetez un œil sur le lien suivant: http://www.babelio.com/livres/Diome-Le-Ventre-de-lAtlantique/8712/critiques
    « Crois-tu vraiment que les accueillir soit une solution. » Oui je le crois et je participe à cet accueil de familles syriennes et irakiennes.
    « je ne veux pas d’étrangers chez moi, pas de souci pour l’assumer, on en a déjà bien assez et on n’arrive déjà pas à les intégrer. » On en intègre pourtant. Des fois on y arrive pas mais des fois oui. Et en France il y a beaucoup de français d’origine étrangère dès qu’on remonte aux grands parents.
     » Je n’ai pas à mal dormir si des gens décident de se mettre sur la figure à l’autre bout du monde. » Oui bien sûr c’est vrai mais là c’est pas à l’autre bout du monde, c’est à nos portes. Et c’est vrai sans être vrai dans la mesure où parfois intervenir c’est pas génial mais ne pas intervenir c’est encore moins génial.
    « L’enfer c’est de ne plus aimer ». George Bernanos.

  • Lib : le fameux modèle chilien est aussi un modèle d’inégalité, où près de 60 % des moins de 25 ans ne votent même plus, conscient que cela ne change rien à leur quotidien. Je ne parle pas tant de l’Occident que d’un système, dont l’occident profite éhontément, parce que c’est l’Occident qui a le pouvoir. Je ne le dis pas pour vous (d’ailleurs, même de « bords » différents, vos posts m’apprennent beaucoup de choses) mais le libéralisme est aussi un système de pouvoir, dont il est très difficile pour ceux qui n’ont rien d’en profiter. Sinon, Haïti, le pays le plus ouvert et libéralisé du monde, devrait être un paradis. D’ailleurs, dans la plupart des pays du monde, plus on est riche, moins on paie d’impôt.

    Polydamas : cette ONG ne travaille qu’avec des acteurs locaux et n’impose rien. Renseignez vous.

    Je reviens du Honduras, le pays le plus dangereux du monde, plus que la Syrie ou l’Irak, que 12 habitants quittent par heure, par heure… La violence, le droit pour chaque personne d’avoir 5 armes (vive l’influence des USA), un système fiscal écœurant d’inéquité, des pauvres abandonnés voire spoliés de leurs terres au bénéfice d’entreprises canadiennes (mines) ou italiennes (électricité, même pas pour eux, pour être vendue à l’étranger). Déjà plus de 37.000 expulsions depuis janvier, de plus en plus d’enfants seuls sur les routes… des centaines de morts et disparus sur le chemin. D’autant qu’avec le changement climatique, certaines régions centroaméricaines deviennent carrément inhabitables. Ce ne sont même plus des mesures ni des programmes qu’il faut, c’est une grosse, une très grosse remise en question qu’il faut.

  • François D a écrit :

    L’une des clés, justement, n’est-elle pas dans ce fol espoir projeté sur « notre » monde qui fait d’elles des personnes déterminées et pleines d’espoir. Ne devrait-on pas tout faire pour largement faire connaître à travers l’Afrique, non seulement les risques du voyage mais la dureté de la réalité de la vie des migrants en Europe ?

    Je me permets de réagir sur ce point précis (car en effet le développement de ces pays est un des aspects de la solution).
    A travers l’Afrique, la difficulté de la migration, le risque de mourir, et la difficulté de la vie en Europe, sont connus. Il y a des campagnes médiatiques, des associations locales, des expats européens aussi…. ca ne sert absolument à rien.
    – migrer est un acte de foi. Le lien entre le départ et la réalité du voyage et de l’arrivée est ténu, et non rationnel. « Si un seul doit y parvenir, je peux être celui-là. On me dit que c’est dur, je veux en juger par moi-même. Je ne veux pas regretter de ne pas avoir essayé. Je ne pourrai pas me regarder en face si je n’ai pas risqué jusqu’à ma vie pour ma famille…. »
    – ces gens se considèrent comme déjà morts : soit parce qu’il y a un risque mortel réel (guerre, ou conflit familial, « sorcellerie », mariage forcé, violence domestique…), soit parce que la qualité de leur vie présente et surtout de leur avenir leur semble suffisamment inacceptable pour être équivalente à la mort. Donc leur mort réelle en route ne les effraie pas beaucoup : « au moins, j’aurai essayé ». (c’est une des raisons, en plus du facteur psychologique et financier, qui explique que en effet les migrants sont souvent relativement diplômés et issus de catégories non miséreuses. Ils sont capables de réfléchir à leur avenir au delà de la survie au jour le jour et éprouvent plus de frustration)
    – ils sont porteurs d’un espoir collectif qui les dépasse : je ne m’étendrai pas sur l’endettement énorme auquel toute leur famille a recouru pour payer le voyage. Quelque soit leur désespoir en route, ils se sentent obligé par le groupe.
    – la difficulté de la vie en France : elle est moins bien connue (car à distance leurs parents ou amis mentent sur leur vie française), mais même connue elle importe peu : ils cherchent surtout un espoir pour leurs enfants. Quelle que soit leur misère, le seul fait d’élever leurs enfants dans un pays libre, démocratique, et ayant un système scolaire et social justifie le voyage.
    – conséquence du point précédent, les migrants s’intègrent mieux en France que leurs descendants. Parce que leur identité est claire (malien vivant en France…), parce que leur présence a une histoire et un sens (j’ai quitté mon pays et je suis arrivé pour aider la famille et donner leur chance à mes enfants), parce que le choc culturel, même violent, a un sens (je ne suis pas chez moi, tout est nouveau). Le seul fait d’être arrivé est une énorme réussite, pour eux, pour les gens au pays. C’est pas évident à première vue mais ils sont dans une dynamique très positive.
    Pour leurs descendants, même français si nés en France, la difficulté est moindre mais elle a moins de sens (sentiment d’exclusion, discrimination, c’est mon pays mais la vie est dure, quel avenir, etc…) et c’est pour cela qu’on trouve plus de violence et de délinquance chez eux que chez les primo-arrivants (en général).

  • La seule question qui reste ici en suspens à la lecture de vos nombreux commentaires est à mon sens :

    Avons nous à notre table toujours de la place pour le pauvre qui passe?
    Un proche pauvre, un voisin, un ami, un cousin, un frère.
    Ou même quelqu’un peut être dont on ne connaît pas le nom mais qui une fois a demandé de l’aide et qu’on a vu et qu’on n’a pas pu défendre.

    Sommes nous capable d’offrir notre plus beau repas de fête avec ceux qui nous sont le plus chers à un pauvre? Nous les cathos.

    C’est à cela me semble t -il qu’il nous faut répondre, chacun dans sa vie, dans ses emmerdes pour qu’on puisse ensemble dire: Marum Nostre.

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