A deux jours d’une nouvelle Manif Pour Tous, Manuel Valls tente de déminer le terrain et de désamorcer la mobilisation dans un entretien à La Croix. Celui-ci est pétri d’incohérences et de contradictions, de sorte qu’il serait bien hasardeux de s’y fier[1].
Je note accessoirement avec amusement qu’il se ferait presque plus conciliant que Nicolas Sarkozy. Quand ce dernier répète à tous les médias que « des familles se sont senties humiliées et se sont radicalisées » – ce qu’il serait bien inspiré de cesser de dire – Valls, lui, évoque « des courants politiques, notamment de l’extrême droite, qui ont cherché à se reconstituer sur le dos de ceux – nombreux – qui avaient des convictions sincères« . Notre ancien Ministre de l’Intérieur, grand ordonnateur d’une répression absurde et outrancière, est bien bon.
Ceci étant dit, malgré cette démonstration de bonne volonté, les incohérences du propos me chatouillent trop pour que je les laisse passer :
- Peut-on croire à la détermination sans faille que Manuel Valls affiche, alors qu’il a affirmé, par le passé, être favorable à la GPA ?
- Peut-on croire que le gouvernement serait à ce point vent debout contre la GPA qu’il envisagerait même de prendre une initiative internationale, alors qu’il n’a même pas « fait appel » de la dernière décision CEDH ? On me rétorque sur Twitter que le gouvernement n’aurait pas été recevable. C’est contestable mais, à supposer même que ce soit exact, je ne doute pas que, par simple habileté politique, il aurait pris soin de reporter cette responsabilité sur la CEDH en tentant le coup malgré tout, plutôt que de l’assumer lui-même;
- Peut-on accorder un quelconque crédit à son propos, lorsqu’il dit que la France n’a pas « fait appel » parce que « notre droit national, c’est-à-dire l’interdiction, n’est pas remis en cause » et que « le gouvernement exclut totalement d’autoriser la transcription automatique des actes étrangers, car cela équivaudrait à accepter et normaliser la GPA« , alors que précisément la CEDH a condamné la France pour avoir refusé de reconnaître le lien de filiation, en raison de la fraude à la loi que représente le procédé ? Rappelons, comme il le dit si bien, qu’un enfant dont la filiation n’est pas établie par l’état-civil français n’est pas pour autant privé de filiation[2]. Est-il en train de nous dire que la France va refuser d’appliquer la décision de la CEDH ? Cela n’est pas possible, et la France devra justifier sous peu des mesures prises pour adapter le droit français;
- Peut-on croire que le gouvernement soit fermement opposé à la transcription des actes étrangers dans l’état-civil français quand on connaît le contenu de la circulaire Taubira ? Si les propos de Manuel Valls sont sincères, pourquoi ne s’est-il pas engagé à revenir sur cette circulaire ? On pourrait imaginer que la nuance soit dans l’automaticité mais, pour qui connaît le vocabulaire administratif, c’est somme toute l’objet de la circulaire Taubira. Evoquant les demandes de délivrance de certificats de nationalité française aux enfants nés à l’étranger d’une GPA, le Ministre indique : « vous veillerez (…) à ce qu’il soit fait droit à celles-ci dès lors que le lien de filiation avec un Français résulte d’un acte d’état civil étranger probant« . La marge de manœuvre est nulle. La phrase est impérative. La seule condition étant une condition de bon sens, sans rapport avec la problématique : le caractère probant de l’acte d’état-civil produit.
Bref. Ces déclarations sont bien trop tardives et opportunistes, à deux jours d’une manifestation, pour être dignes de foi. Et lorsque les actes (circulaire et acquiescement à la décision de la CEDH) contredisent les propos, eux-mêmes fluctuants,il serait fou de se contenter de ces derniers.
Chacun connaît l’allégorie de la grenouille. Pour une fois, elle n’attend pas d’être cuite.
- Je vous l’avais dit : il suffit que j’annonce une pause pour que je me reprenne à écrire. Pour autant, ce sera sur un mode plus allusif, mais ce qui suit commençait en revanche à devenir trop long pour un simple statut Facebook. [↩]
- ce, d’autant plus que je doute fort que l’adoption leur soit fermée [↩]
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Le catho en loden que je suis, qui ira à la Messe dimanche matin, n’est pas pour autant un benêt : les propos de Monsieur Valls ne m’abusent pas et, bien au contraire, sont pétris d’une telle mauvaise foi, qu’ils me donnent envie d’aller deux fois plus à la manif du #5oct, sans goupillon, car je manifesterai en tant que citoyen réclamant simplement un peu de bon sens, ni schlague ou knout, car la violence est mauvaise, et je suis plutôt un doux. J’invite tous ceux qui liraient l’excellent billet de Koz de ne pas céder à la tentation du fatalisme. Manuel Valls lui-même par son interview le reconnaît : il essaie de vous enfumer MAIS il vous craint. Montrez que vous ne le craignez pas, et que vous n’êtes pas dupes. Et continuez de militez, remobilisez-vous. Tant que la gauche est au gouvernement (et après aussi), il faut RESISTER.
Avant la manif du 2 février, Valls proclamait « la République en Danger » dans le JDD.
Cette fois il essaie, même si la ficelle est beaucoup trop grosse, d’y aller dans le sens du poil.
C’est un progrès !
L’argument, au 2, de l’irrecevabilité d’un éventuel appel du Gouvernement français devant la Grande chambre, au motif qu’il faudrait un « moyen sérieux » est…irrecevable !
Tout appel devant la GC de la CEDH d’une décision rendue par une chambre est « filtrée » par un collège (cf http://www.echr.coe.int/Documents/FAQ_GC_FRA.pdf) qui examine sa recevabilité, y compris en opportunité.
Mais sur un sujet aussi litigieux que la GPA, il y a fort à parier que la GC aurait été saisie. Et c’est bien la Cour qui aurait été responsable.
cf l’affaire Lautsi (les crucifix dans les classes, en Italie) : devant l’arrêt défavorable de la chambre de la CEDH, l’Italie a immédiatement fait appel devant la Grande chambre, pour défendre son « identité constitutionnelle ». Et a gagné : la GC a déjugé la chambre et rendu un arrêt favorable à l’Italie !
Non, cet argument n’en est vraiment pas un. C’est pitoyable juridiquement. Autant dire qu’il ne faut jamais faire de recours car il y a des conditions…
Analyse parfaitement juste au demeurant pour le reste.
Pour moi, les deux contradictions principales sont :
– contradiction, comme la CEDH elle-même, entre l’affirmation que l’on peut distinguer la convention de son effet sur la filiation, étant donné que la convention a pour objet exclusif, pour unique cause juridique, de faire abandonner les droits parentaux afin de permettre une nouvelle filiation (cf le modèle-type que j’ai posté sur FB) ?
– contradiction entre Valls et la CEDH : le PM annonce-t-il qu’il s’assoit sur l’arrêt de la Cour (qui ne distingue pas entre les cas pour la transcription, son analyse de l’intérêt supérieur de l’enfant se faisant, contra legem, in abstracto) ?
Quant aux malheureux « petits fantômes de la République », je réplique :
1) Les enfants sont parfaitement sécurisés pour la vie quotidienne. Cela n’a quasiment aucune incidence concrète et ne dure d’ailleurs que pendant la minorité.
2) Il n’y a AUCUN droit, pour personne (y compris tous les autres modes de conception) à être « sécurisé » au regard de l’état-civil français. Ceux qui ne respectent les conditions pour y entrer n’ont pas à y entrer.
3) Il peut parfaitement être transcrit dans l’état-civil français, la filiation d’origine (US ou indienne…) si celle-ci reflétait la vérité biologique (père biologique + mère porteuse). C’est uniquement parce qu’apparaît la fausse filiation (parent d’intention) dans l’état-civil d’origine que cela devrait entraîner une conséquence en droit français. Encore une fois : la convention de GPA n’a qu’un seul but : organiser un abandon, pour rendre possible une « filiation d’intention ». Reconnaître cela, ne serait-ce qu’un peu, d’une manière ou d’une autre, c’est NECESSAIREMENT et INTRINSEQUEMENT reconnaître et valider la « parenté sociale ». Pour tout le monde d’ailleurs.
4) Le problème n’est pas celui des enfants déjà nés par GPA (dont je rappelle au passage que les parents étaient parfaitement au courant du risque de non établissement de la filiation ; il y a là vraiment une « jurisprudence Léonarda, cf la fin de cet article : http://www.marianne.net/Les-lois-bioethiques-au-panier-le…). Le problème c’est qu’en permettant cela, on encourage et incite la génération de nouveaux enfants conçus ainsi ! On incite à une fraude à la loi (parce que tout le monde reconnaît qu’il y a fraude ; simplement on dit qu’elle n’a pas de conséquence pour les enfants). Sans parler de l’incitation à un mode de conception attentatoire à la plus basique dignité de l’enfant.
A qui est vraiment destinée cette entrevue ?
Certainement pas à chercher de convaincre ceux qui se destinaient à aller manifester et qui connaissent pour l’avoir pratiqué le cynisme de ce personnage. Il le sait.
Plus sûrement à donner des arguments à ses troupes.
S’agit-il encore d’enfumer les lecteurs de la Croix (et l’opinion du temps) qui, dans leur grande majorité, n’iront pas manifester ?
Le billet précédent était donc bien le teaser annoncé dans le texte 🙂
M.Valls avale son chapeau et retourne sa veste. C’est une victoire politique des opposants à la PMA et à la GPA: c’est la première constatation à faire. Bien entendu, ce n’est pas sincère de sa part. Je suis tenté de dire: et alors? La seule chose à regretter est qu’il ne l’ait pas fait plus tôt, ou plus exactement, qu’il ait cru nécessaire de faire des déclarations agressives et de prendre des positions extrêmes d’entrée de jeu. Mieux vaut tard que jamais: nous le voyons ici reconnaître ses erreurs, un exercice qui s’accompagne presque toujours de l’émission d’un rideau de fumée pour essayer (vainement) de sauver la face. Le gouvernement a fini par admettre qu’il avait surestimé la capacité de la société à accepter sans broncher certaines évolutions de notre modèle social.
M.Valls aimerait bien mettre le sujet sous cloche le plus longtemps possible, à ceci près que la condamnation de la France par la CEDH oblige le gouvernement à trouver une solution. Il aurait pu faire appel, mais cela n’aurait servi à rien: les juges ont mis en priorité l’intérêt concret de l’enfant, qui est avant tout d’avoir des parents. Je ne vois pas comment un jugement en appel aurait pu mettre cela de côté.
Il reste donc à Manuel Valls qu’à laisser passer la manifestation, et à sortir de son chapeau une législation qui essaiera de ménager la chèvre CEDH et le chou MPT. Le voilà bien mal embarqué, mais il ne peut s’en prendre qu’à lui-même.
Ou alors, si Valls n’annonce pas qu’il ignore l’arrêt de la CEDH, il annonce que la GPA à l’étranger pour les riches, aucun problème, il y aura la filiation derrière, mais qu’il n’y aura pas de GPA « pour les pauvres », en France ? Idem pour la PMA ?
Je rigole…
Tout aussi important, mais sur un tout autre plan : l’entretien du PM est gravissime, et catastrophique, pour la classe politique en tant que telle.
La confiance dans la parole politique est aujourd’hui à ce point abîmée, absente même, que la toute première obligation des responsables politiques, ce qui devrait motiver en tout premier lieu leur action et ce qu’ils devraient avoir en permanence en mémoire dans leurs discours, c’est : « ce que je dis peut-il être cru sans plus détruire le peu de confiance qui reste ? ».
La duplicité du PM (dans le communiqué de presse de Jean-Frédéric Poisson, d’autres qualificatifs intéressants : http://www.jfpoisson.fr/manuel-valls-et-la-gpa-au-theatre-ce-soir/) est inouïe. Elle aggrave une crise politique déjà à ce point désastreuse qu’on assiste déjà à des « jacqueries ».
Comment veut-il qu’on le croit, lui qui a TOUT fait à l’inverse de ce qu’il dit ? Comment prétend-il lutter contre le FN, la tentation démagogique, et l’absentéisme électoral, après cela ?
Louis-Damien Fruchaud a écrit :
Exactement. En s’abstenant de saisir la grande chambre de la CEDH, et en tenant ces propos quelques jours après, M. Valls avalise pleinement le : « ceux qui ont les moyens peuvent parfaitement aller s’acheter des enfants à l’étranger ». Marchandisation des femmes (« porteuses ») mais également des enfants. Et certains osent s’étonner qu’on tique sur le côté éthique de la chose…
Gwynfrid a écrit :
Cela aurait au moins servi à crédibiliser un tant soi peu l’affirmation de sa volonté de lutter contre (si tant est qu’il lui en reste un peu. Là c’est moins le cas que jamais.)
Gwynfrid a écrit :
Eh bien, en raison du fait que, parfois, les juges jugent différemment en appel. Pour les raisons évoquées par Louis-Damien, aussi. Ou parce qu’enfant a des « parents ». Selon un état-civil étranger. Ce qui n’est pas fondamentalement insurmontable.
humpty-dumpty a écrit :
Ah, oui, bien sûr, il aurait pu prendre une posture hypocrite. Et cela aurait changé… rien, puisqu’au bout du compte il a pris une autre posture hypocrite: sa crédibilité reste bloquée sur zéro dans tous les cas (d’ailleurs, soyons clairs… auprès des militants MPT, la crédibilité de Manuel Valls n’est plus un enjeu depuis longtemps). Et la France aurait perdu en appel.
Tant qu’à faire, j’aime autant qu’on évite de gaspiller les sous du contribuable à aller plaider une cause perdue d’avance, tout en nous ridiculisant aux yeux de l’Europe entière. Quand la France est condamnée c’est tout le pays qui perd, pas juste le gouvernement.
Koz a écrit :
Désolé, le raisonnement m’échappe, de même que les points mis en avant par Louis-Damien. Je ne suis pas capable de suivre les finesses juridiques de la situation. Que veux-tu dire par « parce que l’enfant a des « parents » avec guillemets? Veux-tu dire que la loi française devrait imposer un état civil reconnaissant la mère biologique?
Il me semble que d’un bête point de vue humain, l’affaire se résume par un raisonnement simple: en lui refusant la filiation, l’État punit l’enfant pour la faute commise par ses parents. C’est là une injustice élémentaire quels que soient les termes juridiques dont on l’enrobe.
Gwynfrid a écrit :
*
L’État français refuse la nationalité française (et ne se prononce pas sur la filiation) pour des milliards de gens sur terre ; sans que cela soit perçu comme une injustice par quiconque (sauf ceux qui in fine estiment qu’il ne devrait même pas exister une chose telle que la nationalité). A quel titre la demander pour l’enfant en question ici ? Le débat est là, il faut un titre valide (au regard du droit français) à obtenir la nationalité française, et telle ou telle filiation ; pas juste arguer même valablement que l’avoir serait mieux que de ne pas l’avoir.
A mes yeux de non juriste, un enjeu de « l’appel » devant la CEDH ici serait donc de déterminer si la France peut encore définir elle-même les conditions d’accès à la nationalité et à la filiation, non ? (Si je me fourvoie juridiquement que ceux qui le savent n’hésitent pas à me détromper).
Gwynfrid a écrit :
Il me semble surtout qu’un état-civil étranger ne devrait pas pouvoir imposer de fait une situation à l’état-civil français en violant des dispositions qui seraient d’ordre public en droit français (pour rappel, la Cour de cassation a récemment affirmé les conventions de GPA comme d’une nullité d’ordre public).
Pour ceux qui doutaient que Manuel Valls nous prenait pour des truffes avec son interdiction de transcription automatique – ce qui a eu tendance à m’agacer – P. Spinozi, l’avocat de la famille dans l’affaire soumise à la CEDH vient le dire : « c’est un voeu pieux ».
Gwynfrid a écrit :
Disons qu’il me paraît difficile, en restant cohérent, de considérer comme « parents » ceux qui ont obtenu l’enfant par GPA, la GPA étant illégale, et la parenté étant reconnue par un état-civil étranger fondée sur cette illégalité.
De fait, comme l’explique Humty Dumpty, l’enfant est privé d’une filiation selon le droit français. Selon le droit de l’Etat US ou le droit indien, il est bien l’enfant de ceux qui ont procédé à la GPA.
Cette situation est certes compliquée, je le conçois, mais dans un sujet comme celui-ci, il faut choisir entre légaliser de fait les GPA pratiquées à l’étranger, que je considère nuisibles, et ouvrir grand la porte, ou garder cette situation compliquée.
Situation dont je répète qu’à mon avis, elle trouverait de toutes façons une issue point trop compliquée par l’adoption de l’enfant par le conjoint dont la filiation n’est pas reconnue puis par une naturalisation.
Sans oublier que les responsables de tout cela sont bien les « parents », dont on vient valider la pratique détestable.
humpty-dumpty a écrit :
L’argument ne résiste pas à l’analyse. La France a refusé nationalité et filiation à cet enfant pour la seule et unique raison de la méthode de conception qui lui a donné naissance. Ça ne concerne en rien les autres milliards de gens, qui indépendamment de leur conception n’ont pas titre à demander la nationalité et dont la filiation n’est pas du ressort de la France.
humpty-dumpty a écrit :
Symétriquement, le droit français n’a pas d’instructions à donner à un état civil étranger. D’où les règles de droit international pour trancher ce genre de litige. Mais ici, la remise en question ne s’adresse pas au droit américain, mais bien à la CEDH. On peut toujours dénoncer le traité, si les jugements ne nous plaisent pas. Apparemment c’est que que les Anglais s’apprêtent à faire… Bonne chance pour expliquer au reste du monde que ceci constitue un progrès du droit des gens.
Koz a écrit :
Super. Alors le gamin a un état civil différent quand il voyage aux États-Unis, ou quand il reste en France. Et s’il va se balader aux Galapagos, qui sont ses parents alors?
Koz a écrit :
Hmm. À la fin de toute la procédure, l’enfant est français, et ses parents sont bien ceux qui sont nommés dans l’état-civil US. Ça change quoi exactement? On a ajouté quelques années de procédure? C’est dans l’intérêt de l’enfant qu’on fait ça?
Koz a écrit :
C’est exactement ma remarque: les parents ont fait un truc détestable, j’en suis d’accord. Et c’est l’enfant qui est sanctionné.
Holande + Valls : Pluie et brouillard…
« Situation dont je répète qu’à mon avis, elle trouverait de toutes façons une issue point trop compliquée par l’adoption de l’enfant par le conjoint dont la filiation n’est pas reconnue puis par une naturalisation. »
Si le résultat est le même a l’arrivée… j’ai un peu du mal à vous suivre?!
« , la GPA étant illégale, et la parenté étant reconnue par un état-civil étranger fondée sur cette illégalité. »
Il y a une erreur de formulation là, non ?
La GPA est légale dans plusieurs états étrangers.
La parenté est reconnue dans ces états en se fondant sur la légalité de cette pratique dans ces états.
Cette parenté légale est alors légalement retranscrite dans notre état civile bien que la pratique l’ayant déclenchée soit illégale chez nous.
A mon humble avis (et si j’ai bien compris) sur le plan légal la décision de la CEDH est fondée… donc se battre sur des principes juridiques n’apportera vraisemblablement rien.
@ khazan:
Le problème est que la GPA est illégale en France. Or, si l’on reconnaît la filiation d’un enfant né à l’étranger d’une mère porteuse ou que celui-ci acquiert la nationalité grâce à la circulaire Taubira de janvier 2013, alors l’interdiction de la GPA est nulle.
« […] 2013, alors l’interdiction de la GPA est nulle »
Pas tout à fait quand même… Ca reste relativement compliqué et coûteux d’aller faire une GPA aux USA par exemple.
Mais sinon effectivement. Il semble que, moins que la circulaire Taubira, c’est la CEDH qui à enfoncée le clou… donc bon… j’ai l’impression que circulaire Taubira ou pas, les choses auraient été identiques.
Bonjour,
je ne sais pas ce que Manuel Valls a en tête, et s’il s’inquiète vraiment de la « manif pour tous », dont le succès n’aurait pour lui que des avantages politiquement: cela soude sa base et peut même faire hésiter certains centristes ou libéraux à voter à droite à certaines élections, de peur de ramener au pouvoir des « conservateurs » dont ils ne partagent pas les opinions. D’où peut-être le timing des « provocations » sur les prestations familiales ces dernières semaines.
Sur le fond, il me semble sain que les actes de filiation à l’étranger soient reconnus en France sans que l’on ne rajoute un arbitraire administratif qui aurait de nombreux effets de bord. C’est aussi pour moi une soupape de sécurité utile de pouvoir aller faire dans des pays étrangers modernes ce qui est illégal en France: cela met une limite au pouvoir de l’état, ce qui est une très bonne chose.
Gwynfrid a écrit :
C’est dans l’intérêt de la société et du nécessaire respect de la loi. On peut, sinon, continuer le raisonnement qui est le tien : ok, on interdit la GPA mais, de toutes façons, il suffit d’aller la faire en Grèce, alors ça change quoi exactement ? On a juste allongé la durée du processus ?
Uchimizu a écrit :
Si l’on considère qu’acheter une grossesse, arracher à un enfant la mère qui l’a porté, le priver délibérément de toute référence à ses origines, est la modernité, votre position se tient.
Ceux qui se souvienne des débats sur le PACS ont peut-être en mémoire la parole de Mme Guigou, garde des sceaux qui jurait que jamais, au grand jamais, il n’y aurait de mariage homosexuel.
On sait ce qu’il advint. On sait donc ce que vaut la parole de M Valls. Rigoureusement rien.
Cela étant, la manifestation de dimanche était-elle pour faire pression sur un gouvernement dont il ne faut rien attendre de bon, ou pour peser sur les débats au sein de l’UMP, dont on peut – encore ? – espérer quelquechose ?
Si l’UMP veut être respecté, aussi bien de ses adversaires que de ses partisans, il va de son intérêt d’abroger/réécrire cette loi. Sans cela, personne ne peut plus croire en leur courage politique, ni en leur faculté d’indépendance intellectuelle vis à vis de la gauche.
Mais en sont-ils capable ?
C’est donc le meilleur des mondes qui nous est promis par les pro GPA ! Mon commentaire : http://contre-regard.com/la-gestation-pour-autrui-et-est-le-meilleur-des-mondes/
Merci Koz pour cet article éloquent.
Au sujet de ces sujets touchant a la conception de l enfant, chaque nouvelle « avancée » de l opinion publique dans ce sens me rappel toujours Huxley, et le meilleur des mondes, ecrit pourtant en 1931.
« — Il était une fois, commença le Directeur, alors que Notre Ford était encore de ce monde, un petit garçon qui s’appelait Reuben Rabinovitch. Reuben était l’enfant de parents de langue polonaise. — Le Directeur s’interrompit : — Vous savez ce que c’est que le polonais, je suppose ? — Une langue morte.— Comme le français et l’allemand, ajouta un autre étudiant, exhibant avec zèle son savoir. — Et « parent? » questionna le D.I.C. Il y eut un silence gêné. Plusieurs des jeunes gens rougirent. (…) L’un d’eux, enfin, eut le courage de lever la main. — Les êtres humains, autrefois, étaient…, dit-il avec hésitation; le sang lui affluait aux joues. — Enfin, ils étaient vivipares. — Très bien. — Le Directeur approuva d’un signe de tête. — Et quand les bébés étaient décantés… — Naissaient, corrigea-t-il. — Eh bien, alors, c’étaient les parents. — c’est-à dire : pas les bébés, bien entendu, les autres. — Le pauvre garçon était éperdu de confusion.— En un mot, résuma le Directeur, les parents étaient le père et la mère. — (…) — La mère…, répéta-t-il très haut, pour faire pénétrer bien à fond la science ; et, se penchant en arrière sur sa chaise : — Ce sont là, dit-il gravement, des faits désagréables, je le sais. Mais aussi, la plupart des faits historiques sont désagréables. »
Uchimizu a écrit :
On peut ne pas aimer le pouvoir de l’État, mais là vous exagérez. Dans d’autres domaines, l’État s’autorise à sanctionner des délits commis à l’étranger, parce que c’est nécessaire au maintien de l’ordre public. Ce pourrait peut-être être fait pour le sujet qui nous occupe (l’idée de mettre les parents en prison me semble parfaitement folle, mais un autre type de sanction serait à étudier). Par contre, ce que vous proposez ressemble fortement à un passe-droit offert à ceux qui ont les moyens de voyager, c’est-à-dire à de plus en plus de monde.
Koz a écrit :
À quoi je répondrai la même chose que toi: ce qui change c’est que la loi est respectée en France et correspond aux valeurs de la société française. Si des Français contournent la loi en passant par l’étranger, c’est blâmable, et la société le réprouve, peut-être en appliquant une sanction aux parents, si ça tient la route juridiquement. Par contre, je suis opposé à ce que l’on sanctionne l’enfant une fois qu’il est né.
Certes, on pourrait appliquer la procédure que tu proposes, adoption et naturalisation. Mais son aboutissement n’est jamais certain, il peut toujours arriver des événements inattendus faisant dérailler une procédure longue. Louis-Damien, ci-dessus, déclarait que « Il n’y a AUCUN droit, pour personne à être « sécurisé » au regard de l’état-civil français. » Je suis en total désaccord avec ce point de vue. L’enfant a droit à une vie familiale (CEDH, article 8). Il a le droit dès sa naissance à un nom, une nationalité et, dans la mesure du possible, à des parents (Convention des Nations-Unies sur les Droits de l’Enfant, article 7), et en particulier: « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale » (article 3 de cette même convention). L’incertitude durable sur l’état civil est clairement contraire à ces principes que la France a ratifiés, de même que la quasi-totalité des pays du monde.
Comment peut-on défendre les droits de l’enfant et refuser à certains un état civil ?
@ Hervé:
Ils en ont un, là où ils ont été conçus. Les enfants nés naturellement aux US de parents citoyens US n’ont pas d’état civil en France. Que les États qui autorisent la GPA assument l’état civil d’enfants nés de la GPA juridiquement faite sous leur législation me paraît la moindre des choses.
Par ailleurs, la loi française sanctionne pénalement le tourisme sexuel, je ne vois vraiment pas pourquoi elle ne sanctionnerait pas le tourisme reproductif.
@ Louis-Damien Fruchaud:
Un abandon, on croit rêver. Dans une gpa, l’enfant est précisément désiré. Que penser alors de l’adoption, qui répond au désir d’enfant d’un couple qui ne peut pas en avoir ? C’est bien un enfant de substitution. On devrait pouvoir réserver la gpa pour les couples dont la femme ne peut en avoir (absence d’utérus par exemple).
Quant @ koz, une loi ça se change. On n’a qu’à autoriser la gpa et la réglementer, on n’aura plus des citoyens qui contourneront la loi, surtout à l’heure de l’ouverture des frontières et de la mondialisation. D’ailleurs, quand on voit que dans la moindre série américaine, on parle de mère porteuse, je pense qu’une grande partie de la société française n’est plus choquée par ces pratiques. Il suffit de la réglementer. La loi britannique là-dessus est très bien. En plus, elle se fait sans contrepartie financière. cf. http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/10/03/pma-gpa-quel-pays-autorise-quoi_4499828_4355770.html
Et puis dans l’histoire des hommes, on a de tout temps fabriqué des familles, certes sans la médecine, mais il est de tout temps arrivé que l’on arrachait des enfants à leurs parents. Il existe d’innombrables familles diverses, au sein même de notre sol. Accueillons-les et donnons leur les moyens de grandir en toute maturité.
Aristote a écrit :
En l’espèce, le seul état civil US existant pour l’enfant en question est celui que vous ne souhaitez pas reconnaître. L’objection d’Hervé est donc pertinente.
Aristote a écrit :
D’accord avec vous sur ce point.
Mr Valls est un adepte du « plus c’est gros plus ça passe » . Il ne faut pas effectivement avoir la mémoire courte , Mr Valls a été le Ministre de l’Interieur qui a traité les « Manifs pour tous » comme des délinquants majeurs avec menaces préventives, accumulations de CRS aux consignes dures, infiltrations de provocateurs etc etc . Que ce soit Hollande, Valls et les autres, toute crédibilité de ce gouvernement a disparue. Formés par F. Mitterand , ils tentent d’appliquer la méthode mais sans intelligence et les français moins bêtes qu’ils ne le pensent ont tiré l’echelle
Sophie a écrit :
Que c’est précisément cette vision là de l’adoption qui est combattue ici. L’adoption, pour moi comme pour beaucoup, a pour objectif premier de donner des parents à un enfant qui n’en a pas. PAS l’inverse ! Le désir des adultes n’est pas premier et le devient dans les revendications actuelles.
Le danger est là.
@ humpty-dumpty:
Or en l’occurrence, c’est souvent l’inverse. L’adoption telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui sert plutôt à donner un enfant à un couple qui ne peut pas en avoir. C’est donc bien d’un enfant de substitution qu’il s’agit. Les parents ne le font pas par angélisme, ils adoptent un enfant parce qu’ils ne peuvent pas en avoir. Il s’agit de satisfaire un désir d’enfant. C’était sans doute vrai du temps où c’était des familles qui adoptaient un enfant orphelin. Or aujourd’hui, cela ne semble plus être le cas. On a même vu en Haïti que les enfants adoptés avaient toujours des parents en Haïti.
@ Sophie:
« (…) je pense qu’une grande partie de la société française n’est plus choquée par ces pratiques. Il suffit de la réglementer. »
On revient ici a la racine du debat, qui est de savoir si c est acceptable ou non d imaginer autoriser le recours aux meres porteuses. Vous evoquez le cas de la loi anglaise et j ai donc le sentiment que la seule chose qui vous choque dans la GPA, c est la contrepartie financiere.
Est-ce le cas ? Cela ne vous derange pas du tout de faire porter un enfant par une autre femme, pendant 9 mois, avec tout le lien humain que cela implique, puis de le livrer en coupant la mere et l enfant de ce lien ? Quel respect pour le corps des femmes ? Ne voyez vous pas les graves derives eugenistes vers lesquels on court, et les commandes d enfants « sur catalogue » ? Je vous renvoi aussi a tous les cas qui font les titres de l actualite (cas d enfant handicape, etc.) .
Quand a la loi sur GPA avec « non contrepartie financiere » , cela me parait si facilement contournable et hypocrite (e.g payement sous la table) !
Sophie a écrit :
Je te conseille d’entamer une démarche d’adoption pour comprendre, avant même d’avoir envoyé le formulaire au conseil général tu auras changé d’avis. Les OAA sont bien dans l’optique de prioriser les besoins de l’enfant et pas ceux des parents. Et dans le cas de l’adoption simple (ce qui semble être le cas que tu évoques pour Haïti), ce n’est certainement pas pour faire plaisir à des inconnus en France que que les parents biologiques ont laissé partir leur enfant.