Libertà !

Cette semaine nous a offert un entrechoc étonnant, d’ores et déjà bien relevé par Monsieur Chafouin depuis son outre-politique : de l’intolérance éphémèrement victorieuse en Italie à la difficile ouverture en France. Bien évidemment, vous l’aurez compris : j’évoque là l’annulation du discours du Pape à la Sapienza, et le discours de Nicolas Sarkozy à Riyad.

Le discours de Riyad n’est pas sans susciter quelques réserves. Fallait-il tenir à Riyad un discours aux tonalités approchant celles du discours de Latran ? Nicolas Sarkozy doit-il y évoquer le nom de Dieu et se faire quasi-théologue ? Peut-on rendre hommage aux vertus des religions de la même manière à Rome et à Riyad ?

« Sans doute, Musulmans, Juifs et Chrétiens ne croient-ils pas en Dieu de la même façon. Sans doute n’ont-ils pas la même manière de vénérer Dieu, de le prier, de le servir. Mais au fond, qui pourrait contester que c’est bien le même Dieu auquel s’adressent leurs prières ? Que c’est bien le même besoin de croire. Que c’est le même besoin d’espérer qui leur fait tourner leurs regards et leurs mains vers le Ciel pour implorer la miséricorde de Dieu, le Dieu de la Bible, le Dieu des Evangiles et le Dieu du Coran ?

Finalement, le Dieu unique des religions du Livre. »

Que l’on se rassure, en notre bonne terre de France, Nicolas Sarkozy n’a pas viré religieux. Son abord du sujet ne trahit pas la conviction profonde. Le croyant est-il donc vraiment celui qui tourne son regard et ses mains vers le Ciel pour implorer la miséricorde de Dieu ? Est-cela qui caractérise fondamentalement le croyant ? Qu’entend-il donc par « miséricorde » ? Croire, est-ce un besoin ou une volonté, une aspiration ?

Quant au fait que ce soit bien le même Dieu auquel nous adressions nos prières, il conviendrait d’abord de savoir de quel islam nous parlons. Avant tout, il ne faudrait pas oublier que la foi chrétienne est la seule à croire en un Dieu incarné, en un Dieu sacrifié, ce qui n’est pas une nuance dépourvue de conséquences. Que nos amis inquiets du respect de la laïcité se rassurent – au-delà même du rappel très clair mais un peu occulté fait par Nicolas Sarkozy dans ce discours : son regard est resté extérieur.

Fallait-il évoquer l’islam en Arabie Saoudite, pays qui ne connaît pas la liberté religieuse, pays dans lequel une femme peut être condamnée pour avoir évoqué publiquement le viol collectif qu’elle a subi ? Choisir la terre du wahabisme, davantage que, par exemple, le Maroc ? Fallait-il évoquer là le rôle des religions dans les civilisations, comme si toutes les religions et toutes ses applications se valaient ?

Peut-être. Malgré tout. D’une part, parce que devons aussi échapper aux idées convenues sur l’islam. D’autre part parce que l’Arabie Saoudite est bel et bien la terre sacrée de tous les musulmans. Enfin, parce qu’il faudrait lire les propos du roi Abdallah, repris par Nicolas Sarkozy, et espérer que ce ne soit pas que des mots. Et, ultimement, peut-être parce que l’on se félicitera que notre civilisation occidentale soit aussi connue pour autre chose que pour son matérialisme. Parce qu’il n’est peut-être pas inutile de tenter de désarmer le « choc des civilisations » qu’attendent tellement certains.

Le discours de Nicolas Sarkozy fleure toutefois un certain relativisme qui devrait rassurer les tenants inquiets de la laïcité : c’est avec la neutralité nécessaire qu’il regarde le phénomène religieux.

Au final, sur cette inflexion de l’attitude publique, je voudrais[1] me réjouir avec Monseigneur Vingt-Trois d’une

« nouvelle manière d’aborder le fait religieux, plus paisible et moins conflictuelle, qui correspond mieux à une nouvelle génération politique »

et rester vigilant avec Monseigneur Dagens :

« il y aurait rupture si le discours du Latran devenait une instrumentalisation des religions. Elles ne sont pas des forces politique d’appoint, elles sont des références vitales »

*

Outre-Alpes, s’est déroulée une fable politico-religieuse qui ne cesse pas de me réjouir, chaque fois que j’y pense. Souvenez-vous de ces réactions indignées de religieux, qui assurent trop souvent une célébrité innatendue à des oeuvres de mauvaise facture. A ceci près que je ne qualifierai pas d’oeuvre de mauvaise facture le discours du Pape, quelques ânes anticléricaux autoproclamés scientifiques ont offert, par leur intolérance, l’occasion d’un renversement inédit de situation.

C’est ainsi que, lors d’une semaine portant sur l’abolition de la peine de mort, Benoît XVI devait intervenir devant La Sapienza, plus grande université italienne, à l’invitation de son directeur. Las, quelques soixante-dix professeurs de physique se sont opposés à cette visite, au nom de la laïcité et de la raison. C’est ainsi, au nom de la raison, qu’ils ont exhumé un discours de l’alors cardinal Ratzinger selon lequel le procès de Galilée aurait été « raisonnable et juste« . Diantre. A l’exception près que la phrase en question n’était pas du Pape mais était une citation de Feyerabend « dans un discours où, réhabilitant justement le lien foi et raison, il expliquait comment le procès Galilée fut le symbole de l’obscurantisme catholique »[2]. Bref la Divine Raison cédait le pas devant l’idéologie, attitude que certains prêtent obstinément à l’Eglise…

Donc, les professeurs pétitionnent, les étudiants grouspusculent, ils investissent le bureau du recteur et exigent l’annulation de la visite du Pape. Victoire ! La noble raison triomphe de l’obscurantisme, le Vatican, ne souhaitant pas que le Pape soit éventuellement soumis à des troubles dans la salle même où il devait s’exprimer, annule l’intervention.

Victoire ?

Si l’on veut. Car sans eux, nous n’aurions jamais si que le Pape devait s’exprimer devant la Sapienza. Sans eux, nous n’aurions jamais lu son discours.

Un discours dans lequel il rappelle notamment comment philosophie et théologie ont été dissociés sous l’impulsion de Saint Thomas d’Aquin :

« Saint Thomas d’Aquin a ce mérite historique – face à la réponse différente des Pères [de l’Église] liée à leur contexte historique – d’avoir mis en lumière l’autonomie de la philosophie et, avec elle, le droit et la responsabilité propre de la raison qui se pose des questions sur la base de ses forces. Se démarquant des philosophies néoplatoniciennes où religion et philosophie étaient inséparablement liées, les Pères avaient alors présenté la foi chrétienne comme la vraie philosophie, soulignant aussi que cette foi correspondait aux exigences de la raison cherchant la vérité ; que la foi était le « oui » à la vérité par comparaison aux religions mythiques réduites au rang de simples coutumes. Mais plus tard, au moment de la naissance de l’Université, ces religions n’existaient plus en Occident mais seulement le christianisme. Il fallait donc souligner à nouveau la responsabilité propre de la raison, qui ne saurait être absorbée par la foi. »

Discours qui terminait ainsi :

« Qu’est-ce que le pape a à faire et à dire à l’université ? Il ne doit sûrement pas chercher à imposer aux autres la foi sur un mode autoritaire, elle qui ne peut être seulement donnée en liberté. »

Sans ces idiots utiles, l’Observatore Romano ne se serait pas trouvé en rupture de stock, sans eux, l’Italie ne se serait pas levée contre l’intolérance et le sectarisme, de la droite à la gauche.

C’est ainsi qu’on a pu lire les éditoriaux suivants :

« C’est une caricature de la laïcité qui a gagné, une laïcité radicalisante, toujours prête à être anticléricale, qui veut uniquement écouter ses propres raisons » Corriere della Serra

« Jusqu’à hier, (l’Italie) était un pays tolérant, où la forte empreinte religieuse, culturelle, sociale et politique du catholicisme cohabitait avec des cultures et des fois différentes, garanties par l’autonomie de l’Etat républicain (…) Mais quelque chose s’est rompu, dramatiquement, sous les yeux du monde (…) Le Pape, qui est aussi évêque de Rome, qui ne peut plus parler à l’université de sa ville, dans cette Italie médiocre de 2008 » Enzo Mauro, directeur de La Repubblica, principal quotidien de gauche

Sans eux, le Président de la République italienne, communiste, n’aurait pas eu l’occasion d’adresser un courrier au Pape dans lequel il écrit notamment :

« Je considère comme inadmissible ces manifestations d’intolérance et les annonces offensantes qui ont déterminé un climat incompatible avec les raisons d’une confrontation libre et sereine »

Sans eux, Walter Veltroni, maire de Rome, chef du Parti démocrate, principale formation de gauche, n’aurait pas eu l’occasion de juger l’annulation de cette visite « inconcevable pour un démocrate« .

Grâce à eux, le discours du Pape a malgré tout été lu, par le mathématicien Mario Marietti, à La Sapienza et a donné lieu à une grande manifestation de soutien et d’enthousiasme de la part des professeurs et étudiants qui ont applaudi le discours durant de longues minutes, tandis que des étudiants avaient accueuilli Benoît XVI lors de son audience hebdomadaire en scandant Liberta !

Grâce à eux, ce sont près de 200 000 personnes qui se sont réunis pour l’Angelus ce soir afin de soutenir le Pape, scandant Benedetto !

Certains disent même que le Pape a entamé, en petite foulée, un tour d’honneur de la Place Saint-Pierre, levant les bras et lançant haut, pour finir, sa chasuble blanche sous les acclamations enfiévrées du stade de l’assemblée tandis que, d’une nuée, descendaient des anges pour emporter avec eux le vêtement blanc. Mais là, je crois qu’ils déconnent. Faut toujours que certains exagèrent. Alors que l’on peut déjà se satisfaire de ce que l’intolérance et l’obscurantisme antireligieux aient été ainsi ridiculisés.

*

Deux évènements, autour de la laïcité, dans deux pays européens mais aux cultures différentes. Quel autre lien sinon la concomitance ? Sinon l’étonnement devant l’incapacité, semble-t-il, d’avoir un rapport serein entre des convictions divergentes, certes, mais aucunement aberrantes ?

Sinon, peut-être, l’amusement amer devant la parfaite bonne conscience de ceux qui, au nom de la tolérance et des Lumières entendent empêcher l’expression de l’opinion différente.

  1. voir cet article du Figaro []
  2. voir []

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50 commentaires

  • Bien dit! Parfois je me demande si c’est entièrement par idéologie, par ignorance, par bêtise ou par conviction que ces groupuscules agissent. N’y en a-t-il pas un seul de bonne foi? En tout cas, ces incultes sont à plaindre.

  • Ah, juste un mot. J’ajoute que cette furia laïciste est tout de même étonnamment dirigée vers une seule religion. Je suis peut-être parano,mais j’ai l’impresion qu’il n’y a aucune manifestation, aucun trouble à l’ordre public quand tariq ramadan fait des conférences fondamentalistes, ou quand le dalai lama donne audience à Bercy.
    Mais enfin, je crois qu’un certain JC l’avait prédit : on vous pourchassera à cause de moi. En somme, cela fait du bien d’être attaqué : ça prouve qu’on ne doit pas être tant dans le faux que cela…

  • Guillebaud écrit un truc du genre : « être traité de réac dans Charlie-Hebdo, ce n’est pas exactement la même chose qu’être jeté aux lions sous — » [j’ai oublié le nom exact]. Bref : coeur léger.

  • Je vous trouve bien tiède devant le discours de N.Sarkozy.
    Peut-être parce que vous n’entendez pas s’exprimer une foi mais plutôt la volonté de ne pas laisser, pour cause de laïcité, l’Islam occuper une grande partie de l’espace religieux.
    Pourtant, je trouve la démarche osée et digne d’intérêt.
    Heureusement que le Président ne vire pas au  » fou de Dieu  » comme le prétend Marianne et Jean-François Kahn toujours dans la nuance.
    Qu’un homme comme lui, plus tenté par l’action que par la réflexion, par le pragmatisme que par la spiritualité se positionne ainsi, c’est qu’il a été convaincu de l’importance du sujet, non de la place du religieux dans le monde mais de la place de l’Islam dans le religieux; je partage l’idée que l’Islam radical est un des problèmes en cours et à venir du monde occidental, et que la solution ne passe pas uniquement par un service anti-terroriste efficace.
    Pour la deuxième partie de votre billet, je ne connaissais pas les faits, l’intolérance peut aussi bien caractériser les croyants en la laïcité que les croyants religieux, la preuve…
    Ne pensez-vous pas que l’intolérance est essentiellement liée à la peur ? peur de perdre l’ascendant, l’influence, le pouvoir ?
    Il est difficile de faire comme si le religieux ne cherchait pas à s’immiscer dans la société, on en revient à la première partie du billet. Difficile aussi de ne pas voir les crispations des laïcs qui ne voient les religions que sous forme d’obscurantisme alors qu’elles sont civilisatrices avant tout.

  • Merci Carredas vous êtes sur ma longueur d’onde 🙂
    Je suis depuis très longtemps plutôt adepte de la libre-pensée mais j’ai très bien suivie et compris la position de NS et l’utilité de promouvoir par les temps qui courent les religions « modérées » et la laïcité positive plutôt que l’agressivité anti-religieuse qui ne fera que renforcer l’intégrisme de certains.

  • @Margit
    C’est tout l’intérêt du discours de Sarkozy, qui plaide, si j’ai bien compris, pour le fait de tirer profit des croyances et des religions pour le bien commun plutôt que de s’en méfier a priori. Mais celui-ci ne mérite pas les foudres des réacs de gauche parce que justement, il n’a pas franchi la ligne jaune. Il n’a pas appelé à privilégier une religion plutôt qu’une autre, ni à financer des constructions d’églises… Donc keep cool…

    @Koz
    Bien entendu se faire traiter de réac en permancence (et pas juste par charlie hebdo…) n’est pas agréable mais n’a certes rien à voir avec le fait d’être mangé par un lion dans les arènes de Rome. Ou tué par les cocos chinois. Ceci dit, c’est une autre forme de persécution… Une persécution larvée, je dirais. Être ridiculisé en permanence! Je garde le coeur léger toutefois.
    Quant à la manif d’hier j’avais le nez fin : france info a titré « le FN en tête de la manif anti-avortement », et la présence du parti de Le pen était dans tous le spapiers (pas nombreux) que j’ai lus.

  • Je suis un peu tiède, et un peu schizophrène.

    Mon côté laïc est un peu sceptique sur sa façon de l’aborder : c’est dans la nuance, mais son développement sur Dieu en début de discours a une tonalité qui me paraît un peu too much. C’est comme lorsqu’il affirme à Latran que l’instituteur n’aura jamais, grosso modo, la densité du curé : personne, pas même l’Eglise, ne lui demande d’aller jusque là. On peut en être intimement persuadé (tout en – précaution – reconnaissant aprfaitement l’influence très positive que peuvent avoir les instituteurs) mais on n’a pas besoin que cela soit affirmé par le Pdt, dans une phraséologie au demeurant qui rappelle plus le début du XXème que le début du XXIème.

    Mon côté « religieux » en revanche se réjouit fortement de cette nouvelle approche (comme je l’ai dit dans mon précédent billet) tout en restant vigilant sur le fait qu’il ne s’agisse pas juste de faire risette aux religieux. Je l’ai dit dans mon précédent billet sur le discours de Latran et je le redis : j’ai la même conception de la laïcité que lui, à savoir une laïcité qui traite chaque mouvement de pensée avec une égale considération, qui ne nie à personne le droit de s’exprimer publiquement.

    En revanche, j’ai été, initialement, un peu heurté qu’il fasse globalement le même discours à Riyad qu’à Rome. Il me semble important d’avoir bien conscience des racines « essentiellement chrétiennes » de notre culture. La lecture de Guillebaud me permet d’ailleurs de l’avancer avec plus de certitude, d’autant plus que c’est écrit par une personne plutôt à gauche.

    Et puis, pour finir, je ne suis pas très fan du côté : « beh, au final, hein, c’est le même Dieu ». Ca a un ptit air relativiste qui débouche un peu dans la négation, si en fin de compte tout ça c’est pareil. Et ça me semble assez contestable. Est-ce vraiment le même Dieu ? Doit-on dire que l’on prie le même Dieu parce que ce serait le même qui serait à l’origine de chaque révélation, éventuellement mal comprises ensuite ? Ou s’agit-il du même Dieu, en fonction de la conception qui en est portée ?

    Enfin… J’ai un peu l’impression qu’il fait l’équilibriste.

    C’est ça qui me rend tiède, même si fondamentalement, une approche décrispée me semble être plus moderne (en cela que l’approche crispée me paraît souvent davantage fondée sur les reproches faits à l’Eglise d’il y a 100 ans, qu’aux reproches susceptibles d’être faits à l’Eglise actuelle, que certains méconnaissent pour s’en être éloignés y’a près d’un demi-siècle et vivre sur les souvenirs des aïeux).

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  • j’ai du mal à comprendre pourquoi notre présient se livre à des analyses publiques sur la foi, les différences entre les religions, l’oeucuménisme, etc…

    je préférais qu’il s’en tienne à son propos initial:
    la foi donne une force
    cette force est un atout pour les croyants…
    et, si elle est bien utilisée, par la Société, les sociétés….

  • Chapeau Koz !

    Faire une analogie implicite entre Sarkozy (mec à Carla) et le Pape (serviteur du Christ), en les présentant tous deux comme deux hommes luttant pour la tolérance contre des laïcards abrutis et bornés, il fallait oser le faire !

    Il me semble que dans le cas du Pape, ce sont effectivement les bornés de La Sapienza les provocateurs, alors que dans le cas de Sarkozy, c’est lui le provocateur…

    Depuis plusieurs années, il n’était plus question de querelles d’école ou de religion en France (1983 c’est loin !) ; quant à la loi sur les signes religieux, elle est l’un des seuls vrais succès de la 2e présidence Chirac… Alors à quoi rime de ressortir ce salmigondis sur l’importance du sacré ou sur la supériorité du croyant sur l’incroyant ? Cela sent son Guaino, pas plus inspiré à Ryad qu’à Dakar (« l’homme noir hors de l’histoire »)…

    Et puis il y a manifestement d’intimes préoccupations de Sarkozy (cf. son bouquin « Libre ») mais on aura le droit de préférer d’autres illustrations du retour à la foi que le personnage de Sarkozy qui a divorcé deux fois et ne va quasiment jamais à la messe.

  • Sortez de votre anti-sarkozysme primaire qui vous fait voir d’étonnantes analogies, respirez profondément, relisez le billet, et on en reparle.

  • complètement d’accord avec vous, j’ai parfois l’impression, de plus en plus, que sous le couvert de la laïcité dont beaucoup se réclame, que nombreux exigent comme un du, quelque chose comme l’intolérance et le sectarisme ne sont pas loin…car l’important n’est plus de croire ou ne pas croire (en la rose, joke) pour le commun des mortels, l’important est d’avoir raison, tous contre un!
    alors, je ne suis aucunement dérangée par les propos de Sarkozy, ni des 2 bastions religieux où il les a prononcés.

  • @Koz : tu sais à quel point le relativisme est éloigné de mes convictions, mais je ne te suis pas bien quand tu doutes que le Dieu des chrétiens soit le même que le Dieu des juifs ou des musulmans.
    Je crois que le même Dieu s’est adressé de différentes façons aux hommes de bonne volonté, selon leur sensibilité ou leur culture.
    Dieu pouvait-il se révéler aux tribus animistes d’Arabie de la même façon qu’aux juifs imprégnés de la Thora ou qu’aux grecs pétris de philosophie?
    Clément d’Alexandrie dans « Stromate VI » écrit :
    « Dieu veut sauver tous les hommes. il a donné la Loi aux Juifs et la philosophie aux Grecs pour les guider vers son Fils » (44,1).
    Je pense bien sûr que le christianisme est la forme ultime du progrès en matière de pensée religieuse mais encore fallait-il être capable de le comprendre.
    Clément d’Alexandrie dit un peu plus loin :
    « tous les païens sont appelés au salut (…) et ils ont reçu la philosophie pour les aider à y parvenir « (110,3).
    Par ailleurs Saint-Paul n’affirme-t-il pas « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés « (I Tim.2,4)?
    Un commentateur qui me pardonnera d’avoir oublié son nom disait sous l’un de tes billets que Dieu avait donné le Christ aux chrétiens et le Coran aux musulmans.
    Cette approche me semble fort intéressante.
    D’autant plus que Clément, toujours lui, ne craint pas d’écrire :
    « La connaissance est donnée dans l’Eglise , même si la vérité peut être présente aussi chez les hérétiques » (154,1).
    Clément expose aussi que tous les chrétiens n’ont pas la même appréhension de la connaissance, faute de temps pour certains, faute de moyens intellectuels pour d’autres ou tout simplement faute de foi.
    Si tous les chrétiens ne peuvent atteindre la même connaissance on peut imaginer que Dieu ait voulu s’adresser autrement aux tribus animistes de la péninsule arabique car ils ne connaissaient ni la Loi, ni la philosophie.
    On a beaucoup reproché à Jean-Paul II d’avoir accepté la présence d’un medicine-man peau-rouge lors des rencontres d’Assise. C’est oublier que les indiens d’Amérique du Nord sont de grands mystiques dont les ancêtres méditaient 5 ou 6 heures par jour. Peut-on imaginer que notre Dieu n’ait pas inspiré aussi ces gens-là selon des moyens propres à leur culture?
    Les Amérindiens croyaient qu’il fallait se montrer humble devant le Créateur, qu’il fallait pratiquer la charité et montrer de l’amour envers les autres. N’étaient-ils pas à leur manière déjà bien avancé sur le chemin qui conduit vers la Vérité?

  • NS a t il au vatican tenu ce même discours sur le fait qu’il s’agit du même Dieu?
    car si c’est le même Dieu, et que seule la manière de prier change, on peut donner à chacun la liberté de croire à sa manière, de pratiquer suivant ses modalités, tout en restant sous le regard de Dieu?
    qu’en pense Benoît XVI?

    franchement, je ne pense pas que ce soit le rôle du Président de la république de disserter sur les religions, leur proximités et leurs différences, un sujet sur leuqel il n’a aucune légitimité, connaissance particulière…

    ou alors est-ce une tentative politique de rapprochement des religions du Livre pour éloigner, éviter le choc des civilisations?

  • Je pencherais pour ta dernière hypothèse, Francis, à savoir que ces discours sont une manière nouvelle de lutter contre le fanatisme religieux et le terrorisme qui lui est associé. On ne peut rien contre la foi… sauf si on accepte d’en parler, de l’expliquer.

    C’est une démarche nouvelle, nous verrons si elle porte ses fruits sur le long terme.

  • En tous cas si c’est le même Dieu il est regrettable qu’il n’ait pas trouvé moyen d’être plus clair afin d’éviter que ses différents partisans s’étripent les uns les autres en son nom unique.

  • Dang, je n’ai pas déclaré l’infaillibilité sur ce point de doctrine, et n’ai pas de certitudes.

    Je reprends la question que je posais avant : lorsque l’on dit qu’il s’agit du même Dieu, évoque-t-on fondamentalement Dieu, ou la conception que l’on en a ? J’ai beaucoup de mal à imaginer que Dieu se soit simplement « adressé autrement » aux tribus animistes. Bien évidemment, ne disposant pas de ligne directe avec Lui, je ne peux pas avoir d’assurances définitives mais je doute.

    Qu’il y ait dans le coeur de chaque Homme une aspiration à la foi ou, pour le dire autrement, que Dieu ait mis dans le coeur de chaque Homme la volonté de le chercher, c’est une possibilité, mais, ensuite, ces hommes croient-ils dans le même Dieu ?

    C’est peut-être tout simplement une question de perspective, selon considère que l’expression « même Dieu » renvoie à une vérité supérieure, extérieure (bref à Dieu lui-même qui serait à l’origine de toutes choses… même les conceptions erronées de lui ?) ou que cette expression renvoie à la perception que l’on a de lui : si je crois en un Dieu qui m’autorise le meurtre de l’infidèle et si je crois dans « le Dieu des chrétiens », est-ce que je crois dans le même Dieu ?

    J’avance avec prudence, parce que j’ignore trop de choses de l’islam (pour prendre cet exemple puisque NS était à Riyad).

    Mais je n’exclus aucunement que des croyants d’une autre religion, ou des non-croyants, puissent s’approcher davantage de la vérité que de « bons chrétiens ».

    Cela étant, je rejoins Francis : je ne suis pas certain qu’il ressorte du rôle de Nicolas Sarkozy de s’aventurer sur une telle question. Le début de son discours, parlant, donc, directement de Dieu me chiffonne. Il me semble qu’il devrait s’en tenir à évoquer « les religions », ce qui était davantage le cas dans le discours de Latran.

    Et c’est un peu la deuxième hypothèse de Francis que je voulais suggérer : que ce discours entre dans le cadre de l’évitement d’un « choc des civilisations ». Ce n’est qu’une hypothèse.

  • @ Dang

    Et bien moi, comme tu t’en doute Dang, je suis 150% d’accord avec toi.

    En fait, si on analyse le fait religieux dans sa totalité, il existe plusieurs niveaux qui font que lorsque plusieurs interlocuteurs en parlent, ils ont, au mieux, chacun l’impression de parler d’une chose différente. Au pire, ils s’opposent alors que sur le fond, ils sont bien souvent plus en accord qu’ils ne le pensent. Au début de ce post et dans le cadre limité de ma pause, je ne sais pas trop si je vais réussir à m’expliquer mais bon, qui ne tente rien…

    D’une part, il y a l’idée de Dieu. Cette idée est certes protéiforme chez l’homme c’est le moins que l’on puisse dire mais que l’on pense à l’animiste amérindien qui adresse une prière à un arbre avant de le couper et qui manifeste de cette façon son respect de la vie ou à ce scientifique qui au bout de ses recherches s’en vient à se demander si malgré tout derrière et au delà de ces lois physiques il y a peut être « quelque chose » ou à cet autre croyant qui imagine en voyant le soleil un Dieu conduire un chariot en feu, il semble qu’il y ait un dénominateur commun : l’idée que peut être il existe quelque chose de plus fondamental, de transcendantal à cet univers dur et fini ; une certaine idée de l’infini ou de l’absolu ; l’idée d’une intention créatrice ; de l’amour universel.

    Ensuite vient la philosophie religieuse. J’y ajoute cet adjectif parce que certaines ne le sont pas en fonction principalement de leur alignement avec la première idée. Il s’agit alors plus de ce qui traite de la relation entre l’homme et cette idée de Dieu. Son salut principalement. Les moyens d’obtenir ce salut. L’aspiration ou l’espérance qui fait penser que l’homme peut accéder dans cette vie ou dans une vie future à un état qui transcende sa condition présente. Qu’il puisse lui même se rapprocher ou se confondre dans une certaine mesure avec l’idée de Dieu. Ce sont également les moyens d’y parvenir.

    Vient ensuite la pratique religieuse. Il s’agit des rites, ou des modèles de comportement qui dans le détail permettent d’appliquer, de se conformer ou de suivre les préceptes développés dans la deuxième idée. Ces pratiques sont bien entendu fortement influencées par la culture locale, par les conditions environnementales, par les traditions. C’est aussi là que se situe, et ce n’est pas la moindre importance, l’impact moral et civilisateur des grands courants religieux.

    Ces trois concepts sont bien sûr intimement liés mais aussi souvent confondus en un seul. Et plus on se contente d’examiner le troisième étage de mon analyse, plus on constate que l’activité humaine y est dominante même si pour beaucoup, la pratique est « révélée ». C’est aussi là que peut s’appliquer le plus une échelle de valeur en attribuant une considération subjective à l’une ou à l’autre religion. Plus on remonte, plus on réalise l’universalité du concept. Toujours est-il que le « hors du Christ, point de salut » interprété comme « hors de la religion catholique, point de salut » semble contraire à l’idée plus universelle que si un homme se conformant à la philosophie révélée par le Christ sans même, culturellement, en connaître l’existence, sera infiniment plus proche de Dieu et de son salut que la grenouille de bénitier au cœur de pierre.

    Lorsque Jean Paul II rencontre un medecine-man amérindien, il ne communique pas sur les pratiques, il communique un peu plus sur la philosophie car bien des concepts animistes comme le souligne Dang sont proches de la philosophie chrétienne et il s’accorde certainement sur le fait que son interlocuteur dans sa foi en une existence transcendantale se rapproche encore plus de la chrétienté, mais surtout d’une vérité universelle.

    Et je reviens donc par là au discours de Ryad. C’est bel et bien sur l’idée de Dieu que peuvent se rassembler les hommes. Et non pas sur les différentes pratiques où même sur les différentes philosophies développées individuellement par les religions. Les croisades visant à châtier l’infidèle, ou la croyance que le Roi de France et ses héritiers tirent leur légitimité directement de Dieu, sont bien évidement des considérations toutes humaines et politiques dans le sens large. Et c’est aussi en partant de Dieu que les hommes peuvent aussi porter un regard sur certaines « pratiques » comme celles consistant en son Nom à faire sauter sa ceinture de TNT.

  • En attendant le billet promis par Polydamas, je voulais dire à Eponymus que je trouve le sien construit et clair ( celui de Dang étant destiné à un public plus averti me semble-il )
    Je ne suis pas compétente sur le sujet de Dieu, de façon trés basique je dirais qu’un Dieu unique est unique par définition et que nécessairement le Dieu unique des chrétiens des musulmans et des juifs est le même.
    J’imagine que ce n’est pas si simple à admettre par les croyants des trois religions qui se sont massacrés en son nom.
    J’ignore si N.Sarkozy est croyant ou non, et quelque part, ce n’est pas le problème.
    Ce que j’ai compris de sa démarche, c’est qu’il « relégitimise » le sprituel religieux – chez nous le christianisme – il le réintroduit dans notre monde matérialiste comme une force, non par croyance religieuse, mais pour contrebalancer l’Islam radical qui veut convertir le monde »impie » par la violence.
    Il dit aux chrétiens  » vous n’êtes pas que des citoyens auquels la laïcité reconnait le droit de pratiquer, vous êtes porteurs d’un souffle qui nourrit aussi les non-croyants  »
    Ces paroles sont destinées aux musulmans radicaux autant qu’aux chrétiens, elles ne présagent aucun changement dans la séparation des pouvoirs, elles ne sont pas non plus une intrusion dans ce qui relève spécifiquement du religieux, ni  » des risettes  » aux catholiques.
    Pour ma part, je les comprends comme une reconnaissance, un peu comme le chambellan introduit une personnalité devant le public en la nommant…
    La suite dépend de ce que les chrétiens feront de cette occasion, déjà la saisiront-ils ?
    Et si oui, résisteront-ils à la tentation de Dieu mal compris par les non-chrétiens pour privilégier ce qui rassemble ?

  • Epo, je crois aussi (j’en reste à mon idée) que beaucoup dépend de la notion de Dieu. « Dieu », est-ce simplement l’entité supérieure et abstraite qui serait probablement à l’issue d’un principe de vie, ou est-ce que « Dieu », c’est le « Dieu » en lequel je crois ?

    Il me semble inévitable de préciser ce « Dieu ». Pour caricaturer : Oussama Ben Laden aussi croit en Dieu. Peut-on dire que « au fond, c’est le même Dieu » ? A l’évidence, non. Je ne crois à l’évidence pas en un Dieu qui permettrait le massacre d’innocents pour voir son nom se répandre.

    Je crains aussi d’identifier dans ton com’ une tendance à reconnaître dans les autres traditions spirituelles ce qui nous convient parce que, précisément, proche de nous, en faisant le tri de tout ce en quoi ces autres traditions croient profondément mais qui nous dérange.

    Pour autant, penser que ce n’est pas, précisément, le même Dieu ne signifie à aucun moment un irrespect quelconque pour les autres croyances, qu’elles soient au demeurant identifiées ou très personnelles. Je vous renverrais à la formule de Guillebaud et à sa « libre expression dans un rapport robuste et apaisé ».

    Et l’exemple de Jean-Paul II est assez bon : son ouverture aux autres traditions spirituelles ne signifiait pas pour autant sa ferme conviction dans la foi catholique.

    Et je suis, à nouveau, bien d’accord pour dire que je serai certainement plus proche de nombreux musulmans, de nombreux juifs, de nombreux non-croyants que je ne le suis de certains catholiques. Tout comme je suis certain que de nombreux publicains actuels entreront au « Royaume du Père » plus assurément qu’un paquet de pharisiens. Et ce n’est pas spécialement une parole icônoclaste :

    « Saint Luc 18, 9-14

    Jésus dit une parabole pour certains hommes qui étaient convaincus d’être justes et qui méprisaient tous les autres : « Deux hommes montèrent au Temple pour prier. L’un était pharisien, et l’autre, publicain. Le pharisien se tenait là et priait en lui-même : ’Mon Dieu, je te rends grâce parce que je ne suis pas comme les autres hommes : voleurs, injustes, adultères, ou encore comme ce publicain. Je jeûne deux fois par semaine et je verse le dixième de tout ce que je gagne.’ Le publicain, lui, se tenait à distance et n’osait même pas lever les yeux vers le ciel ; mais il se frappait la poitrine, en disant : ’Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis !’ Quand ce dernier rentra chez lui, c’est lui, je vous le déclare, qui était devenu juste, et non pas l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. » »

  • Tu as bien raison Eponymus de souligner que c’est sur l’idée de Dieu que les hommes peuvent se rassembler, en tout cas les croyants, et non sur les pratiques religieuses.
    Les chrétiens eux-mêmes sont divisés en différentes chapelles parfois difficilement réconciliables.
    Au sein même de l’Eglise catholique il y a des différences sinon des différents.
    Les catholiques tradis et les cathos progressistes n’ont pas la même approche du fait religieux. Les catholiques orientaux non plus, eux qui se plaignent à juste titre d’être mal compris par les catholiques latins.
    Mais les chrétiens peuvent tous se retrouver dans la même croyance en un Dieu unique.
    Et ceci comme le dit très bien Eponymus peut s’étendre tout naturellement aux croyants d’autres religions.
    D’ailleurs comment ne pas être d’accord avec Carredas quand il dit que par définition un Dieu unique est unique et se trouve donc forcément être le même pour tous les croyants?
    C’est je pense ce qui a motivé Sarkozy et son conseiller-gourou à Ryad.
    Destiné aux musulmans ce discours-prêche ne pouvait que parler de ce qui est commun aux uns et aux autres, de ce qui unit et non de ce qui sépare.
    Les musulmans ne conçoivent pas l’athéisme, l’agnosticisme, la tiédeur dans la foi. On dit que la religion juive est caractérisée par l’espérance, le christianisme par la charité, l’islam par la foi.
    Comment se faire mieux comprendre des musulmans sur un tel sujet sinon en parlant de Dieu et non pas de religion?
    Pour ce qui est de l’idée de Koz qu’on ne croit pas tous en un même Dieu, je vois bien son objection.
    Dieu est le même mais nous n’en avons pas tous la même perception et il ne représente pas la même chose pour chacun d’entre nous.
    Certes on peut voir les choses ainsi mais on peut immédiatement dire que nous aussi nous aurons sûrement des surprises dans l’au-delà car comment des êtres finis peuvent-ils concevoir l’infini?
    C’est vrai cependant qu’entre un Dieu d’amour et un Dieu qui autorise le meurtre des infidèles le concept n’est pas le même. Encore faudrait-il être certain que le Coran n’est pas mal interprété.
    Les passages de Clément d’Alexandrie que j’ai cités montrent bien que (i) Dieu veut sauver tous les hommes (ii) pour approcher la conception du Dieu d’amour des chrétiens il faut avoir ou bien connu la Loi (juive) ou bien la philosophie (grecque).
    Qu’en est-il alors du medicine-man amérindien qui ne connaît ni la Loi ni la philosophie?
    Est-il incapable de concevoir un Dieu d’amour?
    Je ne le pense pas.
    Epo montre fort bien la différence entre rites et croyance. Le medicine-man n’est pas chrétien mais il a une prescience de ce en quoi les chrétiens croient.
    Les scientifiques nous disent que le siège de la croyance en Dieu a été déterminé en un point précis du cerveau. Si ce centre est atrophié, paraît-il, le sujet ne croît pas.
    La croyance pourrait donc n’être qu’un accident de l’évolution. Et si Dieu créateur avait conçu le cerveau de l’homme pour qu’il puisse communiquer avec lui?
    Dans cette hypothèse l’animiste aurait autant de possibilités de se rapprocher de Dieu que le chrétien, le juif ou le musulman.

  • « Les scientifiques nous disent que le siège de la croyance en Dieu a été déterminé en un point précis du cerveau. Si ce centre est atrophié, paraît-il, le sujet ne croit pas ».

    J’avoue avoir du mal à envisager sereinement cette hypothèse. J’ignore sous quels termes elle a été exprimée ou à jusqu’à quel point le débat est avancé à son propos, mais cela peut revenir à nier notre libre arbitre.

    Dès lors faudrait-il en déduire que les athées ne le sont qu’en raison d’une carence d’ordre physiologique ? Ou qu’une démarche spirituelle ou religieuse ne serait jamais que la traduction mécanique d’une impulsion provenant de ce « point précis du cerveau » ?

  • Est-il incapable de concevoir un Dieu d’Amour ? Non, je ne le pense pas davantage. Mais sa foi réside-t-elle en un Dieu d’amour ? Quand il invoque Dieu, à supposer qu’il invoque Dieu, invoque-t-il un Dieu d’amour ?

  • @Koz : non en effet je ne crois pas qu’il invoque un Dieu d’Amour mais au moins a-t-il le sentiment de la transcendance d’un esprit supérieur sur les choses de ce monde, car lorsque le medicine-man invoque Dieu il invoque un Esprit Créateur.
    Et si on prend la peine d’examiner les cinq commandements essentiels de la religion des indiens des grandes plaines d’Amérique du nord, on constate que les grands préceptes qui nous gouvernent ne sont pas loin :
    « Tu dois être humble devant ton Créateur »,
    « Tu ne dois pas détruire la vie sans nécessité » (ceci s’applique autant aux hommes qu’aux animaux ou aux plantes),
    « Tu dois aider ton prochain qui est dans le besoin »,
    « Tu ne dois pas épouser un membre de ta famille »,
    « Tu dois rester fidèle à ta femme comme ta femme doit te rester fidèle tant que tu es en vie ».

    @Sébastien : tout à fait d’accord avec vous. De nombreux articles ont repris cette théorie dans des magazines plus ou moin scientifiques avec pour but avoué de montrer que la croyance en Dieu était uniquement le produit d’une alchimie moléculaire qui se produit ou pas dans le cerveau.

  • Dang, ramener la foi à ces quelques préceptes c’est diluer le message du christianisme – ou de toute autre religion d’ailleurs, chacune revendiquant sa spécificité et sa vérité – jusqu’à en faire une tisane insipide (pour le buveur de café que je suis c’est redondant).

    La prohibition du meurtre, de l’inceste ou de l’adultère ne sont que des règles de base de la vie en société et il n’est nul besoin de les asseoir sur une quelconque transcendance.

    Ce n’est que d’un point de vue politique, au sens noble et originel du terme, que l’on peut rapprocher ainsi les religions : au regard du bien commun, et dès lors qu’elles partagent ces quelques valeurs fondamentales, elles sont également bénéfiques pour la Cité et doivent donc être traitées avec un égal respect. Il me semble que c’est ainsi qu’il faut entendre le discours de Sarkozy et non comme une déclaration théologique irénique.

    Pour un croyant, en revanche, surtout s’il a lu René Girard, le fait que toutes les religions aient en commun l’affirmation d’une transcendance ne suffit pas à les rapprocher. Il convient en effet de distinguer la transcendance de la violence et celle de l’amour, selon que la religion en cause masque ou révèle le mécanisme victimaire.

    edit. : Merci Margit d’avoir signalé cette très intéressante tribune.

  • Ce qui est certain, c’est qu’il n’y a qu’un Dieu, carredas, donc de facto le Dieu des musulmans et des chrétiens est le même. Mais de la même façon qu’il y a mille interprétations de Dieu rien que chez les catholiques, on ne peut pas dire que les musulmans et les orthodoxes, par exemple, adorent le même Dieu. En fait, ils adorent des images différentes de Dieu. Leur culte est différent.
    On en revient toujours à la question de la Vérité, que tout homme doit rechercher… Il n’y en a à mon avis pas 36!

  • @le chafouin

    Des images de Dieu, des interprétations de Dieu, et en fait un seul Dieu…
    Les musulmans et les orthodoxes n’adorent pas le même Dieu et pourtant il n’y a qu’un Dieu.
    Qui se trompe ? quelqu’un se trompe-t-il ? J’ai un peu de mal à vous suivre.
    Et je pense que c’est normal, parce que déjà l’idée de ce Dieu ne m’est pas accessible.

  • @carredas : Si vous limitez la phrase à « ils adorent des images différentes », tout redevient très clair, ne trouvez-vous pas ?

  • @carredas
    Oui je pense qu’il n’y a pas autant de vérités que de religions. Dieu, comme le rappelle polydamas sur son blog, ne peut pas être à la fois trinité et pas trinité. Dieu ne peut être un en trois personnes ou pas. Jésus est soi Dieu, soit homme. Donc déjà, rien qu’entre l’Islam et la religion chrétienne, l’une des deux se trompe sur ce point, non?

  • @SR : ne vous méprenez pas sur le sens de mes lignes concernant les amérindiens. Je ne suis pas en train de faire du relativisme. Toutes les religions ne se valent pas c’est vrai, mais peut-on faire grief à ceux qui n’ont pas encore eu la révélation de la vérité, ou qui n’avaient pas la culture suffisante pour la comprendre, de ne pas être chrétiens et de ne pas croire en un Dieu trinitaire? J’ai été amené à étudier la religion des indiens des grandes plaines et j’ai été impressionné par la profondeur qui se dégageait du message de mes interlocuteurs. C’est pour cela que je n’ai pas été scandalisé par la présence d’un medicine-man à Assise.

    @Le chafoin : entre l’islam et le christianisme il y en a un qui se trompe?
    Entre le judaïsme et le christianisme aussi alors?
    Et si l’approche du Dieu trinitaire dépendait de la culture d’origine des croyants, et si il fallait passer par le Dieu un pour comprendre le Dieu en trois personnes?

  • Non, non, le chafouin : Jésus est soit homme, soit et Dieu et homme. L’idée que Jésus ne serait que Dieu est hérétique (monophysisme) et a été condamnée par le Concile de Chalcédoine en 451. 😉

  • @ Dang,

    Je ne fais « grief » de rien à personne, en tout cas, pas aux indiens pour leur mauvaise volonté à se convertir à la seule véritable foi alors que les missionnaires les y incitaient par la force raisonnante de leurs arguments et la douceur de leur conduite. 😉

    En revanche, quand vous affirmez que c’est le même dieu qui s’exprime, en se mettant à la portée de ses interlocuteurs, à travers les différentes religions, je tique. Et si je réserve expressément le cas de l’Islam, on ne peut pas mettre sur le même plan Osiris, Balder, Dyonisos, d’un côté, et, de l’autre, Abel, Job, Jonas, les prophètes et finalement le Christ. La transcendance des premiers reposent sur un meurtre collectif maquillé par les mythes en l’exécution d’un coupable ; la transcendance de l’enseignement des seconds reposent sur la révélation de l’innocence de ces victimes.

  • @Sr
    oui, pardon…la fatigue.
    @Dang
    oui, je ne coris pas qu’un même dieu ait inspiré à la fois mahomet et st jean par exemple. Et je ne dis pas ça juste parce que je suis catho, un musulman dirait pareil…

  • @ Sr

    « La prohibition du meurtre, de l’inceste ou de l’adultère ne sont que des règles de base de la vie en société et il n’est nul besoin de les asseoir sur une quelconque transcendance. »

    S’il est possible d’arriver à ces règles de base par la raison et la logique et qu’il n’existe donc pas un « besoin » de les asseoir sur une transcendance, la démarche logique et rationnelle pour arriver à les exprimer en tant que valeur n’a pas toujours été faite et n’est toujours pas faite visiblement par tout le monde.

    Dans un monde qui peut affirmer que tout est absolument matière et que la manifestation de la vie dans tout ses aspect est un hasard du au choc de quelques atomes (si l’on pousse véritablement ce concept à l’extrême), l’humain est réduit alors à un petit tas de cellules organisées sans direction ni plus de sens que ce qui se produit chaque seconde au milieu du soleil. Par conséquent, le meurtre, l’inceste, l’adultère n’ont pas plus d’importance ni de sens positif ou négatif que l’observation d’un félin dévorant ses petits dans certaines circonstances, s’accouplant avec ses géniteurs dans d’autres ou tuant un rival dominant.

    Finalement, un certain humanisme athée, ne peut s’empêcher de façon presque involontaire, d’accorder une dimension métaphysique à l’homme. Je veux dire par là, une dimension qui place l’homme ou la vie au delà du simple conglomérat de cellules issues de la logique (ou du hasard) des énergies et des mouvements créer initialement par le big bang. Il lui attribue des valeurs ou érige un système de valeurs qui est très étranger à la logique des forces qui président à l’organisation des atomes et des molécules. Il applique à l’homme la notion de déterminisme – dans le sens ou l’homme est déterminé par lui-même et non pas par le seul hasard ou la seule logique de la matière. Donc, par « quelque chose » qui est tout à fait étranger à cette matière – personne n’accordant un auto déterminisme conscient à un tas d’atomes. En fin de compte, ce déterminisme (qu’il soit divin – pour ceux qui croit que l’homme est déterminé totalement par Dieu – ou humain dans sa dimension métaphysique) est peut être justement la valeur philosophique la plus fondamentale.

    Ceci étant dit, on peut aussi s’apercevoir que plus les idéologies reposent sur une philosophie matérialiste, moins la vie n’a effectivement d’importance. On peut tuer une race inférieure comme on tue un parasite, on peut éliminer les intellectuels contre-révolutionnaires comme on procède à un assainissement sanitaire, on fait suer les cols bleus comme les ouvrières d’une fourmilière. C’est pourquoi, pour conclure cette parenthèse philosophique, les règles morales de base de la société tendent à s’appuyer, voire s’appuient de fait sur une transcendance.

  • @le chafouin

    Si ce n’est pas le même Dieu, on en revient à la question :
    y a-t-il plusieurs  » Dieu  » uniques ?
    parce que une image de Dieu ne peut inspirer personne, enfin il me semble…

  • @ Carredas,

    Non, seulement une seule religion qui a raison. Quant à savoir laquelle, cela dépendra de votre interlocuteur.

    @ Koz, merci pour ce… soutien ???? 😉

  • @Carredas
    Plusieurs Dieux uniques différents? Pas possible, ils ne pourraient s’ignorer tout de même… Quand je parle d’image je parle dela représetation qu’on en a. Pour moi, certaines religions ont une mauvaise représentation d’un Dieu pourtant unique. En cela elles adorent le même Dieu, on se comprend?

  • @le chafouin

    Donc, il y en a qui se trompent et qui ont une mauvaise représentation de Dieu ( ceux qui se trompent étant logiquement les autres )
    Mais quand vous dites que ce n’est pas le même Dieu qui a inspiré Mahomet et Saint-Jean… ce serait plutôt le même message qui leur aurait été envoyé par le seul Dieu unique et l’interprétation du message qui serait « faussée » par celui qui le reçoit ?
    On pourrait en conclure que Dieu envoie des messages sans imposer une seule compréhension du message, ce serait moins confortant dans l’idée d’être dans la Vérité pour les trois grandes religions mais plus oecuménique…

  • @ Eponymus,

    Je suis évidemment d’accord avec vous. Ce que je voulais souligner c’est que réduire l’apport des religions à ces quelques règles c’est les appauvrir considérablement. Je ne contestais pas l’apport que constitue la transcendance pour appuyer ces règles.

    On peut cependant parvenir, par un raisonnement purement utilitariste, à ces règles sans recourir à un fondement transcendant, au moins en théorie. Il est sûr qu’en pratique, ce sera plus délicat et qu’un régime strictement matérialiste tendra à s’affranchir de ces contraintes.

  • @ SR

    Bien d’accord avec vous.

    C’est plutôt que j’ai profité de votre phrase pour relater très brièvement une longue et passionnante discussion avec un théologien (anglican en l’occurrence) qui arrivait à la transcendance en partant justement de la matière pure et dure. Et qui de ce fait, trouvait une plate forme d’échange même avec un athée pour peu que celui-ci soit humaniste.

    En fait, cela m’a permis de préciser ma pensée. C’est toute la différence existant entre le relativisme et l’universalisme. En caricaturant et sans rentrer dans les détails, l’un dirait « tout est relatif, tout se vaut » et l’autre » il existe un socle commun à tout ».

    La reconnaissance du socle n’implique pas une négation des différences, l’extrême relativisme tends par contre à le faire. La reconnaissance de l’existence du socle permet aussi de reconnaître les similarités ou les identités qui ne sont pas surprenantes du fait d’une source fondamentale commune mais bien entendu, n’empêche pas de mettre les différences en évidence.

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