L'Afrique noire est mal partie

Le sommet Afrique-Europe fut une bonne occasion de rouvrir « L’Afrique noire est mal partie » essai de René Dumont, dont ses détracteurs disaient « avec les malheurs des autres il fait des succès de librairie ». Près de 50 ans après sa parution, l’ouvrage du célèbre agronome et futur écologiste prête à sourire tant les analyses montrent une certaine candeur. Il a toutefois le mérite de souligner que finalement l’Afrique noire n’est pas vraiment mieux lotie maintenant qu’au moment de l’indépendance.

Rendre, comme le fait René Dumont, le colonialisme responsable de l’essentiel des problèmes de l’Afrique, est certes une idée encore répandue. A tort. Bien sûr, et je l’ai souvent dit ici, le colonialisme fut une erreur et une honte. Ses méfaits sont bien connus. Les frontières issues des grands empires coloniaux ou des découpages négociés principalement par la Grande-Bretagne, la Belgique et la France ont donné des pays souvent ingérables. On a obligé des ethnies violemment antagonistes à vivre ensemble, comme au Rwanda ou au Nigéria. Même s’ils ne sont pas hostiles les uns aux autres, les habitants de ces territoires ne parlent pas toujours la même langue et parfois n’avaient même pas en commun la langue des colonisateurs. On l’a vu au Cameroun et au Togo où certains habitants parlaient allemand et d’autres français ou anglais.

On a aussi fait cohabiter des musulmans et des chrétiens alors que les premiers voulaient imposer la charia aux seconds, comme c’est encore le cas au Nigéria ou au Soudan. On vient de découvrir le drame du Darfour mais on a oublié un peu trop vite une guerre de religion qui a opposé pendant vingt ans les soudanais arabes et musulmans du nord aux soudanais noirs et chrétiens du sud qui ont déploré un demi million de morts dans leurs rangs.

Pire, on a amalgamé des peuples aux intérêts économiques divergents. Au Nigéria encore on a ainsi les Ibos du sud, chrétiens très occidentalisés et entreprenants qui sont minoritaires dans une fédération où les ruraux musulmans du nord veulent d’autant plus imposer leur loi qu’ils dépendent largement de l’esprit d’entreprise de ces gens du sud qu’ils détestent. Ce n’est pas pour rien qu’ils les surnomment avec envie et mépris « les juifs de l’Afrique ». La sécession du Biafra suivie d’un blocus qui fit un million de victimes n’a pas d’autre origine. On a vu aussi récemment au Tchad l’absurdité de certaines frontières dans ces régions de pasteurs semi-nomades.

Il est évident aussi que le colonialisme a désorganisé pour longtemps l’économie de ces pays en favorisant des mono cultures ou mono productions qui ne permettent pas de diversifier les revenus des populations.

Le colonialisme a également péché en n’organisant pas assez tôt la formation d’élites prêtes à prendre la relève. Ce défaut a surtout été constaté dans les anciennes colonies françaises, belges ou portugaises. Les britanniques, plus clairvoyants, avaient depuis longtemps admis dans leurs universités non seulement des étudiants africains mais aussi de nombreux chefs tribaux dont ils savaient bien qu’ils formeraient l’administration des futurs états.

Le colonialisme est enfin coupable, mais pouvait-il en aller autrement, d’avoir suscité des besoins de consommation à l’occidentale dans un continent dont la vie des habitants n’avait rien en commun avec celle des colonisateurs. Si l’Afrique avait continué à vivre selon ses habitudes ancestrales elle n’aurait pas connu les famines qui l’ont décimée depuis 1957.

Il faut pourtant être réaliste. On pourra toujours essayer de rendre le colonialisme responsable de tous les maux du continent noir, on ne pourra faire abstraction des réalisations des puissances coloniales : routes, chemins de fer, ports, hôpitaux, universités etc… sont des infrastructures que les états africains auraient mis un siècle à construire et qui n’ont pas été entretenues comme il l’aurait fallu.

Faire le procès du colonialisme ne doit pas non plus cacher un fait essentiel : la majorité des états africains sont indépendants depuis près de 50 ans. Le Libéria n’a même jamais été une colonie. En un demi siècle, considérons les progrès accomplis par un pays comme le Brésil ou certains pays d’Asie ! La Corée ravagée par la guerre et sans grandes ressources propres, Taïwan déséquilibrée par l’arrivée de deux millions de réfugiés en 1949, sont devenues cinquante ans plus tard des géants économiques.

Alors pourquoi pas l’Afrique ? L’Afrique est globalement riche. Son sous-sol recèle tous les métaux précieux dont les pays industrialisés ont tant besoin, et du pétrole en abondance par-dessus le marché. Ses forêts, si elles étaient bien gérées, pourraient assurer aux populations concernées des revenus confortables pendant des siècles. Son agriculture aussi pourrait au moins nourrir mieux sa population. Je sais qu’on va m’opposer les aléas d’un climat capricieux ou d’une terre ingrate, l’avancée du désert au Sahel, les sécheresses, les invasions de criquets, que sais-je encore ?

Sans chercher à sous-estimer la nature on peut se demander si l’homme ne pourrait pas faire mieux. A l’époque où il était archevêque de Dakar, Mgr Lefebvre, plus connu aujourd’hui pour avoir été un évêque intégriste et schismatique mais qui a plutôt laissé un bon souvenir en Afrique, Mgr Lefebvre, donc, avait commandé à des ingénieurs agronomes une étude sur la possibilité ou l’impossibilité de la terre sénégalaise à nourrir une population de plus en plus nombreuse. La réponse des spécialistes avait été positive. On pouvait transformer l’agriculture, on pouvait amender le sol, mais il fallait consentir des sacrifices pendant quelques années, accepter de laisser deux ou trois fois les récoltes pourrir sur place pour fumer la terre.

On revient donc à la question « pourquoi tant de misère en Afrique ? », pourquoi un continent bénéficiaire d’un tel potentiel ne connaît pas la prospérité ? La réponse en forme de question des tenants de l’ancien ordre colonial qui demandent si les africains sont « sous-développés ou sous-capables ? », outre son caractère outrancier, méconnaît les deux causes essentielles du retard de ce continent. L’Afrique est pillée par une caste de profiteurs incompétents et elle voit fuir sa jeunesse.

L’Afrique a été et est toujours une véritable pépinière de tyrans sanguinaires, roitelets mégalomanes confortés par une cour d’arrivistes corrompus. Elle est longue la liste de ceux qui ont fait du mal à l’Afrique : les Bokassa, Mobutu, Idi Amin Dada, et Mugabe pour n’en citer que quelques-uns. Robert Mugabe est véritablement une honte pour les africains. Quand Ian Smith l’ancien Premier Ministre ségrégationniste d’une Rhodésie dominée par les blancs lui remet le pouvoir après un bras de fer de treize ans avec la Grande-Bretagne, nul ne doute que ce pays très riche, en pleine croissance économique, devenu le Zimbabwe, va être la Suisse de l’Afrique australe. Las ! Après 30 ans de dictature c’est l’un des pays les plus pauvres du monde.

Rien de surprenant, dans ces conditions, que la jeunesse rêve d’une vie meilleure ailleurs. Comment ne pas vouloir échapper aux persécutions religieuses et ethniques, aux guerres civiles d’Angola, du Soudan, d’Erythrée, du Rwanda, du Zaïre, du Nigéria ? Comment ne pas vouloir échapper aux famines, à l’anarchie, à la corruption des fonctionnaires, à la criminalité incroyable qui s’est abattue sur l’Afrique du Sud et bien d’autres pays ?

De tous temps, des phénomènes migratoires ont servi de soupape aux pays pauvres ou en crise.

Que serait devenue l’Irlande sans l’émigration vers l’Amérique d’un million et demi de personnes au moment de la grande famine de 1845 ? Pourquoi dénombrait-on sept millions d’allemands et un million de scandinaves dans la seule région des grands lacs américains à la fin du 19e siècle et à peine 20 000 français ? Pourquoi aux 17e et 18e siècles plus d’un million d’anglais sont partis en Amérique contre 60 000 français au Canada ? La France, pays riche, a su garder ses élites et sa jeunesse.

On ne peut donc blâmer les jeunes africains qui veulent tenter leur chance en Europe. D’ailleurs l’Europe a besoin de main d’œuvre à cause d’une grave crise démographique, comme le soulignait encore Jacques Attali il y a peu. Surtout, l’Europe occidentale a fait l’erreur de ne pas assez payer le travail manuel et manque cruellement d’ouvriers, d’artisans. Il est paradoxal de voir tant de jeunes français au chômage dans un département pauvre comme la Haute-Loire alors que la seule industrie prospère, la plasturgie, ne tourne que grâce à la présence d’ouvriers turcs.

Déjà, dans l’antiquité, Athènes et Rome ne pouvaient se passer de la main d’œuvre des esclaves.

Alors, les immigrés sont-ils les esclaves modernes ? Dans une certaine mesure oui. En tout cas pour ceux des pays qui ont recours à une main d’œuvre surexploitée en provenance de l’Afrique subsaharienne.

L’Angleterre et l’Irlande ont fait le choix d’une immigration polonaise, plus exigeante sur le logement et les salaires mais mieux qualifiée. La France a favorisé l’immigration africaine, pour des raisons philosophiques, politiques, historiques et économiques. Certains, à gauche notamment, soutiennent que l’africanisation de l’immigration permettra de mieux lutter contre le racisme à long terme puisqu’il y aura de plus en plus de métis. C’est sincère mais un peu naïf car il faut voir la situation peu enviable des métis en Afrique du Sud ou au Brésil, trop noirs pour les blancs ou trop blancs pour les noirs. Au-delà des grands principes, la triste réalité c’est que la main d’œuvre africaine est logée dans des conditions indignes et qu’elle est sous-payée, surtout lorsqu’il s’agit de sans-papiers. Et on continue à croire à Bangui ou à Dakar que la France est un eldorado où il faut se rendre quitte à risquer sa vie.

Je veux bien admettre qu’un centrafricain smicard à Paris peut, par ses seuls mandats, faire vivre toute une famille au pays, mais au prix de quels sacrifices ? Ces jeunes qui viennent travailler chez nous vont bientôt manquer à l’Afrique qui va vite se rendre compte « qu’il n’est de richesse que d’hommes », d’autant plus que le regroupement familial dont le Vatican nous rappelle par la voix du Cardinal Agustino Marchetto qu’il est un droit, n’incite pas les immigrés à retourner mettre leur expérience et leurs économies au service de leur pays d’origine qui en a tant besoin. Un enfant éduqué en France ne voudra pas, à l’âge adulte, s’installer dans un pays pauvre qu’il ne connaît pas.

On se demandera probablement un jour si ces migrations n’ont pas été aussi préjudiciables à l’Afrique que la traite négrière au 18e siècle. Osons regarder les chiffres : les 2/3 des étudiants africains envoyés étudier en Europe ou en Amérique ne reviennent pas au pays, 1/3 des cadres africains vivent et travaillent sur un autre continent, 23 000 diplômés quittent l’Afrique chaque année, ainsi que 50 000 cadres d’entreprises, 97% des médecins béninois et 80% des médecins ghanéens n’exercent pas en Afrique mais 100 000 cadres non africains employés par les firmes et les administrations coûtent 4 milliards de dollars par an à l’Afrique. Cette fuite des élites est un drame. Comment ce continent peut-il s’en sortir sans ses forces vives ? J’irai même plus loin : le manœuvre burkinabé qui donne les économies de sa famille à des passeurs et qui est assez entreprenant pour s’engager dans une aventure qui lui fera parcourir des milliers de kilomètres dans des conditions périlleuses manquera aussi un jour à son pays natal.Est-ce à dire qu’il faut interdire une immigration dont nous avons besoin et qui rend service aux africains ? Certes non ! Mais il faudrait ne pas siphonner chez nous des élites qui font tant défaut à ces pays. Il faudrait faire preuve d’imagination pour rendre attractif le retour au pays des moins qualifiés qui, après avoir acquis ailleurs savoir faire et pécule, seront un atout énorme pour les pays émergents.

Si dans le même temps on cessait de gaspiller l’aide au tiers monde en ne la donnant plus, sans contreparties, à une bureaucratie avide de luxe et de pouvoir mais en la consacrant au développement durable, et si , pourquoi pas, on acceptait de payer à un plus juste prix les denrées exportées par l’Afrique, on ferait plus pour ce continent malheureux que tous les plans de développement et beaux discours jamais suivis d’effets.


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50 commentaires

  • D’où l’intérêt d’une telle initiative africaine:

    http://www.moibrahimfoundation.org/

    Quant à l’immigration, deux remarques.

    1. J’aimerais bien qu’on m’explique comment les mêmes bons esprits de gauche peuvent affirmer que la venue de nouveaux immigrés est in-dis-pen-sable pour sauver nos retraites, et déplorer le taux de chômage hallucinant des jeunes issus de l’immigration dans les banlieues françaises (20%? 40%? 50%?).

    S’ils ne travaillent pas, mais pèsent au contraire sur les comptes publics par le jeu des allocations et des services gratuits offerts par l’Etat (éducation, santé…) par quel miracle vont-ils « payer nos retraites »?

    Si la gauche possède la recette pour faire travailler les teneurs de murs, qu’elle la donne. Je constate en tous cas qu’elle ne l’a pas trouvée quand elle était au pouvoir. (Un indice: ce n’est pas la Halde.)

    2. Si la décadence d’un pays est provoquée par le départ de sa jeunesse et de ses élites, eh bien c’est peut-être un avenir à l’africaine qui attend la France. Car, actuellement, pour trouver un travail, pour réussir, la jeunesse et les élites françaises prennent de plus en plus souvent le chemin de l’exil.

    Combien de jeune diplômés travailleurs et talentueux ont fait cette expérience: des dizaines de CV dans la nature en France. Pas une réponse. Quelques CV à Londres, Hong-Kong ou Singapour: des rendez-vous en quelques jours.

  • Bonjour,

    Je n’ai pas vraiment le temps de répondre à cet article dont j’ai l’impression que chaque ligne mériterait un démontage en règle. Permettez-moi juste de m’appesantir sur ça:

    « On a obligé des ethnies violemment antagonistes à vivre ensemble, comme au Rwanda ou au Nigéria. Même s’ils ne sont pas hostiles les uns aux autres, les habitants de ces territoires ne parlent pas toujours la même langue et parfois n’avaient même pas en commun la langue des colonisateurs. On l’a vu au Cameroun et au Togo où certains habitants parlaient allemand et d’autres français ou anglais.

    On a aussi fait cohabiter des musulmans et des chrétiens alors que les premiers voulaient imposer la charia aux seconds, comme c’est encore le cas au Nigéria ou au Soudan. »

    Ce qui échappe souvent aux gens qui ne connaissent pas l’Afrique, c’est que les ethnies africaines ont toujours vécu ensembles avec cette conséquence que chaque individu parle trois ou quatre langues différentes. Jusqu’à très récemment, les ethnies différentes n’étaient pas ‘violemment antagonistes’ comme vous dites mais établissaient des rapports complexes de cousinage qui permettaient de préserver la diversité tout en maintenant l’unité de l’ensemble. Le cas du Rwanda est assez intéressant: la distinction entre Hutu et Tutsi était à l’origine non pas strictement ‘ethnique’ mais socioprofessionnelle. Les Belges quand ils sont venus ont non seulement réifiés cette distinction mais également montés les groupes l’un contre l’autre (diviser pour mieux régner). Pour tous les conflits soi disant ethniques africains, on peut facilement remonter à des causes économiques ou politiques et voir comment la diversité de la société a été instrumentalisée par les élites locales ou par les colons pour contrôler la population.

    Sur la cohabitation musulmans/chrétiens: il me semble que l’exemple du Sénégal, du Mali, ou du Burkina montrent assez bien que le problème n’est pas tant dans une impossibilité de principe à faire cohabiter des personnes de religions différentes que dans la structure socio-économique de ces pays.

    Par ailleurs, j’avais toujours cru que les « juifs de l’Afrique », c’était nous autres les peuls dont la religiosité (musulmane je le crains) délirante, l’errance etc, nous rapprocherait de l’archétype du juif errant. http://www.crif.org/?page=articles_display/detail&aid=9132&artyd=2

    PS: Il me parait très intéressant que vous écriviez à propos de l’Afrique à l’occasion du sommet de Lisbonne mais ne vous intéressez pas à la teneur de l’accord qui a été rejeté par les Africains. A mon avis c’est dans le détail de tels accords que se trouve une partie de l’explication des problèmes de l’Afrique.

    Je vous prie d’excuser la longueur de ce commentaire.

  • Le souci, Dang, c’est que je suis souvent d’accord avec toi. Alors j’ai rien à ajouter. A part encore une fois bravo !

    @Robert : Je suis d’accord avec ton 1- et je confirme ton 2- 🙂

    Je crois que le concept de « colonialisme inversé » pour la situation de l’immigration devrait être repris ou alors le « colonialisme indolore ».

    3 possibilités :

    1-On régularise massivement
    2-On favorise la venue des moins qualifiés
    3-On favorise la venue des plus qualifiés

    Dans le premier cas, on légalise le pillage de l’Afrique et on s’amende en donnant à fonds perdus et de plus en plus. Le deuxième cas est assez similaire car l’industrialisation a besoin de bras. Dans le troisième cas, on crée une élite à même de créer les conditions du développement de l’Afrique. Pensons notamment à la Chine ou l’Inde qui ont envoyé pendant des années leurs ingénieurs partout en Europe et aux Etats Unis.

  • A mon avis vous devriez faire des articles moins longs et centrés sur une idée principale…
    Là on a l’impression que ça part un peu dans tous les sens, même si ce n’est qu’une impression, à la relecture…

    Pour le paradoxe de l’Afrique « riche » en sous sol mais sous développée, je pense qu’on fait l’erreur de surévaluer les richesses en matière première. Cela va peut-être changer un peu, mais de tout temps ce qui fait la richesse, c’est l’industrie, et surtout le commerce, pas la matière première. Le cas du pétrole est d’ailleurs frappant.

    Une explication partielle un peu (beaucoup) bas de plafond mais que j’aime bien : en Europe ou en Asie, il fait froid l’hiver, si on avait pas planifié son année rigoureusement, si on avait pas construit des abris, des réserves, réserves qu’il fallait protéger ect… on crevait l’hiver.
    En Afrique, on pouvait plus vivre au jour le jour (enfin, pas partout, seulement dans la partie où les saisons sont peu marquées), avoir des habitudes nomades… D’où un mode de vie qui ne favorisait pas le développement économique (est ce tellement plus mal, diront certains)…
    Evidemment ce raisonnement climatique ne marche pas partout (Mayas, indiens d’Amérique, ect…)

  • @Hadi Ba : non votre commentairen’est pas trop long, d’autant moins qu’il est très intéressant. Pour « les juifs de l’Afrique », je suppose que plusieurs ethnies ont droit à ce qualificatif qui réunit détestation et jalousie. Le terme a bdeaucoup été employé pour désigner les Ibos du Nigéria avant la guerre du Biafra, la presse de l’époque le soulignait et cela m’a été confirmé par un mathématicien Ibos, chercheur à Oxford.
    Votre analyse concernant le Rwanda rejoint tout à fait la mienne. Les tutsis et les hutus n’avaient pas vocation à vivre ensemble dans une seul et même état. C’est le pouvoir colonial belge qui les a obligés à se réunir. Des ethnies opposées peuvent se supporter dans les structures ancestrales de l’Afrique, beaucoup moins dans des états modernes, démocratiques,à l’occidentale. Je m’explique : les tutsis et les hutus ont toujours vécu les uns à côté des autres sans beaucop s’apprécier pour la raison essentielle que les tutsis étaient plsu entreprenants et donc facilement domin

  • Bon billet Dang. Surtout, il est équilibré. Sans nier les fautes et crimes du colonialisme, tu rappelles 2 évidences : le colonialisme a aussi eu des effets positifs et il ne saurait à lui seul expliquer la misère de l’Afrique subsaharienne. J’ai toujours considéré comme méprisant voire raciste le discours qui consiste à retirer toute responsabilité aux Africains. Comme s’ils étaient tellement insignifiants que même leurs échecs ne leur appartiennent pas.

    Pour moi, l’émigration n’est pas la cause mais la conséquence. Les causes fondamentales sont la tyrannie et la corruption généralisée. Dans beaucoup de pays, un entrepreneur qui envisage de se lancer sait qu’il n’aura aucun recours si ses clients ne le paient pas et qu’il sera immédiatement racketté par l’administration. Résultat, il tente sa chance en Europe. Qui pourrait le lui reprocher?

  • @Hadi Ba : mon texte m’a échappé, je le reprends :…les tutsis étaient plus entreprenants et donc facilement dominateurs. Cette cohabitation difficile devint franchement impossible lorsque à l’indépendance ils eurent non seulement à vivre ensemble mais à gouverner ensemble : les tutsis accaparaient le commerce, les leviers de commande, l’administration comme ils l’avaient toujours fait, mais les hutus plus nombreux entendaient utiliser le jeu démocratique pour reprendre la place qu’ils avaient perdu depuis des siècles. le moins que l’on puisse dire c’est que l’expérience de cohabitation n’a pas marché.

  • @Corto : je suis bien d’accord avec vous, ce qui fait la richesse c’est l’industrie et non les matères premières. C’est d’ailleurs ce que je laisse entendre : « il n’est de richesses que d’hommes ». Si l’Afrique laisse partir sa main d’oeuvre elle ne pourra jamais décoller. Au 18e siècle les colonies d’Amérique du Nord sont réputées peu intéressantes, il n’y a aucune richesse à part les fourrures. Voltaire parle de « quelques arpents de neige » à propos du Canada. En revanche les colonies espagnoles sont riches d’or et d’argent. On a vu comment par le seul travail des hommes l’Amérique du Nord est devenue l’un des pays les plus riches du monde, alors que les colonies riches en métaux précieux sombraient dans la misère.
    Quant à la longueur du billet…s’il est long à lire il a été long à écrire, mais le sujet est vaste et ne voir qu’un aspect du poblème c’est biaiser l’ensemble.

  • Sur les maux de l’Afrique, un sénégalais tient un blog pas mal à aller consulter :
     » Ralissoutin » de Resnert Ludovic Alissoutin.
    Je ne connais pas ce type, mais pour avoir travaillé en Afrique de l’ouest, je peux affirmer que ce qu’il dénonce est juste et n’a pas changé depuis mon expérience.
    Qui n’a pas de rapport avec l’article : un petit salut à R.Marchenoir que je retrouve avec plaisir sur ce site.

  • @ Koz

    Vous avez un mail de moi dans votre courrier électronique

    @ Tocquevil,

    Vous avez un bonjour 😉 chez Judith Bernard (quand elle aura validé)

    Cherchez « Revoilà Gatéan »

  • Merci Dang. Cette fois-ci tu nous conduis habilement dans l’écheveau d’une réalité à l’échelle d’un continent !

    Pour ma part j’ai envie de voir dans ce continent un espace du possible plutôt qu’une impasse pour l’avenir.
    je m’appuyerais sur le magazine des chambres de commerce du mois de mai 2007 qui a consacré beaucoup d’articles au développement de l’Afrique.

    Lors du forum Afrique-avenir de février 2007 certains obstacles au developpement du secteur privé ont été mis en évidence :
    – attitude prédatrice du secteur public
    – manque d’accès au réseau des banques commerciales pour les entreprises en création
    – coûts indirects du travail (energie, santé bureaucratie, télécoms..)
    – nature des régimes politiques

    Néanmoins voici quelques pistes qui ont attiré mon attention :

    – Différents marchés communs dont celui d’afrique oriental et austral cherchent à mettre en place des structures d’accueil pour faciliter les démarches administratives des investisseurs.
    comme l’Africa Business Services (ABS) qui est une société spécialisée dans l’accueil et l’accompagnement professionnels des entreprises et investisseurs internationaux qui désirent développer de nouveaux marchés

    -Les Instituts de Micro Finances (IMF) qui permettent aux africains de se financer pour développer une activité.
    Jacques Attali président de Planet finances évoquent les freins au développent du micro-crédit en Afrique :
    * instabilité politique
    *cadre législatif
    * le développement du micro-crédit passe souvent par les femmes qui sont moins autonomes en Afrique qu’en Asie par exemple.

    – pour le département afrique francophone d’Ernst and Young, le continent africain présente un potentiel important sous-exploité. Outre les ressources naturelles, les secteurs porteurs ne manquent pas : banque, assurance, telecom, distribution, automobile, hôtellerie.
    E & Y souligne que tous les collaborateurs suivent le même cursus de formation qu’ils soient français ou de n’importe quel pays africains.

    – Le 31/12/2007 se développeront les APE (Accord de Partenariat Economique) entre l’UE et ACP (afrique, Caraibes, pacifique) qui visent à mettre en place des marchés régionaux et internationaux durables et efficaces.
    Exemple: 49% des exportations du Ghana se font vers UE alors que les exportations vers le bénin voisin représente 2,6%.
    L’idée est de supprimer les entraves entre pays voisins pour favoriser l’échange, donc marchés plus grands ce qui est plus attrayant pour les investisseurs.

    – relever le défi des ressources humaines ou comment donner à l’Afrique les moyens humains de son développement. Cela passe par un redéploiement des compétences.
    Peu d’africains arrivent à profiter des offres d’emploi dans les secteurs porteurs du fait d’une mauvaise adéquation de leur formation aux besoins exprimés par ces entreprises.

    Je ne connais pas spécialement l’Afrique (ou plutôt les pays d’Afrique) mais naïvement à travers certaines lectures dont celles du très célèbre Amadou Hampâté Bâ, j’ai le sentiment qu’il y a deux réalités africaines qui sont à la fois un atout humainement parlant mais une faiblesse pour le développement.
    – le rapport au temps est je pense très différent.
    En Europe, on prévoit son avenir, on anticipe, on se développe, Pourquoi ?
    En Afrique, on vit au jour le jour

    – la solidarité clanique et familiale est tellement importante en Afrique que l’ouverture à d’autres espaces est moins nécessaire. On survit en famille et c’est ce qui est le plus important.

    – Et puis j’ai envie de croire que l’Afrique n’est pas mal partie car les échanges entre certains pays africains et l’Inde, la Chine, le Brésil et les Etats-Unis sont de plus en plus actifs…
    J’ai plutôt envie de poser la question quid des échanges franco- africains.

  • @ Koz

    Sur l’émigration européenne en Amérique du Nord, je ne me réjouirais pas comme toi du faible contingent français : en laissant fuir ses paysans ruinés, l’Angleterre a fait un investissement à très long terme dont elle continue à récolter les fruits aujourd’hui : les États-Unis sont anglophones, ils sont la première puissance mondiale et le petit Québec, dont la survie n’est pas assurée, ne fait pas vraiment le poids en comparaison. Cela n’est pas sans conséquences sur les destins respctifs de la France et de l’Angleterre. Peut-être eût-il fallu que la France allât très mal pour gagner la bataille de la colonisation de l’Amérique…

  • @Criticus : certes on peut voir les choses sous cet angle, toutefois il n’est pas impossible que l’arrivée massive des hispaniques remette cet ordre anglophone en cause, mais c’est là une autre histoire de migrations.

  • @Dang:

    L’Amérique du Nord regorge de matières premières. Au temps de Voltaire on ne les avait pas encore trouvées, c’est tout. Le travail de l’homme est nécessaire mais ça va encore mieux quand on trouve du pétrole. Ca reste vrai même au XXIe siècle, voyez par exemple l’explosion économique actuelle en Alberta.

  • @Criticus : j’ai oublié de vous redire hier que l’auteur du billet est Dang et non Koz. Je ne voudrais pas que Koz porte le chapeau des idées de Dang.

    @Gwynfrid :quand je parlais d’Amérique du Nord, j’avais en tête la Nouvelle Angleterre, le pays des arbres et des fourrures.

    @Thaïs : merci Thaïs pour tous ces renseignements très intéressants.
    Il est certain que la formule des micro-crédits a un bel avenir en Afrique. Autrefois le Secours Catholique finançait une micro-réalisation par mois en Afrique : un puits une école,un dispensaire, la formationd’un technicien etc… Cette formule a été abandonnée, je ne sais pas pourquoi car elle remortait un beau succès, au moins l’argent n’était pas dilapidé et ne finissait pas dans les caisses d’un tyran.
    A propos de Jacques Attali : il dit sur le plateau de Christine Oeckrent que l’Europe ne peut se passer d’une forte immigration et une semaine plus tard il déplore sur l’antenne d’ Europe 1 le « brain-drain » subi par L’Afrique J’aimerais bien savoir quelle est sa position.

  • « Peut-être eût-il fallu que la France allât très mal pour gagner la bataille de la colonisation de l’Amérique… »
    peut-être eut-il fallu que napoléon aie moins besoin d’argent pour ses visées européennes et ne vende pas la louisiane qui, à l’époque, allait jusqu’au pacifique…

    je reviendrai sur le fond de l’article de dang, intéressant et dont je partage une large partie.

    Oui, la colonisation fut injuste comme le dit NS car basée sur l’idée d’une inégalité de savoir, de civilisation entre le colonisateur et le colonisé.
    Mais elle fut aussi violente, au moins à ses débuts : guerre ou conquête, et aussi par moments, du fait d’ une volonté de maintien de l’ordre dans un contexte d’infériorité démographique du colonisateur qui ne lui permettait pas de laisser des désordres « impunis ».
    Elle fut parfois aussi violente à la fin , lors des tristes «guerres coloniales ».
    Par contre sur le plan économique, les travaux des historiens semblent montrer une vision plus équilibrée, les investissements réalisés compensant le bas prix des matières premières.
    D’ailleurs il est significatif que les pays non colonisés en Afrique, en Asie, n’ont pas tiré un avantage économique significatif de cette situation.
    Ce qui est quand même paradoxal, surprenant, c’est de penser qu’à la fin du XIXe, au moment où l’Amérique du Sud, rompait, avait rompu avec le colonisateur, sur le modèle des Etats-Unis, les pays européens colonisaient l’Afrique. J’ai du mal à me l’expliquer…

  • Francis pose une question très pertinente.
    Quelles furent les motivations des colonisateurs?
    En France la colonisation de l’Afrique s’est déroulée principalement sous des gouvernements de gauche, Jules Ferry en étant l’un des plus fervents avocats.
    L’idée de tirer des ressources à bon marché de ces pays était évidente mais venait immédiatement après la motivation philantropique, aussi bien chez nombre d’intellectuels que chez les hommes politiques,de gauche principalement. Persuadés de la supériorité de notre civilisation il fallait la répandre dans le monde notamment chez les « sauvages ». C’est ce que Kipling appelle « le fardeau de l’homme blanc » (« The white man’s burden »), véritable mission, devoir impérieux, des peuples civilisés envers les « sauvages ».
    Et l’homme de la rue dans tout cela?
    Il était fier de voir son pays bâtir un empire outre-mer.
    Ces sentiments ont perduré très longtemps.
    Quand j’étais écolier il fallait entendre les cris de joie des élèves quand l’instituteur communiste nous montrait non sans fierté la carte de l’Afrique : « là c’est l’Afrique occidentale française, là c’est l’Afrique équatoriale française, et ce n’est pas tout, on a aussi Madagascar qui est grande comme la France et la Belgique, et on a aussi la côte des somalis, et en plus l’Afrique du Nord ». Et quand on nous passait un documentaire nous montrant des « sauvages sauvés par la civilisation » : « hier cet africain portait encore un pagne, aujourd’hui il est habillé à l’européenne » disait le commentaire, l’instituteur ne nous expliquait pas pas qu’on était en train de tuer une autre civilisation ni qu’on exploitait ces gens-là.
    Ce n’est vraiment que dans les années 1970 quand le film « La victoire en chantant, blancs et noirs en couleurs » reçut l’oscar du meilleur film étranger à Hollywood qu’un débat de fond s’installa dans certains journaux.
    Et encore, ce film grinçant, sur la guerre de 14-18 en Afrique où français et allemands s’entretuent par tirailleurs noirs interposés n’eut aucun succès en France.

  • Si on arrêtait aussi de donner nos vêtements, nos chaussures et notre nourriture… comment leurs « industries » locales peuvent-elles concurrencer des produits gratuits ?

    On n’entretient leur misère avec ça.

    Construire des écoles, soutenir des projets de développement durable, c’est plus difficile, mais nettement plus efficace.

    «les habitants de ces territoires ne parlent pas toujours la même langue»
    C’est le cas de la Suisse (trois langues), ça ne pose pas de problème.

  • « On ne peut donc blâmer les jeunes africains qui veulent tenter leur chance en Europe. D’ailleurs l’Europe a besoin de main d’œuvre à cause d’une grave crise démographique, comme le soulignait encore Jacques Attali il y a peu. Surtout, l’Europe occidentale a fait l’erreur de ne pas assez payer le travail manuel et manque cruellement d’ouvriers, d’artisans. Il est paradoxal de voir tant de jeunes français au chômage dans un département pauvre comme la Haute-Loire alors que la seule industrie prospère, la plasturgie, ne tourne que grâce à la présence d’ouvriers turcs. »

    On ne peut blâmer les jeunes africains de vouloir tenter leur chance en Europe ? Mais si les problèmes des peuples africains ce sont leurs roitelets et leurs systèmes politiques corrompus, pourquoi n’essayent-ils pas de changer ces situations plutôt que d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs ? Evidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire, mais quand je vois la misère et les difficultés qui les attendent en France, je ne suis pas certain que fuire son pays soit une vraie bonne idée. Je suis de ce fait assez d’accord sur les conséquences de la fuite des élites africaines.

    L’Europe a besoin de main d’oeuvre à cause d’une grave crise démographique ? Quelle crise démographique ? En France en tous cas, elle ne se voit pas bien. On est encore loin du plein emploi. Et je ne vois pas en quoi la main d’oeuvre immigrée est le seul salut de l’industrie, dans le sens où elle n’est pas meilleure justement que les chômeurs. Pourquoi un jeune chômeur ne pourrait pas prendre un emploi industriel ? Manque de formation ? Cela peut s’arranger, surtout que je ne suis pas sûr que les ouvriers turcs aient reçu de meilleures formations en la matière. Manque de motivation ? Alors je m’interroge sur la situation confortable dans laquelle ces chômeurs se trouveraient.

  • @Docteur Peuplu : oui on parle 3 langues en Suisse et même 4 puisque le romanche est reconnu comme langue officielle. La différence avec l’Afrique c’est qu’en Suisse on apprend à l’école au moins deux des 3 langues principales. En Afrique il faudrait déjà qu’il y ait des écoles partout. Je sais bien que Hadi Ba nous dit plus haut que la plupart des africains parlent plusieurs langues mais ce ne sont pas forcément les langues des peuples qui sont amenés artificiellement à vivre ensemble.
    Dans le très beau film « C’est loin la France » (qui a eu le tort de sortir il y a plus de 20 ans et n’a eu aucun succès car les gens n’étaient pas sensibilisés aux problèmles des passeurs) le jeune africain ne comprend pas tous ses copains d’infortune.
    Sinon je suis d’accord avec vous il faudrait cesser de transformer les africains en assistés mais en contrepartie payer leurs denrées à un prix raisonnable. Le commerce équitable est une très bonne chose. Il faudrait qu’il soit pratiqué au niveau des états et des multinationales.

  • @Xerbias : puisque je parlais de la Haute-Loire il est intéressant de noter que dans ce département, comme dans beaucoup d’autres,la motivation principale des jeunes est de devenir fonctionnaires, souvent des postes.
    Travailler dans l’industrie ne semble pas intéresser grand monde.
    Dans d’autres départements comme le 9-3 où il y a une importante population d’origine étrangère, les fils d’immigrés ne veulent surtout pas faire les métiers de leurs pères.
    Donc c’est une spirale sans fin, il faudra sans cesse des immigrés pour faire les travaux jugés indignes.
    C’est pourquoi les immigrés sont dans une certaine mesure l’équivalent des esclaves de l’antiquité.
    Est-ce à dire que nos jeunes sont paresseux?
    Pas sûr.
    Le travail manuel est déconsidéré et mal payé.
    Il faudrait le revaloriser et revaloriser les salaires.
    Il faudrait changer les mentalités.
    Un jeune ébéniste talentueux me disait que son père avait pleuré quand il lui avait annoncé qu’il abandonnait ses études de biologie pour entrer en apprentissage.
    Ce mépris du travail manuel est particulièrement prononcé en France mais nous ne sommes pas les seuls à avoir ce genre de problème.
    L’Islande a voulu anticiper sur la disparition de la morue qui fait vivre son industrie.
    Comme l’Islande produit de l’énergie d’origine géothermique en abondance et bon marché on a installé à grands frais des usines de fabrication d’aluminium, grosses consommatrices d’énergie.
    Eh bien l’Islande qui n’avait pas d’immigrés est en train de faire venir des contingents entiers d’ouvriers et de manoeuvres indiens, pakistanais ou africains pour faire tourner les usines d’aluminium.Les islandais ne veulent pas y travailler.

  • Le taux de chômage de l’Islande est de 2,9 % me souffle Wikipedia. Arrivé à ce taux là en effet, les travailleurs ont un certain choix dans les postes, et certaines professions peuvent connaître des pénuries de travailleurs. En France, on est à 8 %. Si quelqu’un préfère ne pas travailler plutôt que de faire un travail manuel, qu’il en subisse les conséquences en ne recevant pas de revenus. On doit en effet changer le fait que le travail manuel est mal considéré, mais il reste que lorsque l’on est au chômage il n’y a pas vraiment à faire la fine bouche au delà d’une certaine période.

    Et de même que je reproche aux immigrés de changer de pays plutôt que de changer les mentalités qui règnent dans le leur, je nous reproche de faire appel à de la main d’oeuvre étrangère, à l’allure d’esclaves en effet, plutôt que de régler nos propres mentalités.

    Paresseux les jeunes chômeurs qui refusent de travailler manuellement ? Ils bénéficient en tous cas d’un luxe que je ne crois pas soutenable par la société.

  • Bonsoir,

    @Dang: « Je sais bien que Hadi Ba nous dit plus haut que la plupart des africains parlent plusieurs langues mais ce ne sont pas forcément les langues des peuples qui sont amenés artificiellement à vivre ensemble. »

    A vrai dire c’est exactement le contraire: en tant que sénégalais, je parle ma langue maternelle (le peul) et le wolof qui est la langue parlée par tous les sénégalais quelle que soit leur ethnie. Dans chaque pays d’Afrique où vous allez, les gens parlent en général au moins une langue vernaculaire en plus de leur langue maternelle. Quoique hérités de la colonisation, les frontières africaines ne me paraissent pas plus artificielles que celles des pays d’Europe. Toute frontière est le fruit des vicissitudes de l’histoire. Ce qui compte c’est la fabrication ou non d’un sentiment national. Les Wallons et le Flamands ne sont par nature pas plus compatibles que les Hutus et les Tutsis. Bien au contraire: les Hutus et les Tutsis au moins ont en partage la même langue.

    Je n’ai pas réagi à votre première réponse non pas parce que j’étais d’accord avec vous mais parce que j’avais l’impression que vous partiez de présupposés idéologiques que je ne partage pas. (Mais vous pourrez me répondre que je pars moi-même de mes propres présupposés idéologiques!) C’aurait été impoli de ma part de venir chez vous déclencher une polémique stérile.
    Je vous souhaite un excellent weekend

  • Le commerce équitable… je suis sceptique. Je vois ça plus comme une stratégie marketing qu’autre chose (pour être honnête hein).

    Cela dit, je vois beaucoup plus de possibilités dans le micro-crédit qui, chaque jour, fait encore plus ses preuves.

  • @Hady Ba : je me demande de quels présupposés idéologiques vous me soupçonnez.
    Je ne pense pas en avoir et je ne demande qu’à m’informer. Je crois que vous pouvez nous donner votre point de vue sans forcément déclencher une polémique.
    On peut ne pas être d’accord sans pour autant se traiter de noms d’oiseaux! Etant africain vous-même il est évident que votre avis nous est indispensable même si nous ne le partageons pas.
    L’exemple que vous citez des wallons et des flamands qui ont du mal à cohabiter est tout à fait pertinent mais justement ça ne marche pas bien en Belgique.
    Un ami ougandais me dit que certaines populations de son pays se sentent plus proches du Rwanda que de l’Ouganda et qu’elles auraient préféré être rattachées au Rwanda. Je n’ai pas bien sûr les moyens de vérifier ses dires mais quand je regarde cette usine à gaz qu’est le Congo ex-Zaïre je me demande s’il était bien raisonnable de faire un seul état de ces régions si disparates.
    Je suis d’accord avec vous pour admettre qu’il y a de telles aberrations chez nous en Europe, notamment dans les balkans.
    Justement on savait que le découpage de l’Empire austro-hongrois avait été fait en dépit du bon sens, on savait qu’avoir presque autant de hongrois en dehors de la Hongrie était un déni de justice. Forts de cette expérience on aurait pu ne pas refaire les mêmes erreurs en Afrique.
    L’ami Ibos dont je vous ai déjà parlé m’a toujours dit qu’il ne se sentait pas Nigérian mais biafrais.
    Et est-il judicieux d’avoir réuni au Soudan des popuations que tout oppose : les uns sont arabes, parlent arabe et sont musulmans, les autres parlent des langues qui n’on aucune parenté avec l’arabe, sont noirs, chrétiens, et sont méprisés par les premiers.
    Je veux bien admettre que les frontières issues de la période coloniale n’ont aucune incidence sur la gestion de ces jeunes états, je veux même bien admettre que la colonisation n’a eu aucun effet nocif, toutefois mes amis africains m’ont toujours dit le contraire, alors que faut-il penser de tout cela?
    Quant aux langues je vous fait, bien sûr, entièrement confiance. Mes informations viennent de missionnaires et de pères spiritains africains. Ils m’ont dit qu’au Cameroun et au Togo tous les habitants ne se comprenaient pas.
    En conclusion n’hésitez pas à intervenir, votre avis nous est précieux.

  • Je ne suis pas sûr que le surnom de « juifs d’Afrique » ait été donné aux igbos par leur concitoyens Haussas du nord. Les igbos le revendiquent eux-même, notamment dans une perspective religieuse: c’est un titre de fierté d’être cousin du peuple de l’Alliance. On trouve en Igboland quantité de petits bouquins qui tentent de prouver que les igbos sont les descendants de la 13ème tribu d’Israël.

    En ce qui concerne le Nigeria, la dichotomie Nord/Sud, chrétiens/musulmans est trop simpliste. Cependant au début de la colonisation britanique, le nord et le sud étaient deux protectorats différents, que Lord Lugard, gouverneur à l’époque (vers 1914) a décidé d’ « amalgamer » afin d’équilibrer un peu le nord plus agricole et le sud industriel, et pour donner un débouché sur la mer aux productions du nord. Il est donc vrai que les frontières actuelles ont été crées de toutes pièces par le colon: on trouve des Yorubas au Bénin, des Haoussas au Niger et au Cameroun.

    Les frontières du Biafra lui-même étaient artificielles, puisqu’elles englobaient un grand nombre d’ethnies non-igbo, en particulier les effiks et les ijaws, qui se seraient retrouvés en minorité dans cet état et auraient pu également faire sécession. D’ailleurs ce sont ces régions qui sont tombées les premières au main des fédéraux (Calabar, Port-Harcourt).

    Il est toutefois intéressant et intriguant de constater que les Igbos ont davantage d’atomes crochus avec les Haoussas majoritairement musulmans qu’avec les Yorubas qui sont chrétiens pour une bonne part: il est réducteur de penser que ce n’est qu’une histoire de religion.

    Pour ce qui est de la langue vernaculaire, c’est le pidgin que tout le monde parle, dans les villes surtout et spécialement à Lagos. De ce fait, le pidgin nigérian comporte de nombreux mots Yorubas. A l’école, les enfants nigérians apprennent l’anglais et une autre langue parmi les trois principales (haussa, yoruba ou igbo). Beaucoup d’igbos parlent correctement l’haussa.

    Pour finir, sur le pétrole, dont le Nigeria est (était ?) le 6ème producteur mondial, on assiste à un vrai gâchis, et à deux niveaux: le premier, c’est que les rentes pétrolières (99% des revenus du gouvernement fédéral) sont très mal utilisées. Une partie de cet argent est redistribuée aux états, qui le redistribuent eux-mêmes aux Local Government, en fonction de la répartition de la population, Au bout du bout, après tous ces intermédiaires, il ne reste plus grand-chose de cet argent pour l’homme de la rue: voyez l’état des routes et les problèmes d’électricité! Le deuxième niveau, plus grave peut-être, c’est que tout le reste de l’économie a été délaissé au profit du seul or noir: cacao, hévéa et autres cultures agricoles, charbon, étain et autres ressources minérales sont à l’abandon. Le Nigeria avait une petite industrie sidérurgique il y a une trentaine d’années, mais plus maintenant!

    On pourrait parler des heures du Nigeria, qui est peut-être le pays d’Afrique ou se cristallisent tous les problèmes du continent, avec leurs lots de paradoxes… Je m’arrête car j’ai un peu dévié du sujet et me suis trop étendu.

  • Tout d’abord bravo pour ce billet. Il est un peu long et vous avez pris le risque d’être encore trop caricatural malgré votre intention de ratisser large un sujet complexe.

    J’ai lu les commentaire. Seul celui de « xerbias » me semble franchement caricatural. Derrière ce cache au pire un Lepéniste de base au mieux un sarkoziste de base. La tonalité est xénophobe.

    Avant de se lancer dans des considérations du genre nos chômeurs feraient bien d’accepter des emplois que personne ne veut pour éviter d’avoir des étrangers chez nous , sans apporter l’ombre d’une preuve étayant que les chômeurs préfèrent rester au chômage plutôt que se salir les mains me semblent de nature à rabaisser la haute tenue de ce blog. Car le dénommé xerbias sert une soupe qui peut devenir très vite nauséabonde.

    Notre démographie française est meilleure qu’ailleurs MAIS non suffisante pour enrayer un déclin démographique inéluctable. Ce déclin est juste différé par rapport aux autres pays européen (italie, espagne …). les italiens et les espagnols ont régularisé massivement leurs sans-papiers (ceux qui avaient un travail). Les italiens sont d’ailleurs en train de chercher à en régulariser je crois près de 200 000.
    Pourquoi en France en est-on à faire l’inverse ?

    Les tenants d’une gestion de type sécuritaire, répressive et planificatrice de l’immigration ont plus à voir avec un régime type soviétique qu’un régime de type libéral. Les immiigrés viennent au prix de leur vie parce que c’est une question de survie étant donné que leur vie est tous les jours menacée dans leur pays. Cependant tous ne peuvent pas faire le voyage, seuls les plus courageux, les plus débrouillards se lancent dans un périple dont ils savent très bien qu’il peut leur couter la vie. Je crois que l’on aurait tout intérêt à faciliter leur intégration en les sortant de la clandestinité plutôt que de les pourchasser comme c’est le cas depuis plusieurs mois voire années.

  • @Eole : les immigrés ont des droits et on doit les respecter. C’est d’ailleurs le sens de la déclaration des évêques à l’issue de leur conférence annuelle à Lourdes, les évêques ajoutent aussi que l’homme a le droit de migrer.
    Laisser les hommes migrer comme ils l’ont toujours fait ne nous donne pas le droit de les traiter comme des esclaves ni de piller les forces vives d’un jeune continent qui a bien besoin de ses cervaux et des éléments les plus entreprenants de la société.
    Il est évident que ce que je vais dire ne s’applique pas à vous, mais je trouve qu’il y a beaucoup de cynisme et d’angélisme dans la façon dont on traite l’immigration.
    Les uns disent « laissons les immigrés entrer, ceux-là au moins mangeront à leur faim », sans se soucier des conditions de vie indignes que l’ont impose aux immigrés (surtout les clandestins), les autres se soucient peu de savoir si les intellectuels que l’on attire chez nous ont coûté cher en formation à leur pays, ils voient notre seul intérêt égoïste. Nous avons besoin de médecins?
    Allons les prendre en Afrique.
    C’est un cercle vicieux qui mine l’Afrique.
    Je plaide personnellement pour que les jeunes africains qui ont travaillé quelques années ici puissent retourner avec un pécule mettre leur expérience et leurs économies au service de leur pays.
    Retenir ces immigrés chez nous, quelles qu’en soient les raisons, c’est priver les pays émergents de leurs forces vives.

  • Dénommé « eole », sachez que je suis bien navré de faire baisser le niveau de ce blog de haute tenue. Mais je me permets tout de même de défendre après avoir été qualifié de tout et de n’importe quoi. Je n’ai pas apporté la preuve que les chômeurs préfèrent rester chez eux plutôt que de se salir les mains ? La discussion portait sur le fait que certains métiers étaient si peu valorisés que seuls des immigrés acceptaient de s’y employer, l’exemple de l’industrie plasturgique de la Haute Loire étayant cette thèse. Je ne l’ai pas inventé.

    Alors je suis effectivement en desarroi sur le fait que des emplois ne trouvent preneurs lorsqu’il y a des chômeurs. Le problème ici ce n’est pas de mon point de vue les immigrés qui assurent ces tâches, mais le fait qu’on soit en inadéquation permanente entre les offres d’emplois et les chômeurs sur le marché du travail. Je ne crois pas que cela fasse de moi un xénophobe. Par contre, mon questionnement sur le rapport entre les emplois et les travailleurs est limite hors sujet par rapport au billet, je l’admets. Mais si je peux avoir des éclaircissements sur ce domaine, je les lirais bien volontiers.

  • « Je plaide personnellement pour que les jeunes africains qui ont travaillé quelques années ici puissent retourner avec un pécule mettre leur expérience et leurs économies au service de leur pays.
    Retenir ces immigrés chez nous, quelles qu’en soient les raisons, c’est priver les pays émergents de leurs forces vives. »

    nous sommes beaucoup à partager ce point de vue, mais la méthode est difficile lorsque les pays d’origine ont peu attractivité
    pour des raisons de manque de liberté, ou de faible rému…
    d’autant que ces immigrés « de passage » se font souvent des amis, ont des amours qui les incitent à rester…

    comment les convaincre de revenir dans leurs pays d’origine, de formation?

  • Bonjour, je suis d’un côté plutôt d’accord avec cette analyse mais il ne faut vraiment pas sous-estimer l’importance de la redistribution opérée par les émigrés vers leurs pays d’origine : 225 milliards de dollars en 2005 nous dit la Banque Mondiale qui ne plaisante pas dès qu’il s’agit d’argent. Sans vouloir pinailler ce serait bien de citer vos sources pour les chiffres.

  • A mon tour de mettre mon grain de sel à propos d’un continent que je connais un peu.

    @Dang « retenir ces immigrés chez nous » n’est certes pas bien, mais je doute que vous ayez à faire quoi que ce soit pour convaincre un immigré de rester en France ! Au Nigeria, j’ai eu l’occasion de « passer de l’autre côté de la barrière » et j’ai été très lié avec une famille dont le fils aîné a tenté sa chance en Europe. Je vous passe les détails qui font froid dans le dos sur les conditions de son voyage: à fond de cale dans un cargo philippin, nourri aux biscuits pendant deux semaines, battu par l’équipage, récupéré par la police aux Canaries, interrogé puis renvoyé dans son pays en avion (!) avec un petit pécule.

    Pour ce qui est des « conditions indignes », je tempère un peu: lui me disait avoir été surpris de l’humanité avec laquelle les gens, notamment la police, l’avait traité. Évidemment, il comparait avec son pays, mais je pense que Khadafi ferait mieux de balayer devant sa porte avant de nous donner des leçons en matière de droits de l’homme pour les immigrés. Ici, les immigrés, clandestins ou non, bénéficient d’une justice équitable et de nombreuses organisations leur viennent en aide. Et, tout clandestin qu’il était, ce jeune homme a pu avoir confirmation que l’Europe était bien un autre monde, eldorado par beaucoup d’aspects, sans peut-être imaginer à quel prix: notre nation et notre pays ne se sont pas faits en un jour!

    Il est vrai que dans bien des cas, les candidats à l’immigration, du moins ceux qui sont peu lettrés, ont une idée vague et bien souvent fausse de ce qu’est l’Europe, notamment ils ne se rendent pas bien compte de ce que « travail » signifie chez nous. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, je le tiens d’ailleurs d’une camerounaise vivant en France: le travail (malgré les 35h), c’est quelque chose de sérieux, et pas question d’arriver en retard ou de s’absenter toutes les cinq minutes pour téléphoner comme c’est le cas là-bas (je l’ai expérimenté au travail au Nigeria). De plus, et on ne s’en rend pas toujours compte, même le travail dit « peu qualifié » demande certaines aptitudes qu’avec la meilleure volonté du monde certains n’ont pas; faites travailler un maçon nigérian ou un menuisier béninois en France, je doute que vous soyez satisfaits du résultat. Sans généraliser. Mais sans minimiser. Et pourtant nous aurions besoin d’ouvriers de ce genre.

    L’immigration telle que le gouvernement actuel la conçoit, c’est à dire apportant réellement un plus en terme de main d’oeuvre et de savoir-faire, est réellement réservée à une élite, et pas seulement intellectuelle. Et là, il y a un réel problème de pillage des ressources humaines de ces pays. Toute autre immigration s’inscrit dans une autre perspective, uniquement caritative ou humanitaire, qui ne prive pas vraiment le pays de « cerveaux » ou de « bras » mais n’apporte pas grand-chose au nôtre non-plus. Rapport entre les deux: 2% – 98% (grosso modo).

  • Je n’ai pas eu le temps de modifier mon commentaire: les chiffres donnés en dernière ligne sont une manière imagée d’expliciter ma pensée: ils ne reflètent aucune réalité statistique; tout cela pour dire que les candidats à l’immigration ayant un réel potentiel en France sont très peu nombreux comparés à tous ceux qui voient en l’Europe le continent de l’argent facile (« quick money ») et n’ont pas bien saisi l’ampleur du fossé.

  • Bonjour,
    @Dang: Désolé de la réponse tardive , j’étais absent du net depuis samedi.

    Précisons d’abord que je prends l’expression ‘présupposé idéologique’ en un sens assez neutre. Ces présupposés sont en quelque sorte des axiomes qui servent de base à notre réflexion. Le principal axiome qu’il me semble percevoir dans votre post tout comme dans les commentaires est une sorte d’essentialisme culturaliste. Que ce soit pour les Wallons, les Flammands, les Hutus ou les Tutsis, vous semblez considérer que les cultures sont des touts structurant assez fortement la personnalité de leurs membres pour qu’il soit pertinent de dire que les Tutsis sont dynamiques, que les Ibos ont telle qualité, que le wallons ont telle autre qualité. Je ne partage pas cet axiome pour au moins deux raisons. La première est que je ne crois pas que la culture soit quelque chose de stable à travers le temps. Les Tutsi, les Wallons ou les Ibos actuels, même les plus traditionalistes d’entre eux, ont beau clamer que leur culture est authentique, cette dernière est bien plus influencé par leur époque que par leurs ancêtres. La culture, l’ethnie ou la religion sont à chaque fois reconstruites par les vivants en fonction de leurs préoccupations. Cette première raison se situe sur un plan diachronique et vous pourriez me rétorquer que vous vous situez sur un plan synchronique, plan sur lequel des groupes humains s’entretuent au nom de leur ethnie ou de leur religion. La seconde raison pour laquelle je n’accepte pas l’axiome culturaliste se situe justement sur le plan synchronique. Il me semble que la culture est toujours quelque chose de finalement très superficiel. Je m’explique. Quand vous vous intéressez aux individus, vous vous rendez certes compte que la culture dans laquelle ils baignent a une influence très importante sur ce qu’ils croient et ce qu’ils pensent mais en grattant un peu, vous vous rendez compte de la profonde similitude d’approche du monde qui peut exister entre le commerçant d’un village coupé du monde et l’homme d’affaire qui sévit dans une grande capitale européenne. De même, notre contemporain au tempérament fanatique, s’il est musulman sera salafiste, s’il est chrétien exigera la messe en latin et s’il est juif exigera la réunification du Grand Israel etc Personnellement, je ne vois tout simplement pas pourquoi je serais a priori plus à l’aise avec un membre de ma propre ethnie qu’avec un autre individu. Quel que soit le critère que je prends: la nationalité, la culture, l’ethnie, le cursus universitaire etc, ils sont trop simple pour prédire mes affinités. Ce n’est pas parce que je suis peul que je serais plus proche d’un collègue universitaire peul que d’un ouvrier lorrain. Quand nous justifions l’opposition entre Tutsis et Hutus par des motifs culturels, nous tombons tout simplement dans le piège que nous tendent ceux qui instrumentalisent ces différences superficielles pour asseoir leur pouvoir. Ainsi quand votre ami Ibo affirme qu’il se sent plus biaffrais que nigérian, je peux le comprendre, mais je n’y accorde pas plus d’importance qu’au fait pour M. Le Lay de s’affirmer breton plutôt que français.

    Sur le Darfour: je serais d’accord avec Marc Lavergne du CNRS pour dire que cette prétendue opposition entre arabes et noirs est artificielle au possible et qu’une simple explication en termes économiques serait plus rationnelle. Vous avez vu la couleur de peau de ceux qui se disent arabes?

    Sur la colonisation: je suis ravi de vous entendre dire que la colonisation a eu des conséquences désastreuses pour l’Afrique. Je partage bien évidemment votre point de vue. Je n’étais pas en train de suggérer qu’elle avait été positive. Mon point était que ce qui me paraît intéressant maintenant, ce n’est pas de voir en quoi la colonisation était un mal mais pourquoi la fabrication de l’état nation ne s’est pas correctement faite après la colonisation. Nos dirigeants sont assurément responsables de cet état de fait, mais peut être convient-il de se souvenir également que jusqu’à très récemment, les grandes puissances ont systématiquement soutenu les pires dictateurs en Afrique à condition que ces derniers avalisent le pillage en règle des ressources de leur propre pays. Les dirigeants qui exigeaient des rapports d’égal à égal avec leur ancienne métropole se sont fait assassiner. Par ailleurs, il suffit de voir comment les prix des matières premières sont fixés et de se plonger sur les accords bilatéraux qui peuvent lier la France à un certain nombre de pays d’Afrique pour comprendre qu’il est assez improbable que ces pays se développent dans le système international actuel, aide ou pas.

    J’ai essayé de synthétiser mais il me semble avoir quand même été un peu trop long je le crains!

  • @Raymond : je suppose que vous faites allusion aux chiffres que je donne sur le pillage des élites. Ces chiffres ont été notamment cités par Jacques Attali sur Europe 1 sans son émission « où va le monde? » vers la mi-novembre.

  • @Xerbias et Eole : au delà de la polémique qui pointe entre vous deux se pose le problème du mépris que trop de gens ont pour le travail manuel en France et de son corollaire, sa faible rémunération. Pour m’être longtemps occupé d’orientation je puis témoigner de ce que la plupart des parents préfèrent pour leurs enfants un emploi subalterne et mal payé dans le tertiaire à un emploi manuel mieux rémunéré. Les français en général et les jeunes en particulier ne sont pas plus paresseux que les autres européens, ils suivent simplement la tendance du moment. En Allemagne l’apprentissage a été revalorisé, nous n’en sommes pas là chez nous.Considérons le métier de cuisinier. Il ya 20 ans personne issu de la bourgeoisie n’aurait daigné s’y engager. Depuis que les cuisiniers sont devenus des vedettes, des pipoles, vous voyez de grands bourgeois vous annoncer avec fierté que leur fils est en apprentissage chez tel grand chef dont ils ne doutent pas qu’il prendra la succession. C’est snob, c’est désolant, mais c’est la réalité française.

  • @Yves : merci d’avoir complété votre témoignage sur le Nigéria. Donc entre l’immigration choisie qui prive l’Afrique de ses forces vives et l’immigration « humanitaire » on peut se demander quelle attitude nos gouvernements devraient avoir. Mes lecteurs auront compris que je pense que le pillage des élites africaines est un drame pour l’Afrique et que les générations futures nous jugeront sévérement pour avoir par exemple privé certains pays de leurs médecins alors qu’il suffirait de relever le numerus clausus des étudiants en médecine chez nous pour faire face à nos besoins.
    Je n’ai pas d’avis tranché sur l’immigration humanitaire.
    On peut se dire que quelques milliers d’hommes qui sont sauvés de la misère c’est déjà bien.
    Qui n’a pas eu le coeur serré en voyant ces pauvres hères refoulés de Ceuta ou Mellila, en larmes, menottés, ramenés manu militari vers les confins du Sahara, leurs économies remises à des passeurs, le rêve d’une vie meilleure évanoui… Et en même temps en accepter quelques-uns c’est créer une honteuse inégalité de fait avec ceux qui restent.Sans parler des illusions qu’ils se font sur leur vie future (l’Europe c’est le pays de tous les espoirs, de l’argent facile pensent-ils. L’un d’eux, interviewé, disait : quand je reviendrai d’Europe les gens ne me reconnaîtront même pas et moi je me demanderai pourquoi j’ai attendu aussi longtemps avant d’y aller).
    Ce que vous dites sur l’incroyable odyssée du passage vers l’Europe correspond tout à fait à ce que l’on voit dans le film « C’est loin la France » que j’ai cité plus haut, film qui n’a eu aucun succés en salle et qui n’est passé qu’une fois à la télé, au ciné-club.

  • @Hady Ba : encore une fois ne vous excusez pas d’avoir été trop long car votre commentaire est vraiment très intéressant et donne à réfléchir, ce qui, après tout était le but principal de mon billet.
    Je vois très bien votre point de vue concernant les différentes ethnies. Je ne suis pas sûr en revanche de le partager totalement. Nul ne peut nier par exemple que les auvergnats montés à Paris au début du siècle dernier étaient des gens plus entreprenants que la moyenne nationale et que leurs enfants ont su faire fructifier le patrimoine des anciens. Les puritains de la Nouvelle-Angleterre au 17e siècle avaient aussi ces qualités de travail, de ténacité, d’abnégation qui ont tant inspiré le capitalisme américain à ses débuts, les hugue,ots français injustement chassés par Louis XIV ont prospéré dans leurs pays d’accueil, les allemands, les japonais ont tout de même su reconstruire (certes avec l’aide des américains) leurs pays laissés exsangues par la guerre. Ce sont ces exemples et bien d’autres qui me font penser qu’il y a des gens plus entreprenants que d’autres et je ne vois pas pourquoi l’Afrique échapperait à ce phénomène. En revanche je suis tout à fait d’accord avec vous pour admettre que certains se servent de prétendues qualités de leur ethnie, qualités guerrières, commerciales, intellectuelles etc… pour asseoir leur supériorité et commander les autres. On l’a vu avec en Afrique du sud avec l’Inkata du chef Butelezi qui vantait les qualités combatives des zoulous pour leur réserver une place de choix dans la société de l’après apartheid. Il parvint d’ailleurs au moins partiellement à ses fins puisqu’il obtint le maroquin de l’intérieur.
    D’accord avec vous pour admettre que la couleur de peau des arabes du Soudan est bien…noire, en effet. Mais ce qui me semble important ce n’est pas ce que les gens sont mais ce qu’ils pensent être. Je parlais à une amie tunisienne qui me disait être totalement arabe alors qu’elle aussi est de peau foncée. Je doute fort qu’il y ait beaucoup de vrais arabes en Tunisie tant ce pays a subi d’invasions et de mélanges et mon amie n’a rien du type des arabes du Proche-Orient mais ce qui est important c’est son ressenti. Elle illustre ce que j’essayais de démontrer dans mon post « Qu’est-ce qu’un français ». On est ce que l’on pesne et veut être. Sur le plan culturel donc on peut imaginer une grande disparité de ressenti entre les popul

  • @Hady Ba : désolé, encore une fois mon commentaire m’a échappé avant même que je puisse le relire et le terminer. Je termine donc :
    …disparité de ressenti entre les polulations du nord et du sud.
    Quant à votre conclusion je ne vous surprendrai pas en disant que je la partage puisque dans mon billet je me faisais l’avocat d’une meilleure rétribution pour tous les produits venant d’Afrique. Plutôt que de donner de l’argent à des administrations corrompues payons les matières premières, les denrées agricoles et les produits finis en provenance de ces pays à un juste prix.
    Puis-je revenir un instant sur l’aspect culturel que vous avez largement développé? Vous semblez lui donner une importance secondaire mais si vous prenez le Commonwealth, qui n’est rien d’autre qu’un club de gentlemen capables de s’entendre pour faire des affaires et accessoirement de la politique, eh bien qu’ont-ils en commun? Rien si ce n’est d’appartenir à des pays qui ont été à un moment ou un autre de leur histoire (avec l’unique exception du Mozambique) dominés par la Grande-Bretagne, d’avoir été éduqués selon des critères qu’ils ont en commun et ainsi de se mieux comprendre? Le culturel joue donc bien ici un rôle essentiel.

  • « En Allemagne l’apprentissage a été revalorisé, nous n’en sommes pas là chez nous. »

    Borloo avait pas essayé de faire ça, sous le précédent mandat ?

    « Depuis que les cuisiniers sont devenus des vedettes, des pipoles, vous voyez de grands bourgeois vous annoncer avec fierté que leur fils est en apprentissage chez tel grand chef dont ils ne doutent pas qu’il prendra la succession. C’est snob, c’est désolant, mais c’est la réalité française. »

    Merci Cyril Lignac. Il ne reste plus qu’à monter une success story d’un ouvrier du BTP !

  • @DAng : »Puis-je revenir un instant sur l’aspect culturel que vous avez largement développé? Vous semblez lui donner une importance secondaire mais si vous prenez le Commonwealth, qui n’est rien d’autre qu’un club de gentlemen capables de s’entendre pour faire des affaires et accessoirement de la politique, eh bien qu’ont-ils en commun? Rien si ce n’est d’appartenir à des pays qui ont été à un moment ou un autre de leur histoire (avec l’unique exception du Mozambique) dominés par la Grande-Bretagne, d’avoir été éduqués selon des critères qu’ils ont en commun et ainsi de se mieux comprendre? Le culturel joue donc bien ici un rôle essentiel »

    En fait, je suis tout à fait d’accord avec ça. Le seul point que je faisais valoir, c’était que la culture est le fruit d’une construction permanente et qu’elle n’explique rien mais doit elle-même être expliquée par les conditions socio-économiques. Mon Dieu, cette dernière phrase me parait bien marxiste! Je suppose que mon extrême méfiance envers tout discours culturaliste vient simplement du fait que la culture et la religion sont les étendards les plus faciles à brandir quand ont veut mobiliser un groupe humain contre un autre.

  • Faudra-t-il rajouter le Kenya à la liste de ces pays dans lesquels des ethnies opposées sont amenées à cohabiter ? Le calme semble être revenu. Mais ces images, que je viens de voir, ces personnes brûlées vives dans une église rappellent tellement le Rwanda.

  • Un article du Figaro (supplément Economie) du vendredi 11 janvier 2008 me permet de compléter ce que je disais dans mon billet : 20% des médecins africains exercent dans l’hémisphère nord, 135 000 médecins ou infirmières africains exercent hors d’Afrique.
    L’Angola, la Guinée-Bissau, le Libéria, le Rwanda, avaient perdu 40% de leurs médecins en 2000.
    L’Afrique compte 14 médecins pour 100 000 habitants et la France 380 pour 100 000 habitants.
    On voit bien l’absurdité de faire venir des médecins africains en France alors qu’il y a un besoin dramatique de professionnels de santé en Afrique.
    Ce que l’article du Figaro ne dit pas c’est que le numerus clausus en France est respecté en imposant par exemple une moyenne de 15 en première année (je ne sais pas si cette note correspond à la réalité mais elle sert à étayer ma démonstration) excluant des gens qui ont eu 13 mais qui auraient fait d’excellents généralistes.
    On a ainsi une pénurie de médecins qui nous amène à vider l’Afrique de ses élites médicales, dont beaucoup auraient obtenu la note de 13, éliminatoire en France, s’ils avaient fait leurs études chez nous. On ne peut donc même pas se retrancher derrière le prétexte qu’on choisit des médeciins d’un meilleur niveau que les nôtres.
    Le problème est le même en Grande-Bretagne qoù l’on s’apprête à recruter 25 000 médecins et 35 000 infirmières dans les toutes prochaines années, ce qui fait dire à Cap Afrique : « En fait, les pays pauvres financent la formation de professionnels qui iront soigner, demain, les patients des pays riches.
    Autre remarque : une discussion avec un étudiant malien m’apprend que plus de 30 langues sont parlées au Mali.
    Cet étudiant me dit qu’il a déjà rencontré des maliens avec qui il ne peut absolument pas communiquer dans une langue africaine qu’ils auraient en commun. Ils ont donc recours au français. Ceci contredit en partie l’affirmation d’Hady Ba qui écrivait ci-dessus qu’on peut toujours se faire comprendre dans un elangue africaine.
    Comme les jeunes sont davantage intéressés par l’anglais que par le français il arrivera un jour où des vieux dont personne ne comprend la langue, ou les langues qu’ils parlent, ne pourront plus communiquer en français avec des interlocuteurs qui ne sauront que l’anglais.
    Encore des difficultés en perspective.
    Je ne suis pas en train de dire qu’il faudrait morceler le Mali mais on voit bien combien la création d’états modernes, à l’occidentale, est difficile en Afrique.
    Dernière remarque : une entreprise est en train d’installer des micropieux sous les fondations de l’immeuble à côté de chez moi.
    Le contremaître portugais me confiait que son homme de peine, un peul mauritanien, est pratiquement aussi compétent que lui, désormais, pour mettre en place cette technique pointue. Ce peul ne savait pas un mot de français il y a 7 ans et n’avait fait que garder des chèvres dans son pays.
    On imagine l’atout que représenterait pour la Mauritanie le retour au pays de cet ouvrier : il possède parfaitement une technique de pointe, il parle bien le français, il a vu autre chose…

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