Je me demandais soudain, comme beaucoup l’ont fait, ce que peut ressentir l’homme que ses pairs ont élu pape. Lorsqu’il perçoit que les voix se portent sur lui, lorsque son nom est proclamé, lorsqu’il se trouve dans cette aussi célèbre que mystérieuse pièce qu’est la chambre des larmes. Notre logique personnelle nous conduit peut-être à penser qu’il ne faut pas exagérer les larmes, et songer tout de même à l’honneur. Homme de foi chrétienne, il est bien peu probable qu’un pape le vive ainsi. Mais surtout, que peut penser celui qui sait qu’il sera non seulement observé pour ses décisions, ses actes, ses écrits, mais aussi sa façon d’être, de se tenir, de sourire ou d’avoir l’air grave, de penser, à sa grandeur d’âme, celui qui sait qu’aucun de ses pas ne lui appartiendra plus et que, de surcroît, ils seront mesurés non pas à l’aune des Hommes mais à celle du Christ, celui qui sait que des milliards se tournent vers lui, qu’il est en somme responsable pas seulement de leur destinée temporelle mais encore, en grande part, de leur âme ? Comment un homme peut-il à cet instant-là, lorsqu’on le laisse seul, faire autrement que tomber à genoux et s’abandonner dans la confiance, tant un tel rôle n’est taillé pour personne ? Puis se relever, paraître, entendre proclamer puis scander son nom, ne pas laisser monter l’orgueil. Bien sûr, le pape élu l’a été aussi parce qu’il a fait preuve d’aptitudes similaires dans d’autres charges. Mais tout de même, tout de même, dans une version édulcorée de l’orgueil – pas la gloriole personnelle, trop facile à discerner, à débusquer – garder « un cœur qui écoute », et décide, aussi.
Et dans cette tâche immense, hors de proportion, le pape sait que, misérablement, il rencontrera des oppositions, internes. Alors même que sa mission n’est à la portée de personne, il sait qu’il s’en trouvera pour tenter de le contrecarrer. Le 17 mars 2013, nous rappelle Andrea Tornielli, dans l’introduction de ce livre d’entretien que vous connaissez tous, le pape François célébrait sa première messe en public et prononçait sa deuxième homélie en tant que pape. Et François commentait un évangile connu, celui de la femme adultère. Et vraiment à lire cet ouvrage, on se dit qu’il y a dans cet évangile à la fois tout le pontificat de François, et pratiquement toute la foi chrétienne.
Comme Tornielli le rappelle, un an plus tard, le pape revient sur cet évangile et sa façon de l’introduire m’a soudainement frappé par l’analogie que l’on peut faire avec sa situation personnelle. « Nous rencontrons Jésus, assis là, parmi une foule de gens, occupé à catéchiser, à enseigner ». Je ne confonds pas le pape et le Christ, mais soudain je vois François, assis là, occupé à catéchiser, occupé à dire au monde quel est le message véritable de la foi chrétienne, quelle est la nature de Dieu, ce qu’Il veut pour l’Homme. Et soudain les scribes et les pharisiens. Parce que l’Amour de Dieu, Jésus, c’est bien. Mais Dieu, c’est pas juste « cuicui les ptits oiseaux ». Il y a la Loi de Moïse. C’est trop facile de prendre la bonne part et de nous laisser nous dépatouiller avec ça. Alors, ils Le mettent à l’épreuve. J’admire aussi cet évangile par la capacité de Jésus à trouver une troisième voie, à refuser l’alternative stupide et stérile que lui propose les pharisiens : mettre à mort, ou exonérer de toute faute. Les scribes et les pharisiens, grossiers personnages, interrompent donc Jésus dans sa mission essentielle et fondamentale. Et tiens, combien de fois le pape François s’est-il vu reprocher de ne pas dire « les mots qui fâchent », de ne rappeler qu’insuffisamment ce que l’Eglise n’estime pas juste, notamment en matière de morale sexuelle ? Alors ils le mettent à l’épreuve et l’interrompent, alors qu’il est assis là, occupé à catéchiser…
Car il catéchise tant. « Le nom de Dieu est miséricorde » n’est pas fait pour les savants. Il est fait pour être lu. C’est un petit ouvrage, court et simple, mais fondamental. Avec lui, on a le sentiment de retourner aux sources et de porter le regard sur le cœur. Le nom de Dieu est miséricorde : il est au-delà de la justice. Car le pape insiste sur ce point : en ne condamnant pas la femme adultère, alors que son acte était puni de mort dans la loi de Moïse, donc infiniment grave, Jésus outrepasse la loi et dépasse le pardon. Il pourrait tout à la fois sanctionner puis pardonner mais non. « Il ne lui dit pas : l’adultère n’est pas un péché, mais Il ne la condamne pas au nom de la Loi » . Ainsi Jésus tient-il cet équilibre difficile : il ne nie pas la faute, le péché, il ne nie pas l’existence de la loi, et il passe outre. La loi est là, pourtant Il ne l’applique pas.[1]
Le pape livre aussi cette perception chrétienne de Dieu : cette envie certaine de Dieu d’accueillir et pardonner. Comme une tendre impatience à nous voir faire un pas et même ne serait-ce que ressentir le désir de le faire. Andrea Tornielli souligne comme le pape lui a demandé de rajouter ce que Tornielli avait omis de leur entretien : « le remède existe, la guérison existe, si seulement nous faisons un tout petit pas vers Dieu ou si nous avons, du moins, le désir de le faire » . J’aime aussi cette parabole du fils prodigue – que rappelle à de nombreuses reprises le pape dans le livre – où l’on voit un Dieu qui nous guette tout le jour : « comme il était encore loin, son père l’aperçut et fut saisi de compassion; il courut se jeter à son cou et le couvrit de baisers » . Et pourtant, Dieu est Dieu : le fils prodigue l’a rejeté, offensé, s’est mal comporté, Il pourrait au moins attendre qu’il arrive jusqu’à lui. Mais Il se précipite à son cou.
Il y aurait tant à dire encore sur ce pourtant court livre d’entretien, et sur la bulle d’indiction[2]. Tant de passages à citer, de références à rappeler. J’aime lire que « l’une des plus anciennes collectes de la liturgie nous fait prier ainsi : « Dieu qui donnes la preuve suprême de Ta puissance lorsque tu patientes et prends pitié« »[3]. Oui, dès le VIIIème siècle, on le voyait et formulait ainsi. Le pape souligne comme Dieu n’attend que le plus fin rai de lumière – jusque même le regret de ne pas regretter – pour se précipiter. Il revient sur l’Eglise, hôpital de campagne, qui se déplace elle-même sur le terrain.
Il nous invite au retour. Retour à l’Essentiel. Oh ça ne veut pas dire que ce qui était mal est bien et qu’il n’y a plus d’erreur. François n’est pas un de ses parents laxistes qui laissent tout passer en imaginant que c’est de l’amour. Ça veut dire que ce n’est pas vraiment le sujet. Ça veut dire qu’avec Saint Paul, tombé de son canasson, il nous faut, si ce n’est pas déjà fait, « situer désormais en premier la foi, et non plus la loi ». Et Dieu sait (Il sait tout) que nous sommes nous-mêmes, fidèles, laïcs, religieux, parfois bien scribe et pharisien – et bourgeois, aussi, on peut dire. Le pape le rappelle d’ailleurs, citant des exemples concrets dans lesquels l’Eglise, par l’un de ses prêtres, n’a pas su accueillir.
Et moi, moi qui ne suis que moi[4], quand je referme ce livre-là, comme avec la toute première interview de celui que ses pairs ont élu pape pour nous guider, comme avec son exhortation apostolique La joie de l’Evangile, c’est avec la joie au ventre, c’est avec l’enthousiasme – pour un peu je me confesserais là. Libéré, délivré[5]. Et quand très concrètement, je l’ai refermé, ce livre, j’ai pensé que la Vérité nous rendra libres et, dans mes oreilles, il y avait Clapton :
Bomp, bomp, bomp, bomp, bomp
Bomp, bomp, bomp, bomp, bomp
A vous.
- « L’Eglise condamne le péché parce qu’elle doit dire la vérité : ceci est un péché. Mais en même temps, elle embrasse le pécheur qui se reconnaît tel, elle est proche de lui, elle lui parle dans l’infinie miséricorde de Dieu » (p. 42) [↩]
- Grosso modo, le texte d’ouverture [↩]
- Prière d’ouverture du XXVIè dimanche du Temps ordinaire. Cette prière apparaît dès le VIIIè siècle dans les textes eucologiques du Sacramentaire gélasien, 1198. Ne me demandez pas d’expliquer : je ne fais que recopier la note de bas de page [↩]
- Mais si, vous connaissez : Daniel Guichard, Mon vieux, La tendresse, Comédien… [↩]
- Poke ma fille [↩]
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La Loi est humaine, le pardon est divin ou dicté par le Divin.
Le Pape, bien que remarquable, est humain mais sa parole est dictée par le Divin.
En temps qu’humain au moins il pense ce qu’il dit. Merci.
Merci Erwan pour cette invitation à déguster ce livre … Oui nous avons de la chance d’avoir un tel pasteur et si son exemple était suivi ne serait-ce que par 25 % de nous que le monde serait plus beau …
En lisant ce billet je ne peux m’empêcher de faire le lien avec la parabole des ouvriers de la dernière heure (que j’aime beaucoup et qui fait hurler à l’injustice toutes les personnes athées à qui je la raconte… alors que ce sont les mêmes qui accusent Dieu d’être le grand méchant comptable de toutes les petites infractions à sa règle…)
Dieu n’est pas injuste, Dieu est sur-juste: sa miséricorde dépasse l’application de la justice (mais sans léser ceux qui reste dans le droit chemin non plus, nous avons tous grommelé avec le frère aîné du fils prodigue hein!)
C’est d’ailleurs bien rassurant pour les effectifs célestes. Si Dieu n’était pas miséricordieux, le paradis serait bien vide.
Merci beaucoup pour cet article et cette invitation à lire une nouvelle fois notre bon Pape. Pour ma part je m’apprête à lire les catéchèses sur la Famille, et vu ce que j’ai lu en survolant….ça décape! Restons centrés sur l’Essence-Ciel! Au passage, recevez mes meilleurs voeux pour 2016, pour plein de bons moments en famille, au travail, en mission 🙂
Piline a écrit :
Ah tiens, merci pour cette clé. J’ai toujours beaucoup de mal à comprendre cette parabole mais ce rapprochement est intéressant. Et tant que nous y sommes, cela laisse penser aussi qu’il n’est jamais trop tard pour s’y mettre.
Tenez, je vous livre un extrait, issu de la bulle d’indiction :
@ Au fil des ouvrages : je n’ai pas voulu faire une fiche de lecture, ni donner les « meilleurs extraits ». Il ne me semble pas que ce soit mon meilleur apport. Mais oui, le monde serait plus beau si nous vivions cette miséricorde, si nous étions capables de la faire percevoir, et si nous nous abstenions d’être des obstacles entre ceux qui voudraient bien rejoindre le Père et lui.
Et là encore, quelques extraits :
Ou encore
Et
ElisCham a écrit :
Recevez mes meilleurs voeux également.
Un détail : Paul n’est pas tombé de son canasson ! Ce sont les peintres qui l’ont représenté ainsi. Le texte dit qu' »il est tombé à terre » cf. Ac 9, 22, 26.
Sinon, grande envie de lire ce livre d’entretiens.
Oui, enfin, vous vous avancez en disant qu’il n’est pas tombé de cheval. Au final, on ne sait pas. On sait juste qu’il est tombé à terre, peut-être de cheval. D’autant que, pour ramener des chrétiens enchaînés de Damas à Jérusalem, il n’avait peut-être pas prévu d’y aller à pied. Mais bon, je ne fais que taquiner.
Vous avez raison : on fait crédit à une représentation postérieure. A vrai dire, je le savais mais bon, comme c’est un détail…
Merci pour ce beau billet !
Mes interrogations anciennes ne font que resurgir cependant à la lecture de passages comme :
Pourquoi ce pardon divin ne s’est-il pas exercé vis-à-vis d’Adam, pourquoi ne s’est-il pas exercé pour les millions d’êtres humains ayant vécu avant le retour du Christ, pourquoi Dieu a-t-il voulu que le Christ (et donc Dieu lui-même) soit supplicié avant de finalement accorder son pardon, voilà des questions qui sont restées pour moi insolubles. S’il y a un théologien dans la salle …
Une chose est sûre, tu donnes envie de le lire (je suppose que c’était le but!)
Le rapprochement avec la parabole des ouvriers est parlant. Souvent, lorsque j’écoute ou lis ce texte, le premier réflexe est le même: je m’identifie d’abord avec l’ouvrier de la première heure, celui qui trouve ce traitement injuste; de même, je me sens volontiers proche du fils resté fidèle, qui se sent lésé par le geste de pardon du père. Et puis je me rappelle qu’avec un peu plus de réalisme, je ressemble plutôt aux ouvriers tardifs ou au fils prodigue…
Comme il est écrit, rendez à Clapton ce qui est à Clapton, et à Cream ce qui est à Cream (groupe dont Clapton n’est qu’un élément, à égalité avec les deux autres. Il n’a d’ailleurs pas écrit cette chanson, et c’est Jack Bruce à la voix lead, il me semble).
Comment ça, un détail????
(A moins qu’il y ait une allusion au surnom de Clapton dans les années 60?)
@numero N
Dans le credo, nous disons « je crois en jésus Christ….descendu aux enfers, … »
Il est allé au séjour des morts pour y proclamer la bonne nouvelle auprès des justes qui l’avaient précédé. Or on ne se justifie pas soi même, ces justes l’étaient car ayant déjà eu la grâce donnée par Dieu pour suivre ses préceptes.
Le pardon de Dieu s’est bien exercé pour les générations d’avant le Christ, cf catéchisme de l’Eglise catholique §632 à 637 🙂
« L’Eglise condamne le péché parce qu’elle doit dire la vérité : ceci est un péché. Mais en même temps, elle embrasse le pécheur qui se reconnaît tel, elle est proche de lui, elle lui parle dans l’infinie miséricorde de Dieu »
extraordinaire amour de Dieu bien loin de nos calculs, de nos lois humaines. Si ces dernières sont nécessaires à la société, cet amour miséricordieux dense et intense fait exploser les cadres.
Dans toute la Bible, y compris dans le nouveau testament, il y a une dialectique justice/miséricorde qui n’est pas facile à démêler et articuler, les réflexions de saint Paul à propos de la Loi en témoigne. De fait, si la miséricorde de Dieu précède en puissance la justice, en acte la justice, au moins au niveau du sujet, précède la miséricorde, puisque c’est bien en reconnaissant son injustice qu’il peut espérer obtenir miséricorde – c’est à dire le pardon qui lave de la faute.
Il est d’ailleurs notable que dans l’épisode de la femme adultère, Jésus dit « je ne te condamne pas mois non plus », et « va et ne pèche plus », et non : « tes péchés sont pardonnés ». Dans le discours qui suit : « Qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais aura la lumière de la vie », Dieu est étranger à la mort, donc évidemment Jésus ne condamne pas à mort. Ne pas condamner (acte négatif qui pourrait être de l’indifférence) est tout de même différent de faire miséricorde (acte positif), c’est à dire de pardonner. Dans la parabole du fils prodigue, le fils reconnait au préalable ses torts, est prêt à satisfaire sa faute et retourne chez son père (ce qui est étymologiquement un chemin de conversion) ; idem dans l’épisode de Zachée – ce n’est qu’après la promesse de celui-ci de rendre justice que Jésus annonce que « le salut est entré dans cette maison. »
Il n’y a pas de miséricorde sans satisfaire (ie faire assez) une certaine justice, et pas de justice sans vérité évidemment – celle qui rend libre. Finalement le sacrement de réconciliation traduit bien toute cette exigence.
Numéro N a écrit :
Pour compléter le commentaire d’exilé,
dans l’iconographie on représente souvent le Christ ressuscité tenant Adam et Eve par la main et les extrayant de leurs tombeaux.
Petit exposé sur la note de bas de page recopiée texto par Koz qui ne se sent pas capable d’expliquer : les textes eucologiques, ce sont les textes de la prière de l’église. Les textes liturgiques, quoi.
Le Sacramentaire gélasien, c’est l’ordonnancement que le pape Gélase a donné à la liturgie dans la première moitié du VIIIe siècle : le Sacramentaire, c’est le grand-père du missel d’autel. Sauf qu’à l’époque, il y avait à peu près autant de traditions liturgiques que de diocèses ou au moins de régions. C’est Charlemagne qui a fait l’unité liturgique en imposant dans tout son empire (c’est-à-dire 80 % de la chrétienté latine de l’époque) les pratiques romaines. Le Sacramentaire gélasien, c’est vraiment l’organisation fondamentale de la liturgie latine, la source de celle que nous célébrons encore malgré des ajouts au Moyen Âge, des modifications mineures au concile de Trente et plus lourdes après Vatican II.
Adoncques, « les textes eucologiques du Sacramentaire gélasien », c’est les textes liturgiques tels qu’ils ont été organisés à Rome au début du VIIIe siècle et tels qu’ils ont ensuite servi de modèle à toute la chrétienté latine (sauf le rite mozarabe, mais je vais finir par avoir l’air cuistre).
@ exilé @ Courtlaius:
Merci pour vos précisions utiles et vos références !
Cela a du être une « divine surprise » en effet, pour tous les justes ayant précédé le Christ, d’apprendre qu’ils n’avaient finalement pas mérité d’avoir passé ce temps aux enfers !
Je ne m’explique toujours pas cependant pourquoi Dieu n’a pas pardonné à Adam depuis le début au lieu de plonger l’humanité dans la souffrance, pour finalement changer d’avis et accorder son pardon après s’être « lui-même » crucifié (d’autant que , comme le rappelle Koz, « Dieu sait tout » depuis toujours). Voilà des questions qui m’ont interpellé depuis ma jeunesse, et qui resteront sans doute à jamais sans réponse.
Changez de dieu ! celui-ci n’apporte pas de réponses satisfaisantes, et il à l’air bien changeant.
@numéro N : je ne répondrais certes pas à toutes vos interrogations, mais je ne crois pas que Dieu « ait changé d’avis » : il est en dehors du temps, et que Marie soit l’Immaculée Conception suppose que son âme soit avant le péché originel (je sais, ça donne un peu le vertige. mais bon, la science fiction aussi, hein! 🙂 )
Le rapport au temps, une fois que nous sommes morts, est sans doute extrêmement différent.
Et Dieu est hors du temps.
C’est pourquoi je prie souvent pour la conversion de défunts, ma prière intervient pourtant après leur mort, mais elle peut avoir une action avant leur mort….(c’est fou :p )
Numéro N a écrit :
Relisez attentivement les articles du cec cités par exilés. Notez aussi que dans le christianisme nous ne sommes pas sauvés parce que nous le mériterions éventuellement individuellement (saint Anselme par ex montre que cela est impossible – cf « Cur deus homo »), combien même nous ferions cent fois ce que fit saint Vincent de Paul ou mère Térésa (parabole du serviteur inutile Lc 17,10), mais par la grâce permise par la passion et la résurrection de Jésus-Christ (épître aux Romains de saint Paul notamment) – résumée par l’expression « mort pour nos péchés ».
La question du pardon à Adam pose le problème du mystère du mal et de la liberté (ainsi que de la solidarité entre tous les hommes, et au-delà toute la création), auquel ultimement il n’y a pas de réponse rationnelle. On peut simplement constater la condition présente de l’homme (que tous, croyants ou non, jugeront insatisfaisante), et inférer rétrospectivement. Ainsi dans la Genèse Adam s’est librement éloigné de Dieu accordant sa confiance à une créature plutôt qu’au créateur. En tant qu’être libre, il doit en toute justice, selon l’ordre des choses créées, assumer les conséquences de ses actes. Cependant une lecture attentive de la Genèse montre que la miséricorde de Dieu est déjà présente et agissante malgré la faute. La suite n’est « que » l’histoire du Salut qui se déploie. Adam ne peut pas se sauver lui-même, mais Dieu ne le sauvera pas non plus sans sa coopération, manifestant ainsi à la fois sa justice et sa miséricorde.
En résumé Dieu ne veut pas raser gratis. Justice et miséricorde entrent certes en dialectique, mais ne s’insultent pas l’une et l’autre – comme l’écrit saint Thomas : « misericordia non tollit justitiam », la miséricorde n’efface pas la justice, ou psaume 25:10 : « tous les chemins de Dieu sont miséricorde et vérité. »