Sans tarder, le gouvernement a mis en place un « chèque inflation ». Cent balles par personne pour prendre soin du pouvoir d’achat des Français, certainement, pour tuer dans l’œuf toute velléité de reprise des Gilets Jaunes, assurément. Ces Gilets Jaunes, ces « Oubliés » que chante Gauvain Sers, les « trop loin de Paris, les cadet de leurs soucis »… On se sera davantage appliqués à les amadouer qu’à les écouter, préférant les réponses tactiques aux orientations stratégiques. Après le Grand Tour de Passe-passe National à l’issue duquel on fit disparaître les cahiers de doléances pour ne plus jamais les retrouver, voilà que l’on disperse en vitesse quelques billets sur le carburant de la révolte. Au vu du caractère incertain du ciblage – permettant à deux retraités sans voiture de toucher la prime quand une mère célibataire avec trois enfants qui ne peut s’en passer ne touchera rien – il est à craindre que la justice sociale de la mesure échappe aux plus concernés.
Ils avaient pourtant quelque chose à dire, nos compatriotes, qu’ils redisent aujourd’hui, pour peu qu’on les écoute. Quelques mots sur une relégation, quelques maux sur un abandon. Ils ont quelque chose à dire sur ces territoires sans Poste, sans médecins, sans épicerie, sans gendarmerie parfois, sans services publics. Le prix de l’essence n’est que le thermomètre de l’inévitable colère de tous ceux qui doivent le payer pour la moindre démarche.
Il serait temps d’envisager un débat présidentiel en prise avec l’avenir des Français les cinq prochaines années, et de proposer un dessein pour le pays. La crise sanitaire rend un peu plus possible encore l’idée de travailler où l’on veut vivre, plutôt que vivre où l’on doit travailler, selon la distinction de Jean-Christophe Fromantin[1]. L’hyperconcentration des métropoles inquiète, le télétravail s’étend. Développer les villes moyennes à toutes les allures d’un cercle vertueux, l’amélioration de la qualité de vie des ex-métropolitains contribuant au réveil des économies locales et, par tâche d’huile peut-être, à la relocalisation de services publics dans un rayon accessible aux territoires ruraux, le tout permettant de valoriser l’ensemble d’un territoire national qui a bien d’autres richesses à proposer que sa capitale congestionnée. Finissons donc de débattre du rôle de Vichy, jolie ville moyenne sur les rives de l’Allier : l’avenir du pays n’attend que nous.
[1] Travailler là où nous voulons vivre – Pour une géographie du progrès, Jean-Christophe Fromatin, éd. François Bourin, 2018
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