Petit Papa Noël a notamment, par deux sources différentes, doté mon petit soulier de ces deux livres, l’un souhaité, l’autre pas : respectivement, Une Vie, de Simone Veil, et Je vous fais juges, de Rachida Dati. Amusante « coïncidence » lorsque l’on connaît le rôle de la première dans la vie de la seconde, et que l’on lit les hommages respectifs de l’une à l’autre dans chacun de ces ouvrages.
Ces deux livres m’ont surpris… positivement pour le second. Ce que c’est, aussi, d’avoir des attentes, ou de ne pas en avoir.
Le premier n’est évidemment pas dépourvu d’intérêt, bien loin de là. Que l’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit. Mais, avec la vie qu’a menée Simone Veil, je m’attendais à un ouvrage de plus grande densité.
Pour évoquer ce livre dans sa généralité, il reste toutefois deux thèmes, qui m’ont spécialement intéressé : l’évocation de la vie d’une famille juive avant la seconde guerre mondiale, et la remise en perspective de la loi de 75. J’ai aussi largement souri à la lecture des portraits qu’elle fait de deux candidats à la dernière présidentielle qu’elle a beaucoup fréquenté.
L’un, « aussi vif qu’intelligent, infatigable travailleur, exceptionnellement au fait de ses dossiers » (p. 276), « seul en mesure d’administrer [à la France] l’électrochoc [dont elle] avait besoin« … et dont la « diabolisation » l’avait « indignée« , « la suite [lui ayant] donn[é] à penser qu’[elle] n’avait pas eu tort » (p. 307).
L’autre, « capable en quelques jours d’énoncer avec la même assurance une chose et son contraire« , et qui
« demeure incompréhensible si l’on ne tient pas compte de cette donnée essentielles : il est convaincu qu’il a été touché par le doigt de Dieu pour devenir président. C’est une idée fixe, une obsession à laguelle il est capable de sacrifier principes, alliés, amis. Comme tous ceux qui sont atteints de ce mal, il se figure les autres à son image : intrigants et opportunistes. Il a donc pu se fabriquer cette chimère que je risquais de lui faire de l’ombre » (p 250)
Mais l’important n’est pas là. Nous y reviendrons.
Le second frappe par le volontarisme évident de Rachida Dati. Au demeurant, le titre même de ce livre d’entretiens avec Claude Askolovitch annonce la couleur. Non, même si telle est l’expression usuelle, il n’est pas de son genre de nous laisser juges : elle nous fait juges. Comme un défi : puisque vous parlez, puisque vous commentez, alors, lisez et jugez ensuite.
Son volontarisme affleure également dans ses réponses aux questions d’un Asko que l’on sait accrocheur : on ne compte pas le nombre de fois où elle lui renvoie simplement un « la question ne se pose pas en ces termes« … ou à ses propres préjugés. J’ai apprécié notamment la façon dont elle répond à la critique à la fois sournoise et faux-cul de son ambition, que Claude Askolovitch lui sert, lui donnant l’opportunité d’y répondre :
Ce que vous êtes aujourd’hui, c’est la réalisation d’une ambition ?
Dites d’un arrivisime ! C’est une idée bien arrangeante, n’est-ce pas ? Si quelqu’un progresse, qui n’était pas predestiné au sommet, c’est qu’il a triché, ou qu’il était dévoré d’ambition, qu’il était prêt à tout, qu’il était calculateur, cynique, manipulateur… Seuls ceux qui seraient nés du bon côté de la fracture sociale seraient honnêtes et intelligents, cumulant le mérite et le succès !
Ce n’est pas ce que je suggérais.
Non ? Mais je poussais au bout cette logique qui, souvent, entoure les gens qui ont brisé les frontières sociales. Quand des journalistes s’en vont enquêter pour savoir si, par hasard, je n’aurais pas volé ou acheté mes diplômes, ils sont dans le soupçon… Ils alimentent cette idée que seuls les installés sont légitimes. De même, quand on évoque mes capacités d’intrigante mises au service de ma terrible envie de pouvoir. Comme si le monde politique était composé de modestes tendrons dépourvus de toute velléité de carrière, et que la terrible Rachida Dati venait bousculer !
J’avoue que j’aime cette franchise. Eh oui, elle aussi, elle a des velléités de carrière. S’attendrait-on à autre chose ? Autre point très intéressant, qui mériterait d’être creusé : la distinction qu’elle effectue entre sa génération d’enfants de l’immigration, et les générations suivantes, à tout le moins dans les traitements qui leur ont été appliqués et, croyez-moi sur parole, c’est somme toute savoureux.
Car Rachida Dati récuse toute vision d’elle-même comme fille de l’immigration ou , plutôt, comme fille du mouvement « beur« , terme qu’elle semble exécrer. « Ne vous trompez pas d’époque« , dit-elle au sympathique nouvel-observateurien Asko. Eh oui, parce que la revendication communautariste, c’est avec la mitterrandie triomphante qu’elle s’est trouvée consacrée : Touche pas à mon pote ! … Et le beur installé comme tel, promptement victimisé. Non, comme elle le dit clairement, qu’il n’y ait eu quelque raison à dénoncer des injustices. Mais la réponse apportée…
Qu’aurait-il fallu faire ?
Dire à ces enfants qu’ils étaient français; que leur statut social n’avait rien à voir avec leur identité. Leur dire qu’il fallait travailler, même si c’était difficile, même si plein de choses leur paraissaient injustes et l’étaient effectivement, mais que c’était la seule solution ! Leur explique que l’assistanant était un piège dans lequel on les enfermait, dans lequel ils s’enfermaient eux-mêmes, une prison qui se construisait autour d’eux. Il aurait fallu les convaincre qu’ils n’étaient pas à la charge de la société, mais qu’ils en faisaient partie (…)
Non, si elle lui garde toutefois de la sympathie, elle n’est pas du mouvement beur. Elle a pris sa volonté à deux mains, et elle a travaillé. Et, si elle a rencontré des personnes dont le regard vide glissait sur la jeune maghrébine qui leur donnait bonne conscience, elle a également rencontré d’autres personnes qui l’ont aidée, et qui ont pour noms : Albin Chalandon, Marceau Long, Jean-Louis Bianco, Simone Veil. Une idée me traverse l’esprit : autant de personnes n’aurait pas aidé Rachida Dati simplement parce que c’était la maghrébine de service. Elle doit bien avoir quelque chose en elle.
*
Surtout, deux points de ces deux ouvrages me semblent mériter une citation et, dans le cas de Simone Veil, dont je citerais le propos en dernier, une répétition en boucle, puisque la pédagogie, selon certains, serait dans ladite répétition. Les fidèles le verront : j’ai déjà évoqué son propos lorsqu’il a figuré dans les bonnes feuilles des hebdomadaires. Je le reprends ici, et je le reprendrai, autant que nécessaire. Parce que, du propos de Rachida Dati comme de celui de Simone Veil, ressort un même message : non, contrairement à ce que l’on nous a enseigné et inculqué, la France n’est pas un pays de salauds ! C’est le dernier vrai développement de Rachida Dati :
« J’espère que personne ne voit en moi l’héroïne d’un conte de fées. J’ai été boulerversée par l’intérêt des medias étrangers pour moi, parce qu’en réalité, c’était un engouement pour notre pays, en train de changer. Ce que je suis montre que la France est belle, quand elle veut. Que la France n’est pas raciste. Qu’on peut monter au mérite, par son travail… »
Le propos de Simone Veil n’est pas moins émouvant. Il m’avait touché il y a plus de deux mois. Il me frappe encore, au coeur. Ce propos, elle le tient dans son livre, pages 326 et suivantes :
« Les années 1970 avaient inversé la tendance des années 1950; à l’époque, réconciliation des français et reconstruction obligent, les gaullistes étaient parvenus à imposer l’idée d’une France héroïque et résistante à laquelle tout le monde avait fait semblant de croire. Vingt ans plus tard, la pensée dominante avait changé, tout aussi simplificatrice. Désormais les jeunes se montraient ravis qu’on leur dise que leurs parents s’étaient tous comportés comme des salauds, que la France avait agi de façon abominable, que pendant quatre ans, la dénonciation avait été omniprésente, et qu’à l’exception des communistes, pas un seul citoyen n’avait accompli le moindre acte de résistance. Le Chagrin et la Pitié tobait à pic dans ce concert d’autoflagellation, et c’est à ce titre que je trouvais ce film injuste et partisan. En outre, il ne nous épargnait aucun raccourci mensonger. Ainsi la ville de Clermont-Ferrand, où un grand nombre d’étudiants avaient rejoint la Résistance, où nombre d’entre eux furent arrêtés, et pour beaucoup fusillés ou déportés, était présentée comme exemple de la collaboration universelle.
(…)
J’avais suffisamment travaillé sur la Shoah pour savoir que la France avait été de loin le pays où le nombre de Juifs déportés s’était révélé le plus faible, un quart de la communauté et, toujours en proportion, très peu d’enfants. Ce phénomène ne trouvait son explication que dans une réalité indéniable : nombreux étaient les Français qui avaient caché des Juifs, ou n’avaient rien dit lorsqu’ils savaient qui en protégeaient. Or, le film n’en disait mot. Il se montrait à cet égard d’une hrande injustice, moins d’ailleurs à l’égard du pouvoir de Vichy que des français eux-mêmes. »
Elle l’a tenu lors de la cérémonie en homme aux Justes de France :
« Certains Français se plaisent à flétrir le passé de notre pays. Je n’ai jamais été de ceux-là. J’ai toujours dit, et je le répète ce soir solennellement, qu’il y a eu la France de Vichy, responsable de la déportation de soixante-seize mille juifs, dont onze mille enfants, mais qu’il y a eu aussi tous les hommes, toutes les femmes, grâce auxquels les trois quarts des Juifs de notre pays ont échappé à la traque.
Ailleurs, aux Pays Bas, en Grèce, 80% des Juifs ont été arrêtés et exterminés dans les camps.
Dans aucun pays occupé par les nazis, à l’exception du Danemark, il n’y a eu un élan de solidarité comparable à ce qui s’est passé chez nous.
Vous tous, les Justes de France auxquels nous rendons hommage aujourd’hui, vous illustrez l’honneur de notre pays qui, grâce à vous, a retrouvé le sens de la fraternité, de la justice et du courage.
(…)
Face au nazisme qui a cherché à rayer le Peuple juif de l’Histoire des hommes et à effacer toute trace des crimes perpétrés, face à ceux qui, aujourd’hui encore, nient les faits, la France s’honore, aujourd’hui, de graver de manière indélébile dans la pierre de son histoire nationale, cette page de lumière dans la nuit de la Shoah.
Les Justes de France pensaient avoir simplement traversé l’Histoire. En réalité, ils l’ont écrite. De toutes les voix de la guerre, leurs voix étaient celles que l’on entendait le moins, à peine un murmure, qu’il fallait souvent solliciter. Il était temps que nous les entendions. Il était temps que nous leur exprimions notre reconnaissance.«
Elle a également incidemment défendu l’honneur de la France, à la tribune de l’ONU, le 29 janvier 2007, à l’occasion de la Journée Internationale de commémoration dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste :
« En France, soixante-seize mille Juifs ont été déportés, mais les trois quart des Juifs de France ont été sauvés. Ils le doivent à ces milliers de français qui les ont aidés et qui ont incarné le courage, la générosité, la solidarité. »
Le moins que l’on puisse dire est qu’il y a un certain hiatus entre cette position et ce que l’on a souhaité m’enseigner.
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Superbe.
je vais acheter le livre de R Daty pour le lire dans le train.
Et sinon, qu’est ce qu’elle raconte sur l’IVG, Simone ? 🙂
Merci, ce seront mes deux prochaines lectures!
… Lorsque j’aurai terminé le premier tome des « Souvenirs Entomologiques » de J.-H. Fabre. Autant dire pas tout de suite, tout de suite.
__
OX
Bravo Koz pour ce rapprochement des deux livres.
Moi aussi j’ai eu celui de S.Veil à noël, vous me donnez envie de lire celui de R.Dati.
Et moi, du coup, j’aimerais faire le rapprochement entre deux billets de Koz :
Celui-ci « Deux vies » et l’actuel antépénultième « L’hallu » sur la “politique de civilisation“…
Juste comme ça…
Vichy même, à mon sens, a été double: il y a eu les ordres d’en haut, dictés surtout par le souhait de plaire à l’occupant, et il y a eu leur exécution, parfois zélée, parfois pas du tout. Et il y a ces situations « grises », dans lesquelles l’occupant demande tant d’otages, et où l’on en négocie un nombre inférieur. Difficile d’avoir des opinions tranchées sur tout ça.
Je l’avais déjà dit dans le premier billet, mais la réaction de Veil sur « Le chagrin et la pitié » m’étonne: dans la mentalité d’aujourd’hui, ce documentaire pourrait passer pour complaisant envers Vichy, tant nous sommes passés à l’excès inverse.
@ FC:
Oui, c’est l’opinion que j’avais à propos de ce téléfilm.
Je veux bien, ce rapprochement, Olivier, mais de quelle manière ?
Excellent. Il faut que je lise ça. Les extraits sont excellents, et donnent à penser. Merci!
Vachement intéressant ce que dit Dati.
J’étais lycéen au moment de l’émergence de SOS Racisme donc je ne pouvais pas à l’époque prendre conscience de ce qui se passait. Mais avec le recul, il semble bien que les années 80 ont fait quelque chose de terrible aux Maghrébins.
Auparavant, ils étaient une vague de migration comme celles qui les avaient précédés (les Polonais dans le Nord, les Italiens dans l’Est…). La vie était dure, comme celle de tous les immigrants dans tous les pays. Mais la voie était tracée : s’intégrer par le travail et l’effort.
Les années 80 ont changé ça. On a expliqué aux jeunes maghrébins qu’il ne servait à rien de travailler, qu’ils n’y arriveraient jamais. Que c’était parce que les Français étaient des salauds racistes. Que la France les avait lesé et leur devait réparation.
Ca a été radical. En même temps qu’on leur retirait leur seul moyen de s’en sortir, on les envoyait au casse-pipe dans une haine stérile des Français.
Une génération sacrifiée. La suivante s’en tirera-t-elle mieux? Il y a des signes encouragents, mais c’est ténu.
Koz, tu écris :
« Une idée me traverse l’esprit : autant de personnes n’aurait pas aidé Rachida Dati simplement parce que c’était la maghrébine de service. Elle doit bien avoir quelque chose en elle. »
Pour avoir lu « Je vous fais juges », je me dis qu’il y a manifestement quelque chose en elle.
Elle est hors du commun. Au-delà même des jugements politiques que l’on peut avoir sur ses convictions et sur ses actions de ministre, R. Dati est une personne largement au-dessus de la moyenne.
Sa capacité à avoir confiance en elle-même, dans le système, dans son instinct qui la dirige vers telle ou telle personne, dans les rapports humains et l’humanité finalement, chapeau ! respect !
Et je profite de l’occasion de ce billet pour exprimer une rancune vieille de quelques mois ;
quand, a fortiori dans notre société et dans notre époque, on est une personne de valeur, on ne s’abaisse pas à jouer de mécanismes victimaires.
Quand on est une femme, on est confrontée au sexisme misogyne dans sa vie. Que ce soit tous les jours ou seulement à certaines périodes, que ce soit dès son enfance ou seulement dès qu’on progresse dans l’échelle sociale, nous devons toutes à un moment donné apprendre à affronter cette réalité.
Et nous ressentons toutes un jour ou l’autre ce satané blues de cette part supplémentaire de chemin à parcourir, de cette difficulté ajoutée à nous faire entendre, de ces preuves que nous devons apporter quand les hommes en sont automatiquement dispensés.
Pourtant, la plus belle, la plus efficace, la plus efficiente des réponses à cette situation injuste, c’est le talent, la compétence, l’intelligence et certainement pas la victimisation.
Et là se situe ma rancune. Au-delà de mes convictions politiques, S. Royal a usé de la victimisation d’être femme en politique alors qu’une véritable valeur individuelle aurait dû la conduire à agir sans recourir à ce subterfuge.
Sa féminité, sa beauté, auraient alors pris tout leur pouvoir d’atouts supplémentaires.
La force du féminisme de Veil, c’est dans ses convictions et l’intelligence de ses combats qu’on la trouve. Et si en plus la nature l’a faite jolie, tant mieux pour capter plus d’attentions. Idem aujourd’hui pour R. Dati et R. Yade.
Mais la force du féminisme de Royal, je la cherche encore, alors que rien de sa beauté n’a pu m’échapper….
Pareil Koz… J’ai trouvé le livre de Simone Veil un poil décevant au vu de son parcours exceptionnel. Je m’attendais à plus mordant de la part d’un personnage que j’estime hautement et que j’ai eu la chance de rencontrer. Elle pêche par modestie peut-être, ou par excès de bienveillance… Ton rapprochement entre une juive et d’une maghrébine est intéressant mais je trouve que les 2 parcours ne sont pas comparables du tout. Mme Veil a le recul que les années et la sagesse lui confèrent. R Dati est dans l’action. Reparlons en dans qqs années…
A propos…. Bonne Année Koz !
Oui, Lib, tout en voulant me garder d’une explication unique. L’attitude des français a peut-être été plus agressive vis-à-vis de l’immigration maghrébine que vis-à-vis des précédentes, encore que je n’en sois pas convaincu : j’ai le souvenir, en Histoire, d’épisodes de « chasses aux italiens » qui me semblent avoir été le fruit d’une population plus nombreuse.
Que l’on ait installé les jeunes maghrébins dans l’idée qu’ils étaient en droit d’attendre que la France répare un tort qu’elle aurait commis à leur encontre me paraît assez probable et je trouve effectivement très intéressant ce point de vue de Rachida Dati. Au demeurant, on observera qu’à la différence d’autres, elle n’a pas cherché à cultiver un « parler banlieue » culturel…
Cilia, nous sommes d’accord. Il y a bien deux attitudes face à la féminité et celle qu’ont adopté Veil et Dati est également plus dans mon goût.
Cathy, nous sommes, aussi, d’accord. J’ai peut-être pu laisser croire, par mon titre, que je voulais comparer deux vies. Ce n’est pas très sympathique pour Simone Veil qui est encore bien active, et ce serait bien prématuré pour Dati. Ce n’étairt pas mon intention.
En revanche, je trouve intéressant de voir le parcours de deux femmes qui n’ont manifestement pas entendu jouer de la victimisation.
En ce qui concerne le livre de Simone Veil, je te suis dans l’explication possible de notre déception commune par modestie, excès de bienveillance et, peut-être aussi, pudeur. PEut-être aurait-elle dû employer un autre mode d’expression, notamment par un livre d’entretien, qui aurait permis d’aller plus au fond, et de l’aider à exprimer ce qu’elle n’exprime pas forcément spontanément.
Et bonne année à toi !
Koz, quand je parle d’un rapprochement entre vos deux billets « deux vies » et « l’hallu » je veux parler plutôt d’un parallèle que de rapprochement.
– Dans « l’hallu » vous partez de la « politique de civilisation » abordé par Sarkozy.
Je remarque que ce billet, guère plus long que les 3 mots de Sarkozy, déclenche des commentaires tous plus longs 🙂
De toute évidence, parler « politique de civilisation » c’est parler de l’humain dans le sens COLLECTIF du terme, dans le sens du « destin de(s) civilisation(s) ».
– Dans ‘deux vies » vous abordez non une comparaison de deux vies, mais une mise en perspective de deux destinées – féminines – d’origines différentes, qui se croisent dans leurs activités et dans leurs vies.
De toute évidence, parler ainsi de « deux vies » c’est parler de l’humain dans le sens INDIVIDUEL du terme, dans le sens du « destin de ces deux vies ».
J’ai lu vos deux billets immédiatement l’un après l’autre, ne m’étant pas connecté quelques jours.
Et cela m’a sauté aux yeux : vous touchez, au travers de ces deux billets, des thèmes qui se rejoignent.
Le parallèle, il est sur la place, que nous avons tous quelque part en tant qu’individu, avec nos origines civilisationnelles diverses, pour créer le collectif de la civilisation de demain.
On a là, avec ces « deux vies » un témoignage concret du croisement de « civilisations » originellement bien différentes, dont les Histoires respectives ont été – voire sont – dans bien des aspects contradictoires et même conflictuelles…
Vouloir parler, supposer, prévoir, penser « civilisation » … pour la compréhension que je peux en avoir, c’est vouloir réfléchir sur les comments et les pourquois du « vivre ensemble demain », comment réunir dans un avenir concomitant et commun les vies de chacun, au centre d’une vie collective la plus respectueuse et paisible qui puisse être…
Avec tout ça les profs de philo peuvent pondre des dizaines de sujets de philo !
Hé bien voila Koz !
Sarkozy vient à l’instant de relier vos deux billets « deux vies » et « l’hallu » …
Il charge Simone Veil de rédiger le préambule de la constitution…
Libéral écrit:
« Les années 80 ont changé ça. On a expliqué aux jeunes maghrébins qu’il ne servait à rien de travailler, qu’ils n’y arriveraient jamais. Que c’était parce que les Français étaient des salauds racistes. »
Il est en effet très frappant de lire les nombreux témoignages d’anciens d’élèves issus de l’immigration dont un prof a, un jour, tué les ambitions en leur disant: « Laisse tomber, un tel métier n’est pas pour toi, fais donc ceci ou cela » — en les dirigeants d’office vers des filières courtes et dévaluées.
Comme par hasard, le milieu des professeurs est squatté par la gauche, dominé par l’idéologie de victimisation, d’assistanat, de repentance de la société française, de multiculturalisme, d’anti-racisme — le communisme du XXIème siècle, comme dit à juste titre Alain Finkielkraut.
Il n’y a aucun doute que, parmi ces professeurs qui ont découragé des tripotées d’élèves qui étaient prêts à faire les efforts nécessaires, il y avait de nombreux « De Gauche ».
Ce crime s’est perpétré en silence pendant des décennies dans l’arrière-cour des socialistes et de l’extrême-gauche.
Rachida Dati, elle, a été l’élève des bonnes soeurs, dans l’une de ces écoles catholiques vouées aux gémonies par les De Gauche. Les soeurs l’ont remarquée et encouragée. On voit la différence.
je n’ai pas lu ces livres et je le ferais sans doute pas (sauf peut-être Veil.)
je suis étonnée de ce rapprochement
L’une a un passé politique et humain reconnu par tous et elle s’est tellement exprimée avant, que ce livre actuel parait peut-être vide de contenu mais surtout elle n’a rien à prouver.
L’autre était certes reconnu par certains qui l’ont aidée mais à une époque donnée ; certes elle est volontariste et alors (il y en a d’autres en économie par exemple)mais il me semble qu’elle n’a non seulement rien fait (sinon appliquer une réforme qui avait sans doute été préparée depuis longtemps et qu’elle essaye péniblement de défendre) et en plus elle est contestée (elle et non la réforme)par nombre d’acteurs de la justice.
Je me pose donc la question pourquoi ce livre ?
Pour essayer de justifier son insuffisance ? pour essayer à travers son livre de se présenter sous un meilleur jour ?
Je suis persuadée qu’elle en a plus bavée que d’autres mais l’histoire ne juge que les actes et pour l’intant ?
Et peut-on penser qu’une personne qui a plein de qualités humaines et professionnelles comme elle à l’instant t, a toujours ses mêmes qualités à l’instant t+1 dans des boulots qui sont différents ?
Bref elle a tout à prouver…
L’une a forcé l’admiration en imposant un texte essentiel devant un parterre de vieux croutons pour qui la condition féminine ne dépassait pas le seuil de la chambre à coucher puis a mal vieilli pour finir par passer la soupe à Nicolas Sarkozy.
L’autre débute en comptant sur son physique et l’admiration gourmande de nouveau riche que porte le même Sarkozy aux tanagras. Espérons qu’avec le temps … Ecrire ses « mémoires » à cet âge donne justement peu à espérer pour le futur.
le livre de S.Weil apporte peu: son règlement de comptes avec FB manque d’élégance (l’ambition démesurée est la caractéristique des grands fauves politiques) , son admiration pour le Président peut sembler de la complaisance….ou, pire, intéressée…
ce qu’elle dit sur les juifs est juste, mais connu, et, au delà des caricatures des premières années, chacun sait que les français n’étaient en majorité ni des héros, ni des zéros,…
mais cherchaient à vivre, survivre avec en plus des solidarités relationnelles , ou des opportunités conflictuelles…
rachida dati, je ne lirai à priori pas son livre…
j’avais été très choqué par son agressivité les premières fois que je l’ai vu, durant la campagne…
je n’aime pas beaucoup le style des « lettres de recommandation »
qu’elle a largement pratiqué, cela me semble contraire à ma conception de la compétition par les compètences…
c’était le seul moyen d’être ministre à quarante ans pour une fille d’immigré? la fin ne me semble pas justifier le moyen…
je suis aussi très surpris par une ministre qui passe sses vacances avec le président… qui ici passe ses congés avec son patron?
je n’arrive pas à me faire à ces méthodes/moeurs…
un point positif pour elle tout de même: elle ne parle pas de sa vie privée, et personne n’en parle, ce qui prouve qu’il suffit de le vouloir pour y arriver…
une question que je me pose: parle t -elle de l’Islam dans son livre? en ces temps de « laïcité positive » ce point pourrait être intéressant….
@Françis
François Bayrou un » grand fauve politique » ??
Vous suspectez Simone Weil de flagornerie, elle serait complaisante ou pire,intéressée… quelle étroitesse de vue que l’antisarkozysme primaire !
je trouve que le comportement de S. weil dans es propos sur F. Bayrou er N.Sarkozy paraît manquer de hauteur de vue….
je ne vois pas où est l’antisarko »primaire »
Non, Rachida Dati ne parle pas de l’islam. Claude Askolovitch lui demande bizarrement à un moment si elle a l’intention de se convertir au catholicisme. Elle lui répond qu’elle « ne comprend pas cette question ».
Deux choses m’amusent, dans les commentaires de francis et claudius, qui se résument un peu à la relativité des appréciations :
– ainsi Rachida Dati n’aurait pas dû faire usage de lettres de recommandation ? Parce que, bien entendu, nous sommes tous égaux en droits et en chances dans la grande compétition au mérite ? Franchement, après que la gauche ait dénoncé durant tant d’années les discriminations, notamment au CV, est-ce que c’est bien sérieux d’affirmer cela ? On fait dans l’angélisme, maintenant ? L’égalité des chances, no pb, elle est parfaitement respectée ? Les convictions changeraient-elles selon les personnes auxquelles on les applique ?
– et en ce qui concerne Simone Veil, j’aime beaucoup la façon dont l’appréciation d’un grand personnage, comme elle, varie : dès lors qu’elle décide de soutenir Nicolas Sarkozy et de dire tout le bien qu’elle en pense, celle qui était quasi-unanimement aurait soit vieilli (on ne dit pas qu’elle est gâteuse mais on le pense si fort que cela s’entend) ou aurait perdu sa hauteur de vue. Reste une hypothèse : que ce soit la même personne, avec la même hauteur de vue, qui ait fait ce choix.
Quant à son éventuel opportunisme, il faut croiser cela avec l’âge : au sien, je ne crois pas que l’on courre véritablement après un maroquin. Mais bien évidemment, l’opportunisme et le carriérisme que nul n’a jamais identifié sur toute une vie se révèlerait précisément maintenant.
Non, il n’y a pas d’opportunisme de la part de Simone Veil, je la pense bien au dessus de ça; par contre, une fatigue, certainement et soutenir Sarkozy, à son niveau, je crois que c’est vraiment s’abaisser. Elle avait atteint un statut de « juste » ou de « sage » qui la dispensait de cirage de pompes.
Rachida Dati elle, est une sarkozienne pur sucre, elle a beaucoup de points communs avec lui, le goût des couvertures, les grandes déclarations, de l’épate; bien sûr, réussir comme cela n’est pas haïssable en soi, Nicolas Sarkozy a su lui aussi passer de main en main, de Pasqua à Chirac en virevoltant au point de vue des idées dans la palette de la droite; ça en fait quelqu’un d’habile, mais ça n’en fait pas pour autant un homme d’Etat capable de représenter et surtout de parler au nom de tous les Français.
C’est quoi les lettres de recommandation? En quoi est ce contraire au mérite?
Voilà, je suis de retour après avoir presque fini le livre de R Daty ( pas fini, car, pour une fois, les trains n’avaient pas de retard )
J’ai beaucoup aimé.
Cela se lit bien, et ce que j’ai beaucoup apprécié – qui a écrit ce livre, elle ou C Askolovitch ? – c’est cet esprit de répartie.
Une critique sur le fait qu’elle ait fait, jeune , une auto bibliographie ?
Ce n’est pas, à proprement parler cela.
Ce serait plutôt une mise au point sur de nombreux sujets dont on s’aperçoit, à la lecture, qu’il était nécessaire d’éclairer, tant la presse, comme à son habitude , a déformé le sens et de sa vie et de son action.
En lisant ce livre, j’ai eu l’impression que l’origine des critiques sur R Daty était certainement plus le fait qu’elle soit sarkosyste tout en étant d’origine étrangère et de milieu pauvre, que le fait qu’elle soit femme, d’origine étrangère et ayant réussi sa vie !
En lisant ce livre, j’ai eu l’impression que celui qui l’interogeait n’arrivait pas à comprendre comment elle pouvait apprécier de travailler pour N Sarkosy.
Comme si il voulait lui faire avouer que c’était purement ambitieux, parce que in fine, personne ne pouvait suporter un tel homme. ( ni même apprécier quelqu’un qui réussit dans sa vie professionnelle )
Et quand il lui parle de ses valeurs à elle et qu’il tente de la destabiliser, par le fait qu’il se réfère constament à Sarkosy, cela me semble être un moyen de la pousser à glisser sur ce qu’il pense être une peau de banane à savoir les valeurs de N Sarkosy.
Nombre de questions correspondent en fait au fonctionnement du président :
» la liberté de parole était elle totale » « on ne vous demande rien d’autre ? » » mais vous auriez pu être de gauche » » la lutte des classes, voilà un mot peu sarkosyste », » oh comme vous etes bien habillée, bien coiffée » etc, etc…
J’ai eu l’impression que l’interviewer tentait de comprendre comment, avec une vie semblable, elle pouvait être de droite.
Et comment elle pouvait être compétente en venant de ce milieu , en étant femme, et en étant de droite.
Ce livre n’est en rien pour moi, un livre dans lequel elle tente de justifier son incompétence, comme le dit Thais, mais plutôt de prouver qu’elle plus compétente que ce que certains veulent nous faire croire.
La quatrième de couverture donne exactement le ton de ce livre : « »mettre fin aux fantasmes, les purger et pouvoir avancer ». « Trouver les mots justes et échapper aux clichés. » « Dire la vérité avant que d’autres ne mentent » – ça c’est trop tard semble t il – . et aussi s’expliquer.
Quant aux lettres de recommandation, à l’ANPE que je pratique entre deux vacations, elles correspondent au réseau.
réseau étant mieux vécu sans doute que « piston » ou lettre de recommandation….
Et le réseau, ah le réseau…
Les employés de l’anpe ont moins d’états d’âmes que Francis !
J’entends souvent : » Madame, on ne peut rien pour vous » « faites donc marcher votre réseau »….- je suis effectivement atypique et l’anpe pas très performante, ce qui m’est d’ailleurs totalement égal –
-je lisais le blog de P.Bilger, apprécié ici expliquant que robert Badinter n’était pas intouchable, qu’il n’ y avait pas de « saint -badinter », que ses positions d’aujourd’hui étaient critiquables, bien qu’il aie fait, il y a quelques décennies, une loi remarquable qui fera date. Le même principe s’applique, au mot près, à S. Weil, et on peut trouver un certain manque d’élégance, voire un certain opportunisme dans sa manière de traiter durement celui qui fut longtemps, me semble t-il dans sa formation politique,
et de tresser des louanges au président…
dans le moment choisi il y a, il me semble, un « vae victis »…
-pour rachida dati je remarque avec intèrêt qu’elle n’évoque jamis sa vie privée et que les médias respectent cette discrétion,
en dépit des rumeurs du net, ce qui prouve que c’est possible…
ensuite je trouve dommage qu’elle ne nous livre pas un point de vue personnel sur l’islam, qu’elle prenne position sur ce point délicat…
pour son ascension par les relations, les recommandations, les accomodements avec le CV, je maintiens que ce n’est pas quelquechose qui me paraît le mieux traduire le discours sur la promotion par les compétences,…
j’ai un certain malaise aussi quand R. dati passe des vacances avec son patron…je trouve qu’il y a confusion des rôles
enfin j’ai toujours une interrogation quand on dit d’une part R.dati n’est pas là en tant que « maghrebine » mais d’autre part qu’elle « représente la diversité »…
enfin, je trouve que l’attitude de R.dati et de R. yade, toutes les deux à Washington, faisant de la figuration et ne disant pas un mot de Guantanamo ne me paraissent pas plaider en faveur de leur indépendance d’esprit…
Salut Koz, bon billet intéressant de faire ce parallèle littéraire politique et féminin. Je trouve que cette chère Rachida a en effet un style étonnant, détonnant même. Ce qui me frappe c’est la sincérité évidente au delà des techniques de com auxquelles elle a été entraîné.
Il y a une rage de vaincre l’immobilisme, de dire sa vérité sur le parcours d’une femme, d’une immigrée, et de tous ses semblables. Travaillez, n’attendez plus, ne croyez plus les lunes et brisez cette prison. C’est courageux et cela paiera à long terme dans la lignée de son patron et de leur dessin pour la France.
Amitiés
Laurent from Geneva
Je trouve moi aussi le commentaire de S.Veil sur Bayrou agaçant, parce que non fondé et totalement arbitraire.
J’ai cru comprendre que la réalité de sa haine était toute autre : la cause en serait une photo ratée pendant les européennes de 89. Comme quoi…Gardez-vous de fâcher une femme quant à sa parure, elle vous en gardera une rancune tenace…
Pour le reste, le rapprochement est d’autant sensé que Rachida Dati a été un certain temps la protégée de Simone Veil, à ma connaissance.
Quand j’aurai le temps, j’achèterai peut-être ce livre, mais ce que j’en entends ne me pousse pas à le faire.
Ce qu’elle dit sur la France et les juifs est en revanche intéressant. Je ne savais pas que la france venait en seconde derrière le Danmark pour leur protection dans la population durant la seconde guerre mondiale. Bon, toutefois, on reste loin de l’exploit du Danemark , pays dans lequel, seuls 80 juifs ont été déportés, tous les autres parvenant à gagner la Suède via des barques de pêcheurs avec la complicité de la population.
En revanche, j’escompte bien parcourir celui de la charmante Rachida Dati. Je n’approuve pas nombre de ses réformes, mais son parcours est très intéressant, et puis…c’est une très jolie femme 🙂
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