J’ai lu l’Equipe. A vous, ça vous fait rien, peut-être. A moi, ça fait tout drôle. Et puis, j’ai lu Midi Olympique.
Parce qu’apparemment, oui, comme l’a déclaré Marc Liévremont,
« Le rugby français et les joueurs se sont gaussés des footballeurs l’an passé. Mais d’une certaine manière, on n’est pas descendus du bus ».
Et avec les joueurs et le rugby français, il y a tous les amateurs. On ne voyait pas une équipe de rugby sombrer comme ont sombré les milliardaires-grévistes du football français. Parce que le rugby, c’est pas la même chose. Le rugby, « c’est pas pour les gonzesses », on ne s’écoute pas, on ne pleurniche pas sur un tampon. Et puis, le rugby, c’est l’authentique, c’est le sport « viril mais correct », c’est une explication d’hommes. Ce sont des valeurs, des têtes bien faites, des types qui se prennent pas au sérieux. Des gars capables de faire des phrases de plusieurs mots. C’est la célébration des régions, des terroirs, du Sud-ouest, d’une autre France, d’une France dont on aime bien savoir qu’elle existe encore.
Et puis voilà. Voilà qu’on apprend de sa part que les joueurs ne tiennent pas le collectif. Qu’après le match, « ils se sont éparpillés ». Qu’avant et après, ils étaient avec leurs agents « la veille du match et après le match au lieu de se rassembler », parce que on ne se fait pas d’illusions, « on est dans une société où l’image est importante ». On dira que le sélectionneur a beau jeu de tancer ses joueurs – même si c’est un peu son rôle – et que ce n’est pas en faisant tourner systématiquement ses joueurs qu’il a pu créer un collectif. Mais à écouter Thierry Dusautoir, c’est individuellement (aussi) qu’ils ont été mauvais : « quand on manque des plaquages, des un contre un, quand on passe au sol, ce n’est pas une question de manque de repères ». Et ok, gloire soit rendue aux Tonguiens. Mais, tout de même, ce n’est pas contre les Anglais ou les Springboks que l’équipe s’est écroulée.
Le Tonga, une équipe qui a fait du porte-à-porte pour trouver les moyens de se présenter à la Coupe du Monde… En face, des joueurs qui alignent les contrats de pub. Qui font les minets à poil dans les calendriers. Si l’image est importante, faudra leur dire que ce n’est pas cette image que l’on attend des rugbymen.
Alors, la question est de savoir si la tendance est réversible. Pour samedi ? Déjà. Mais à plus long terme ? La professionnalisation a-t-elle tué le rugby français ? La crainte était que le rugby vire au foot : n’est-elle pas en train de se réaliser ? D’ailleurs, la génération actuelle n’est-elle pas la dernière génération née avant la professionnalisation, et qui aura baigné dans l’esprit d’avant ? Et cette évolution, n’est-elle que celle du rugby ? Le rugby touché, n’est-ce pas le signe que toute la société est emportée ?
Après tout, ce n’est pas un maigre signal que les premiers touchés par l’individualisme, l’argent et l’image soient des sports dans lesquels l’esprit du collectif est si primordial. Il serait logique que les premiers dégâts apparaissent là où rien n’existe sans le collectif.
Et, nous, sommes-nous dans le bus aussi ? Incapables d’esprit collectif, d’abnégation ? On met en avant la responsabilité individuelle. C’est un bon début. C’est même un pré-requis. Mais il ne faudrait pas oublier que nous sommes membres d’un collectif (ou de collectifs) et que la responsabilité individuelle ne mène pas loin sans la conscience d’un destin commun.
credit photo : buck82
Samedi, je ne serai pas là pour vérifier s’il y a sursaut. Sur un apparemment tout autre sujet, un théologien rappelait récemment qu' »être chrétien, c’est espérer contre toute espérance ». Disons que ça se justifierait et qu’on va commencer par là. Pour ma part, je serai à Lille, pour un débat dans le cadre des Etats Généraux du Christianisme. D’ailleurs notez bien que c’est gratuit, faut juste s’inscrire.
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Je crois que, malheureusement, il y a beaucoup de vrai dans votre billet, KOZ.
Je ne veux pas taper sur l’entraineur mais Marc LIEVREMONT n’est pas l’entraineur qu’il fallait au XV de France. Il est trop gentil. C’était un bon joueur mais est-il fait pour gérer un groupe ?
Comment est-il possible qu’il n’ait pas dégagé une ossature de base ? On a assisté à un turn-over permanent. Or, en rugby, comme dans les autres sports co, il faut mettre en place des automatismes et on ne peut pas improviser.
La charnière PARRA-TRINH-DUC fonctionnait bien, me semble-t-il, pourquoi mettre PARRA à l’ouverture ? La communication de Marc LIEVREMONT est médiocre. Dire à un journaliste en conf de presse: » Tu m’emmerdes avec ta question », je n’ai jamais vu cela. Et critiquer un joueur devant les journalistes comme il l’a fait pour HARRINERDOQUY (orth non garantie).
Par contre, que le rugby à XV soit touché par la professionnalisation comme le foot me paraît plus discutable. L’importance du collectif est plus grande pour le rugby. C’est peut-être une lueur d’espoir contre l’Angleterre.
j’ai aimé les TONGA. Certains joueurs sont en France en championnat………………fédéral!!.
Travaillez bien à LILLE. Hélios
Mouais. Les Irlandais, Neo-Zélandais, Anglais, Australiens etc… (ou Espagnols, Italiens, Allemands si on parle de foot) ne sont pas moins professionnels et touchés par l’argent, l’image, l’individualisme que nous.
Faut arrêter de prendre le problème à l’envers. Le besoin de collectif émerge individuellement. Ce n’est pas une entité supérieure (Etat ou Dieu) qui a créé les individus mais bien les individus qui ont créé la collectivité.
N’importe quel footballeur, aussi con et mal élevé soit-il, sait viscéralement qu’il pratique un sport d’équipe et qu’il a besoin du groupe pour prospérer. D’ailleurs les joueurs français performent très bien dans leurs clubs et s’insèrent correctement dans le collectif. Malgré le fric et la pub.
Il y a un problème avec les équipes de France qui a sans doute beaucoup plus à voir avec les critères de sélection des dirigeants qu’avec l’argent, la professionnalisation ou l’image.
Pour ma part, je suis convaincu que nos problèmes (largement au-delà du domaine sportif) viennent au contraire de notre méfiance exacerbée envers l’individu. Ce dernier est sommé de se soumettre au groupe, lequel est généralement représenté par un blob administrativo-corrompu qu’on appelle l’Etat ou la fédération. Sauf que les gens lient des liens avec des gens, pas avec des blobs. Les gens prêtent allégeance à un drapeau, pas à un blob.
Il est piquant de constater que la meilleure équipe de rugby du monde est celle du pays probablement le plus libéral de la planète. De même que nos athlètes jouent collectif dans leurs clubs privés (et gavés de thunes, cotés en bourse etc…) mais pas dans l’équipe nationale.
Le principal ennemi du collectif est l’aliénation de l’individu.
Beaucoup de vrai dans ce billet, mais en le lisant, je me faisais la même reflexion que « Lib ». Effectivement, ce problème n’arrive qu’en France, non ? C’est peut-être plutôt de là que ça vient…
C’est amusant parce que tu ne te prives pas de contradictions dans ton raisonnement. Les joueurs performeraient dans le club mais ils seraient aliénés par le « blob administrativo-corrompu » qu’est la fédération. Va savoir pourquoi une fédération serait administrativo-corrompue et pas un club. Pourquoi une fédération aliénerait l’individu et pas un club. Quels sont donc les avantages dont disposeraient par nature la structure club et dont serait privée la structure fédération ? Et pourquoi nous coller la fédération dans l’histoire ?
Prendre le problème à l’envers ? J’indique que la responsabilité individuelle est un pré-requis. Quant au besoin de collectif, il n’est semble-t-il pas créé par une entité pré-existante (quoique, va savoir, en ce qui concerne Dieu), mais va donc me dire qu’il n’est pas inscrit dans la nature de l’Homme. C’est marrant cette façon qu’ont eu les Hommes, tous les Hommes, de se regrouper et de s’organiser. L’individu n’existe pas seul. Sinon dans les fantasmes de quelques libéraux.
D’autres pays sont également touchés par l’individualisme et le professionnalisme. Oui, ça ne m’a pas échappé. Je ne dis pas qu’il n’y ait qu’une variable dans ce problème comme, d’ailleurs, à tout problème. Possible aussi qu’ils développent mieux que nous ce sens d’un destin commun, qui dirige ces individualités réunies vers un but partagé. Possible, donc, que nous soyons plus sensibles, plus fragiles, à cet égard. Possible, donc, qu’il soit spécialement nécessaire, en France, de développer le sens du collectif.
Quelqu’un peut-il m’expliquer ce que signifie « Blob » svp? et me pardonner mon ignorance…
@ jfsadys:
Google est votre ami.
@ Gwynfrid:
Merci du lien indiqué. Me voilà avec trois définitions sur les bras. Car j’avais consulté mon ami Google qui me renvoyait à une expression d’architecte et d’informaticien. Bon je pense avoir saisi le sens du mot. Merci encore.
Ci-dessous ma contribution au débat qui commence à peine à mon avis:
http://www.monde-diplomatique.fr/2007/11/GARRIGOU/15317
Le rugby étant un vrai sport de combat collectif, il ne tolère pas le manque d’engagement. Celui, flagrant, des Français contre les Tonga, pose peut-être effectivement la question des conséquences du professionnalisme sur l’esprit de ce sport (mais alors pourquoi les Français seraient-ils plus touchés que les autres principales nations ?). Mais ce déficit d’engagement peut aussi s’expliquer par la volonté (consciente et/ou inconsciente) de se préserver pour le seul match qui compte. Réponse : samedi contre les Anglais.
Personnellement je ne crois pas trop aux explications invoquant le manque d’amour du drapeau ou de la nation. Ni bien sûr à celles, idéologiques, qui essaieraient de nous expliquer que les performances rugbystiques des pays (comme les performances dans tous les domaines d’ailleurs) seraient directement proportionnelles à leur degré de libéralisme économique…
Remarque sur la langue: on dit LES Tonga, ou LES ÎLES Tonga, comme on dit LES Fidji ou LES Samoa.
Et on dit TONGIENS. Et non pas Tonguiens. Voir cet article écrit par un Polynésien:
http://forums.la1ere.fr/sport/rugby/Coupe-du-monde-2011/tongiens-tonguiens-sujet_2122_1.htm
Sur le fond, intéressant article. Ce qu’il y a aussi, c’est que les Bleus ne peuvent pas nécessairement être toujours bons. Toute nation traverse un creux de temps en temps. Les All Blacks ne gagnent presque jamais la Coupe du Monde. Et en foot le Brésil ne la gagne pas si souvent que ça non plus. Or ces deux équipes sont, dans leur sport respectif, la référence suprême. Alors?
Il y a aussi, à mon avis, quand même un peu de manque d’amour du maillot et du pays, dans le XV de France actuel. Entendez-moi bien, je ne demande pas qu’on ait une bande de Hitler Jugend prêt à mourir pour la Patrie, mais y a-t-il encore de la fierté à porter le maillot bleu?
Juste pour donner un exemple, les Argentins, eux, pleurent comme des bébés quand retentit leur hymne national, et le chantent à pleins poumons. Et après ils se battent comme des pumas!
L’afflux de joueurs étrangers de grande qualité dans le top 14 n’a-t-il pas pour effet de diluer la qualité des joueurs autochtones? C’est bien d’avoir le meilleur championnat du monde, mais si on ne gagne plus rien en équipe nationale, est-ce que ça rime à quelque chose?
J’espère voir un très beau match Angleterre-France, avec un beau vainqueur pour défendre l’honneur de l’hémisphère Nord.
Un Belge amateur de rugby
Bonsoir Koz,
avant de faire des analyses compliquées, ma première hypothèse est que le match est une impasse volontaire. Ce n’est pas forcément idiot, une coupe du monde de rugby se gagne surtout au physique. Cela s’est sans doute mélangé avec le fait que notre équipe n’est pas excellente cette année.
Pour le reste, le rapport entre individualisme, argent, et manque d’engagement reste à démontrer. En football, Barcelone, ou le championnat anglais de football ont des moyens énormes, mais ne souffrent pas que je sache de manque d’engagement.
Il me semble que la piste d’un amateurisme des différentes fédérations de sport collectif français mal supporté par les joueurs habitués à des structures de club de meilleur niveau est aussi à creuser.
Dans ma propre expérience en entreprise, en tout cas, je n’ai pas forcément vu de lien évident entre paye, individualisme et résultat. J’aime par exemple souvent bien travailler avec des « free-lance ». Par contre, j’ai vu de vrais différences criantes entre des systèmes, souvent orientés sur l’argent, qui responsabilisent les individus, et des systèmes bureaucratiques frustrants pour tout le monde.
Assez d’accord avec Jeff (et à la critique du billet par Lib). On a tendance en France (à gauche et à droite) à voir dans les défaites sportives (plus rarement les victoires, pessimisme français oblige) ce qui nous arrange. Or, une partie du charme des compétitions sportives à élimination directe tient justement à ce que le résultat ne soit pas garanti [ça permet de parier sur les sites de pari sportif !], et à ce que très régulièrement une nation connue/le favori rate sa prestation. Pas de quoi en faire en psychodrame.
Sur le foot, il y a quelques indices sérieux pour invoquer un manque d’amour du maillot chez certains, mais ce n’est pas si convainquant que ça pour expliquer la faillite de 23 joueurs.
Pour le rugby, je pense que c’est avant tout sportif (au sens large). Les joueurs sont peut-être moins bons que ceux des EF précédentes, ils se sont plantés, ML n’a pas su créer un groupe, et monter une stratégie de jeu…
Et d’ailleurs sur le papier (sur le tableau plutôt), on peut envisager d’aller en finale. Et sur un match, la France peut battre n’importe qui… Pas très probable, mais dans le sport on a déjà vu plus étonnant.
Bonsoir,
Il est amusant de constater que le rugby français, qui faisait figure de refuge et de contre-exemple universel face au football, prenne dans la tronche une « crise » se rapprochant de l’épisode 2010 sud-africain et traduisant la même « perte de valeurs ».
Je trouve très intéressante la question intéressante que soulève votre billet, Koz. Vous l’avez dit, l’individualisme et le professionnalisme dans le sport de haut niveau ne concernent pas seulement la France. Alors pourquoi rencontrons-nous ces difficultés là où d’autres nations semblent y échapper ?
Je suis mesuré : je pense que ces difficultés guettent probablement toutes les grandes équipes : Arsène Wenger confiait lors de la dernière coupe du monde de foot que la quasi-totalité des équipes nationales étaient « au bord de l’implosion ». Raison pour laquelle la capacité de gestion d’un groupe par l’entraîneur a pris une importance démesurée dans ce genre de compétition. Et si c’est encore l’équipe qui présentait la meilleure valeur « intrinsèque » (l’Espagne) qui l’a emporté en 2010, combien d’équipes regorgeant d’individualités talentueuses sont allées au tapis prématurément ?
Difficultés qui seront encore accrues par la question, pas franchement nouvelle, du pouvoir toujours grandissant des clubs (employeurs légaux des joueurs) face aux fédérations nationales. Dans le rugby le rapport de force est encore en faveur de ces dernières, mais pour combien de temps ?
Enfin, même s’il demeure toujours un malaise face au supposé peu d’attachement des joueurs de foot et de rugby au maillot bleu, je trouve cette explication décidément trop simpliste. En 2006, les footballeurs ne chantaient pas la Marseillaise non plus. Mais bon, y avait Zizou.
Hors-sujet :
Koz, pourquoi passer par la sempiternelle comparaison avec le football dans ce billet sur nos rugbymen ? Est-bien nécessaire ?
Koz a écrit ::
Même si ça sent fortement l’ironie, hum hum. Et puis le bon vieux coup des « valeurs », hé ho merci hein. Chez les amateurs, on retrouve les mêmes épiphénomènes (rixes, incidents racistes) que dans n’importe quel autre sport co ; chez les pros, c’est l’inflation des salaires, les éphèbes langoureux du calendrier, Bastareaud and co.
Pourquoi vouloir cantonner un sport à ces détails marginaux ? Comme vous le dites : avec les pros, il y a tous les amateurs. C’est eux qui comptent, au final.
Koz a écrit ::
Je ne vous suis pas tout à fait sur les termes « tuer » et « crainte » ; surtout je ne vois même pas comment l’on peut encore se poser la question. Mais naturellement, la professionnalisation a placé le rugby sur le même plan que le football, c’est déjà fait ! Il n’y a qu’à regarder : starification à outrances de certains joueurs, recrutement « glamour » de Toulon, préparation physiques formatées, disparition du floklore, entrée en scène d’investisseurs moins passionnés qu’intéressés, etc.
De toutes façons, nous, en Bretagne, on s’en tape du rugby, sport du sud de la Loire, donc de grandes gueules aux valeurs suspectes (les anglais, pareils, ils perdent en gueule ce qu’ils gagnent en roublardise) !
Nous, on jouait à la sioule, 3 jours de suite, à coup de faux, de bêches et entre les paroisses : çà avait une autre allure que ces tarlouzes épilés dans des calendars à camionneurs invertis. No rule, no mercy, et pas de droits télé, çà assainnit…
Mais bon, maintenant, se lever à des heures impossible pour écouter les propos faiblards d’un surpayé, autant un bon DVD de Van Damme !
Je crois qu’il ne faut pas cherche midi à quatorze heures. D’autres nations sont passé au professionalisme et n’ont pas ce soucis de cohésion d’équipe. De plus, comme déjà dit plus haut, nos propres joueurs n’ont pas ce problème en club. Le professionalisme a peut être changé la source motivation de tel ou tel joueur pour jouer en équipe de France, mais avant comme aujourd’hui les sportifs de haut niveau sont des compétiteurs dans l’âme et aucun ne galvauderait consciemment une coupe du monde.
Le problème est chez nous et plus particulièrement, comme pour l’équipe de France de foot en 2010, au niveau du sélectionneur qui n’a ni projet de jeu ni équipe type.
Domenech et Lièvremont, au contraire d’un Jacquet, auront fait la même erreur: croire que les joueurs sont interchangeables, que leurs performances en club sont indépendantes de la cohésion de leurs équipes respectives, que leur culture et expérience sportive peuvent compenser le manque d’automatismes, de partage de l’effort sur le long terme, et qu’il suffit de les aligner sur le terrain pour qu’ils sachent comment jouer ensemble.
La comparaison de leurs résultats avec celles des équipes nationales espagnoles de foot et de basket, ou française en handball, construite dans la continuité et sur un projet de jeu spécifique, est cruelle.
Pardonnez mon interruption de béotienne du rugby dans une discussion sur un sport « viril et correct », moi qui ai tendance à n’être ni l’un ni l’autre. Mais vos réflexions sur le collectif me semblent manquer d’une pièce trop importante pour que j’y adhère. Unis oui (ou non), mais pour quoi ? Si c’est juste pour un trophée ou une apparition à la télé, il est assez logique que l’individualisme réapparaisse. Organisez un tournoi pour une cause un peu plus noble et les comportements ne seront plus les mêmes. Bref, l' »entité pré-existante » que tu réintroduis timidement, Koz, j’en ferais bien, moi, la pièce maîtresse. Et je dirais bien avec Don DeLillo (End Zone) : « Oneness was stressed – the oneness necessary for a winning team. It was a good concept, but I suggested that, to me at least, it could not be truly attractive unless it meant oneness with God or the universe or some equally redoubtable superphenomenon. What he meant by oneness was in fact elevenness or twenty-twoness. » Ceci pour vous permettre de me répondre comme à mon héros : « He told me that my attitude was all wrong. People don’t go to football games to see pass patterns run by theologians ».
Au fait, il est amusant que personne n’ait remarqué l’ironie de Koz écrivant un article sur des valeurs collectives qui se perdent, et les dégats de l’individualisme et de l’argent alors qu’il vient de se mettre à son compte.
Ma petite responsabilité individuelle mise au service du collectif va consister ces jours-ci à apporter ma voix aux Primaires .
@Joyeux acier « Au fait, il est amusant que personne n’ait remarqué l’ironie de Koz écrivant un article sur des valeurs collectives qui se perdent, et les dégats de l’individualisme et de l’argent alors qu’il vient de se mettre à son compte. » Oui, nous avons tous nos contradictions …( moi la première , parfois ça tourne au conflit intérieur …)
Je viens d’entendre sur F Culture , 7h55 la chronique de Ph Meyer sur les Bleus, foot et rugby. Savoureux.
@ Pécuchet du Boulevard: je suis bien d’accord avec vous. Le sens du collectif ne peut pas exister sans une raison de former un collectif. Apparemment, le fait de représenter la France, ou le rugby français, n’est pas une raison valable. Pour les joueurs ou pour les commentateurs.
Jeff a écrit ::
Il n’est pas nécessaire d’aller chercher une question d' »amour ». La fierté, l’envie d’être à la hauteur quand on représente son pays, c’est déjà ça. Quand je me déplace à l’étranger, je n’ai pas très envie de nourrir d’éventuels a priori sur « les Français ». Quand je représente ma famille, j’ai envie d’être à la hauteur, envie qu’elle soit fière de moi quand je reviens. Pourquoi cela devrait changer lorsque l’on représente son pays ?
@ Joyeux Acier : j’imagine que personne ne l’a relevé parce que c’est aberrant. Mais si ça peut vous faire plaisir… Vous n’auriez pas une légère propension au troll, vous ?
Koz a écrit ::
Bonjour,
Si on regarde les choses un peu basiquement, on fait trop d’honneur à ces joueurs (ainsi qu’à leurs collègues foot-ballers) en considérant qu’ils représentent le pays : après tout, ce ne sont jamais que des représentants de fédérations sportives qui s’affrontent lors de ces compétitions.
N’est ce pas tout ce qui va autour (le cérémonial autour de l’hymne, le plaisir un peu étrange du téléspectateur d’assimiler une simple compétition sportive à une guerre sans conséquence, l’emphase intéressée des médias autour de ces matchs) qui nous conduit à vouloir du sens à un événement au fond un peu insignifiant ?
Pierre Ménès, dans Direct Matin, qui a oublié d’être con même s’il est journaliste spécialisé dans le foot, écrivait AVANT le match contre les Tonga, qu’à son avis Marc Lièvremont nous préparait une « Domenech » : un beau fiasco sportif, sur fond de groupe qui jouait et vivait mal, de communication mal maitrisée et de choix tactiques douteux. Il ajoutait qu’il aurait du mal à verser une larme après les remarques condescendantes des rugbeux vis à vis des joueurs de football après le fiasco en Afrique du Sud. Il faut dire que les leçons de morale par le monde du rugby à l’occasion n’ont fait ni dans la finesse ni dans l’humilité. La finesse, on s’y attendait un peu. L’humilité, c’était plus censé faire partie des valeurs maisons.
Parce il y a deux manière d’interpréter la Nouvelle-Zélande 2011, à la lumière de ce qui s’est passé en Afrique du Sud en 2010. On peut dire que le mal doit être encore plus profond pour que même « ce sport de brutes supporté par des gentlemen » soit touché, pour parodier la citation classique. Ou en profiter pour constater que l’on a dit beaucoup de conneries (Disclaimer anti-baffe: je ne parle pas forcément de toi, Koz) sur le foot, et que ça vaudrait la peine d’y regarder avant de faire dans le recyclage facile.
Au moins pour le foot, il y avait un scénar qui tenait la route. Une bande de petits cons bafouant toutes les valeurs de la Nation en allant jusqu’à faire grève, rendez vous compte. Une dernière défaite bien humiliante dans le rôle de la colère divine, qui au moins existe encore dans le domaine du sport, c’est toujours ça de pris. Et puis la reprise en mains par le Sauveur issu du passé glorieux, et la repentance avec même des auto-critiques de joueurs, d’une sincérité soviétique. Je me moque pas, allez pas croire, on nous en sert des pires au cinoche.
Ce qui est plus emmerdant pour le rugby, c’est que le dossier à charge pour « faillite morale » est un peu plus léger. Et il a essentiellement été rassemblé après la défaite, ce qui permet toutes les reconstructions et entre autre d’évacuer les cas pédagogiquement génants, comme ces histoires de groupes de connards qui gagnent ensemble sans pouvoir se sentir, ou de bon gars qui ne réussissent pas à jouer ensemble. C’est comme si on n’avait pas vraiment besoin d’expliciter la faute morale, puisqu’on a inventé l’ordalie rugbystique : gagnez, et on trouvera le moyen de faire un « Invictus » de votre histoire. Mais si vous perdez…
Enfin pour conclure, il convient de se demander ce qu’il y a de spécifiquement français dans cette histoire, et qui mérite un nouveau grand moment d’introspection nationale. A mon avis, c’est le syndrome de juin 40. Parfois la France perd, à la guerre, en sport ou en n’importe quoi d’autre, et quelquefois pour de bonnes raisons. Rien de particulièrement spécifique. Par contre, ce qui me parait bien franchouillard, c’est de ne pas même attendre que le cadavre des vaincus soit froid pour commencer à y voir la trace d’une faillite morale, et entamer la chasse aux traitres aux valeurs de la Nation. Et de la France enjuivée par ci, et de la contamination par « l’esprit banlieue » par là , et du triomphe toujours plus triomphant de l’argent-roi un peu partout…
La France, championne du Monde de la chasse aux sorcières ?
Sans employer les mêmes termes que Vivien, je trouve qu’il y a dans ce dénigrement rapide de nos sportifs dès qu’ils ne gagnent pas, une dérive dommageable, qui témoigne, à son échelle, d’un désenchantement général : les sportifs ne mouillent pas le maillot, … les hommes politiques sont tous corrompus, … les riches peuvent tout se permettre, … on ne nous dit pas tout, et autres lieux communs.
C’est dans les moments difficiles qu’il faut les soutenir, pas quand ils gagnent la coupe du monde, ils n’en ont pas besoin.
Comment expliquer cette attitude que je trouve si répandue chez nos compatriotes, à la différence d’autres pays ? dérive du cartésianisme ? relativisme ? perte de repères ?
Je n’ai pas vu le match samedi dernier (le site tf1.fr/live était bloqué sur tifou, j’ai pesté), mais si nous obtenons la qualification avec une défaite contre les Tongiens, c’est que nous avons marqué plus d’essais qu’eux contre le Canada et dans le 1er match.
J’espère que Marc Lièvremont saura trouver les mots positifs (je ne l’ai pas souvent entendu dire qu’il était content d’une prestation de son équipe, c’est quand même un problème…) pour battre les Anglais. Allez les petits !!
@ Sébastien : on n’est pas dans la même perspective. Je ne considère pas que ce soit l’image de la France qui est en jeu en Nouvelle-Zélande, sinon je serais un peu plus stressé que ça. Il n’y a donc pas, de ma part, de projection de la France vers l’équipe de rugby. En revanche, que les joueurs, eux, se disent qu’ils représentent le pays, oui.
@ Vivien,
@ PIC : je veux bien, de façon générale, mais vous oubliez qu’on s’est fait later par une équipe dont on ne devrait faire logiquement qu’une bouchée. Considérer que l’équipe a failli, quand on voit le jeu qu’ils ont fait, et la déroute face… aux îles Tonga, ça ne me paraît pas un diagnostic précipité. Je suid ‘autant plus d’accord que je l’ai, globalement, écrit pendant la coupe du monde 2007. Ce n’est donc pas mon état d’esprit.
Mais à l’époque, on s’était fait choper par l’équipe d’Argentine, pas par celle des îles Tonga.
Et tant mieux s’ils se relèvent samedi prochain.
Par ailleurs, je ne cherche pas à donner une analyse complète et terriblement rugbystique du match et de l’équipe et, comme je l’ai écrit, il est bien possible que Marc Lièvremont ait sa responsabilité dans l’absence de collectif. Il reste que certains éléments ont suscité ma réflexion.
@ Koz:
Mon firewall bloque l’accès au classement de l’International Rubgy Board, mais si je ne me trompe pas, la France est aux environs de la 6-8ème place du classement de l’IRB, et Tonga aux environs de la 10ème place. C’est certes un petit pays (100.000 habitants), mais habitué aux phases finales de la Coupe du Monde.
Par ailleurs, certains grands joueurs ayant porté le maillot néo-zélandais sont d’origine tongienne : Jonah Lomu notamment. J’insiste, ce n’est pas un tout petit pays du Rugby.
PIC a écrit ::
Bien fait.
Mais, si je lis bien, avant le match, on était 5ème et eux, 13ème. Après l’Italie. Le Samoa. Le Canada. Mais bon, je te l’accorde, juste avant la Géorgie. Et puis bon, quand tu descends un tout petit peu, tu découvres que certains pays jouent au rugby.
Mais la question est plutôt celle de la disproportion des moyens engagés. Nous, nous déployons la grosse artillerie. Eux, ils ont de bons résultats, tout en s’inquiétant de savoir s’ils auront les moyens d’être présents à la prochaine coupe du monde.
Il faut bien reconnaître que ce match contre les Tonga était déprimant. À ces Bleus-là, j’ai largement préféré l’équipe canadienne lorsqu’elle a pris une raclée mémorable face aux Blacks: ils ne faisaient clairement pas le poids, mais ils y allaient quand même vaillamment, et ils ont quand même passé deux essais.
Cela dit, je rejoins les commentateurs qui trouvent qu’il ne faut quand même pas exagérer, et particulièrement Vivien: s’il y a un truc spécifiquement français ici, c’est bien ce réflexe consistant à chercher un ou des fautifs à pendre sur-le-champ, et à trouver la cause de la défaite dans les tréfonds de l’âme nationale.
On peut tout aussi bien être en face de causes plus banales: notre équipe n’est pas si bonne que ça. Les petites équipes sont moins nulles qu’on ne le croyait (la plupart de ces tongiens jouent en Europe ou en Nouvelle-Zélande). Notre entraîneur s’est planté – ça peut arriver même à des gens honnêtes et compétents. La mentalité du sport moderne, « l’échec n’est pas envisageable », est une faribole: par définition, toutes les équipes sauf une connaîtront l’échec, comme dans chaque compétition.
Les explications idéologiques sur le collectivisme opposé à l’individualisme ne tiennent guère la route: le « blob » plaisamment dénoncé par Lib était déjà en place lorsque le rugby français remportait de si belles victoires. Le seul élément du décor qui est nouveau est, effectivement, le professionnalisme. Il est bien possible que la FFR s’y soit moins bien adaptée que d’autres. On a pu lire en effet des remarques sur les tensions entre clubs et équipe de France, phénomène classique que la professionnalisation n’a pu qu’exacerber. Mais bon, même les Blacks ont ce genre de problème: il paraît que leur participation à la prochaine épreuve en 2015 est incertaine, à cause d’une histoire de pognon !
Une remarque, tout de même, sur le mode de management: le seul point commun entre Domenech et Lièvremont est qu’ils ont tous les deux vu leur remplacement annoncé, et même leur remplaçant nommé officiellement, juste avant le début de la compétition. Voilà qui n’était pas propre à conforter leur crédibilité en tant que patrons de leurs équipes respectives.
Gwynfrid a écrit ::
Ca, je t’accorde qu’en termes de management, c’est une idée plutôt fantasque.
En passant : Rugby : le syndrome de Knysna.
Koz a écrit ::
Cela m’amuse un peu que nous exigions de nos sportifs et de nos politiques qu’ils se battent pour la gloire, qu’ils prennent des coups, et qu’ils mettent leur égo(isme) en veilleuse pour le bien du collectif, alors que dans la vie de tous les jours, beaucoup d’entre nous (moi le premier) sont des individualistes pas très courageux et motivés par l’argent.
Se mettre à son compte est toujours une décision motivée par un besoin d’une plus grande autonomie (et donc d’individualisme), et à ma connaissance, dans une grande majorité des cas, par l’argent. Il me semble donc que tes choix de vie ne sont pas toujours consistents avec tes opinions.
Honnêtement, si j’étais à la place de nos rugbymen, footballeurs ou hommes politiques, je ne pense pas que je fasse beaucoup mieux qu’eux. Et si jamais une guerre éclate, je ne pense pas résister, si j’en ai la possibilité, à un exil tranquille au bout du monde le temps que les hostilités s’achèvent. Et je suis a peu près convaincu que la plupart, même s’ils se donnent des airs, feraient la même chose.
Joyeux Acier a écrit ::
Possible; si vous dites vous-même être le premier de ceux-là, qui suis-je pour vous dénier ce rang ? De là à écrire que quelqu’un qui se met à son compte contredit ses propres valeurs, il y a une distance. Disons, la distance qui sépare la bonne foi de la mise en cause personnelle.
Ce qui me rend mon interrogation, plus haut, ainsi que toute réponse superflues. Mais ce qui nous démontre que vous n’avez aucune difficulté à être, catégoriquement, à côté de la plaque.
Gwynfrid a écrit ::
La manoeuvre ressemble à un désavoeur officiel au pire des moments, c’est certain. Mais dans les deux cas il ne restait déjà plus grand chose de leur crédibilté, ni auprès des joueurs, ni auprès des médias, ni auprès du public, ni auprès de la fédération.
Le facteur n°1 des mauvaises performances de ces deux équipes nationales, c’est que Lièvremont comme Domenech sont de mauvais managers eux-mêmes. Les joueurs peuvent être les meilleurs du monde, les plus motivés du monde, les plus patriotes du monde, si personne – entraîneur ou leader sur le terrain tel Zidane en 2006 – ne décide comment jouer ensemble ils n’arriveront à rien dans les grandes compétitions et ne gagnerons que sur défaut de l’adversaire.
Le reste, la faute au professionalisme, l’appât du gain, la people-isation, etc… ce n’est que superficiel. Les sportifs de haut niveau savent gérer cela ; ils le font quotidiennement en club.
On peut faire une analogie avec le théâtre. Combien de pièces désespérantes ai-je vu regroupant des acteurs formidables dans une mise en scène inexistante? Des dizaines peut-être… Mettez tous les oscarisés, césarisés et autres moliérisés les plus professionnels que vous voulez sur scène, s’il n’y a pas une convention de jeu commune et un chemin commun à parcourir ensemble des trois coups jusqu’au salut final, alors le résultat sera naturellement médiocre.
Aurélien a écrit ::
Ça ne me semble pas si évident. On disait exactement la même chose d’Aimé Jacquet en juin 1998, et pof, un mois plus tard c’était le meilleur entraîneur de tous les temps. Il est clair que Lièvremont comme Domenech n’a pas su gérer les médias, mais Jacquet non plus. Pour le reste, il est difficile de savoir ce qu’il en est vraiment de Lièvremont, car tout passe par le filtre de journaux défavorables a priori. Je parie que les critiques s’évaporeront en cas de victoire contre les Anglais… alors qu’en cas de défaite, bien entendu, tout le monde viendra achever le bonhomme à terre.
Heureusement que tout ça n’est jamais que du sport.
Hé ho, vous êtes sympa mais vous n’allez pas me la jouer à l’envers. C’est bien Koz qui a axé son billet sur une grille de lecture idéologique de la défaite contre les Tonga. Celle-ci étant due à l’individualisme, l’argent, la pub, l’image, le professionnalisme, par opposition aux Tongiens qui ont fait la manche pour pouvoir venir à Auckland…
C’est sûr que si l’équipe colle une raclée aux Anglais demain matin, on aura l’air bien cons; mais on s’en remettra 🙂
Maintenant, que le rugby français soit en faillite ou pas, la grille de lecture de Koz me paraît complètement à coté de la plaque.
D’abord parce que les équipes qui gagnent sont tout autant sinon plus que nous touchées par l’individualisme, l’argent, la pub, l’image, le professionnalisme… Ces facteurs ne sont donc pas explicatifs.
Mais plus profondément, le billet indique un a priori très fort dans la position des individus par rapport au groupe. On a deux informations, (i) le groupe est dysfonctionnel (on perd) et (ii) les individus se défient du groupe (ils sont avec leurs agents et non ensemble). Lequel est la cause de l’autre?
Pour Koz, aucune hésitation, le groupe échoue parce que les joueurs ne sont pas collectifs. Et pour se rassurer il appelle en renfort l’individualisme, l’argent, la pub, l’image, le professionnalisme etc… Tous ces éléments étant supposés éroder l’esprit collectif.
Pour moi, il est plus probable que les joueurs se détournent du groupe pour s’en protéger. Les humains sont des créatures grégaires, on ressent tous le besoin d’appartenir à un groupe et on sait tous que l’union fait la force. Un professionnel d’un sport collectif, plus que quiconque, sait à quel point son sort personnel dépend de l’équipe.
Seulement voilà, des dynamiques de groupe perverses ça existe. On en a tous connues. Des groupes qui, au lieu de prendre le meilleur de chacun et le lui rendre au centuple ne font qu’exacerber tensions et crispations. Souvent ça vient du chef qui manque d’autorité, de rectitude ou de compétence. Souvent aussi ce sont une poignée d’individus qui insinuent le poison. Mais c’est encore la faute du chef s’il n’a pas corrigé le tir assez vite.
Pour un sportif professionnel, ce doit être une véritable détresse. Une coupe du monde est un événement unique doté d’un potentiel (positif ou négatif) hors du commun. Y être propulsé au sein d’un groupe dysfonctionnel doit être un calvaire. Je ne suis pas surpris que certains joueurs ressentent le besoin de passer du temps avec quelqu’un en qui ils ont confiance.
Ensuite, j’ai généralisé avec cette histoire de blob parce que j’ai le sentiment que depuis quelques temps nos instances sportives dirigeantes sont atteintes du syndrome. Des nominations politiques, des luttes d’influence, des haines et des trahisons, de l’incompétence crasse…
Domenech nommé parce que la DTN voulait imposer son candidat. Blanc qui a failli se faire virer parce qu’un délateur a transmis un enregistrement illégal à un journal extrémiste. Lièvremont qui fait ce qu’il peut mais ne semble pas taillé pour le job (à moins qu’on ne lui ait pas donné tous les leviers). Les sordides histoires autour de Manaudou ou Perec…
Toutes les organisations sont susceptibles un jour de se planter sur le choix d’un dirigeant. Mais il n’y a que dans le blob qu’on n’essaie même pas de trouver un mec compétent. Pour rappel, François Baroin a été nommé ministre des finances au beau milieu de la pire crise de finances publiques qu’ait connu l’occident.
Lièvremont était aussi un stagiaire ?
Je ne crois pas que le groupe vive mal ou soit dysfonctionnel, ni que Marc Liévremont soit un mauvais entraîneur. Peut-être, en rupture avec l’ère Laporte (conquête-défense), a-t-il eu un projet de jeu trop ambitieux avec les joueurs qu’il a… Peut-être aussi a-t-il cherché trop longtemps à certains postes, sans laisser s’installer une équipe-type… Mais pour l’instant, ce qui manque surtout à cette équipe, c’est de l’engagement et du caractère. D’où cela vient-il ? Peut-être de l’absence de véritables leaders dans le groupe ou du manque de vécu commun. Mais je ne crois pas, je le répète, au manque d’amour du maillot et de la nation. Même à l’ère du professionnalisme, porter le maillot de l’équipe de France reste quelque chose de très spécial et de très fort pour tous les rugbymen. Vous n’aurez qu’à regarder les masques sur les visages, demain, pendant les hymnes. Contre les Anglais, je ne sais pas si l’on va gagner, mais je serais vraiment étonné que les joueurs ne mettent pas, cette fois-ci, tout l’engagement requis. Cela va être un gros combat et là, on ne s’échappera pas comme contre les Tonga.
Au fait, si la France gagne, vous votez à la primaire PS ?
Blob blob blob ils sont nuls ces Français… ;+)))
Hehe, j’ai rarement été aussi content d’avoir l’air d’un con 🙂
Lib a écrit ::
Ah tiens oui, j’en suis déjà parfaitement remis, c’est à peine croyable.
Et… réflexion faite, Lièvremont est un génie du management: sa sortie sur le thème « on n’est pas descendus du bus » était parfaitement calibrée pour réveiller l’orgueil blessé de ses ouailles. Et voilà nos Bleus ressuscités du jour au lendemain. Trop fort, le gars.
Ouaip, c’était peut-être bien la comparaison qu’il leur fallait !
On va pas s’arrêter là quand même!
Le rugby est un sujet ouvert à toutes les marottes, la preuve: Lib a réussi à l’associer au libéralisme! Je ne le conteste pas d’ailleurs, Nouvelle Zélande et Australie sont des nations libérales, Angleterre et Etats-unis (je parle ici du football américain qui est comparable de mon point de vue) ont connu des époques libérales et que dire du sud-ouest français, particulièrement des Landes qui ont vu naître Frédéric Bastiat. Donc, en réalité, mais sans l’expliquer pour autant, je plussoie Lib dans son observation.
Cependant, mon violon d’ingres, c’est Girard.(René, pour les intimes) Et le sport, qui, dit-on, serait la méthadone de la violence se lit très facilement à la lumière de sa théorie. Prenons les jeux de balle:
Ils ont, dans leur expression sociale, un caractère religieux très marqué (règles, exégètes, prêtres, morale, temples et, bien entendu, fidèles) mais de type religion archaïque avec exclusion victimaire où la victime émissaire n’est autre que la balle.
La balle représente assez bien la tête de celui qu’on a sacrifié et qui emporte avec lui les germes de notre violence, chaque joueur la touche pour que les germes mauvais qu’il portait s’en aille avec la victime.
Cette façon de toucher est remarquable par la manifestation du dégoût qu’elle impose, le dribble du basket, le frappé du volley, l’utilisation d’une raquette ou le très inconfortable usage du pied, toutes choses qui, sous prétexte de corser la difficulté, masquent mal l’intérêt paradoxal qu’il y a à approcher la victime tout en évitant au maximum la contamination par contact.
Ensuite, c’est l’exclusion, la libération par la violence, le mal est envoyé chez l’adversaire et par ce mouvement refait le lien dans la communauté des vainqueurs.
De ce point de vue, le rugby est différent: Il semble, en effet, honorer la balle, on se bat pour elle, on la couve, on la protège en la passant uniquement vers l’arrière (c’est là, d’ailleurs la grande différence avec le football américain qui n’hésite pas à prendre des risques insensés avec la balle mais il s’agit, à mon avis, plus d’un révélateur d’une mentalité très (trop?)entreprenante que d’une différence dans la symbolique de cette balle)… On peut aussi objecter que, parfois, on la frappe cependant il s’agit, à mon sens, d’une élévation, une mise en lumière de ce pourquoi on se bat (son côté précieux persiste d’ailleurs dans le jeu au pied car la récéption parfaite se fait dans le « berceau des bras », expression consacrée par tout entraîneur qui se respecte).Le ballon n’est pas victime mais enjeu… Son côté capricieux souligne bien le caractère aléatoire de ce après quoi nous courrons et dont la possession (associée à un maniement dextre) est censée nous assurer une place dominante dans la société. Finalement, c’est une sorte de remake sur pelouse de ce qu’on fait la semaine dans la vraie vie.
Ceci étant dit, au final, au foot comme au rugby, l’essentiel reste de l’emporter sur l’ennemi pour ressouder la communauté des vainqueurs sur le dos des vaincus. Or, ce que nous dit Girard,c’est que cela ne marche plus. Tous les stratagèmes sacrificiels sont voués à la disparition à plus ou moins long terme. Et parce que la France est fille aînée de l’Eglise, les ersatz de religion sacrificielle y périclitent plus vite qu’ailleurs. Ce qui est amusant, d’ailleurs, c’est de constater que les explications qu’on donne à ce phénomène, corruption des lévites, hypocrisie des prêtres et tutti quanti sont identiques dans d’autres pays mais ne provoquent pas cette perte de foi dans le dieu. En France, le dieu foot est mort, il ne refera plus le lien entre nous, le dieu Rugby qui n’est qu’un demi-dieu (par le côté humain que j’ai essayé de montrer) lui survivra peut-être un peu plus longtemps, mais, au final, même si nous battions les gallois puis les black(on peut toujours rêver), la victoire ne nous ferait pas croire que le mal a été expulsé et que la France est de nouveau délivrée…
Bon, après, je serais bien content quand même et je suis déjà satisfait qu’on ait haché le rosbif.
Voilà, je retourne à mon comptoir…
Trop cool. On est incapable de faire deux bons matches d’affilée; le scenario idéal était de gagner la demi en faisant un match de merde.
Mission accomplie 🙂
Point de vue:
http://francois-d-alancon.blogs.la-croix.com/coupe-du-monde-de-rugby-trop-bizarres-ces-francais/2011/10/15/
Zoom sur: http://fr.wikipedia.org/wiki/Thierry_Dusautoir
Soit dit en passant
Bon. Il y a une probabilité non nulle que j’ai écrit des conneries dans ce billet. Avec une dernière possibilité tout de même que cette tôle leur ait remis la tête sur les épaules.
Soit dit la finale passée j’aurais jamais cru que l’équipe de France arriverait en finale au début de la coupe du monde. J’ai aimé le match contre les Anglais et celui d’aujourd’hui même si c’est une défaite. Que pensent celles et ceux qui s’y connaissent en rugby de l’arbitrage?
Koz a écrit ::
Il est envisageable aussi que les deux hypothèses soient vraies. En relisant ton billet avec le recul des matches suivants, j’y vois deux influences: celle de la mauvaise humeur – il y avait de quoi après l’affreux match contre les Tonga – et celle de la presse sportive française, qui n’est jamais tendre avec nos équipes, et, surtout, qui cherche toujours à faire monter la mayonnaise. Soit on parle de gloire et de triomphe, soit on annonce le désastre et la honte: bon ou mauvais, il faut toujours que ce soit épique.