Avez-vous vu la main invisible ?

Je n’y comprends pas grand-chose. Il faut dire aussi que je commence déjà à ressentir un doute fondamental dès l’évocation de la monnaie scripturale. Les pièces, ça va. Les billets, c’est ok. Mais les jeux d’écritures de compte à compte, ça commence déjà à éveiller ma suspicion. Lorsque l’on évoque la « titrisation », lorsque j’apprends que l’on peut se refiler de la dette, voire spéculer dessus, mon cerveau fait l’âne devant l’obstacle.

La monnaie scripturale, toutefois, me facilite la vie, et admettre qu’il me serait bien plus difficile de régler ma dernière commande si je devais apporter au vendeur la somme exigée en liquide. Sans compter le fait qu’il me faudrait nécessairement contourner les bois dans lesquels se cacheraient encore les brigands de grands chemins. J’ai donc admis l’idée que ma faculté d’entendement n’était pas un critère suffisant en matière économique, et encore moins financière.

Mais des comme moi, tout de même, il y en a quelques-uns. En réaction à un système dont le fonctionnement nous échappe, certains choisissent la contestation, éventuellement radicale, d’autres le silence. Parce qu’ils voudraient bien faire valoir leur « solide bon sens » mais savent qu’ils susciteront les sarcasmes des personnes plus avisées. Chacun est / sera pourtant impacté : par le renchérissement du crédit, pour les particuliers, qui veulent devenir propriétaires de leur logement, déjà, mais là n’est pas le plus grave. Ce sont aussi les PME qui risquent d’être touchées par une difficulté à trouver des liquidités. Or, les PME, c’est l’innovation, et l’emploi…

Et la capacité d’acceptation diminue fortement lorsque le marché, au lieu de fonctionner sans que l’on comprenne comment, se pète la gueule sans qu’on comprenne pourquoi.

C’est surtout le cas lorsque l’on constate que nombre d’opérateurs ne comprennent pas nécessairement non plus comment tout cela fonctionne. C’est ainsi que l’on peut lire que le risque « subprime » « a été ensuite diffusé dans des produits financiers sophistiqués et proposé, par exemple, à des fonds de pension ou de retraites, qui bien souvent, n’étaient pas en mesure d’évaluer les dangers« . Verel propose, pour sa part, une explication détaillée et somme toute compréhensible pour un bourricot. On y retrouve un terme que l’on avait un peu oublié, les junk bonds, témoin de la faible originalité de cette crise. Et Verel de prédire une « prochaine fois » à laquelle, fatalistes, nous sommes bien tous portés à croire.

Nathalie Lacube relaie, pour La Croix, le propos du Commissaire européen aux affaires économiques, Joaquin Almunia :

« J’étais il y a plusieurs mois à une réunion avec certains de ces banquiers d’affaires dont parlent maintenant les journaux (...) Nous avons demandé à l’un d’entre eux comment nous en étions arrivés là. Il l’a résumé en un mot : l’avidité« 

On se souvient que les premiers théoriciens du marché tablaient sur les rapports entre les égoïsmes pour réguler la vie économique, sur le « souci de [de chacun de] leur intérêt propre »[1]. Il ne paraît pas évident, à première vue, que la recherche de leur intérêt propre, par certaines banques, certains traders nous garantissent « notre dîner« .

Autre interrogation : j’entendais, dans un JT, un homme d’affaires américain affirmer que la chute de Lehman Brothers était une illustration du capitalisme, « seuls les plus solides survivent« . Faudrait-il donc voir dans ces crises à répétition d’utiles et bienvenues corrections du marché ? Une illustration de son fonctionnement optimal ? Et oublier que les banques et les traders sont de justes victimes de ces « réajustements » mais qu’elles ne sont pas les seuls, et que des particuliers bien étrangers à ces prises de risques inconsidérées en seront aussi les victimes ?

Dernière interrogation : outre le fait que le plan de sauvetage américain est une fois encore, après celui de Bear Stearns, en contradiction totale avec l’orthodoxie économique revendiquée aux Etats-Unis, qu’il coûtera 700 milliards de dollars aux contribuables américains – qui épongeront ainsi les fautes des autres – avant que les contribuables d’autres pays soient mis à contribution, il opère un transfert au Trésor des créances douteuses qu’ont contracté les institutions financières en raison de leur meilleur rendement, et ressemble dès lors fort à l’exonération de responsabilité que l’on se félicitait d’avoir évité en laissant Lehman Brothers tomber…

De quoi alimenter une certaine perplexité sur les talents cachés de la main invisible.

  1. « ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur, du boulanger que nous attendons notre dîner, mais du souci de leur intérêt propre », Adam Smith, Enquête sur la nature et les causes de la richesse des Nations []

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113 commentaires

  • « De quoi alimenter une certaine perplexité sur les talents cachés de la main invisible. »

    (rires)
    Ce qui se passe est tout simplement la démonstration éblouissante qu’elle n’existe pas.

  • Domi, effectivement, et je me doute qu’une telle crise n’a pas un seul facteur d’explication. Mais je pense que celui-ci est un élément d’explication non négligeable.

  • Cela ne marche pas bien, certes, mais si quelqu’un peut nous suggérer un système qui marche mieux, qu’il ne se prive pas !

    Je n’ai pas trop de commisération pour le contribuable américain. Une des raisons fondamentales de la crise, c’est l’endettement du Trésor américain (=les contribuables américains)qui rend politiquement impossible une politique responsable de contrôle des liquidités et donc une politique de taux d’intérêt tant soit peu réaliste (des taux plus élevés pour être clair). Les liquidités excédentaires cherchent une rémunération et finissent toujours par trouver un moyen pour camoufler le risque qui sous-tend cette rémunération !

    Les contribuables américains dans leur ensemble ont économisé des sommes considérables en émettant de la dette à bas taux grâce à la complaisance de Greenspan. Qu’ils paient maintenant n’est que justice. Mais bien sûr ceux qui paient aujourd’hui ne sont pas nécéssairement ceux qui en ont profité hier, et là est l’injustice.

  • « (…)en contradiction totale avec l’orthodoxie économique revendiquée aux États-Unis, qu’il coûtera 700 milliards de dollars aux contribuables américains(…) »

    Ce changement de pied permettra t-il aux politiques d’aborder plus sereinement, avec aussi une plus grande légitimité, les questions autour de l’imposition du capital?

  • Je me réjouirais pas trop pour les pays du Golfe. Ils sont bardés de dollars, et font une grosse partie de leur économie sur la consommation américaine… et la vente du pétrole, c’est à dire l’échange de pétrole contre des dollars.
    Or le dollar, c’est l’économie américaine. En fait non ça fait longtemps que c’est plus ça : le dollar c’est de la dette américaine, dont on espère qu’ils pourront la rembourser. Sauf que plus ça va moins c’est possible. Et en plus, vu que les taux d’intérêts sont bas, ça rapporte pas grand chose.

    Faire du commerce en dollars, c’est comme racheter un subprime, mais avec le petit taux d’intérêt d’un placement sûr. Les pays du Golfe, placement éthiquement correct ou pas (j’en sais rien) ils vont pas trouver ça drôle très longtemps, les rachats à coup de milliers de milliards de dollars. Et d’autres risquent de se faire la même réflexion rapidemnent.

    PS : trop cool, le retour de l’édition!!!

  • Pas sûr que cette crise soit si nocive qu’on le dit pour les PME.
    Aujourd’hui, les banques commencent à réaliser qu’il est moins risqué de prêter à une entreprise qu’à une autre banque. Au moins, dans une « vraie boîte », les bilans veulent dire quelque chose.

  • @ CSP

    Faudrait peut-être que tu te décides un jour à vraiment étudier comment fonctionne un marché, le meilleur outil de répartition qui soit, loin devant toutes les autres solutions.

    Et à la base, le souci principal vient plus de l’enchainement des subprimes, c’est à dire de la capacité à augmenter son emprunt en fonction de la progression de la valeur de la maison, c’est différent de la technique de titrisation, on ne peut pas tout mélanger…

  • Le commentaire que j’avais fait samedi chez « Radical-chic » et qui m’avais valu de me faire traiter par Guillermo. Im me semble aoir plus sa place içi.

    Vous me faites marrer, les gauchistes, à ne parler de la crise des subprimes que sous son aspect financier.

    Car derrière il y un sérieux aspect social : les pauvres qui ont cru pouvoir se payer des maisons de riche, et dont certains ont déjà étés expulsés. Il semble bien que tout le monde s’en fout !

    Il y a aussi des éléments de l’économie physique ; pour que les pauvres empruntent, il a bien fallu leur batir des maisons neuves, qu’ils ont même pu habiter quelques années, avant que les remboursements ne deviennent excessifs. Et sans les subprimes, JAMAIS ces logements n’auraient étés construits.

    Et que vont devenir ces logements, après l’expulsion de leurs propriétaires insolvables ?
    Les créanciers qui vont les récupérer ont une alternative simple :
    – payer pour leur gardiennage, en attendant 3 ans ou quelques dizaines d’années, que la crise surmontée et la croissance aidant, se crée un large groupe de salariés aisés prêts a les acheter.
    – les louer aux pauvres expulsés, au prix ridiculement faible qu’ils peuvent payer.
    Comme la deuxième solution est un moindre mal …
    Sauf qu’elle risque d’entrainer le marché de la location dans une logique de baisse générale.

    Finalement, le marché aura fait que la cupidité des spéculateur permette de construire des logements sociaux.

    Adam Smith n’a jamais dit autre chose.

  • @ Koz :
    « Nous avons demandé à l’un d’entre eux comment nous en étions arrivés là. Il l’a résumé en un mot : l’avidité ».
    L’on critique considérablement (et a juste titre en ce moment) la cupidité du banquier qui a conduit a cette crise. Mais, je me souris a l’idée que le banquier serait le seul acteur économique dont la conduite est inspirée par l’appât du gain (ce que souligne très précisément la citation de Smith). Comme si cette constante de l’esprit humain n’était pas présente dans d’autres professions (rappelons-nous la crise de la vache folle) !
    Dans le cas de figure qui nous intéresse: Quid de l’appât du gain des acheteurs de maisons aux US, qui connaissaient pourtant leur propre insolvabilité ? Quid du Trésor américain, bien content de toucher -par impôts interposés- les dividendes d’une politique d’expansion économique pourtant jugée insoutenable par beaucoup ?

    « Cela ressemble dès lors fort à l’exonération de responsabilité que l’on se félicitait d’avoir évité en laissant Lehman Brothers tomber ».
    La main invisible est parfois un peu lourde. Tout le monde s’effraye du cout pour le contribuable américain et étranger. Mais il y a aussi des pertes bien réelles pour les actionnaires et les employées de ces banques. Il y a évidemment une dimension de sanction dans la crise actuelle.
    Le problème d’aujourd’hui tient davantage d’éviter que la sanction devienne une contagion, une crise de confiance dans tout le système bancaire. C’est pourquoi les autorités cherchent a stopper la crise : parce que le cout de ne rien faire et de laisser le système s’effondrer serait plus élevé que de le sauver comme ce qui est tenté en ce moment.

    @ Liberal :
    « Pas sûr que cette crise soit si nocive qu’on le dit pour les PME. ».
    Hélas, la crise sera bien nocive pour les PME. De par la conjonction d’une moindre consommation des ménages (restriction du crédit des particuliers), de la moindre capacité a investir (restriction du crédit aux entreprises), et des charges financières accrues (hausse des taux de base et renchérissement des marges bancaires).

  • « Dernière interrogation : outre le fait que le plan de sauvetage américain est une fois encore, après celui de Bear Stearns, en contradiction totale avec l’orthodoxie économique revendiquée aux Etats-Unis, qu’il coûtera 700 milliards de dollars aux contribuables américains – qui épongeront ainsi les fautes des autres – »

    Voyons, il n’y a aucune contradiction ; ce « libéralisme » financier n’a rien contre l’intervention de l’État… quand ça l’arrange. Son seul principe philosophique est celui de la maximisation du rendement par actions. Alors il s’en remet sans scrupule à l’une des plus vieilles recettes pour y parvenir : « privatiser les profits, collectiviser les pertes »

  • Les articles du blog « Objectifliberté » sont assez édifiants. S’ ils pointent du doigt les méfaits d’ un certain interventionisme d’ Etat (fédéral comme fédéré), ils n’ en exonèrent pas pour autant le système financier qui s ‘est engouffré dans la brêche pour s’ en mettre plein les fouilles en oubliant toute règle élémentaire de prudence.
    Une cause annexe est également relevée : la cherté des terrains à bâtir en raison de règlementations excessives des gouvernements locaux (même si cela ne peut être strictement taxé « d’ interventionisme »).

  • Je ne vois pas très bien quelle différence on peut faire entre jeux d’écritures entre comptes et billets : dans un cas comme dans l’autre, ça se convertit en billets, pièces d’or et pétrole ?

    non ?

  • La crise du crédit a trouvé son origine dans la vente massive de crédits hypothècaires gagés sur la valeur du bien à 20 ans afin de contourner l’insolvabilité court terme du chaland. Sur ce point, on ne pourra jamais empêcher un vendeur de vendre n’importe quoi, mais on peut penser qu’un peu plus de sélectivité de la part des autorités de marchés ne serait pas un luxe.

    La cause de la propagation de la crise à la globalité du système financier se niche dans ce curieux métier de banquier d’investissement, consistant à racheter de la dette, à en changer le packaging, et à la revendre à quelqu’un d’autre dont la tentation sera de faire la même chose. Avec cette conséquence pratique dévastatrice : au final, plus personne n’est en mesure d’assurer le risque du crédit initial.

    Cette cause est « technique » avant d’être idéologique, les solutions techniques existent. Il est par contre sidérant de constater que plus d’un an après l’éclatement de la bulle subprime, après un lent mais sûr processus d’enfoncement dans la crise, il n’y a toujours pas eu l’ombre d’un début d’initiative politique pour améliorer les mécanismes de régulation.

    Rien.

    Assez incroyable.

  • —, dans un cas, t’as un truc dans la main, pas dans l’autre.
    Ma réflexion n’avait pas la prétention de relever de la théorie monétaire…

    Henri, oui, j’ai bien saisi que le coût serait supérieur si on laissait le marché se casser la gueule. C’est bien là qu’il y a un souci : en laissant s’écrouler Lehman Brothers, l’Etat US passait aussi le message qu’il ne serait pas toujours là pour éviter la sanction. Et là, c’est le contraire.

    Sinon, non, bien sûr, il n’y a pas que les banquiers qui puissent faire preuve de cupidité. Il y a aussi, parfois, des avocats. Mais en l’occurrence, lorsque l’on connaît le montant des bonus que pouvaient toucher certains, directement liés aux performances des portefeuilles/positions (connais pas le terme exact) qu’ils géraient, on peut comprendre que cela n’incite pas à la plus grande prudence.

    Polydamas, je ne suis pas du tout spécialiste. J’ai même eu du mal à écrire ce billet tellement je ne le suis pas. Mais justement, il y a une certaine rage à se voir impactés par les décisions irrationnelles de gens qui vous expliquent dans le même temps que vous êtes bien gentils de ne pas trop vous mêler de ça parce que vous n’y comprenez rien. Quand tu fais ton taf’ normalement, correctement et que tu dois subir les conséquences, notamment sur la croissance, de ces comportements, ça a tendance à gonfler un chouya. Et je comprends encore davantage les réactions de ceux qui, eux, se feront virer.

    On peut trouver un paquet d’explications. D’ailleurs, des explications, il y en a à revendre. Et il y en aura probablement autant qu’il y a d’écoles économiques. C’est l’effet de levier, c’est l’intervention de l’Etat initiale, c’est la titrisation, c’est l’enchaînement des subprimes. Il me semble en tout cas que ces subprimes pourraves, les institutions financières se les sont refilées. Alors, oui, le problème ne vient pas de la seule technique qui permet de se refiler les trucs, puisque tant que tu te refiles des trucs en bonne santé, tout va bien. Il n’empêche que cela a favorisé une diffusion généralisée du risque.

    Par ailleurs, vu de là où je suis, je trouve qu’il y a une défausse un peu facile : nous sommes probablement là dans le système où fonctionne le plus le marché mais non, là encore, la faute revient à l’Etat. C’est presque l’excuse joker. On a fait des conneries – et des grosses – mais c’est à cause de l’intervention publique… en fait, il faudrait dérèglementer ? Tu comprendras que le comportement des financiers inspire modérément confiance.

    Liberal, ce que tu dis est probablement vrai, mais probablement à long terme. Ce qui est le plus désagréable dans cette affaire, c’est que les vrais responsables sont loin d’être les seuls à payer. Les PME qui ne vont pas pouvoir obtenir de crédit vont le sentir passer, dans les prochains mois. Et les salariés de celles qui vont fermer aussi. Du coup, oui, peut-être, il y a là une bonne leçon à long terme. Mais à court terme, ça va faire mal.

  • Faudrait peut-être que tu te décides un jour à vraiment étudier comment fonctionne un marché, le meilleur outil de répartition qui soit, loin devant toutes les autres solutions.

    Je suis toujours dubitatif devant ce genre d’affirmation. Je ne suis pas spécialiste en économie, mais je m’y connais un peu en optimisation numérique : il y a quelque chose appelé le « no free lunch theorem » qui dit, en gros, qu’il n’y a jamais de recette miracle qui marche à tous les coups pour optimiser quelque chose. En particulier, je ne vois pas pourquoi, en vertu de ce théorème, les mécanismes de marché seraient systématiquement plus efficaces que le reste. Il y a quand même des différences entre le marché du pain et le marché de l’éducation par exemple; dès qu’il y a des situations type dilemme du prisonnier, j’ai du mal à voir comment un mécanisme de marché peut marcher.

    La force du marché me paraît surtout reposer sur une réalité empirique. Au bout du compte, en science, seule l’expérience, la réalité compte, et quand la réalité n’est pas conforme à la théorie, il est assez sain de questionner la théorie (comme le fait Koz d’ailleurs).

  • « Le libre jeu du marché conduit à un équilibre optimal »

    C’est ce genre de phrase que cette crise devrait conduire à interroger. Liberal a raison de dire qu’elle continue à être vraie, dans les conditions où elle a été établie. Mais ces conditions sont théoriques (il faut supposer que l’Homo n’est pas sapiens sapiens, mais économicus, c’est-à-dire égoïste, rationnel et calculateur, puis que le marché parfait existe ou peut exister). D’autre part, il faudrait s’entendre sur le sens de « optimal ». En ce moment, une dérégulation du marché du travail (par exemple par la suppression du SMIC, comme le demande nombre de libéraux) conduirait une majorité de salariés à avoir des salaires peut-être optimaux, mais qui ne leur permettent pas de manger. De toutes évidences, les états ont l’air de trouver que le prix de l’auto-ajustement des marchés est trop cher.

    J’ai d’autre part depuis longtemps un problème avec la confiance. Il semble que la condition de fonctionnement des marchés financiers soit la confiance. Mais comment faire confiance à quelqu’un dont on sait qu’il ne cherche qu’à optimiser son propre capital? Si mon boulanger fait du bon pain à cause de ça, un jour ou l’autre il essaiera de me fourguer un truc qui lui revient moins cher, et je me méfierai de lui et de son pain.

  • Tu as raison jmfayard. Quand l’Etat intervient, c’est toujours payé par le plus grand nombre et ça bénéficie aux copains du pouvoir. C’est l’aphorisme de PJ O’Rourke : When buying and selling are controlled by legislation, the first things to be bought and sold are legislators

    Koz, je conçois que la critique de l’intervention de l’Etat apparaisse comme un défausse. Il n’en est rien. Le comportement des financiers n’inspire pas confiance et c’est très bien ainsi. Il ne faut pas leur faire confiance pour autre chose que la défense de leurs intérêts propres. En garantissant les prêts immobiliers, l’Etat a créé une confiance artificielle dont les financiers ont bien évidemment abusé. Et c’est bien le drame de ce plan de sauvetage. Il n’est pas seulement choquant moralement, il prépare la prochaine crise en envoyant le message suivant : « quitte à faire des conneries, faites en des vraiment grosses; ainsi l’Etat sera obligé à vous sortir de la merde. »

    Enfin, le lien avec la présidentielle US tel qu’il ressort du billet d’objectifliberté est savoureux. Les dirigeants de Fanny Mae qui se sont gavés sur le dos de la garantie publique en contribuant à envoyer tout le système dans le décor font partie du staff d’Obama. Le sénateur qui a dénoncé tout ça et qui a essayé en vain de réformer ces institutions malsaines, c’est John McCain.

  • @ Liberal et @ Henri : « Pas sûr que cette crise soit si nocive qu’on le dit pour les PME. ». Hélas, la crise sera bien nocive pour les PME. De par la conjonction d’une moindre consommation des ménages (restriction du crédit des particuliers), de la moindre capacité a investir (restriction du crédit aux entreprises), et des charges financières accrues (hausse des taux de base et renchérissement des marges bancaires).

    Ces deux commentaires mis bout à bout sont extrêmement révélateurs à mon sens sur le fonctionnement du système bancaire en général aujourd’hui. En gros, quant tout allait bien les banques avaient d’autres chats à fouetter en bourse que de financer les PME, maintenant que tout va mal en bourse, elles en ont plus les moyens.

    Autrefois (devrais-je dire, il était une fois ?) le système bancaire était simple. Une fois le troc remplacé par la monnaie, les banques qui recevaient les économies des entreprises et des individus, sachant qu’il était improbable que tous les clients demandent restitution de l’argent placé en banque le même jour, avait la possibilité de prêter de l’argent contre intérêts à des entrepreneurs, dans le but de créer un outil de production et donc plus de richesses. Richesses qui revenaient en grande partie à la banque plus les intérêts du prêt.

    Si une banque a dix clients, il n’est pas (ou très peu) risqué de réaliser cette opération 5 fois. C’est déjà plus fragile, si vous réalisez cette opération 10 fois. C’est suicidaire ou, plus exactement, créateur d’une instabilité économique très dangereuse, si vous multipliez cette opération par cent, voire même beaucoup plus. C’est, je pense, la base de la fragilité financière de l’économie mondiale ; le reste (bourse, interventions des états, planche à billets, créations de titres n’ayant aucune valeur en contrepartie, etc.) ne servent qu’à camoufler le déséquilibre entre les actifs et le fictif, le pêché originel des banques. Le problème n’est pas qu’il existe, le problème est qu’il est peut être de 1 pour 100 millions de nos jours.

    Je sais, je sais, je suis trop simple. Mon commentaire va faire hausser les épaules de toutes les personnes un temps soit peu versées dans l’économie. Mais je reste persuadé qu’il s’agit bien du fond du problème.

    De fait, les banques sont tellement plus intéressées par le fait de jouer (et même de se faire beaucoup d’argent de cette façon) avec le pur fictif, avec tous les système mis en place pour camoufler cette instabilité fondamentale, qu’elle se sont désintéressées depuis très longtemps de financer et de créer des outils de production et de la richesse avec les PME. L’épisode Kerviel qui montre qu’un seul trader pouvait gagner (ou perdre) quelques millions d’euros en quelques semaines, démontre aussi qu’il est vain de penser que la banque va déléguer trois personnes à plein temps pour aider une famille arabe à ouvrir une épicerie au coin de la rue, même si le fonctionnement familial de ces commerces en font des micro entreprises qui fonctionnent généralement bien.

    Non, jamais de la vie. En fait, les prêts aux PME, lorsqu’ils existent (car ils existent quand même, je caricature là, hein), ressemblent plus à quelque chose comme ça : un type X a une idée réellement géniale et crée une entreprise Y pour fabriquer et commercialiser son idée géniale. Après calculs, il se fait qu’il a besoin de 10 machines. Il ne peut en fonds propres et avec des éventuels petits investisseurs associés, en acheter que 5. La banque lui prête assez pour n’en acheter que 3 de plus. L’affaire au bout d’un moment se casse la figure. Il lui fallait 10 machines par sécurité, il n’en a que huit. Et pas assez de trésorerie pour supporter les retards de paiements.

    La banque refuse de le suivre et d’une manière directe ou indirecte se paye sur la bête une fois la boîte coulée. L’idée géniale est récupérée à bas prix par une grosse entreprise Z qui a les reins assez solides et qui est un autre client de cette banque. Parfois même, la grosse entreprise Z était même un « client récalcitrant à payer ses factures » de l’entreprise Y, et, tiens donc, fonctionnait principalement avec des marchés publiques de façon quasi-monopolistique.

    Selon l’adage que « lorsque vous avez 1000 euros de dettes, c’est votre problème, mais que cela devient le problème de la banque quand vous en avez 10 millions » et son corolaire « lorsque une banque/une entreprise Z a 10 millions d’euros de dettes c’est leur problème – ou, lorsqu’une banque ou une entreprise Z tripatouille dans l’illégalité avec 10 millions d’euros c’est leur problème, mais lorsqu’elle en a 500 – ou qu’elle tripatouille avec 500, c’est le problème de l’Etat », il se fait que le système perdure et que de grosses fortunes peuvent et se sont même construites sur cette base.

    Ce qui me fait dire que « Il ne paraît pas évident, à première vue, que la recherche de leur intérêt propre, par certaines banques, certains traders nous garantissent “notre dîner“ » est presque une évidence à l’heure actuelle.

    La théorique main invisible ne peut faire son oeuvre que si certains principes sont respectés. Les situations quasi-monopolistiques dans les faits des entreprises qui tiennent le marché – l’instabilité chronique d’une économie qui repose fondamentalement sur du vent – la prise en otage des populations potentiellement dramatiquement victimes du système – et d’autres facteurs comme l’évolution de tout ça dans des, peu ou prou, états providence, font que la main, elle n’est pas seulement invisible, elle est paralysée. Et que le fond est bel et bien un problème de morale et d’éthique plus qu’un défaut intrinsèque du système.

    Je vais encore caricaturer, mais en fait, la grosse différence entre un capitaliste la calculette entre les dents et un ministre d’un état socialo-collectiviste qui affament tout les deux les populations en vivant grassement des deux systèmes à titre personnel (l’un dans une « villa à Beverly Hill » l’autre dans une « datcha d’état de la mer noire »), c’est que ça ne s’écrit pas pareil.

  • @ Tom Roud:

    Vous avez gagné le droit de lire Friedrich Von Hayeck, le marché est le meilleur outil de répartition parce qu’il est le seul à faire la synthèse de ce que TOUS les intervenants ont besoin.

    Un type en-haut de sa pyramide n’aura jamais, au grand jamais, toutes les infos nécessaire pour pouvoir répartir correctement les ressources entre tous les acteurs, entrainant de ce fait, contrebande, délit, inégalités…

  • « Le problème, c’est qu’on n’est pas allé assez loin dans le socialisme » martelaient en guise d’explication les tenants du système soviétique quand les craquelures du système commençaient à devenir béantes.

    Après une accumulation sur des décennies dans presque tous les pays de l’OCDE de réformes allant globalement dans leur sens (dérégulations, privatisations, montée en puissance de la finance, transfert de 10% du PIB des salaires vers les actionnaires, …), les tenants du système d’économie de marché dérégulée à dominante financière nous expliquent que l’accumulation de problèmes (crise énergétique, environnementale, climatique, alimentaire, crédits, endettement privé, …) c’est encore la faute à trop de régulation.

    Je pose la question : est-il raisonnable de continuer à faire confiance à ces fondamentalistes ?

  • « Je vais encore caricaturer, mais en fait, la grosse différence entre un capitaliste la calculette entre les dents et un ministre d’un état socialo-collectiviste qui affament tout les deux les populations en vivant grassement des deux systèmes à titre personnel (l’un dans une “villa à Beverly Hill” l’autre dans une “datcha d’état de la mer noire”), c’est que ça ne s’écrit pas pareil. »

    C’est le propre des idéologies messianiques. Plus tard, à la fin de l’h(H)istoire (quand les marchés seront parfaits, ou quand l’état et les classes sociales auront disparu), ce sera le bonheur maximum pour tous. En attendant, c’est moi qui ai le pistolet chargé, et c’est vous qui creusez.

  • A propos de libéralisme et de est-ce que c’est la fin de l’économie de marché :
    L’une de mes idées les plus fructueuses ces derniers mois a été de m’enfiler cette série d’entretiens avec Stiglitz. C’est remarquablement clair
    http://www.challenges.fr/video/

    Stiglitz parle d’un échec d’une certaine pratique « sauvage » du libéralisme. En particulier, il pourrit le FMI et la banque mondiale…. cela dit, il ne dit pas du tout qu’il devient anticapitaliste pour autant. Il estime probablement qu’on mettra en place de nouvelles règles (parce que des règles, il y en a, demandez à l’Argentine, c’est juste que les EU étaient exemptés).

    A propos du rapport au PME : Libéral, Henri et Eponymus, je trouve votre échange très intéressant. Cependant, je me demande ces derniers jours s’il ne faudrait pas faire une différence entre les PME européennes et celles des états-unis.
    Le crédit facile a été encore plus facile aux état-unis (et en GB) qu’en France. Et cela a éte un levier puissant pour l’innovation et la croissance. Cet afflux de monnaie. Aujourd’hui, on se rend compte qu’après les bornes passées il n’y avait plus de limites, en fait, et c’est la cata.
    Du coup, notre gouvernement nous explique qu’on est protégés par la ligne bleue des Vosges et la ligne Maginot. En gros, on a quand même eu des conditions de crédit beaucoup moins facile, donc on va moins souffrir de tout ça parce qu’on est restés sages. C’est partiellement (seulement!) vrai (et surtout, on a une monnaie qui vaut qqch), même si on va en baver un bon peu aussi c’est ça la globalisation. Mais surtout, ça veut dire que ce qui nous protège, c’est ce qui nous a pénalisé pendant un moment. Des moindres capacités de financement et des taxes pour cause de budget tenu par la BCE ont fait que nos PME avaient plus de mal (elles avaient 8 machines au lieu de 10). Et maintenant, ça fait qu’elles vont un peu moins souffrir que les autres.
    C’est vrai ça?

  • Le problème fondamental c’est qu’il n’existe aucune alternative crédible au marché. Aucune.

    Même après la tonne d’analyses et de positions idéologiques autour, on est incapable de formuler le début du commencement « d’autre chose ».

    Et donc on reste enfermé dans ce double dilemme : – il faut réguler ou bien – il faut déréguler. Et probablement que du point de vue de l’efficacité globale les deux positions sont recevables suivant les cas d’espèce.

    Car si le marché fonctionnait correctement sans régulation, cela aurait été observé dans sa phase initiale et l’on aurait pas eu besoin … de commencer à réguler.
    Et par ailleurs , on voit bien que souvent la régulation ne sert qu’à masquer ou différer une ‘crise’ qui contient sa propre solution, et que ce faisant on n’additionne pas mais on multiplie la force potentielle de la crise suivante.

    La main invisible pré-existante n’existe pas. C’est à l’inverse une construction purement intellectuelle vers laquelle on est obligatoirement obligé (!) d’aller (avec des variantes géographiques) , dans tous les secteurs où la démonstration historique que la planification administrativo-étatique merdait très grave, a été faite.

    Il y a aussi une fausse variante paralysée centrale qui consiste à essayer de ne rien faire , ou le plus tard possible (au cas ou ça s’arrangerait tout seul, ou avec le temps): bien sûr c’est la pire solution puisqu’on refuse de réguler lorsqu’il serait encore temps et qu’ensuite on régule à court terme , en général en reportant le mal aggravé dans le futur.

  • La théorie de la main invisible n’a jamais garanti que l’avidité des uns compensait celle des autres…

    C’est aussi une théorie qui présuppose une minimum de transparence dans les rapports économiques. Or, force est de constater que le grand succès et les avantages indéniables de la titrisation ont fait oublier que l’efficacité et la sécurité de cette technique repose justement sur une forte dose de transparence dans sa mise en œuvre.

    C’est la raison pour laquelle ton passage sur ces fonds de pension qui n’étaient « pas en mesure d’évaluer les dangers » est si pertinent. Le problème n’est pas que les mécanismes soient si complexes ; c’est que les choix de chacun doivent être un minimum informés.

  • Epo évoque en fin de commentaire un problème d’éthique, Opposum souligne qu’il n’y a pas d’alternative crédible au marché, et Georges Soros évoque un « intégrisme de marché » (cherchez pas, ce n’était pas en commentaire ici) :

    C’est la conséquence de ce que j’appelle « l’intégrisme de marché », cette idéologie du laisser-faire et de l’autorégulation des marchés. La crise n’est pas due à des facteurs extérieurs, ce n’est pas la conséquence d’une catastrophe naturelle. C’est le système qui a causé sa propre perte. Il a implosé.

    J’aurais tendance à penser qu’effectivement, on trouve difficilement mieux que le marché (l’action publique fait aussi de belles c…ies, et est soumise à des considérations qui ne la portent pas nécessairement à l’efficacité – y compris en raison du risque démagogique) mais qu’il y a un véritable et grave problème d’éthique.

    On a un peu le sentiment que le marché tourne à vide, dans la finance, ou qu’il tourne « sur lui-même ». Que la technique financière n’est pas au service de l’économie réelle, mais à son seul service. Il n’y a plus de bien commun ou de valeur supérieure, le seul fait de faire des profits est valorisé en soi, parce qu’ainsi, on injecterait des fonds dans l’économie et que, donc, ipso facto, ce serait bien.

    Par la même occasion, sauf à se réunir sur les grandes causes bien populaires (le téléthon, le sidaction, les restos du cœur, et l’aide aux petits nenfants), nous n’avons plus de valeur commune et surtout chaque individu est devenu la mesure de toute chose, son unique référentiel.

    On évoque des « cours d’éthique ». Mais quelle éthique pourrait être dispensée ? Qui pourrait être fondé à professer une éthique particulière ? Qui serait légitime ?

  • En fait, je crains que notre société n’en finisse pas de payer le XXème siècle, et je repense aux analyses de Guillebaud.

    Avec le XXème, on a bouté hors de la société tout ce qui était collectif. On a bouté le religieux hors du monde, on en a bouté le sacrifice par horreur des tranchées, on en a bouté les idéologies hors du monde à la suite des horreurs nazies et communistes.

    Il reste une chose : l’économie. Libéralisme et marxisme se rejoignent dans le primat qu’ils accordent à l’économique. L’homme est vu dans sa seule dimension économique.

    Une fois bouté ce que l’on a bouté, et affirmé le primat de l’économie, peut-on s’étonner de ce que le marché s’auto-justifie ?

    Bon, c’est probablement un peu fumeux comme propos, mais ça m’aide de le poser par écrit. 😉

  • @ Lisette :
    Je suis d’accord avec vous. Il est probable que la France ne sera protégée de crise que par quelques spécificités (comme l’endettement immobilier a taux fixe pour les ménages, une moindre exposition aux segments les plus risqués, des banques au final plus faibles sur la scène financière mondiale). Lesquelles ne suffiront surement pas a maintenir la croissance. Retour a la case départ : l’économie est désormais mondiale, il est aberrant de ne pas le savoir ni en tirer les conséquences (je pense aux projections farfelues de déficit publics de notre gouvernement jusqu’il y a encore peu).

    @ Eponymus :
    « Autrefois (devrais-je dire, il était une fois ?) le système bancaire était simple. »
    Je présente par avance mes excuses pour cette réaction épidermique… Mais non, par pitié, pas de réaction a rebours . Je proteste vigoureusement parce que je crains par-dessus tout une mentalité de la ligne blanche (une sorte de paradis perdu a rebours). En deca de la ligne : félicité éternelle ; au-delà : tourments sans fin. Ce genre de discours (autre que sur des points de discussion d’ordre moral) me met toujours mal a l’aise.
    « c’est que ça ne s’écrit pas pareil ». Pas seulement. Il y a aussi la notion de liberté d’entreprise dont on sait qu’elle est pleinement liée a la notion de liberté tout court. La richesse du capitaliste est fondée sur le travail mais celle du ministre sur une forme bien réelle d’esclavagisme. Sans même parler de l’aspect durable de la richesse en question. Pour illustration, allez donc comparer la Russie postsoviétique et les USA.

    @ Opposoum :
    Oui – je suis bien d’accord avec vous, il n’y a pas d’alternative au marché. Le pire mais le seul acceptable, pour paraphraser Sir Winston. Polydamas cite avec bonheur Hayek, et de fait c’est la référence qui s’impose ici.

  • S’il me paraît évident que le marxisme place l’économie au premier plan, cela ne me semble pas être le cas du libéralisme, qui repose comme son nom l’indique sur le primat de la liberté individuelle. Dans ces conditions, la liberté économique n’est qu’une ramification de la liberté tout court dont doit jouir tout individu. Non ?

  • @ Koz: « L’homme est vu dans sa seule dimension économique. »
    Certes, mais cet individualisme, cet abandon du collectif, n’a pas que des sources ou des impacts économiques. Quitte a rajouter une pensée fumeuse toute personnelle, je dirai pour faire écho a votre digression que c’est la beauté de la devise de la République Française.

    Liberté : la grande valeur de la droite, l’individu comme source de tout bien, au risque de l’individualisme.

    Egalité : la grande valeur de la Gauche, le vivre-ensemble en droits et en devoirs, au risque de l’égalitarisme.

    Fraternité : la valeur humaniste qui réconcilie les contraires, et qui stoppe le révolutionnaire au bord du crime par idéalisme, et qui stoppe le capitaliste au bord de la ruine morale par cupidité.

    Cette devise est splendide, dans sa rythmique propre, comme un mouvement de balancier entre individualisme forcené et égalitarisme aveugle.

  • @ Polydamas : justement, comment on fait sans intervenant extérieur pour résoudre le dilemme du prisonnier ? Que dit Hayek là-desus ? Encore une fois, le socialisme, cela ne marche peut-être pas pour le marché du pain, mais pour la santé et l’éducation, ce n’est peut-être pas si mal.

    Et je suis désolé : un mécanisme de marché ne conduit au mieux qu’à trouver un optimum local, qui n’est pas forcément un optimum global. C’est probablement avec les sciences de la comlexité qu’on va vraiment comprendre l’économie. Voir les travaux de Bouchaud (un des plus grands physiciens français d’ aujourd’hui) par exemple :

    Le paradigme de l’Homo economicus, optimisant en permanence sa fortune morale, se heurte à un mur de complexité algorithmique, qui rend caduque [la] fonction d’utilité. Un exemple, classique dans les manuels d’économie, est celui de la ménagère qui ressort du supermarché avec un caddie censé contenir les produits qui maximisent sa fonction d’utilité. (…) La fonction d’utilité est une fonction de N variables (…). Dès que N est un peu grand (par exemple N=100 produits différents) et que la fonction d’utilité a une structure un peu compliquée, la recherche de la configuration optimale ne peut être menée à bien; aucun ordinateur ne peut énumérer les 2^100, soit envirion 10^30 combinaisons possibles ! Il est donc clair que la ménagère, même parfaitement rationnelle, ne remplit pas son caddie en utlisant ce procédé. Son optimisation est au mieux locale, et non globale.

  • @jmfayard,
    J’aime bien ton parallèle avec le socialisme… à deux bémols près.
    1. Il n’y a pas eu de transfert de 10 points de pib des salariés aux actionnaires.
    2. Penses tu sincèrement que le monde est moins bien aujourd’hui qu’il y a 5 ans? 10 ans? 25 ans? 50 ans? Réalises tu que les crises énergétique et environnementale que tu dénonces sont nées du fait que 3 milliards d’êtres humains (essentiellement en Asie) sont en train de s’extraire de l’abjecte pauvreté dans laquelle ils croupissaient?

    @Lisette,
    Stiglitz a raison. Contrairement à ce que voudraient faire croire les gauchistes, les libéraux ne s’opposent pas à la régulation mais à l’intervention.
    Tu as aussi raison de souligner que notre système social très interventionniste nous protège partiellement dans ce genre de crise. Par rapport aux US-UK, on fait un peu moins mal quand ça va mal et beaucoup moins bien quand ça va bien. Au global, on fait moins bien.

    @Koz,
    Je ne sais pas ce qu’on a bouté au XXe siècle, mais en France, avec des dépenses publiques dépassant la moitié du PIB, on ne peut pas dire qu’on ait bouté le collectif.

    Et puisque tout le monde semble s’accorder à pleurer sur le sort des PME, un petit sondage. A votre avis, qu’est ce qui fait souffrir le plus les PME ? 1. la difficulté à trouver du financement. 2. Les charges sociales.

  • Koz, j’apprécie et je partage la différence que vous introduisez entre le marxisme et le communisme, ainsi que votre comparaison entre libéralisme et marxisme. La question est alors de déceler l’équivalent du communisme du côté libéral (disons le « libéralisme réellement existant »), car il doit générer lui aussi des conséquences intolérables. Disons le tout de suite: on n’a pas encore de goulag, donc pour l’instant ça va. Mais comment ne pas faire de parallèle entre les idéologues du marché, qui expliquent tous les échecs par une intervention trop importante de l’état, et les idéologues du communisme, qui expliquaient tous les échecs par les activités contre-révolutionnaires?

    On retombe sur votre question: puisque la révolution conduit au bien, tout ce qui ne conduit pas au bien est contre-révolutionnaire. Puisque le marché conduit à l’équilibre optimal, tout ce qui n’y conduit pas doit venir d’une perturbation du marché.

  • Libéral : je me posais la question pour l’Europe en général, pas seulement pour la France. Et donc, non pas à un seul pays que tu dis hyper-interventionniste, mais à un marché plus autocentré que les autres, avec une cohérence monétaire et une certaine orthodoxie forcée (ça dépend pour qui). Est-ce que ce n’est pas ça qui va nous protéger un peu mieux, alors que ça nous a gonflé un temps? (Et que Sarko dit que ça nous coûte un point, et que les Allemands se sont pris une période de rigueur, et que les nouveaux entrants ont dû réduire leur dette)

  • « Le problème fondamental c’est qu’il n’existe aucune alternative crédible au marché. Aucune. » et « On évoque des “cours d’éthique”. Mais quelle éthique pourrait être dispensée ? Qui pourrait être fondé à professer une éthique particulière ? Qui serait légitime ? » pose le problème dans toute sa dimension.

    Et, malgré ma grande incompétence en matière économique qui se traduit trop souvent en grande incompétence à gérer mes finances perso, je n’arrive pas à m’enlever de la tête la réflexion suivante.

    Mon sentiment, (et je me demande bien qui et pourquoi on y jetterait ne serait-ce qu’un coup d’œil distrait après ce que je viens de dire), c’est que les questions de Koz trouvent leur réponses dans la première assertion d’Opposum.

    Je pense qu’on n’a pas trouvé une alternative crédible au marché, parce qu’une toute première loi éthique de la vie est tout simplement l’échange. Ca peut même être un échange d’affection ou d’amour. Même l’altruisme dans une certaine mesure, quand il est volontaire, peut être considéré comme une sorte d’échange de par la satisfaction qu’il peut entrainer chez celui qui donne. Dans la nature, si on coupe un arbre, on en replante un. Mais, pour en revenir au sujet, la loi la plus fondamentale du marché est de produire quelque chose, de fournir un service et de recevoir quelque chose ou un symbole monétaire en échange.

    Quand cette règle est un peu violée, que ça soit dans les rapports commerciaux ou dans la simple relation d’un individu avec les éléments qui composent son environnement, il y a une rupture de l’équilibre. Dans les relations commerciales, cette rupture (qui consiste à vendre de la camelote) peut d’ailleurs à termes, pénaliser non seulement les premiers clients mais le vendeur dont le commerce va finir par péricliter.

    Pour poursuivre sur l’éthique, quand cette règle est beaucoup violée, on a une forme de criminalité. Finalement, le délit le plus fondamental, l’acte criminel de base (je ne parle pas du crime de sang là, bien sur) est une violation de cette loi ; elle consiste à s’approprier quelque chose en l’échange de rien ou pour quelque chose ne correspondant pas du tout à sa valeur.

    Ce truisme étant formulé, qu’en est-il du système financier ?

    Lorsqu’un spéculateur profitant d’une baisse ou d’une hausse bien souvent fictive, pour ramasser un pactole d’une manière ou d’une autre, quelle est le produit fournit pour l’argent reçu ? Les spécialistes ou les professionnels vous expliqueront que certains mécanismes spéculatifs sont utiles voire indispensables – et c’est probablement vrai dans certains cas. Mais la grosse majorité des spéculations font de l’argent en ne produisant rien. Lorsqu’un mécanisme financier fait de l’argent sur du vent, lorsque la bourse ressemble à un exercice de « cavalerie » et lorsque ces pratiques atteignent un volume à l’échelle mondiale tel que nous le connaissons, comment ne pas voir qu’il y a forcement un impact sur l’équilibre même des finances mondiales – un effet sur l’économie de type « faux-monnayage ».

    Le fric a bien des égards est une énergie. Dans ce bas monde, rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme. Si cette énergie se retrouve dans la poche de quelques uns parce qu’ils produisent et qu’ils échangent beaucoup, ça ne me dérange pas. Lorsque cette énergie se concentre dans celles de personnes qui ne produisent rien d’autre qu’un artifice et que les trous logiques ainsi créés sont compensés par de la « fausse monnaie » émise par les gouvernements, ça me pose problème. Ca me donne même l’impression de vivre au sommet d’un château de cartes dont l’édificateur prie tous les jours pour que personne n’ouvre la porte. Et, il s’agit bien d’une forme de criminalité même si elle parfaitement légale en l’état.

    Est-ce que ce n’était pas le problème le plus aigu avec la noblesse française à la veille (ou l’avant-veille) de la Révolution de 1789 ? Une révolution fiscale, ne dit-on pas, fomentée par les bourgeois ponctionnés par une caste qui ne produisait rien pour ce qu’elle recevait.

    Bon, les traders bossent et spéculer est un métier. Et la bourse, bien pensée, peut être créatrice de richesses réelles et honnêtes, et n’est pas le problème en soi. Mais pour une certaine caste de spéculateurs, ça n’est pourtant pas sans me rappeler certains systèmes de justification des braqueurs de banques qui vous expliquent que leur boulot est un métier à risques qui mérite d’être correctement rétribué.

    En matière d’environnement dans la perspective d’une catastrophe écologique à l’échelle planétaire, on a eu Kyoto, le Grenelle, et ses suites, et celles encore à venir, etc.

    En matière de marché, je pense que la finance mondiale, les états vont devoir se réunir tôt ou tard pour mettre fin, ou décourager par le biais d’une fiscalité adéquate ou d’autres systèmes, des pratiques qui en elles-mêmes sont des violations du marché qu’elles sont supposées animer. Surtout qu’elles ont le même potentiel de nuisances catastrophiques voire supérieur à celui du réchauffement climatique. Pour moi, ce n’est pas une question d’intervention, de régulation ou de non régulation. C’est juste que si vous voyez un voleur s’en prendre aux biens d’un voisin ou aux biens communs, vous le faites arrêter.

  • @ Henri

    « Pas seulement. Il y a aussi la notion de liberté d’entreprise dont on sait qu’elle est pleinement liée a la notion de liberté tout court. La richesse du capitaliste est fondée sur le travail mais celle du ministre sur une forme bien réelle d’esclavagisme. Sans même parler de l’aspect durable de la richesse en question. Pour illustration, allez donc comparer la Russie postsoviétique et les USA. »

    Doucement, doucement… c’était une boutade. Je suis fondamentalement d’accord avec vous sur la nature des deux régimes.

    Mais j’évoquais « le capitaliste la calculette entre les dents » comme j’aurais pu évoquer « le capitaliste, le M16 entre les dents ». Je parlais de celui qui compte ses billets sur un monceau de cadavres d’une guerre ethnique en Afrique qu’il a fomenté afin d’avoir accès au précieux minerais qui avait la mauvaise grâce de se trouver sur une terre qui ne lui appartient pas ; je parle de celui à la tête d’un labo pharmaceutique qui trouve l’argent nécessaire pour tester des nouvelles molécules hasardeuses sur la population (noire le plus souvent) mais qui refuse de fabriquer les médicaments efficaces anti-pallu dont il possède le brevet parce que ça ne lui rapportera pas assez comparés aux hypotenseurs dont notre civilisation occidentale obèse a cruellement besoin ; je parlais de ceux qui vendent des rations alimentaires aux GI américains en Irak, 10 fois leur prix, pour les aider à gagner une guerre déclenchée sur la base de mensonges et pour protéger leurs intérêts énergétiques aux prix de quelques centaines de milliers de morts. Et tout ça et de nombreux autres exemples, oui, comparé à un commissaire du peuple, c’est vrai, ça ne s’écrit pas pareil.

  • @ Tom:

    Le dilemme du prisonnier, Tom, c’est sans échange d’infos, ce qui est la définition même du marché, donc votre question n’a aucun sens.

    Vous pourriez parler français, je n’ai aucune idée de ce que vous entendez par optimum global ou local…

    Marrant cette volonté de me parler de complexité, de programmation, alors qu’on ne cesse de parler de ce qui est justement impossible à programmer, l’esprit humain. Ça me fait rire de voir les scientifiques rentrer dans la danse en croyant qu’ils vont pouvoir tout planifier avec des modèles. Mais l’irrationnalité est la clé du marché financier, ce qui explique les mouvements moutonniers, c’est donc absolument impossible de penser qu’on pourra tout contrôler en réduisant tout à des équations.

    En matière d’éducation, je suis définitivement convaincu, à voir l’état de l’EN que l’Etat est une catastrophe. D’ailleurs mes parents en étaient tellement convaincus que je n’ai fais que du privé hors-contrat.

    Concernant la santé, ça pourrait se discuter, vu que l’assurance n’a pas besoin de l’Etat pour fonctionner, mais bon, effectivement, c’est le seul domaine, en plus des fonctions régaliennes, qui ne me parait pas aberrant si il est géré par un Etat. Mais bon, ce sont les contribuables qui vont morfler…

    @ Eponymus:

    La spéculation a bon dos. Mais elle n’est pas responsable de grand-chose en ce qui concerne les subprimes. Ce n’est pas parce qu’ils ne produisent rien qu’ils ne font rien. Au contraire, ils transmettent une info, qui peut être primordiale, au marché. Par exemple, sur le pétrole, la spéculation informe tout d’abord les intervenants, les clients, que la Chine achète en masse, puis qu’elle déstocke, ce qui explique la montée puis la baisse des cours du pétrole.

    Un spéculateur n’a RIEN à voir avec un voleur, il faut arrêter cinq minutes avec les fantasmes…

  • @ Eponymus: Au temps pour moi, je m’étonnais a vrai dire… d’autant que mes souvenirs de vos précédents commentaires ne me laissaient pas cette impression de « dangereux alter-mondiste ». 🙂

    Je comprends bien votre mise au point. Toutefois, dans un souci de cartésianisme bien français, j’aurai tendance a dire que l’on touche ici a un problème de différence d’ordre. Je pense pour ma part (en bon financier londonien assoiffé de sang et de bonus) que l’on parle de 2 choses radicalement différentes. Le capitalisme, même sauvage ou débridé, n’est jamais qu’un outil, une façon de plus (et j’y tiens a ce « de plus ») de gagner de l’argent. Le capitalisme, le seul système économique efficace que nous connaissions, n’est en soi ni moral ni immoral. Pour moi, il est amoral.

    C’est a la politique de l’encadrer. Vous donnez l’exemple d’une guerre ethnique pour avoir accès a des ressources naturelles. Qu’est-ce qui pose problème ? La guerre ou l’exploitation des ressources ? La guerre, a mon sens. Et elle est d’ordre politique et non économique. Vous citez un laboratoire pharmaceutique qui testerait sans limites de nouveaux médicaments (cf. La Constance du Jardinier de LeCarré). Qu’est-ce qui pose problème ? La non-régulation de ces tests. Encore une fois, c’est un sujet d’ordre politique et non économique.
    Par analogie, on a les mêmes sujets en matière de recherche scientifique. Par exemple, les recherches sur l’embryon n’ont pas de valeur morale en soi. C’est nous qui en décrétons, de manière politique, a l’issue d’une discussion, nourrie de nos propres positions (philosophiques, religieuses, que sais-je). L’on serait surpris de savoir combien les financiers comme les scientifiques appellent de leur vœux des règles claires… même si l’innovation sera souvent davantage de leur coté que du coté des régulateurs.

    C’est pour moi la raison pour laquelle on a tant besoin de Politique aujourd’hui. C’est a l’homme politique de fixer des lignes, de fixer des limites, après discussions démocratiques. Et c’est aussi pourquoi je suis libéral, car il est difficile de penser que l’Etat peux vraiment jouer son rôle d’arbitre s’il est lui-même sur le terrain dans l’une des équipes !

  • @ Polydamas : « Ce n’est pas parce qu’ils ne produisent rien qu’ils ne font rien … Un spéculateur n’a RIEN à voir avec un voleur, il faut arrêter cinq minutes avec les fantasmes… »
    C’est curieux comme on doit le rappeler en ce temps de crise financière. Je m’étonne un peu de ce préjugé (une erreur qui a pris racine, comme le qualifiait Voltaire) !
    Que l’on ne soit pas au fait des tendances financières, ne me pose pas de problème évidemment. Mais que l’on s’imagine que les spéculateurs travaillent sur du vent et ne créent « aucune richesse » me surprend et m’effraye un peu.

    @ Niamreg : en 39 « merci ». Certes, mais pourquoi ?

  • @ Libéral :

    « Et puisque tout le monde semble s’accorder à pleurer sur le sort des PME, un petit sondage. A votre avis, qu’est ce qui fait souffrir le plus les PME ? 1. la difficulté à trouver du financement. 2. Les charges sociales. »

    La réponse dépend de la nature de l’activité de la PME, cigle abritant une diversité infinie de situations. Pour ce qui concerne la mienne, je n’ai pas de souci majeur pour répercuter mes charges dans le prix au client, par contre l’absence de récurrence de notre activité est structurellement génératrice de besoin en trésorerie. PME contre grand groupe, devinez qui impose ses conditions de paiement à l’autre. Sur ce plan, la vie déjà pas très facile il y a quelques mois devient aujourd’hui carrément compliquée.

    @ Henri et Rubin : en phase avec vos commentaires, c’est au politique de mieux réguler et d’exiger plus de transparence. Afin qu’a minima les acheteurs de produits financiers puissent connaître précisément la nature et l’origine de ce qu’ils achètent, ce que la titrisation efface avec légèreté et irresponsabilité.

  • @ Eponymus
    Vous posez le problème de la création de valeur sans contrepartie réelle. Effectivement cela produit des déséquilibres qui peuvent être très perturbants dans certains cas.

    Le marché est un outil magique pour fixer le prix des choses et donc permettre l’échange équilibré.
    Néanmoins il est toujours , en plus, un casino ,avec cette idée d’un gain sans contrepartie.
    Mais d’une part cela ne gêne pas le fonctionnement du marché en période normale car c’est un jeu a somme nulle : ce que l’un a gagné, il l’a pris à l’autre , les choses sont claires et cantonnées car il n’y a que déplacement de richesse. Et d’autre part toute réglementation de cet aspect immoral gênerait les côtés utiles et vertueux du marché.

    Cependant, il est vrai que ces outils de pure spéculation , transparents à échelle artisanale, finissent par amplifier les mouvements , et, même s’ils fonctionnent toujours avec une contre-partie qui devraient les rendre neutres, créent de l’incertitude et de la destruction de confiance. A ce titre ils devrait être régulés me semble-t-il.

    Une autre création de richesse se produit en cas de bulle spéculative pure : le marché s’achète à lui même en surenchérissant continuellement , en une martingale folle. Dans ce cas il n’y a que des gagnants et le monde est merveilleux. La nécessaire contrepartie viendra donc dans temps par un crasch où les plumés seront les derniers entrés dans ce marché.
    Là aussi ces accoups sont très dommageable au système mais là aussi on voit mal comment les réguler sans enlever l’essentiel de l’intérêt du marché.

    Mais la crise boursière actuelle n’est pas du tout de cette nature : la bourse n’était en état de bulle.

    Et donc la focalisation sur la partie spéculative de la finance n’a pas lieu d’être.

    Et s’il est vrai que l’origine de la crise vient de la bulle immobilière, sur laquelle on n’a peu de prise (comme sur toute les bulles pures) , en fait c’est l’exploitation imprudente et ‘avide’ de cette illusion de richesse donnant ensuite lieu à des créances pourries qu’on a cherché à diluer, qui est à réguler.

    Bref c’est à des choses aussi évidentes que la prudence face aux mouvements des marchés , et à une transparence dans les mécanisme de titrisation , qu’il faut revenir.

    Et parler de la finance folle comme d’un concept global , avec tout les aspects moralistes que cela véhicule, me semble obscurcir le problème.

    Bon , mais le mal est fait et tout cela n’indique pas clairement ce qu’il faut faire, à défaut de savoir ce qu’il ne faut pas faire.

  • koz: dans la nationalisation se cache la punition de l’actionnaire qui, faute de n’avoir pas su controler ses employes, a perdu de la valeur. Charge au nouvel actionnaire (l’état américain) de faire porter leur responsabilité à ceux de ces employés qui ont dépassé les limites.

  • @ Eponymus :

    Il y aura toujours des êtres « assoiffés de sang et de bonus » pour reprendre l’expression auto-dérisoire de Henri. De même qu’il y aura toujours des assassins.

    La bonne question est donc la nature du système qui permet le mieux de contrôler leurs agissements, les éradiquer est impossible. Bien sûr, après chaque épisode honteux du libéralisme, et il y en aura d’autres, on charge l’âne. Mais sur la distance…Les grands scandales français, du Crédit Lyonnais à Elf, ne sont pas à porter au débit du libéralisme !

    Et il faut sans cesse ravauder le système des régulations et des contrepoids, comme il faut sans cesse adapter les politiques de lutte contre la criminalité, etc.

    C’est la vie.

    Bien à vous.

  • @ Polydamas
    « Un spéculateur n’a RIEN à voir avec un voleur, »

    Bien sûr que si.

    Allez, disons plutôt que c’est un joueur de casino !

    Qui aurait en plus une vague utilité d’anticipation économique sur la valeur réelle des produits échangés. Utilité largement gagée par sa participation aux bulles, aux krachs et aux divers déséquilibres
    Bref c’est un ‘courtermiste’ facilement allié aux logiques économiques purement financières qui oublient l’entreprise et les stratégies à long terme.

    La voleur, lui, au moins ne participe pas au crise 😉 : voilà une pratique claire et honnête ou le cocu et immédiatement désigné et cantonné !

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  • @ Voila Henri

    Et petite précision supplémentaire, je ne parlais pas du capitalisme, mais d’un « capitaliste le M16 entre les dents ». Et c’est justement toute la différence.

    Personnellement, ces histoires de systèmes m’indiffèrent un peu même si je suis par nature plutôt libéral également. Et la raison principale figurez vous, c’est que ces « capitalistes » ont des noms. Il ne s’agit pas d’un système, mais de Monsieur Untel, ou des Messieurs Untels et Untels.

    Ces messieurs ont élaboré un système derrière lequel ils peuvent dévoyer le marché et jouir d’une relative impunité. Tout ce que l’on voit ensuite, ce sont des stats, des chiffres, des prévisions, des analyses, des professionnels de la finance, des politiciens qui gère les crises, etc.

    Mais derrière, au départ un homme, plusieurs, etc. ont pris des décisions précises afin d’atteindre des objectifs précis par des moyens précis. C’est le cas de certains montages financiers et de certaines opérations spéculatives, c’est le cas de certaines façons de faire des affaires en Afrique, par exemple.

    On parle des brevets des labos et des mesures que les politiques pourraient prendre pour mettre de l’ordre dans tout ça – la vision est quelque peu idyllique.

    A preuve, c’est le Gouvernement américain qui est directement intervenu sur le gouvernement Sud Africain avec la menace d’un embargo économique jusqu’à ce qu’ils cessent de fabriquer à bas prix les médicaments anti pallu en question sous brevet appartenant à ces chers labos.

    On a beaucoup parlé de la grippe aviaire, soudainement. Des risques, des peurs, de la catastrophe terrible si… Au point que Bush décida de renouveler la totalité du stock de Tamiflu et de l’ajuster à la nouvelle menace. Vous pensez, les US, la victime imminente de la pandémie. Fallait au moins faire ça. Et en plus ça se périme vite le Tamiflu. Bon, petit détail sans grande importance, une des personnes ayant le plus d’intérêts financiers dans la fabrication du Tamiflu, c’est Rumsfeld, himself.

    Et comme le souligne Liberal plus haut : « Les dirigeants de Fanny Mae qui se sont gavés sur le dos de la garantie publique en contribuant à envoyer tout le système dans le décor font partie du staff d’Obama. »

    Moi je veux bien compter sur les politiques pour réguler le ni moral ni amoral libéralisme… mais j’ai comme un doute.

    C’est un peu comme le dopage dans le cyclisme. C’est comme ça, ce sport n’est ni moral ni amoral. Mais il y a une course entre les autorités anti dopage et les médecins qui vendent leurs cames. Quand les premières inventent une parade, les autres trouvent un moyen de la contourner et ainsi de suite. Et idem avec la législation. Et puis la presse sportive n’en parle pas trop, puisqu’ils vivent du spectacle. Et puis, les Fédés sportives nationales ou internationales marchent sur des œufs, ils vivent aussi du spectacle. Et là encore, il s’agit d’un sportif Untel qui achète à un Docteur Untel qui se fournit auprès d’un Labo Untel et qui connait bien le boss de la Fédé Untel.

    Il y a un moment, et c’était surtout le propos, où il faut introduire des règles éthiques dans l’histoire, de façon drastique sinon le système implose. On peut aussi attendre que la main invisible de la compétition remettre de l’ordre (et c’est probablement ce qui arrivera, sinon ce sport disparaitra et ses profits avec) mais au prix de quelques centaines de sportifs malades ou morts prématurément.

    On peut aussi faire un Grenelle du cyclisme. On peut aussi faire un Kyoto de la finance internationale.

  • @ Polydamas :

    Le dilemme du prisonnier, Tom, c’est sans échange d’infos, ce qui est la définition même du marché, donc votre question n’a aucun sens.

    L’information est donc parfaite sur les marchés financiers ? Par exemple, dans le cas de la crise des subprimes, l’information sur les risques était parfaite, bien évaluée et disponible ? L’information dont vous parlez ici est justement la connaissance des optima globaux i.e. dans le dilemme du prisonnier, on connaît la situation optimum, qui est que les deux prisonniers se taisent. Mais justement, dans ce cas, il me semble qu’il faut une connaissance a priori de la fonction d’utilité pour arriver à l’optimum global, soit une espèce d’autorité extérieure pour dire ce qui est bon; or le principe même du libéralisme c’est de laisser les acteurs du marché se débrouiller pour trouver ce minimum et c’est pour cela qu’il n’a aucune raison d’être efficace pour trouver un minimum global.
    Dans le cas du dilemme du prisonnier, l’intérêt immédiat de chacun des prisonniers est de parler, or quand ils parlent tous les deux, ils vont à leur perte. Mais il n’y a aucune raison qu’ils sachent a priori qu’ils vont à leur perte tant qu’ils n’ont pas joué le jeu du marché, un peu comme dans la crise actuelle, chacun a maximisé ses profits sans voir qu’on allait alors dans le mur collectivement.

    Quant à votre méconnaissance de la notion d’ optimum global et local, honnêtement là vous me sciez sachant que vous m’avez fait la leçon sur Hayek : le seul intérêt du marché, c’est de trouver des optima (un prix optimum, un maximum de la fonction d’utilité), mais comme beaucoup de choses dans notre monde complexe, il peut y avoir plusieurs situations d’équilibre (pour un prix par exemple), toutes n’étant pas équivalentes en terme d’intérêt des différents agents (i.e. on peut se retrouver « bloqué » à un équilibre économique par les lois du marché, ce qui correspond à un optimum global, sans que cela soit la situation la plus avantageuse pour tous, ce qui correspondrait à un optimum local).

  • @ Eponymus: Vous vous doutez bien que je suis assez proche de votre position.

    « Au départ un homme, plusieurs, etc. ont pris des décisions précises afin d’atteindre des objectifs précis par des moyens précis ».
    Evidemment: j’ai bien en tête que l’on parle de « Salauds » (a la mode Sartrienne). Vous avez raison sur ce point. La ou mes remarques sont plus d’ordre général qu’autre chose, et sans doute déconnectées des faits (il n’y a que cela, des faits, après tout), votre analyse est, hélas, plus lucide.

    « Il y a un moment, et c’était surtout le propos, où il faut introduire des règles éthiques dans l’histoire, de façon drastique sinon le système implose. »
    D’accord bien sur, cette éthique que vous appelez est l’autre nom de cette politique que je pensai invoquer. Mon point était précisément ne pas de verser dans l’angélisme. On ne peut lutter contre les excès non du système capitaliste mais de son utilisation, que par une prise de conscience et une régulation extérieure au système, par peur de corruption d’une part mais aussi parce que les entreprises n’ont pas la légitimité pour se fixer leur propres barrières d’autre part. C’est ce que je pensai souligner dans ce besoin vital du Politique, et du juridique dont la source est le politique.

    Votre exemple pharmaceutique est je crois le plus pertinent parce qu’il touche au cœur du sujet. Droit des brevets contre légitimé des soins. Seule une décision politique pourrait changer les choses. En espérant qu’elle soit inspirée par une éthique humaniste…

  • @ Henri
    Je n’avais pas compris que la fraternité permettait de résoudre la tension entre la liberté et l’égalité, et ça m’a ouvert des horizons intéressants.

  • Echanges intéressants comme souvent.
    Quel le but ultime de notre passage sur terre ? la réponse à cette question, très personnelle, peut nous éclairer sur cette crise. « Bien » vivre sur notre terre pour préparer la « suite » ou bien vivre sur cette terre parce qu’on pense qu’il n’y a rien après. Dans nos pays occidentaux, je pense que la proportion de personnes choisissant la seconde proposition est en augmentation. De là, comment bien vivre sur terre ? Il est vrai que l’argent permet de vivre agréablement, à défaut de rendre heureux. Le danger de l’argent réside dans l’illusion qu’il peut rendre heureux. Pour des personnes intellectuellement développées, ayant des facilités en mathématiques, la finance offre des débouchés fort alléchants. Les études développent l’émulation entre élèves. Tout cela forme un terreau propice à la recherche de l’enrichissement rapide, sans parler de notre monde qui met en avant people, bling bling, et autres modes de vie nécessitant de hauts revenus.

    techniquement, je pense qu’en simplifiant à l’extrême,le déroulement des opérations est le suivant :

    John, banquier à la banque du Kentucky a consenti deux prêts : l’un à Laurel de 600.000 $, sur 10 ans, pour acheter une maison et l’autre à Hardy de 400.000 sur 5 ans pour acheter un appartement. Evidemment, ni l’un ni l’autre n’ont la possibilité de rembourser ces emprunts par les revenus de leur travail. Qu’importe, pense John, ils rembourseront avec la plus-value qu’ils tireont de la vente de leur bien, que je leur imposerai dans 3 ans, l’immobilier grimpe depuis 10 ans.
    Mais John est un peu méfiant, ce n’est pas un poulet de 3 semaines. Il n’a pas totalement confiance dans la capacité de Laurel et Hardy à rembourser. John se dit : « je vais créer Kentucky subprimes, une société filiale de ma banque, qui va acheter pour 1.000.000 $ mes prêts, contrepartie capitaux propres (cela devient comtpable). J’irai ensuite voir ce malin de Ben à NewYork, pour lui vendre mes actions de Kentucky subprimes, cela aura l’air plus séduisant pour lui que mes prêts sur Laurel et Hardy. Ben est intéressé par les perpectives juteuses de Kentucky subprimes. Mais il veut gagner plus. Il raisonne tout haut : » Je vais lui acheter ses titres Kentucky subprimes, au travers de la société Ben-net, qui va émettre un peu de capitaux propres et beaucoup de dettes. Mais Ben est très malin. Il se dit : qui va me prêter de l’argent pour une telle opération ? si mes dettes étaient un tant soit peu garanties pour mes créanciers, je trouverais plus facilement preneur. Il se rend donc chez le réhausseur de crédit, qui le connaissant de longue date, et moyennant forte rémunération, accepte de garantir la dette de Ben-net. Ben est heureux, et peut revendre ses titres à Charles, qui a une belle entreprise florissante à Manhattan. Mais Charles, qui préfère garder ses fonds propres pour ses placements les plus risqués et les plus rentables, souhaite emprunter. C’est un type éveillé, Charles. Au réveil, il s’exclame, il faut que je me fasse « rater » (prononcer rété), c’est à dire noter ma dette, cela facilitera ma levée de fonds et en diminuera le coût. Après moultes rendez-vous avec l’agence de notation Fisch and Chips, la dette de l’entreprise Charles-Attan, est notée AAA, presque aussi bien qu’une andouillette AAAAA. Les dettes émises par Charles-Atan sont donc admises dans la catégorie « investment grade », susceptibles d’être achetées par les plus grands fonds de pension. Freddie la Bonaventure travaille chez un de ces fonds, Blue Morning Star. Dans le cadre de son allocation de risques, il prend donc une pincée (quelques millions de dollars) de dettes de l’entreprise Charles Attan, qui sont in fine assises sur les emprunts de Laurel et Hardy. Tout fonctionne très bien tant que l’immobilier augmente, mais s’effondre comme un chateau de cartes, de bas en haut, si Laurel et Hardy ne peuvent rembourser.

  • Crise financière : crise de trop de marché et de pas assez de droit ou l’inverse.

    Vu de ma petite lorgnette de petit financier « corporate », je me prends à penser que la main invisible a flanché par manque de liberté dans le système global.

    Je m’explique, cette crise illustre l’absence de réflexion qu’induit une réglementation

    Depuis Bâle I et maintenant Bâle II, le calcul du ratio de fonds propres rapporté aux prêts accordés par une banque n’est plus l’apanage de la direction de la banque mais le fruit d’un ratio imposé : Cooke, puis Mac Donough maintenant. L’effet d’une telle mesure, est qu’au lieu de penser « risque », tout banquier qui se respecte pense Cooke et surtout à triturer ses engagements de façon à échapper aux contrôles de son autorité de tutelle et à prêter plus avec moins de capital. Une mesure bien intentionnée s’est donc transformée en une déresponsabilisation générale : je ne couvre pas mon risque mais je suis plus malin que la commission bancaire !

    Réglementation encore, avec les agences de rating. Aves 3 agences « certifiées » au monde, nos financiers en sont revenus à un vieux syllogisme foireux : les agences de rating sont rares, or ce qui est rare a de la valeur donc les agences de rating ont raison. Après la démission Cooke, la démission Moody’s S&P Fitch etc…., plus besoin de réfléchir, je suis bordé vis à vis de mon comité de crédit, ah la sagesse des foules…, rateo ergo sum, AAA on y va…..

    Maintenant juste une petite hypothèse : si personne n’avait fixé par décret le capital minimum des banques et si personne ne s’était mis en tête de noter le risque de crédit à la place du vrai preneur de risque quelle aurait été la forme de cette crise ?

    Et puis encor d’autres idées mais pas ce soir !

  • Les subprimes ne sont pas la raison de la crise actuelle mais le détonateur.
    La titrisation n’est pas la cause de l’effondrement actuel mais son explosif

    Mais le liant qui a permis la construction de cette bombe, c’est l’existence de taux zéro, voire négatifs dans certains pays comme le Japon, face à des taux de 4 ou 5 % aux USA et le passage des grandes sociétés financières d’un système de prélèvement de commissions à une activité de « création de valeur » par le tout simple système de la traite de cavalerie entre copains qui savaient très bien ce qu’ils faisaient.

    Comme le disait Piccoli juché sur une montagne de sucre dans ce film merveilleux :
    Messieurs il n’y a plus de sucre !

    La bulle internet n’était que la répétition avancée du même phénomène sur une plus petite échelle mais avec les mêmes acteurs et le même principe de valeur projetée.
    Seulement, quand on coupe le projecteur, il fait tout noir ………

    Eh oui, on n’apprend jamais rien et ceux qui croient que les fonds souverains arabes ou chinois n’ont pas souffert n’ont qu’à regarder ce qu’ils ont perdu avec Freddie Mac et Fanny Mae qui étaient des placements de rentiers.

    Croire qu’une « régulation » va changer tout cela c’est ne rien comprendre à la nature, au fonctionnement de l’intelligence humaine et à la rapacité des hommes.

    Ce qui change avec le temps c’est l’effet multiplicateur.

    Combien, la prochaine ?

  • Je parle de psychologie mais Tom me parle de fonction d’utilité, on n’est pas vraiment sur le même domaine.

    Bon, un marché, c’est de l’offre et de la demande. Si ils se rencontrent, il y a transaction, sinon, niet. Croire qu’on peut anticiper cet optimum est illusoire puisque personne ne connait l’avenir.

    L’information est donc parfaite sur les marchés financiers ?

    Je crois pas avoir dit ça, c’est juste qu’il s’agit du moins mauvais système pour répandre l’information, cf Hayek. L’information que j’évoque sont les contraintes que subissent l’investisseur ou le commerçant et qui ne peuvent être communiquées que par ce moyen.

    Autant je peux comprendre un optimum non pas local (ça veut dire quoi ? ) mais individuel, autant un optimum global n’a aucun sens, parce que pour savoir cela, il faudrait connaitre les contraintes d’absolument TOUS les intervenants ce qui est complètement impossible. D’où il vaut mieux laisser faire chacun et le principe de subsidiarité.

    Mais il n’y a aucune raison qu’ils sachent a priori qu’ils vont à leur perte tant qu’ils n’ont pas joué le jeu du marché, un peu comme dans la crise actuelle, chacun a maximisé ses profits sans voir qu’on allait alors dans le mur collectivement.

    Mais ça, c’est tout à fait possible, je ne le nie nulle part, les acteurs sont tous capables de s’envoyer collectivement une balle dans la tête. Reste qu’une fois tous les 20-30 ans, au prix d’un mécanisme gravissime, je trouve qu’il y a encore de la marge avant de jeter ce système à la poubelle. Je ne nie pas l’intervention d’un arbitre pour calmer le jeu, mais il ne faut pas oublier non plus qu’il n’est pas sans tâches, lui également.

    Par exemple, dans le cas de la crise des subprimes, l’information sur les risques était parfaite, bien évaluée et disponible ?

    Oui et non, beaucoup n’ont pas pris le temps de voir ce qu’il y avait à l’intérieur de ce qu’on leur refourguait. En outre, la titrisation n’a rien d’aberrant, ce qui l’est, c’est le système de crédit corrélé à la valeur de la maison, qui est à mon humble avis, la raison de cette crise, avec aussi, quelques contraintes interventionnistes.

    @ Opossum:

    Prouvez-moi qu’un spéculateur est un voleur.

    Utilité largement gagée par sa participation aux bulles, aux krachs et aux divers déséquilibres Bref c’est un ‘courtermiste’ facilement allié aux logiques économiques purement financières qui oublient l’entreprise et les stratégies à long terme.

    Sans les spéculateurs, personne n’aurait intégré qu’un jour ou l’autre on allait manquer de pétrole, personne n’aurait compris que la Chine allait se réveiller, personne n’aurait compris le vrai prix des matières premières, personne n’aurait compris ce que représentent la sécurité des boites saines, etc, etc.

    Cependant, il est vrai que ces outils de pure spéculation , transparents à échelle artisanale, finissent par amplifier les mouvements , et, même s’ils fonctionnent toujours avec une contre-partie qui devraient les rendre neutres, créent de l’incertitude et de la destruction de confiance. A ce titre ils devrait être régulés me semble-t-il.

    Non, la spec’ ne crée pas plus d’incertitudes, au contraire, elle la lisse et la réduit, mais je sais que c’est compliqué à comprendre. On va le faire simple, ce qui est important sur un marché n’est pas le prix auquel vous comptez traiter, mais le fait que vous puissiez traiter, on l’a vu récemment, il n’y a rien de plus dangereux qu’un marché qui ne traite plus. Or, la spéculation accroit la liquidité et accroit donc les possibilités de sortir du marché, notamment quand le marché ne va pas dans le sens désiré.

    . La nécessaire contrepartie viendra donc dans temps par un crasch où les plumés seront les derniers entrés dans ce marché.

    Et alors ?
    Nous sommes entre adultes responsables, chacun fait ce qu’il veut avec son fric. C’est aussi simple que cela. Tant qu’il n’y a pas mort d’homme, je ne vois pas bien pourquoi il faudrait absolument tout réglementer.

  • « Est-ce que le vrai preneur de risque est aussi, dans votre exemple, celui qui refile le risque à un copain ? »

    Réponse : dans toute vente il y a une asymétrie d’information : le vendeur en sait beaucoup plus que l’acheteur.

    Donc la réponse à la question est que le preneur de risque en l’occurrence est le « copain » qui se fait refiler le risque et point le « malin » qui le refile.

    Si le « copain » fait bien son boulot, analyse son risque proprement sans se cacher derrière les sigles verbeux des agences et en faisant ses calculs comme un grand en oubliant de tenter de berner le maître du Cooke ( le régulateur) alors ce preneur de risque éclairé doit être en mesure de prendre une bonne décision, un bon risque.

    Dans le cas où l’acheteur n’est plus vraiment une personne physique ou morale, mais un « Structured Vehicle » l’histoire devient un peu plus coriace.

    Dans ce cas , l’acquéreur achète « pour compte de » et vient empiler ses trouvailles du jour dans le bilan du dit Structured Vehicle qu’il financera grâce à des financements plus ou moins prioritaires en termes de remboursement qu’il refilera à qui en voudra bien. On se retrouve là devant un classique problème de déficit d’alignement d’intérêts où un agent à la comm (en banque d’affaires on parle de « fees » bien sûr) ne conserve aucun risque résiduel significatif dans les structures qu’il monte.

    J’ai toujours rêvé de voir les arrangeurs conserver un petit pourcentage de leurs brillantes constructions , juste pour voir, …..j’ai même fait un rêve encore plus fou, que les agences de notation conservent un petit bout du papier qu’elles notent.

  • @ Vercaud

    Tout à fait d’accord. Tant que l’on encensera les Greenspan et que l’on pissera sur les Trichet, on continuera à stocker de l’essence dans le hangar où l’on sait que des gamins jouent avec des allumettes.

    Bien à vous.

  • Michel B.

    Si votre boîte est bénéficiaire mais souffre d’un BFR débiteur, vous avez plein d’option pour vous financer, même en l’absence de prêt bancaire. Vous pouvez mobiliser vos créances, vous pouvez augmenter vos fonds propres en faisant appel à des investisseurs, vous pouvez aussi tout simplement ralentir votre croissance pour voir revenir les liquidités. Chacune de ces options comporte des difficultés et des inconvénients, mais vous avez des options.

    En revanche, si votre boîte fait face à une concurrence internationale et ne parvient pas à répercuter les charges sur les clients, vos seules options sont de rogner sur les salaires, puis sur les investissements, puis sur l’entretien pour finir par crever de toute façon.

  • @ Polydamas , merci de vos développements pour ne pas assimiler spéculateurs et voleurs !
    J’avais déjà modéré mon propos provocateur en les dégradants en joueurs de casino.

    L’idée selon laquelle on aurait découvert un rôle économique ‘noble’ au pur spéculateur qui posséderait donc une fonction d’analyse échappant mystérieusement à tous les autres, me parait douteuse. Il est plutôt nuisible en ce sens qu’ avec les outils à effet multiplicateur il amplifie n’importe quel mouvement et crée donc de la défiance.

    Ceci étant je n’en conclus pas pour autant qu’il faut réglementer leur passe-temps plus ou moins lucratif, assez ludique mais un peu asséchant.

  • Aristote ,
    Trichet est peut-être ondophile (on dit ça ?) … ?
    Mais pourriez vous développer plus pédagogiquement votre idée sur les responsabilités supposées de Greenspan ou de Jean-Claude … (et le rôle des taux d’intérêt)

    Car Nicolas cherche les responsables … 😉

  • Curieux que personne n’ait encore parlé des paradis fiscaux, et du peu d’empressement des dirigeants des principales puissances (ceux qui sont supposé fixer les règles éthiques, en somme…) à les reglementer.
    Plus que du rôle du politique dans tout çà, je préfère parler du rôle de l’électeur. Tant que ce dernier considèrera la finance internationale ou les guerres pour les matières premières comme des problèmes lointains sur lesquels il n’a pas prise, les politiques agiront en parfaite collusion avec les « capitalistes M16 entre les dents » d’Eponymus.

  • « Et alors ? Nous sommes entre adultes responsables, chacun fait ce qu’il veut avec son fric. C’est aussi simple que cela. Tant qu’il n’y a pas mort d’homme, je ne vois pas bien pourquoi il faudrait absolument tout réglementer. »

    C’est bien le problème… la responsabilité. Quand les malversations sur le marché, même si elles sont « légales », pêchent sur le plan de l’équité et de l’éthique et pêchent de par les risques que ces activités font peser sur l’économie mondiale, il est difficile de croire que ces gens agissent en tant qu’adultes responsables.

    Oh bien sur, le boursicoteur, le petit porteur sait ce qu’il risque – il « joue » en bourse. Il peut donc gagner comme il peut perdre. Mais c’est une courte vue. Si, ces activités entraînent faillites, chômage, ralentissement de l’économie et au final une baisse généralisée du moteur économique, oui, au final, dans les pays les moins protégés, il peut y avoir mort d’hommes.

    Si le spéculateur ou autre acteur du marché s’engouffre dans un vide, si son activité bien que parfaitement respectueuse des lois et des coutumes du milieu, voir même de certains mécanismes, engendre une catastrophe économique juste parce que les régulations n’avaient pas prévu le cas de figure, il n’est peut être pas coupable de quoi que se soit, mais il peut par contre être responsable de tout.

    Ca me rapelle l’épisode des « moineaux » de Mao. Dans le cadre de ces plans communistes et des directives du Grand Timonier pour le Grand Bond en Avant, Mao et les instances du Parti avait publié et relayé l’ordre de diminuer fortement le nombre de moineaux en Chine qui bouffaient les semances et les récoltes. Avec l’ingéniosité, l’efficacité de la discipline chinoise et communiste (les paysans recevaient des primes ou des médailles pour tant de moineaux tués, etc.) le nombre de moineaux a dramatiquement chuté en Chine. La récolte a été magnifique. Sauf que les années suivantes, les récoltes ont été tellement détruites par les insectes (chenilles que les moineaux mangeaient) que le nombre de morts des différentes famines qui ont suivies a été estimé à quelques 6 millions. La taille d’un génocide.

  • Si, ces activités entraînent faillites, chômage, ralentissement de l’économie et au final une baisse généralisée du moteur économique, oui, au final, dans les pays les moins protégés, il peut y avoir mort d’hommes.

    Pour cela il faudrait que la spéculation puisse à elle seule déclencher des crises, ce qui n’est pas possible, elle n’a pas l’impact suffisant pour, la spéculation ne peut déclencher des bulles ou des krachs à elle seule, il faut des montants autrement plus importants pour cela. Au fait, je note que les mêmes qui hurlaient à la mort de la spéc quand le pétrole était à 150 $ ne disent plus rien à ce sujet maintenant qu’il est à 120 $. Pourtant les speculateurs n’ont pas disparu dans la nature, ils sont toujours là et toujours aussi actifs.

    L’idée selon laquelle on aurait découvert un rôle économique ‘noble’ au pur spéculateur qui posséderait donc une fonction d’analyse échappant mystérieusement à tous les autres, me parait douteuse. Il est plutôt nuisible en ce sens qu’ avec les outils à effet multiplicateur il amplifie n’importe quel mouvement et crée donc de la défiance.

    Il suffit de comparer le marché spot (ie, comptant, c’est le marché physique) et les marchés à terme sur n’importe quelle matière première. A votre avis, quel est le marché le plus liquide, et donc, le moins dangereux ? Quel est le marché sur lequel on trouve le plus de contreparties ? En outre, comment croyez vous que les assureurs pourront construire leurs assurances à terme si personne n’est en face pour prendre le risque, si il n’y a pas de vils spéculateurs ? Parce qu’il faudrait voir à ne pas oublier que les spéculateurs, ce sont justement ceux qui permettent à tous les autres, industriels, banquiers, producteurs, investisseurs, assureurs, de dormir tranquille en leur permettant de se couvrir sur ces marchés.

    Alors la spéc’ est toujours aussi inutile que cela ? c’est justement elle qui permet à l’économie de fonctionner, c’est aussi simple que cela.

  • Au prétexte de l’exactitude sourcilleuse (même si tu oublies que j’ai bien précisé « et autres acteurs sur le marché »), Poly, je vais finir par croire que ta défense bec et ongles du « spéculateur » est un tant soit peu motivée par des intérêts corporatistes.

  • @ Aristote
    Bon ok, mais peut-on dire que les taux d’intérêt bas sont la cause de la crise ? N’allez vous pas un peu vite là ?
    Même si l’excès de crédit facile cherche sans être trop regardant, un débouché naturel dans une utilisation , il reste qu’on est pas obligé d’être aussi imprudent en gageant des prêts sur des mouvements aussi fragile que ceux des hausses de l’immobilier.
    N’est-il pas plus sain de réfléchir sur la titrisation et ses mécanismes obscurcissants, que les acteurs du monde financier semblent avoir utilisé en toute connaissance de cause.

    Mais une question : je lis que l’encours des créances pourries titrisées serait en définitif, assez faible . Si c’est le cas comment cette crise peut-elle avoir ce retentissement ? J’ai lu également que les faillites de ces derniers jours auraient révélées d’autres pratiques à risques des banques. Est-ce l’explication ?

  • Opposum : les taux d’intérêts

    Supposons que j’ai de l’argent et que je constate que la bourse récupère de sa chute de la bulle Internet (déjà oubliée) et surfe sur la croissance des pays émergents et l’expansion « sans fin » de l’économie américaine.

    Comment profiter de ce mouvement ?

    J’emprunte au Japon les sommes dont j’ai besoin et je vais les utiliser avec un effet multiplicateur important (dit effet de levier) pour augmenter mon gain (et le risque certes, sinon il n’y a pas spéculation). Cela ne me coute rien puisque les taux d’intérêts sont nuls là bas. Il ne me reste que le risque.
    Les banques me suivent puisqu’elles touchent leur commission au passage.
    Pour info le taux multiplicateur moyen des Merrill lynch, UBS et autres Lehman était il y a quelques semaines de 30 à 40 : 30 dollars d’encours pour 1 dollar de fond !

    Je peux utiliser cet argent pour financer les emprunts du rêve américain (ma maison à moi pour moi sans questions indiscrètes) et prélever des intérêts au niveau de ce qui se fait aux USA, (base de départ 4 à 5 % mini pour tenir compte du risque à moyen terme).
    Je suis gagnant rien que par le différentiel des taux d’intérêt.

    Je pourrais aussi acheter des trackers matières premières car les éclaireurs du monde savent bien que les financiers se couvrent de la chute du Dollar en achetant du pétrole et des matières premières dont raffolent les pays émergents pour pouvoir produire pour eux et pour les pays occidentaux. En faisant cela j’attire l’attention du monde sur la rareté du pétrole et l’impact du développement accéléré des pays émergents sur la demande en matières premières.

    Quand au premier semestre 2007 je lis les articles dans la presse anglo saxonne (au printemps en France) qui expliquent le mécanisme des sub primes et l’écroulement qui est en train de se produire, je me demande comment moi, spéculateur de type Polydamas, je vais pouvoir m’en servir pour éclairer le monde et ne pas me faire piéger.
    Donc je sais que le défaut sub prime va affecter toutes les institutions financières. Je ne sais pas à quel niveau mais il y aura un effet très négatif. Donc je vends tout ce qui est lié à la construction et aux activités financières. Je m’arrange aussi pour passer le mot aux chroniqueurs économiques qu’il faut surtout ne pas paniquer et garder son calme face aux petits soubresauts de la bourse (le temps que je vende mes placements en tout cas).
    Relisez bien la presse, c’est ce qu’on fait de nombreuses banques et sociétés de placement pendant l’été 2007 (BNP, Goldman Sachs entre autre) et c’est ce qui s’est traduit par la première chute des cours en automne. Pourquoi les autres banques d’affaire n’ont-elles pas suivi : parce que leur rendement dans les dernières années était bien inférieur à celui des leaders et que le retard à rattraper ( pour bénéficier de l’afflux des capitaux) ne pouvait se jouer que sur ces placements à risque. Encore un moment monsieur le bourreau. Quand la guillotine a commencé à tomber il était trop tard pour se dégager !

    Cette bulle financière est donc largement le résultat de ces deux effets conjugués :
    la possibilité d’emprunter à taux zéro
    la volonté des institutions financières d’accepter le risque de ces effets de leviers considérables car ils multipliaient d’autant les gains financiers en commissions transactionnelles.

    Ne sortez pas votre mouchoir, les contribuables américains (et européens) vont rembourser un milliard de Dollar (pour le moment) sans rien dire, voire même en remerciant l’état providence qui évite la banqueroute.

    Pour info, l’équivalent du quart du PIB mondial est dans les mains de quelques 100.000 personnes et le taux moyen de retour sur investissements des grands cabinets de gestion de fortune est supérieur à 20% annuel sur les dix dernières années.

  • Merci Vercaud.

    @ Polydamas : Eurêka! , le spéculateur « attire l’attention du monde sur la rareté » . La voilà la rémunération légitime aux déplacements de richesses qu’il opère vers sa poche, en apparence sans contrepartie productive . Bon, je 😉 !

  • @ Oppossum & Vercaud : Désolé de rentrer dans des détails techniques, le billet de Vercaud est tout a fait correct dans son ensemble. Mais il ne répond pas a la question d’Oppossum a savoir : « Je lis que l’encours des créances pourries titrisées serait en définitif, assez faible . Si c’est le cas comment cette crise peut-elle avoir ce retentissement ? ». Vercaud répond les taux d’intérêt. Ce qui n’est pas tout a fait exact.

    Ce qui fait que cette crise est d’abord et avant tout une crise, c’est le mécanisme de confiance qui grippe le marche interbancaire. Ce mécanisme n’est pas lié en soi aux taux bas que vous citez, mais a l’incapacité des banques a identifier leur exposition a tel ou tel produit dangereux (en l’espèce les obligations « subprime »). Cette exposition (on parle de « risque » en jargon bancaire) a en effet été saucissonnée, revendue, repackagée, et j’en passe (permettant au passage a des « banquiers assoiffés de sang et de bonus » de prendre leur commission – il faut bien maintenir leur train de vie).

    Du coup, personne ne sait chiffrer son exposition précise aux produits toxiques, et tout le monde se défie de tout le monde, provoquant la crise de liquidité entre les banques (chacune ayant peur de voir sa contrepartie faire défaut). C’est cet épiphénomène qui provoque la crise, dans une prophétie auto-réalisatrice bien connue…

    @ Oppossum: Ne vous effrayez pas en pensant qu’il s’agit de « mécanismes obscurcissant ». La titrisation ce n’est pas « mal » en soi. C’est un produit remarquable qui rend des services a toute la sphère financière. Et on ne parle pas ici (forcément) de spéculation, mais de produits de placement pour tout un tas de gens.

    @ Vercaud : votre billet tout a fait pertinent décrit 2 choses un peu différentes du déclenchement de la crise elle-même. D’une part, le mécanisme dit du Carry Trade Dollar/Yen, qui est l’un des excès a l’origine de cette crise. Et d’autre part la surliquidité planifiée par la FED depuis des années a l’origine d’un crédit si abondant que l’on en a fait bénéficier des gens (les pauvres, ne nous cachons pas derrière notre petit doigt) qui n’auraient pas du y avoir accès.

  • Et puis on ne pourra pas faire non plus l’impasse sur le sujet de la réglementation. J’entends presque tout le monde hurler a un besoin de plus de réglementation. Mais personne ne souligne l’impact catastrophique d’une mesure récente : l’obligation de valoriser au bilan des banques les actifs a leur prix de marchés.

    Dans le cadre d’une crise, le prix de marché est quasi-nul, car personne ne souhaite acheter (personne ne peut acheter ou presque). Ceci entraine des pertes (comptables) et donc un besoin d’argent pour compenser ces pertes. Par contagion, c’est la valeur de tout un tas d’actifs qui est touchée sans que l’on sache encore si la perte sera réelle… C’est ce qui s’appelle mettre de l’huile sur le feu !

    Enfin, pour les Anglophones, voici un billet intéressant de Boris Johnson le maire de Londres (certes, le monsieur est surnommé dit « Boris the Buffoon », mais bon). Pour ne pas transformer les banquiers en bouc-émissaires « Girardiens » ! 😉

    http://www.boris-johnson.com/2008/09/23/financial-crisis-banking-and-housing/

  • @ Vercaud

    Oui, un peu comme Le Sucre de Rouffio, avec des valeurs haussées ou maintenues artificiellement, jusqu’au moment choisi ou un type dit « ya plus de sucre » ou « ça vaut pas un pet de lapin, en fait », un système de transfert d’un endroit à un autre qui ressemble bien à de la cavalerie de traites.

    Sans rentrer dans le détail, (et au passage, merci à Henri et d’autres pour la vulgarisation même si j’ai du mal à vous suivre jusqu’au bout), les activités boursières décrites par Vercaud, elles produisent quoi de concret ? Elles sont équitables ? Où est le respect de la fameuse loi de l’échange ?

    Depuis mes objections et mon impression initiale que la « spéculation sur du vent » crée un déséquilibre, on me répond que s’il y a des pertes pour certains, il y a des gains pour d’autres – et d’autres prétendent comme le dit Koz que « le seul fait de faire des profits est valorisé en soi, parce qu’ainsi, on injecterait des fonds dans l’économie et que, donc, ipso facto, ce serait bien » sauf que si j’ai bien compris, ça devrait marcher dans les deux sens. Si les pertes entrainent des « profits », les « profits » sont construits (je ne parle pas d’un marché sain ici, mais de la part artificielle de celui-ci) sur des pertes.

    Lorsque ces baisses sont justifiées par une diminution de la valeur réelle d’une entreprise par rapport à d’autres, par exemple, le transfert est sain – lorsque tout ceci est purement artificiel et basé sur des effets d’annonce, ou pire encore, lorsque les mécanismes reposent sur une forme de cavalerie, où se trouvent les fonds injectés dans l’économie ? Qui perd, qui gagne ?

    Autrement dit, la calerie de traites lèse bien quelqu’un – elle a bien un effet négatif en créant une valeur artificielle. Dans ces opérations boursières qui s’y apparentent, qui est lésé, pourquoi, comment, où ?

  • « Spéculation sur du vent ». Bien sur que non. Eponymus, ma remarque ne s’adresse pas a vous en particulier, mais je suis toujours surpris de la mauvaise presse et du peu de compréhension des mécanismes économiques et financiers de la part des Français. Bon je me lance – désolé de prendre un ton un brin paternaliste et (pire encore) ennuyeux. 😉

    Il y a 3 personnes dans une transaction financière. Quelqu’un qui achète parce qu’il pense que le bien est sous-évalué. Quelqu’un qui vend parce qu’il pense que le bien est surévalué. Quelqu’un qui prend une commission parce qu’il fait se rencontrer acheteur et vendeur. La finance, au départ, ce n’est pas les 2 premiers acteurs. C’est le troisième, et donc je mets au défi quiconque de penser qu’il n’y a pas de valeur dans ce savoir-faire se rencontrer les acteurs économiques. Petit exemple.

    Acteur 1 : Je suis le DAF d’une boite industriel qui transforme du pétrole en plastique. J’achète aujourd’hui du pétrole pour demain, parce que je pense que McCain sera élu et va aussitôt bombarder l’Iran faisant ainsi exploser les prix du pétrole. Donc le pétrole que j’achète aujourd’hui vaudra plus cher demain, je couvre mon risque électoral.
    Acteur 2: je suis producteur de pétrole. Je vends du pétrole aujourd’hui parce que je sais que Obama sera élu (vu ce que j’ai contribué a sa campagne, puisque c’est bien connu le Texas roule démocrate) et va aussitôt faire « ami ami » avec Chavez et ouvrir grand les vannes du pétrole vénézuélien. Je couvre mon risque électoral.
    Acteur 3 : je suis banquier assoiffé de sang et de bonus, je fais se rencontrer (par téléphone hein j’ai pas que ca a faire) le vendeur et l’acheteur et prend ma commission. L’électoral, je m’en tamponne.

    Bon, que l’on vienne pas me dire que le jeu est a somme nulle. Le deal permet a tout le monde d’être content. Pas seulement a celui qui a raison sur l’élection américaine. Parce que les 2 industriels pourront prévoir leur investissements industriels et faire tourner leur boutique sur des bases fiables et se déconnecter du risque électoral. Ca fluidifie toute l’économie cette affaire, ce qui est déjà une vraie valeur. Sans compter sur le bon vrai argent que le financier va dépenser au Pink Paradise et qui va rémunérer a leur juste valeur nos amies danseuses d’Europe de l’Est. Tout le monde est bien content.

    Les choses se compliquent lorsque l’on multiplie a l’infini le nombres des acteurs. Genre, le DAF qui achète et qui vend la même chose pour empocher la différence… Parce que finalement il a changé d’avis et pense qu’Obama va gagner, alors que en face quelqu’un d’autre pense toujours que McCain va gagner. etc… Est-ce que c’est de la spéculation ? Non, cela crée de la profondeur dans le marché ce qui est en soi une immense valeur ajoutée pour tous les participants. Donc tout le monde est toujours content, et le banquier peut boire du Petrus en regardant danser ses amies d’Europe de l’Est (parce que le Petrus c’est bon et cher).

    « Ah la, la, mais je croyais que les spéculateurs étaient les financiers, Henri ! On m’aurait menti ?? » Non, le financier, parfois c’est celui qui gère la position de quelqu’un d’autre. Le financier apparaît dans les 3 rôles mais -de fait- il continue a représenter les DAF et les producteurs (qui sont des deux cotés de la transaction, souvent en même temps et souvent les mêmes). Est-ce de la spéculation, non, c’est une intermédiation, mais tout le monde est toujours content (et le financier fume un cigare et finit son Petrus en matant ses danseuses, ce qui -il faut bien l’admettre- ne témoigne pas d’un gout particulièrement sophistiqué).

    Alors, dernière étape, un salaud de riche se dit qu’il pourrait faire de l’argent en pariant sur l’erreur de la partie adverse. Lui, il s’en fout du pétrole, ce qu’il veut c’est gagner de l’argent (Une précision bien sur, il va de soi que personne ne connaît ce type de gens, personne n’a d’argent de coté, et tous les gens qui travaillent le font par pur altruisme). Il confie donc son argent a un financier qui représente déjà des DAF, des producteurs et même tout plein d’autres salauds de riches. La, c’est sur, le facteur de Neuilly va me dire que c’est de la spéculation. Par définition, oui. Mais ou le mal ? Ca apporte de la liquidité dans le marché, certains vont gagner certains vont perdre, c’est la vie. Mais le marché est plus profond et plus liquide, toute l’économie est fluidifiée. Et moi, le banquier assoiffé de sang et de bonus, je peux arriver au Pink Paradise en Aston Martin, que ca en jette a fond auprès des collègues.

    Epnomynus, vous le mettez ou, vous, le « marché sain » et ou la « la part artificielle de celui-ci » ? Si vous en êtes capable, vous êtes beaucoup plus fort que je ne pensai. Parce qu’il n’y a pas, a aucun moment de saut qualitatif. Il n’y a qu’un continuum qu’on appelle le marché et qui ensuite va connaître ses crises, ses emballements, ses folies comme toute activité humaine… Mais rassurez-moi, ce n’est pas le marché que vous vouliez interdire ?? 🙂

    Désolé pour ce billet long et rébarbatif.

  • @ très cher Henri

    Je vais vous rassurer tout de suite (faites passer le mot au cas où d’autres que vous s’en inquiéteraient – je ne veux pas ajouter à la panique) j’affirme bien clairement : non ce n’est pas le marché que JE voulais interdire. Voilà, j’imagine que ça va mieux.

    Ce sont les pratiques dangereuses qui violent les lois de l’équité et qui ont pour conséquences directes l’effondrement des économies mondiales pour le plus grand mal des individus contribuables qui, eux, n’ont rien risqué mais vont payer.

    Et relisez le billet de Koz… Ya faute là, ya même anti-jeux. Faut que quelqu’un sorte le jaune. Je lève le bras et je cite les extraits du règlement qui s’applique :

    « Mais des comme moi, tout de même, il y en a quelques-uns. En réaction à un système dont le fonctionnement nous échappe, certains choisissent la contestation, éventuellement radicale, d’autres le silence. Parce qu’ils voudraient bien faire valoir leur “solide bon sens” mais savent qu’ils susciteront les sarcasmes des personnes plus avisées. »

    et…

    « Et la capacité d’acceptation diminue fortement lorsque le marché, au lieu de fonctionner sans que l’on comprenne comment, se pète la gueule sans qu’on comprenne pourquoi. »

    Non, non Henri, ce que je vous demande, derrière la grille en fer forgé qui nous sépare, c’est de laisser tomber le masque, de cracher le morceau, de nous confier les petits secrets de famille, de sortir les cadavres du placard… Je ferais preuve de la plus grande mansuétude, mais allez, vous qui avez un œil dans la place, dites nous qui est le méchant. Si ya pas de méchant, alors qu’est ce qui ne va pas dans le système.

    Parce que la première crise fut dure, la deuxième encore plus, et elle n’est pas finie, et Vercaud nous annonce que par un effet multiplicateur, la prochaine sera inévitable et encore plus dure.

    Vous pouvez pas éternellement vous réfugier derrière les « emballements » en attendant que la prochaine frappe encore plus fort, si ? Tout va finalement bien, ya pas de méchants, et ya pas de défauts à corriger ? C’est juste les inévitables petites et grandes folies de toutes activités humaines ? Ya pas un seuil quelque part ? Ou une malfaçon à la base ? Ya rien à faire ?

    Quand Vercaud parle de cavalerie de traites…. quand il nous parle de 30% d’assurés juste parce que vous passez d’une place financière à une autre avec des intérêts différents, juste un mouvement d’écriture… c’est normal ? Il dit n’importe quoi ?

    Venez donc vous confier, mon petit, personne ne nous écoute. On le dira pas, on est du même bord après tout, on veux juste comprendre.

  • @ Eponymus :

    Vercaud simplifie les choses. Dans l’exemple qu’il prend, il y a quand même des risques, risques de change (parité Yen/Dollar), risques de maturité, etc. Certains peuvent être couverts, mais c’est coûteux et la couverture parfaite n’existe pas, ne serait-ce qu’en raison du risque de contrepartie.

    Bien sûr qu’il y a des fautes et des cadavres dans le placard. Telle agence de notation, pour gagner de la part de marché chez les émetteurs, n’a pas posé les questions qu’elle savait devoir poser, même si aucune règlementation ne lui imposait de les poser. Tel banquier s’est contenté de finasser avec les règles prudentielles, perdant tout sens de responsabilité dans la gestion de ses risques. Tel gérant de fortune, pour dégager la rentabilité plus ou moins promise au client, ou pour ne pas risquer de faire moins bien que le concurrent, s’est laissé vendre ces placements exotiques, dont il ne comprenait pas bien les tenants et aboutissants, mais au profil de rentabilité si attrayant… On peut les multiplier, les exemples.

    Bien sûr il faut améliorer le système, mais sans se faire d’illusions sur la capacité d’un système, quel qu’il soit, à faire disparaître le goût du lucre, etc.

    Il y a bien une malfaçon à la base, mais elle me paraît constitutive de la nature humaine (natura lapsa). Il y a toujours quelque chose à faire, sans se faire d’illusion sur l’existence « d’une » solution.

    Bien à vous.

  • @ Eponymus. Il y a tant a dire. On dit que la nuit porte conseil. Je l’ai laissée passer avant de vous répondre. Et bien, j’ai mal dormi.

    « Ce sont les pratiques dangereuses qui violent les lois de l’équité et qui ont pour conséquences directes l’effondrement des économies mondiales pour le plus grand mal des individus contribuables qui, eux, n’ont rien risqué mais vont payer. »
    Les lois de l’équité, certes. On retombe sur la notion d’éthique qui vous est chère. Mais le problème c’est de la définir. Elle est mouvante, cette éthique, selon les pays et selon les gens. Pas trop pour moi, hein (dans un commentaire récent ici-même, j’en appelai a l’universalité des valeurs et j’étais fort peu suivi…); mais non, pour tout le reste du monde. Mais voudriez-vous que je m’érige, moi, en juge du reste des hommes ?
    Donc le plus petit dénominateur commun, c’est la loi, pas l’éthique. En espérant toutefois que la loi soit inspirée par la souci de justice et donc l’éthique telle que nous la définissons vraisemblablement tous les deux. Dans cette affaire de crise, trouvons-donc des contrevenants a la loi de leur pays et nous serons d’accord, punissons-les, de façon juste. Il y en aura. Mais, ne vous y trompez pas, ce ne sont pas eux les responsables de cette crise… Car leur influence n’est somme toute que marginale dans cette crise.

    « Ce que je vous demande, derrière la grille en fer forgé qui nous sépare, c’est de laisser tomber le masque, de cracher le morceau, de nous confier les petits secrets de famille, de sortir les cadavres du placard… ». « Tout va finalement bien, ya pas de méchants, et ya pas de défauts à corriger ? ».
    Mais Eponymus. Je veux bien tomber le masque, comme vous m’y appelez. Mais qu’y verrez-vous, si ce n’est vous-même, votre frère en inhumanité ? Il n’y a pas de grille en fer forgé entre nous, Eponymus. Vous êtes mon semblable. Parce que ne nous leurrons pas, c’est bien chacun de nous tous les méchants, les cupides.
    La brisure morale n’est pas au milieu du marché. Elle est a son fondement, c’est sa fondation même. Cette recherche de confort et de profit. Elle prendra différents noms. Protéger ses enfants d’un avenir incertain, leur offrir le meilleur, mettre de coté, profiter de la meilleure offre, faire travailler ses menues économies, garantir sa retraite. Et qui fixe quand nous nous arrêtons ? Qui dit que c’est assez, si ce n’est chacun de nous ?

    Cette crise est hideuse, car elle nous montre en loupe notre propre avidité, notre propre cupidité. C’est le système que nous avons choisi. Il y aura toujours des crises parce que le désir humain est infini.
    Vous tiquez a me lire ? Mais n’achetez-vous pas vos vêtements au meilleur prix depuis la mondialisation ? Ne vivez-vous pas non plus a crédit: en France depuis 30 ans, la nation dépense plus qu’elle ne gagne ? Ne laissez-vous pas allumées les lampes de votre appartement ? Et ne partez-vous en vacances en voiture ? Quid des ressources de la planète ?

    Le monde vit a crédit, Eponymus, et tout le monde le sait. Et vous voudriez venir me dire que cette crise financière est déconnectée du réel ? Mais c’est l’inverse : c’est nous qui sommes déconnectés du financer depuis beaucoup trop longtemps. Nous n’avons pas les moyens de nos désirs infinis, Eponymus. Et la seule voix discordante dans le concert des nations, c’est celle qui prophétise et aplanit la voie du Seigneur.

  • Je vous conseille le tres bon film « le sucre ». Les banques ont une combine en or…un magnat du sucre repand une rumeur de penurie mondiale et bloque les stocks pour faire monter les cours.

    Tout le monde s’empiffre.
    Le magnat avertit qu’il va annoncer l’abondance de sucre.

    Toutes les banques sautent, ayant voulu s’empiffrer encore et encore jusqu’a la derniere seconde…pour « le dernier sou, le dernier ptit sousou ».

  • @ Henri :
    Quoique fortement béotien dans ce débat j’apprécie au plus haut point votre remarque suivante (profondément philosophique) :
    « Parce que ne nous leurrons pas, c’est bien chacun de nous tous les méchants, les cupides. La brisure morale n’est pas au milieu du marché. Elle est a son fondement, c’est sa fondation même »

    La sur-spéculation n’est qu’une conséquence de nos actes quotidiens (Et s’en trouve ainsi blanchie .. et nous, noircis !)
    Je la reformule ainsi : bien souvent (dans les systèmes ‘libres’), des dysfonctionnements majeurs ne sont que la somme de l’envers caché de nos micro-comportements individuels. (D’ou difficulté à trouver le ‘responsable’ …)

    Allons même plus loin : cela nous amène à conclure , non pas que la main invisible n’existe pas mais qu’il y en a une seconde, une autre ‘main invisible’ à l’envers ? Deux anges gardiens invisibles ,muets et opposés.

    Lorsqu’on a pigé et integré ce phénomène, on se plait à rêver ou regretter un structurant supérieur ou organisationnel (religieux?).
    Koz écrit : « Il n’y a plus de bien commun ou de valeur supérieure, le seul fait de faire des profits est valorisé en soi, parce qu’ainsi, on injecterait des fonds dans l’économie et que, donc, ipso facto, ce serait bien »
    Et il ajoute « nous n’avons plus de valeur commune et surtout chaque individu est devenu la mesure de toute chose, son unique référentiel »
    Mais ce regret n’indique pas de solution.

    On peut parler aussi d’éthique comme Eponymus, mais , vous avez raison, c’est à la fois une notion éternelle dans son inspiration profonde mais très relative dans ses réalisation géographiques et historiques.
    Bref une notion difficile à cerner comme vous l’expliquez en commentaire 82 où vous démontez la notion même de spéculation en la confrontant au continuum du réel.

    Alors il faut en revenir à une notion plus simple de règle du jeu, dans l’intérêt, la survie même, de la grande partie que nous jouons tous.
    Et donc il faut revenir au fondamentaux de la vie individuelle, de la vie en société . Si divers soient-ils, une chose est certaine : le but de nos existences n’est pas la fluidification financière éternelle et sans fin des marchés, comme vous l’affirmez : « Mais ou le mal ? Ca apporte de la liquidité dans le marché, certains vont gagner certains vont perdre, c’est la vie. Mais le marché est plus profond et plus liquide, toute l’économie est fluidifiée »

    Et bien non , il arrive un moment ou il faut mettre une règle , arbitraire, injuste, nominative, anti-libérale , anti-productive, et même si mon niveau de vie ne progresse plus à la même allure et même si mon avenir est un peu moins bien garanti , et même si mes enfants sont un peu moins bien protégés etc …

    Une règle qui rend l’ensemble du système plus fluide et pas seulement le marché.
    Donc il ne s’agit pas de trouver des lampistes ni de bloquer ce qui marche bien, ni de construire des chmilblic réglementaires . Au besoin dérèglementons et mettons d’autres régulations plus efficientes

    C’est le sens de la question d’Eponimus, je crois, même s’il l’emballe dans de l’éthique un peu génante, j’en conviens

    Mais chose curieuse, les praticiens de la finance qui nous expliquent par le menu l’enchaînement fatal des choses, ne savent pas trop quoi proposer – mis à part fustiger toute réglementation (certainement à raison parfois) ou l’éternelle nature humaine qu’on ne corrigera jamais -.

    Ne parlons pas des politiques qui naviguent dans les généralités fumeuses.

    Il est vrai qu’il y a quelque chose de surréaliste à voir le choeur de la société civile et du politique fustiger le monde financier qui serait déconnecté de la réalité de l’économie, alors qu’eux mêmes sont largement déconnectés des règles et des réalités élémentaires de la finance et de la monnaie.
    C’est ce que vous dites génialement, Henri : « c’est nous qui sommes déconnectés du financer depuis beaucoup trop longtemps. Nous n’avons pas les moyens de nos désirs infinis »

    Comme si le monde non-économique s’était affranchi des règles élémentaires d’équilibre en basculant dans un système basé sur généralisation de la dette perpétuelle et croissante dont le remboursement est différé à une échéance de plus en plus lointaine.
    Et en attendant découpons, charcutons, titrisons, vendons, décantonnons, ré-emballons etc … car on fond , car il y en a , de la dette et il faut bien en faire quelque chose
    !
    Même si ce ne sont que jeux d’écriture (comme aiment à le rappeler certains) puisque la richesse globale n’en est pas affectée directement et reste constante, c’est une formidable machine à broyer la confiance , qu’on est en train d’armer.
    Et un jour (?) il apparaîtra clairement que la contrepartie ne peut plus se réaliser dans des délais raisonnables et l’on assistera alors à une mutualisation totale , anarchique et mondiale ou chacun tentera de sauver ses billes en les retirant à temps du système.

    La crise , un retour sauvage à l’équilibre par une réalisation de l’irréalisable sous la forme d’une mutualisation sauvagement généralisée et forcée des pertes.
    Bon j’exagère un peu dans le fumeux, quand même.

  • @ Opposum

    En fait, je crois que seriez moins gêné par mes références à l’éthique si je vous expliquais qu’à la différence de la morale (et c’est précisément la raison pour laquelle j’ai choisi ce mot), ma définition de l’éthique sur un plan philosophique (je ne parle pas simplement de déontologie là) est à peu près la suivante :

    « Alors il faut en revenir à une notion plus simple de règle du jeu, dans l’intérêt, la survie même, de la grande partie que nous jouons tous. »

    J’aurais peut être remplacé « simple » par « saine » en précisant que j’entends par là : « une notion plus douée de raison et de bon sens ».

    @ Henri

    Superbe commentaire, que j’ai lu et relu. Je vous répondrais avec la réflexion que la qualité de vos propos mérite.

    Idem pour celui d’Aristote et celui ci dessus d’Oppossum.

  • Opossum et Koz posent logiquement la question d’un « structurant organisationnel » qui permettrait d’éviter les conséquences néfastes d’une société purement libérale (càd ayant fait le choix de ne pas imposer de valeurs). Cette question est très bien posée, à mon sens, par JC Michéa, dans « l’empire du moindre mal ». Le siècle des lumières est arrivé à la conclusion que l’imposition de valeurs (à l’époque religieuses) conduisait à une lutte de pouvoir entre les tenants de différentes valeurs, et finalement à la guerre (de religion, donc, à l’époque). La solution a été de refuser d’imposer des valeurs, et de s’en remettre au marché (à la main invisible). Mais Michéa observe que cela revient en fait à imposer les valeurs du marché (rationnalisme supposé des acteurs, égoïsme, et concurrence, pour faire bref, mais il y aurait déjà là de quoi discuter), imposition masquée par la déclaration de leur caractère naturel. Or, poursuit Michéa, ce caractère naturel est faux, ou incomplet, et le problème n’est donc pas réglé.

    La question se repose donc d’un « structurant organisationnel ». La religion en était évidemment un, mais qui ne me semble plus envisageable actuellement. Elle présente d’autre part un énorme inconvénient, qui est qu’elle est transcendante, venant d’un ailleurs de cette société. L’accession à l’autonomie, au sens de Castoriadis, serait donc pour la société d’assumer le choix collectif des valeurs nécessaires à son fonctionnement harmonieux. N’est-ce pas là la vision la plus noble de la démocratie? Aucun besoin de compétences techniques pour choisir des valeurs, donc chacun est réellement à égalité avec l’autre. Et je reviens au premier post de Henri: la fraternité pourrait être une valeur choisie collectivement pour résoudre les tensions entre liberté et égalité. Elle est d’ailleurs déjà inscrite au fronton de nos écoles, comme on dit.

  • @ niamreg

    « L’accession à l’autonomie, au sens de Castoriadis, serait donc pour la société d’assumer le choix collectif des valeurs nécessaires à son fonctionnement harmonieux. »

    Comme firent les Allemands dans les années 30 ?

    On ne peut discuter d’hétéronomie vs. autonomie sans proposer une hypothèse, je dis bien une hypothèse, sur ce que pourrait ou devrait être l’Autre pour que l’hétéronomie ne serve pas de repoussoir à deux balles.

    Bien à vous.

  • @ Aristote,

    Oui, bien sur, c’est un exemple évident que l’autonomie n’est pas forcément une réussite (même si l’accession au pouvoir de Hitler n’a été démocratique que formellement, et sert depuis de repoussoir à deux balles à toute tentative de fonder le pouvoir sur le peuple. Après tout l’Allemagne des années 30 était un pays démocratique, certes, mais aussi instruit, cultivé, industrieux, et capitaliste). Mais l’hétéronomie n’est pas forcément une réussite non plus, si j’en crois le message des Lumières, et mes livres d’Histoire. Pour préciser ma pensée, je ne crois pas me servir de l’hétéronomie comme d’un repoussoir à deux balles. Mon idée est seulement que fonctionner sans valeur est un leurre, et que dans ces conditions, l’accession à une démocratie adulte consiste à reconnaître que c’est bien de choisir des valeurs qu’il s’agit (et pas d’une série de mesures techniques). Et choisir des valeurs pour la société impose bien sur, ou même consiste à avoir un discours (une hypothèse) sur l’autre.

    C’est bien le sens de ma dernière phrase sur la fraternité.

  • Pourquoi l’efficaité du marché serait elle contraire à la morale ou l’éthique ?
    j’ai bien aimé les commentaires d’henri, mais il me semble qu’il y a un moment où le système déconne
    c’est quand il n’est plus transparent, quand les engagements hors bilan représentent des montants faramineux, quand la Société générale ne sait pas qu’elle a plus de 60 millairds de paris pris sur les marchés qui finalement ne lui couteront « que » 5 milliards
    Le système ne peut fonctionner que si les acteurs peuvent mesurer la confiance qu’ils font aux autres
    d’où les agences de notation et les règles prudentielles
    c’est sur ce point qu’il faut s’interroger
    Méainteant, quand on pense que le marché est globalement le moins mauvais des systèmes (ce qui est mon cas) il faut assumer le fait qu’il y a des crises et des faillites
    C’est d’ailleurs une des principales différences entre les économies de marché et les économies planifiées : dans ces dernières, l’absence de faillites conduit à conserver tous les dysfonctionnement et à les accumuler
    A la fin de l’URSS, on a une espérance de vie qui diminue régulièrement, des libertés absentes, un environnement saccagé et un niveau de vie bas

  • @ Verel :
    « Pourquoi l’efficacité du marché serait elle contraire à la morale ou l’éthique ? » Tout a fait d’accord avec vous, je ne crois pas qu’elle le soit, car elle ne se situe pas sur le même plan, elle n’est pas du même ordre.
    Le marche est de l’ordre de l’outil, et très clairement, c’est l’outil le plus efficace dont on dispose en matière économique. L’éthique ou la morale sont de l’ordre de la finalité. Deux choses différentes. Ce serait vouloir interdire une voiture parce qu’elle pourrait causer des accidents. On ne va pas en rester a la charrette (elle-même plus dangereuse que la marche a pied). C’est la conduite qui pose problème, pas le véhicule. Sur ce point, on peut relire avec intérêt l’excellent « Ravages » de René Barjavel, et sa thèse d’une humanité toujours tentée par le progrès au risque de sa propre destruction.
    Absolument d’accord aussi, avec vous sur les parallèles économies de marché / économie planifiées et la nature de leur crises respectives. Aucun outil n’est parfait, et j’assume complètement les crises capitalistes a ce titre.

    @ Oppossum & Niamreg:
    « il arrive un moment ou il faut mettre une règle , arbitraire, injuste, nominative, antilibérale , anti-productive… ».
    « La question se repose donc d’un “structurant organisationnel”. »
    Mille fois oui. Et cette règle, ce structurant, je crois que c’est la loi démocratique. C’est elle fixe les limites. C’est elle seule qui a la légitimité pour lier entre elles les personnes dans une volonté collective. C’est l’autre face de l’absence de collectif que Koz mentionnait si tôt dans les commentaires. On fait dire (a tort semble-t-il, sur la formule du moins) a Malraux que le 21eme siècle serait religieux.
    Si le religieux est ce qui relie ensemble les hommes (au sens étymologique de re-ligare), alors oui a n’en pas douter, notre grand dessein futur sera d’apprendre a revivre ensemble après tant d’individualisme. Ou ce que vous résumez élégamment, Niamreg, par « L’accession à l’autonomie … serait donc pour la société d’assumer le choix collectif des valeurs nécessaires à son fonctionnement harmonieux ».

    Merci de cette conversation enrichissante.

  • @ Henri

    D’abord merci pour votre réponse et désolé pour votre mauvaise nuit.

    En fait, avant d’aller plus loin dans cette discussion il est nécessaire de s’entendre sur un certain nombre de choses. Parce que dans votre commentaire et dans le mien, on se réfère à des principes qu’il serait utile de bien définir avant d’aller plus loin.

    Comme le dit Opposum, je mentionne le mot éthique depuis plusieurs commentaires. Et je vois bien ce qu’il peut trouver gênant à l’affaire. Cependant, il est peut être utile de préciser ce que je veux dire par là.

    a. Sur un plan philosophique, l’éthique, c’est la part de raison chez l’homme qu’il utilise pour guider sa conduite afin d’assurer la pérennité du jeu individuel et collectif. C’est effectivement mouvant et cela varie d’un individu à l’autre. Finalement, cela traite de ce que les règles morales et les lois ne peuvent pas prévoir, ou les détails de leur application (si on les inclues) dans la vie de tous les jours. C’est le choix personnel qui après analyse vous fait dire « non, je ne participerais pas à ça » ou « non, je ne ferais pas ça ». Quelques fois cela peut même s’opposer aux lois et aux règles morales, même si c’est rare. C’est souvent attaché ou assimilé à la déontologie, parce que les règles déontologiques, la bonne pratiques, les codes régissant certaines professions, sont des cadres généraux dans lequel le praticien, le professionnel peut exercer son jugement. L’éthique n’est pas seulement individuelle, donc, et il existe des comités consultatifs qui se réfèrent à elle mais qui ont pour point commun d’apporter une réflexion à un problème collectif afin de dégager un principe optimum permettant d’assurer la survie du jeu collectif comme le soulignait Opposum.

    b. La morale, si dépréciée de nos jours dans certains cercles, n’est pourtant qu’un ensemble de règles collective basées sur l’expérience ou sur une révélation divine qui déterminent que telle ou telle action est mauvaise parce que nuisible (à la survie du jeu). La raison n’intervient plus, les règles ont supposément été éprouvées et vérifiées (ou proviennent de l’infaillibilité de Dieu) et il suffit de les appliquer pour s’assurer d’une conduite relativement optimale dans sa vie. Bon, elles sont mouvantes, elles aussi, d’une région à une autre car les valeurs collectives peuvent être différente en fonction des valeurs ethniques par exemple. Elles sont aussi parfois (parce que rien n’est parfait) en contradiction avec le contexte ou avec l’évolution des valeurs et des mentalités. Mais globalement à l’étude, elles ont une certaine constante depuis que les civilisations existent qui fait que « tu ne tueras point » ou « tu ne voleras pas le bien d’autrui » sont des valeurs/règles morales assez largement partagées. La morale est définitivement une affaire collective, bien qu’il existe des règles morales portant sur le comportement strictement individuel.

    c. Les lois sont les règles écrites par une société d’individus afin de préserver avant tout l’existence même de cette société. De façon optimum (mais là encore rien n’est parfait) elles doivent correspondre à a. et à b. ci-dessus, autrement dit à la raison et aux valeurs partagées. Les lois font intervenir le concept de justice qui impose à l’individu de respecter les règles. Elle fait également intervenir le concept de pénalité, de peine à l’encontre de la personne qui les violle. On peut dire que dans une certaine mesure, et dans les cas les plus graves uniquement, la loi intervient lorsque une personne n’a pas réussi ou n’a pas cru bon ni d’utiliser son bon sens, ni de respecter les règles collectives pour le forcer à le faire. Et la peine doit inclure des mesures susceptibles d’inciter l’individu à ne pas recommencer. Elles sont aussi généralement écrites lorsque des violations répétées et constantes des points a et b ci dessus dans certains domaines commencent à peser sérieusement sur la bonne marche de la société. Moins une société fait appel à a. et b. ci-dessus, plus elle doit publier de lois. Les lois et les réglementations sont le dernier filet d’auto protection d’un ensemble collectif civilisé.

    Pour prendre un exemple insignifiant, mais qui illustre l’inter relation des trois points, un individu qui laisse son appartement dans un bordel indescriptible ne fait pas appel à la raison qui devrait lui souffler à l’oreille qu’il est d’une part plus agréable d’évoluer dans un minimum d’ordre, que le bordel appelle plus de bordel et que l’on devient confus dans un environnement confus. La morale, c’est quand ce même type invite des amis chez lui qui ont du mal à trouver un siège sur lequel ne sèche pas un reste de pizza depuis un mois, qui commencent à penser ostensiblement qu’il est un porc en fronçant les sourcils et le nez. La loi intervient quand ce même type a oublier d’éteindre une plaque qui a mis le feu à un carton de Pizza Hut qui a lui même mis le feu à l’appartement et ensuite à l’immeuble.

    Bien sur, il existe des sociétés ou des milieux dans lesquels les valeurs sont inversées. Quand en effet, les points b et c se sont inversés ou sérieusement éloignés de la raison, (du point a. en d’autres termes), alors on obtient par exemple « l’omerta » comme règle morale dans la Mafia ou le conseil de guerre pour le soldat SS qui n’a pas assassiné assez de juifs dans un camp.

    Désolé de vous avoir infligé les paragraphes ci-dessus, mais ils sont indispensables à mes propos suivants.

    Pour revenir à votre commentaire, vous me dites deux choses. D’une part, que les petits et grand crimes de la haute finance ne sont que les reflets de notre propre nature cupide. D’autre part, que qu’il n’y a pas de différences fondamentales entre le rentier qui espère financer les études du petit fils en appelant Polydamas pour faire fructifier ses économies sur un marché à risques et le banquier véreux qui pour augmenter la taille de ses bonus a envoyer dans le décors une institution bancaire qui avait auparavant résistée à la crise de 29.

    Oh certes, votre post est intéressant et comporte beaucoup de vérité. L’homme qui se cache derrière Eponymus est certainement mal placé pour donner des leçons. Qui l’est vraiment d’ailleurs à ce titre ? Sauf que… sauf que.

    Si l’on trouve dans le cœur des hommes la cupidité et l’avidité qui règne dans les portefeuilles de ces banquiers, vous ne me ferez jamais croire que le monde tourne sans le point a. Et s’il y a des traces ou un potentiel de cupidité dans votre cœur comme dans le mien, il y a aussi, et vous ne ferez jamais croire que ce n’est pas le cas chez vous, une énorme part de raison qui vous fait décider de votre comportement chaque jour et qui vous permet de pouvoir encore vous regarder dans une glace.

    Non, le monde ne tourne pas et n’est pas encore debout, grâce aux lois. Le monde est là et encore debout parce que d’instinct, de manière réfléchie ou par peur des conséquences, les gens se tiennent le mieux possible dans l’ensemble. Et qu’il y a aussi des leaders (intellectuels ou politiques) qui par foi ou par humanisme essayent de guider les gens afin que le jeu continue dans les meilleures conditions possibles. Non le monde ne fonctionne pas sur la base du pas vu, pas pris. Ce n’est déjà pas rose, mais si c’était le cas, l’enfer serait un refuge paisible en comparaison, ou le monde n’existerait tout simplement plus.

    Il est peut être utile de rappeler qu’il existe des professions dans lesquelles justement il règne un état d’esprit qui dans la grande majorité des cas fait considérablement appel au point a, et dont les membres se conduisent en général plutôt bien sans même penser aux points b et c. Je pense aux médecins, aux humanitaires, aux pompiers, aux secouristes, à beaucoup de profs, d’éducateurs, etc. Est-ce un hasard si ces professions sont hautement considérées et respectées par une grande majorité des gens ? Par contre, il en existe d’autres qui à tort ou à raison ont une réputation exécrables. Et tiens, c’est justement le cas des banquiers et de la haute finance, par exemple. Bien souvent à tort, nous sommes d’accord. Mais aussi à raison, on ne peut que l’admettre aujourd’hui.

    Peut être que justement, comme finalement vous semblez le décrire, pas mal de professionnels de la finance ont depuis longtemps oublié le point a. et b. pour s’en tenir uniquement au point c. Et peut être que quelques autres encore pires, appliquent la règle du « pas vu pas pris » que je mentionnais plus haut. Et il semble, que pour un nombre encore plus restreint, ceux avec le « M16 entre les dents », les valeurs se sont carrément inversées.

    L’état d’esprit fait tout justement. Lorsque la déontologie fondamentale du médecin est oubliée, vous trouvez certains chirurgiens esthétiques qui ne violent pas la loi mais qui dévoient leur profession – vous en trouvez même pour procéder en Espagne à des avortement sur des fœtus de huit mois sur la base du pas vu pas pris – vous en trouvez même pour transfuser du sang qu’ils savaient contaminé lorsque leurs valeurs se sont inversées. Mais de dire ça, fait oublier que 95% au moins des membres de la profession font leur job et souvent avec abnégation.

    Pour en revenir à la haute finance, l’article de Daniel Pinto mentionné ci-dessus est tout à fait intéressant à plus d’un titre. Il place la rupture avec la déontologie, avec les principes éthiques de base de la profession lorsque les banques ont cessé de travailler pour la prospérité des aventures à la fois individuelles et collectives que sont les entreprises. Lorsque le fossé se creuse au point que les banques ne jouent plus qu’avec les produits financiers et oublient les principes de bases de la profession qui consiste à aider à la création d’outils de production et de richesses, et à permettre qu’un marché existe basé sur le bon vieux échange – dans ce cas, elles commencent à changer d’état d’esprit.

    Ceux qui tombent dans ce jeu exclusivement dévoient la profession. Ceux qui commencent à jouer avec le marché façon « Wall Street (le film) », appliquent le pas vu pas pris. Ceux qui oublient que leur argent est en partie aussi l’argent des clients et s’embarquent dans des aventures sur-risquées pour une histoire de bonus appliquent des règles inversées. (C’est d’ailleurs ce que j’essayais maladroitement d’expliquer avec ma parabole, ma fable sur les principes de base des banques, pas de prétendre que « c’était mieux avant »).

    Je vais enfin conclure ce point par l’opinion suivante : je ne pense pas que les gens travaillant dans la haute finance sont « tous pourris », très loin de là. Je pense qu’une énorme partie fait son job correctement et fonctionne avec une bonne dose d’éthique. Mais si la profession a moins bonne réputation, c’est probablement une histoire de pourcentages. Dans ce milieu, peut être que le pourcentage des gens ayant une conscience éthique est descendu malgré tout un peu trop bas. C’est peut être aussi lié à la profession et à la nature du marché. Il est vrai qu’un guichetier aura plus d’occasions et donc de tentations de taper dans la caisse qu’un conducteur de train. On ne peut pas demander à un joueur de poker professionnel d’être raisonnable. On ne peut pas demander à un trader de ne prendre aucun risque.

    Pour répondre ensuite à l’autre idée développée. Je vais vous dire l’énorme différence entre le retraité cupide qui essaye de faire fructifier ses économies et le banquier avide de bonus et de danseuses : ce sont les responsabilités. C’est juste une question de taille et de sphère d’influence. L’avidité du rentier lui fera peut être perdre ses économies. L’avidité du banquier fera peut être perdre les économies de milliers d’individus et d’entreprises. Pourquoi exigeons-nous de nos leaders qu’ils soient sans tache ? Parce que nous leur déléguons un pouvoir exorbitant. Le pouvoir exige d’être responsable – d’ailleurs les sens de ces mots se rejoignent sémantiquement parfois.

    Tout ça pour en arriver à cette lapalissade. Les responsables sont… responsables. Point barre. On peut éventuellement rentrer d’une réunion entre copains le soir trop bourré pour embrasser ses enfants, on ne peut pas être un chef d’état et déclencher une guerre parce que l’on a un coup dans le nez. Les entreprises qui confient leurs réserves et leurs liquidités à une banque d’affaires peut comprendre que celle-ci s’amuse entre copains à fluidifier le marché, mais comprennent moins bien que leurs fonds aient mystérieusement disparu dans une partie de Texas Hold’Em. Dans ce cas le responsable devient… coupable. Comme le type qui conduit bourré me direz-vous. Oui mais l’un ne tue qu’une ou deux personnes, l’autre plusieurs milliers.

    Aristote a un peu ouvert le placard. Il y a bien quelques cadavres qui y dorment. Il y a bien des petits et des grands secrets de famille dans ce jeu. Il y a bien des seuils au delà desquels rien ne va plus. Et même le FBI qui vient d’ouvrir une enquête officielle sur la dernière crise, semble penser qu’il y a aussi des méchants.

    Il n’y a pas de fatalité quand la criminalité (ou la relative criminalité, disons dans ce cas) pénètre un milieu. Mais il y a deux constantes dans les milieux criminels organisés : a. une omerta et b. une collusion plus ou moins grande entre le gendarme et le méchant.

    Pour assécher ces deux mamelles, il doit exister un gendarme indépendant, dont les membres sont des experts indiscutables à la probité indiscutée et surtout qui n’ont rien à gagner ou à perdre dans le fait de prendre telle ou telle position. Ce super gendarme doit avoir assez de pouvoir pour au moins être capable de saisir les juridictions compétentes en fonction de ce qu’il découvre afin que des enquêtes approfondies puissent être faites. Et pour contrer l’omerta, il doit exister un moyen pour que ce super gendarme puisse être alerté par n’importe qui. Le fameux système des « whistleblowers » dans l’administration américaine ou le programme de protection des témoins dans la lutte contre le crime organisé. Quand, une agence de notation commence à raconter n’importe quoi pour protéger les intérêts d’un gros porteur, il doit bien y avoir un membre de son staff qui s’y connaît suffisamment pour dénoncer le fait. Et de balancer assez d’infos pour que le gendarme puisse au moins émettre un avis disant « Subprimes, attention danger. »

    J’arrête là, parce que j’ai pas la prétention de pouvoir même imaginer des solutions réglementaires aux problèmes actuels. Je fais juste part de ce que je connais bien.

    Donc, en conclusion de ce trop long commentaire qui ne sera pas lu par grand monde et qui déplaira probablement à beaucoup et en ennuiera encore plus, je dis que vous pouvez appeler ça « fraternité », « règles morales inspirées de Dieu », « raison », « déontologie », « bon sens », « point a et point b », ça commence toujours de cette façon et ce sont ces principes qui sous-tendent toutes civilisations ou toutes activités de valeur.

    Pas l’efficacité des flics et des juges ou l’inatteignable perfection des lois composées par des politiciens eux-mêmes impliqués. Même si des situations assez graves les exigent, elles ne seront appliquées efficacement que si les points a. et b. prévalent. Et que les points a et b, peuvent être restaurés par l’éducation, la formation, la prévention, un minimum de répression et la correction des défauts intrinsèques d’un système.

    Je crois enfin beaucoup plus à un sursaut humaniste civilisateur comme vous le mentionnez, qu’il soit de type religieux ou pas, qu’au simple pouvoir de la démocratie. Ce dernier est trop facilement contournable pour qu’on lui fasse complètement confiance. Parce que là aussi, la démocratie, sans les points a et b, ça vaut pas grand chose.

  • @ niamreg

    Chacun a son repoussoir à deux balles, je vous l’accorde bien volontiers ! Et je suis d’accord avec vous que le débat public se devrait d’être d’abord à propos de valeurs et non de mesures techniques.

    Mais l’expression « choisir ses valeurs » me laisse perplexe, mal à l’aise. Au nom de quelles valeurs choisit-on ses valeurs ? Qui rédige le menu sur lequel nous choisissons ces valeurs ? Et pourtant oui, quelque part nous choisissons, nous consentons…

    Je ne prétends nullement avoir une solution toute faite.

    Bien à vous.

  • A Eponymus
    je me méfie beaucoup dans un domaine aussi technique que celui là, de l’appel aux valeurs morales

    Ce qui ne veut pas dire que les cours consacrés à la réflexion éthique dans les écoles de commerce soient inutiles

    Comme le fait souvent remarquer Alexandre Delaigue, les mécanismes économiques sont souvent contre intuitifs, ce qui l’amène à dire que c’est à cause des mesures prises sous l’influence de l’abbé Pierre et de ses semblables qu’on manque de logements

    Effectivement, il est nécessaire que les autorités de marché soient composées de gens qui ne soient pas aveuglés par l’attrait du profit, mais cela ne suffira absolument pas s’ils n’ont pas compris comment cela fonctionne et quelles sont les règles qu’on peut mettre en place pour limiter les crises et les dérives

  • @ Verel

    Je suis justement d’accord avec vous sur le fond.

    D’abord, beaucoup d’intervenants ici ont démontré les effets pervers que peuvent avoir certaines réglementation/mesures régulatrices. Ensuite, le fond de mon commentaires porte justement sur ce point, en faisant appel à l’éthique vs les règles/lois, c’est à dire, à la capacité de l’acteur lui-même, qui sait parfaitement ce qu’il fait, à se dire : « oups attention, je vais trop loin là ».

    C’est pour ça, justement, que j’ai arrêté mes élucubrations sur les possibles solutions, car si elles sont effectivement valables dans le cadre de la lutte anti-corruption et la grosse criminalité organisée, je suis conscient qu’elles portent en elles leurs propres limites dans ce cadre. Bon, à ma décharge cependant, je suggérais une sorte de comité des sages composées de personnes n’ayant plus d’intérêts personnels aux affaires, mais qui sont eux même des experts du marché. Un peu à la manière du conseil constitutionnel.

  • @ Eponymus : Merci, une nouvelle fois, de votre commentaire.

    Sa densité et de sa longueur vont certainement m’amener a revoir et reformuler mes propres convictions sur un certain nombre de sujets.
    Je compte bien vous répondre – sans croire un instant qu’il y ait de bonnes ou de définitives réponses sur ces sujets touchant a l’éthique et la raison.

    Laissez-moi, si vous voulez bien, une nouvelle nuit blanche (!), pour lire et relire votre pensée, et mettre en ordre la mienne.
    Pour reprendre votre illustration, je ne voudrais pas, dans un moment d’absence, en postant un billet dé-raisonnable, mettre le feu au blog de Koz ! 🙂

  • Eponymus, (en attendant … Henri …)

    La fragilité de l’éthique et de la morale face au marché provient du fait que le ‘marché’ démocratique/libéral et capitalistique s’est d’emblée construit en dehors de ces notions.
    Ce marché suppose même (même si c’est plus une construction intellectuelle qu’on cherche à mettre en oeuvre qu’une réalité qui fontionnerait naturellement) que l’addition des égoïsmes peut conduire au bien commun. La fondation du marché n’est pas l’éthique , rappelle Henri avec le plaisir provocateur qu’on éprouve à mettre du cynisme dans du lucide .
    Et même lorsque cela ne marche pas très bien, c’est souvent sous la pression des exigences micro-individuelles de chacun de nous ou bien de réglementation pleine de générosité sociale (Faite des crédits faciles aux ‘pauvres’ … hé ! qui serait contre ?)

    Réclamer de l’éthique aux acteurs du marché n’a pas de sens, quand ce n’est pas un contre-sens total .

    Mais , et là je suis d’accord avec vous, porter une exigence morale sur le résultat global du marché est nécéssaire. Que le Tout interroge la partie responsable sur sa façon de fonctionner est tout de même normal, voire sain.

    Mais il est en train de se produire un défoulement généralisé assez malsain et obscurcissant, bouquet de discours démagogiques d’une partie de la droite qui cherche à tout prix des responsables, probablement pour se donner l’image de l’action et faire très peu ensuite, et de discours archaïques et … démagogiques de la gauche qui voudrait redonner un peu de substance à son vieux dada d’un état qui administre tout. Sans parler de la société civile trop contente de trouver des agents économiques qui respectent encore plus mal qu’elle des principes élémentaires de bon sens économiques.

    Bref on est bien partie pour mal tirer les leçons de cette crise. (Bon déjà si on en sort , ça sera pas mal … en attendant la suivante ?)

    Ceci dit votre cri d’amour envers la Morale et les Valeurs, au dessus de la Règle et du Droit est partagé par beaucoup ! Mais il doit se situer à une autre étage, supérieur, qui remet l’économique à sa place.

    Il s’agirait de mettre en vigueur des règles qui permettront aux « marchés » de fonctionner correctement (pour le Tout) , même sans éthique préalable particulière de la part de ses agents. Allons même plus loin : surtout sans éthique , c’est plus prudent.

    Mais bien entendu , ces règles du jeu doivent répondre à un second impératif (retour aux basics) … qui est de ne pas étouffer la « Main Invisible Bienveillante » sous ses excès réglementaires … et de créer , artificiellement, un environnement douilletement favorable à son fonctionnement (en évitant la Main Invisible Malveillante ) , ce qui, avouons le, ne semble pas couler de source de façon si ‘naturelle’ que ça.
    Du politique oui, mais là, il faut aussi vraiment des techniciens pointus !

  • @ Eponymus.

    Votre commentaire est remarquable, et du coup c’est certain, l’on touche aux limites de l’exercice du blogging. Parce que je voudrais répondre, expliquer, reprendre chaque phrase pour opiner, reformuler, infirmer. Mais ce ne sera pas possible, c’est la limite de l’écrit. Sans compter que nos commentaires en 20 pages doivent commencer a sérieusement ennuyer (encore que, il ne doit plus y avoir grand monde a lire ce billet-ci, Koz ayant d’ailleurs déjà poursuivi son chemin).

    Pardonnez-moi de réduire a si peu un billet si long, mais votre thèse, c’est que :
    1. Les banquiers se caractérisent, en comparaison de leurs responsabilités, par un manque d’éthique, de morale ou de respect des lois.
    2. Ceci les a conduit a prendre des positions inconsidérées, pour satisfaire leur avidité, remettant en question toute l’architecture d’un système dont ils sont le cœur (ou le sang).
    3. Il faut punir leurs excès, et rétablir l’éthique, la morale, et le respect des lois dans la profession financière (en l’espèce en revenant aux fondamentaux de la banque/finance, et en faisant appel a une autorité de régulation).
    4. Ce processus doit se faire de façon démocratique (puisque c’est notre système) mais au final, c’est l’humanité qu’il faut grandir, un processus permanent et personnel.

    Point 1. Est-ce que la finance tourne a ce point sur cette décomposition des valeurs, une décomposition qui commencerait par une absence de rationalité (le marché est moutonnier), puis par une absence de morale (qu’importe mes actes immoraux mais légaux puisque le mandat qui m’est donné est très clair, faire « plus » d’argent), enfin par une absence de respect des lois (plein les fouilles, qu’importe les victimes mêmes en monceaux de cadavres) ? C’est possible voire probable. Voyez, je crache le morceau. Qu’il y ait des salauds sans éthique ni morale en finance, je vous l’accorde. Et que leur proportion soit supérieure a celle d’autres catégories professionnelles, pourquoi pas ? Je bosse avec eux au quotidien et, pour certains, comme vous le dites, « ce n’est pas rose ». Et ce n’est pas étonnant, car compte tenu de leur proximité même avec l’argent, ces métiers vont attirer ceux que l’argent fascine le plus, avec les travers que cela sous-tend.

    Point 2. Des positions inconsidérées, c’est certain aussi. Et pour des raisons de cupidité, également. Le mécanisme est parti des USA, ou la culture du « deal » est reine. Par volonté d’augmenter son bonus, des banquiers ont prêté a des risques qui n’auraient pas du pouvoir emprunter, ou pas dans ces proportions. Nous en avons discuté plus haut. La grande irresponsabilité, c’est la diffusion de ce risque par des mécanismes encore relativement inconnus auparavant (la titrisation) contaminant ainsi l’ensemble du système financier et créant de fait le pré-requis pour une crise de confiance généralisée, aboutissant au bordel que l’on connait aujourd’hui. Je ne m’attarde pas, c’est en fait le point le plus discuté depuis le premier billet de Koz.

    Point 3. Il faut corriger le monde financier. Il faut punir la contravention a la loi (d’ou les enquêtes du FBI). Il faut redresser la morale du banquier (d’où les faillites de certaines institutions, une fois qu’il s’est brulé les doigts, il n’oubliera pas). Insuffler une nouvelle éthique en formant au départ les financiers. Vous dites, le FBI va enquêter sur des possibles crimes. Très bien, il y en aura, comme il y en a dans toutes les industries (je pense aux crises alimentaires identiquement basées sur la cupidité (vache folle et poulet a la dioxine) et qui présentent une similarité de rupture de leur propre marché).
    Mais je maintiens toutefois que la limitation a une banque proche des entreprises est une mis-conception des avantages de la finance pour l’ensemble de l’économie. Par exemple, la titrisation permet de mettre en relation des pans entiers de l’économie avec des sources de financements auxquels ils n’auraient pas eu autrement accès. De même, la spéculation apporte une liquidité indispensable au marché, pour le bien des entreprises qui y font appel. Pour ce qui est de la régulation enfin, je pense que nous aurons l’occasion d’en reparler lors de prochains billet de Koz !

    Point 4. Vous demandez un sursaut éthique et moral. Vous le demandez a ceux qui exercent des responsabilités (les décideurs comme l’on dit aujourd’hui) et dans tous les domaines et d’autant plus qu’ils seront situés en haut de l’échelle. Je vous entends (et vous approuve, qui n’approuverait ?) lorsque vous souhaiteriez que les « ministres » de la nation fussent aussi les serviteurs du peuple.

    Alors après cette confession en bonne et due forme, ou suis-je maintenant que j’ai renié mes pairs ? Ai-je moi-même montré plus d’éthique ou de morale que les autres financiers de mon bureau, de mon immeuble ou de la City ? Suis-je différent d’eux, suis-je plus proche de vous qui semblez étranger au monde spéculatif ?
    Mon propre exemple importe peu, bien sur. Car cette part immorale me semble assumée par le système au départ. Et c’est, non pas une excuse que je souhaite invoquer pour le monde de la finance, mais le point noir dans la vision de ceux qui viendrait a le critiquer comme déconnecté du réel.

    C’est ce que je soulignai lors de mon dernier commentaire. Je crois que l’emballement financier dans les crises comme dans les booms, c’est encore une part de nous-mêmes, celle que nous ne souhaitons pas voir, mais qui est pourtant indispensable a notre propre survie.
    Une sorte de « Ca » Freudien du marché, que nous tenons a distance mais qui nous pousse aussi a survivre. C’est pour cela que je me suis permis de mettre tout le monde dans le même sac. Cette avidité que le système capitaliste porte en lui ne s’exprime jamais mieux qu’au travers de la finance car elle concentre la potentialité infinie de l’argent, le pire peut-être (encore qu’il n’est jamais certain) des participants économiques, et l’irrationalité de notre nature humaine.
    Nous nous leurrons pas, de fait c’est toute notre société qui est tournée vers l’argent roi. A tous les niveaux, évidemment. Aux intelligents ou favorisés, les matrices stochastiques et les projections financières. Aux autres ou défavorisés, la sortie par le haut par le sport-spectacle ou le show business. Dans tous les cas, une fascination par l’argent, que toute la société recherche comme la seule source de son bonheur incertain.
    D’une certaine manière, je crois que toute la société s’attend a voir le banquier comme un prédateur. N’est-ce pas d’ailleurs la ce que vous en attendez lorsque vous lui confiez vos économies, qu’il les fasse fructifier, et si vous désintéressez de la manière, vous savez bien pourtant de quoi elle est faite.
    Car voyez, la cupidité et l’avidité, et le reste, ce sont précisément les qualités que l’on demande a ces professionnels pour travailler dans leur milieu: ne pas faire de cadeau, avoir le cuir épais (et souvent l’esprit aussi). Vous le soulignez d’ailleurs « C’est peut être aussi lié à la profession et à la nature du marché » et plus loin « On ne peut pas demander à un trader de ne prendre aucun risque ». Il y longtemps, j’avais lu que la colonisation sud-américaine par les Espagnols avait été particulièrement sanglante parce que l’on avait envoyé là-bas tous ces mercenaires violents et sans emploi depuis la fin de la « Reconquista ». Ce parallèle éloquent entre marché et mercenariat résume ma vision de la situation.

    Et c’est pourquoi aussi je me gausse de voir les hommes politiques si prompts a accuser le monde financier. Parce que ce système, ce sont eux qui en sont en premier lieu responsables. Dans un monde ou les considérations financières sont systématiquement délaissées par le pouvoir politique, il est ironique de voir les responsables appeler a une plus grande déontologie (pensons a nos déficits chroniques, ou plutôt endémiques). De plus, ce sont évidemment les mêmes qui sont au cœur du sujet en matière de régulations. La matière première du banquier c’est l’argent et qui d’autre que le pouvoir politique pour en réguler la provenance ?

    C’est pour cela que j’apprécie votre espérance d’une morale personnelle avant d’être collective. Ces définitions premières d’éthique, de morale et de légalité que vous nous rappelez sont sans doute indispensables pour revenir au cœur du sujet. L’humanité progresse par crise, en boitant. Et cette crise nouvelle, mais sans doute pas dernière, est un nouveau scandale sur lequel nous venons trébucher.
    En nous relevant, nous savons bien que nous allons tomber de nouveau, mais peut-être aurons-nous appris sur nous-mêmes, tant individuellement que collectivement.

    Alors, que dire de plus ? Eponymus. Pas grand-chose, je vais vous mettre en conclusion ce que j’ai hésité a simplement vous répondre. J’aurai pu me contenter d’écrire cela. Cela n’aurait pas conclu le débat mais, c’est sans doute la seule chose pertinente pour le finir… Je vous aurai écrit que je m’apprêtai a passer une nouvelle nuit blanche a penser dans le noir, quand j’ai compris que j’allai vous répondre en une phrase… Et puis j’ai eu peur, j’ai cru que vous vous penseriez que je me foutais (même pas gentiment) de vous, si j’en restais la, a cette simple citation. Me croiriez-vous si je vous disais que je n’ai pas d’autre réponse que cette simple phrase, qui sonne pourtant comme un tour de passe-passe de ma part. Si je vous disait qu’a vous lire je n’ai pensé qu’a elle, et que tout ce je pourrai y rajouter ne serait que le balbutiement d’une pensée sans importance au regard de ce que je tiens pour être la seule réponse décente a vous faire. Me croirez-vous ? Je crois vous entendre opiner. Allons-y donc.

    Matthieu 5,6.
     » Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés ! ».

    Bon week-end Eponymus. Ainsi qu’a tous les lecteurs de Koz Toujours qui auront eu le courage de me lire jusqu’ici.

  • @ Opposum

    Toujours en attendant Henri (qui pour l’instant récupère de sa deuxième nuit blanche en une semaine)…

    Je comprends parfaitement votre post et j’y souscris totalement paradoxalement. C’est ce paradoxe, qui n’est seulement qu’apparent, que je vais essayer de vous expliquer.

    Pour faire plus simple, pour mieux comprendre où je voulais en venir dans cette histoire, il vous faut reprendre mes point a, b, et c mais en traçant une ligne rouge infranchissable entre a et b (voire même c). Dans la vie, cette ligne n’existe pas, mais en la traçant vous allez comprendre pourquoi on parle bien de la même chose et que mon post m’a été inspiré, en fait, par l’une de vos réflexions sur la « continuité du jeu ». Le truc à comprendre, c’est que parfois les décisions parfaitement éthiques s’opposent complètement aux règles morales communément admises. C’est là, que le sujet devient fascinant et extrêmement subtil et complexe.

    L’éthique, vue de cette façon, a quelque chose d’universel que la morale n’a pas. Et cette universalité vient du fait que la morale est fixe alors que l’éthique s’adapte au contexte d’un problème donné. Les deux s’interprètent toujours dans la direction de la pérennité, de la continuation, de l’existence future du jeu individuel et collectif, et pour le bien, le mieux, du plus grande nombre d’individualités participant à ce jeu (on pourrait dire de l’humanité, de la vie, etc.)

    Une partie de la problématique étant que la perfection, l’absolu n’existe pas ici bas, l’éthique, (encore une fois, consistant à trouver la meilleure solution par l’utilisation de la raison afin d’assurer la continuation du jeu au bénéfice du plus grand nombre), a donc été bien souvent considérée comme un système de conduite du comportement bien supérieur à la simple morale. Elle apporte des solutions que la morale limitée par sa rigidité ne peut apporter. Idem pour la supériorité de la raison sur les dogmes.

    Tiens, puisqu’on est chez Koz, ça me rappelle un passage des Evangiles. De mémoire : Jesus redonne la vue à un aveugle. Or, ce miracle a été accompli un samedi, jour du Shabbat. Les rabbins (qui à l’époque étaient tous à la CGT) lui tombent dessus, en lui faisant remarquer qu’il venait de violer le principe sacré du Shabbat en travaillant un samedi. Eh oui, lorsqu’on exerce le boulot de faiseur de miracles, en faire un, c’est bosser. « C’est quand même un comble de prétendre être le messie et de donner le mauvais exemple en sapant les avantages acquis par le prolétariat » disaient-ils. Et là, Jesus rappelle qu’il existe un principe supérieur à la règle qui est l’esprit de la règle : le principe supérieur des règles est qu’elles existent pour aider le plus grand nombre à aller mieux – le Shabbat a été créé par Dieu pour aider les hommes – leur donner un repos mérité après une dure semaine de labeur – pas pour les contraindre. Pas que la règle ne soit pas bonne en elle-même, mais si violer la règle redonne la vue à quelqu’un, alors violer la règle est bon. C’est un bon exemple, de fracture entre l’éthique et la morale. De la supériorité de la raison sur le dogme.

    Je vais donner un exemple bateau un peu stupide et absolument tout théorique appliqué au monde politique (mon exemple va faire hurler ; on ne va pas en discuter ici, c’est pas le sujet, mais il me fallait bien trouver une illustration) :

    Vous avez dans une société X, des individus que vous connaissez assez pour savoir que ce sont des types biens. Ces quelques « types biens » réussissent à peu près financièrement. Je dis « à peu près » parce qu’ils doivent se battre avec des tas de réglementations et d’impôts. Parce qu’il se trouve qu’il existe dans cette société, une catégorie bien plus vaste de types « biens » aussi mais qui sont nécessiteux et qu’il faut aider. En tant que leader, votre idéal est qu’un maximum d’individus aillent bien ou même beaucoup beaucoup mieux.

    La considération morale vous incite à aider les nécessiteux (« le mec dans la mouise, tu aideras »). Néanmoins, vous vous apercevez, qu’en augmentant les charges pesant sur les « types biens » vous aidez les nécessiteux certes, mais vous créez par là même un climat économique difficile qui peut même entraîner la réduction de types biens qui réussissaient auparavant.

    La considération éthique peut éventuellement au contraire, vous conduire à aider les types biens qui vont déjà bien à aller beaucoup mieux. A utiliser leur capacités créatives pour générer suffisamment d’activités pour donner aux nécessiteux les capacités de s’en sortir sans aide, et à aller beaucoup mieux eux-aussi.

    C’est peut être pas « moral » sur le coup mais parfaitement éthique à longs termes. Bien sur, vous pouvez encore plus subtilement affiner votre politique avec des systèmes permettant d’éviter que les nécessiteux ne meurent de famine en attendant que les « types bien qui vont bien » aillent beaucoup mieux encore. Et vous DEVEZ le faire pour que le tout reste éthique. Parce que ne l’oublions pas, vos actions devront profiter au plus grand nombre. Si le plus grand nombre meurt en attendant la réalisation de votre plan, vous avez échoué.

    Comme je le disais plus haut, à partir de ce moment, le sujet devient complexe, subtil, mouvant, etc.

    C’est là aussi dans toutes leurs subtilités, le génie de certaines décisions politiques dans le passé… c’est là aussi, que l’on trouve, des catastrophes générées par des bonnes intentions parfaitement « morales » dont les effets ont été dévastateurs (ce que semble être les bio-carburants par exemple).

    Autrement dit, quand quelqu’un dit ici que la résultante des actions de l’Abbé Pierre a été une diminution de la construction de logements sociaux, (si tout ceci est vrai, je suis complètement incapable d’en juger), alors on peut dire que les actions de l’Abbé Pierre étaient peut être hautement « morales » mais absolument pas éthique.

    Appliqué à notre propos, au marché, il faut simplement savoir que le marché ne peut exister que dans un but : la pérennité du jeu résultant dans le maximum de personnes qui « vont bien ». Dans ce cadre, en effet, il n’existe pas de principes « moraux » ou « amoraux » mais absolument une nécessité éthique. Si certains principes du marchés semblent amoraux mais s’ils aboutissent à plus longs termes à une prospérité économique bénéficiant à tout le monde, alors ils sont parfaitement éthique.

    Maintenant si vous imaginez le monde et les activités humaines comme un arbre, que la haute finance en est une branche, voire une des branches principales, et que les activités des « financiers » résultent dans le fait de couper ou de faire crever cette branche au risque de faire mourir l’arbre, vous pouvez triturer le concept dans tous les sens, il n’y a plus aucune justification éthique et certaines de ses activités destructrices doivent être annulées, stop, fin de la récré. Si, il ne s’agit pas de la faute de quelques actions/individus isolés mais que dans sa nature même, le marché inévitablement va détruire sa propre branche ET l’arbre, alors le marché lui même doit être envisagé autrement – au moins, ses règles de base constitutives de son existence doivent être modifiées plus subtilement.

    Quand je demandais les cadavres du placard, c’est de ça que je voulais parler. Il y a certainement, dans le système actuel des cadavres qui entrainent une presque récession, puisque nous avons dans les faits, une presque récession (ou une menace sérieuse en tout cas). C’est aussi mathématiquement ou pragmatiquement simple que ça.

    La solution est bel et bien dans les mains « d’Henri et ses amis » pour beaucoup, des politiques aussi bien sur – pas dans ma tête – mais à la condition expresse « qu’Henri et ses amis » reviennent au principe fondamental éthique qui est d’assurer la continuité du jeu au bénéfice du plus grand nombre. Et dans ce cadre, affinent les stratégies pour que la branche sur laquelle ils sont assis, cesse de péricliter. Il n’y a pas de solution miracle justement, il y a plutôt une multitude de choses à faire, à condition, que l’on revienne aux principes de base, je le re-martelle une fois de plus : son jeu n’existe que pour assurer la survie du jeu plus global et ceci pour le bénéfice du plus grand nombre. Allez, encore une fois : son jeu n’existe que pour assurer la survie du jeu plus global et ceci pour le bénéfice du plus grand nombre.

    A partir de là, sachant « qu’Henri et ses amis » sont majoritairement des types bien (à condition qu’ils respectent ce principe, sinon ils deviennent des types « pas bien »), je leur fais, à priori, 100% confiance (du fait de leur connaissance intime avec le sujet) pour qu’ils élaborent quelque chose qui puisse corriger le tir. Et je ne leur demande pas d’avoir de considérations « morales » ou « amorales » parce qu’effectivement, ce n’est pas le bon point de vue. Même si dans les faits, au final, les résultats positifs finiront bien inévitablement par réconcilier la morale et l’éthique.

  • Au risque de m’attirer les foudres des philosophes, je ne crois pas en l’autorégulation humaine, facteur que l’histoire dément jour après jour, mais au coup de sifflet de l’arbitre.
    Ceci étant quel est le match, qui tient ce sifflet et au nom de qui ?
    Le match est simple :
    Il faut année après année créer de la richesse au niveau mondial pour élever le niveau de vie des habitants du monde. Certes une bonne partie s’en remet au destin mais ce n’est pas celle qui détient aujourd’hui les rênes du pouvoir.
    On a crée cette richesse par la chasse, la cueillette, l’élevage, l’agriculture, la production, la création artistique et on continue à faire preuve d’imagination tous les jours.
    Ceci étant on se trouve en position difficile dans les pays à haut niveau de vie car on ne peut tout faire reposer sur la recherche effrénée au remplacement et à la nouveauté dans les biens et l’art.
    Comment faire quand une entreprise offre une rentabilité de 4 à 10 % bon an mal an sans espoir de grand changement ? On diminue les coûts mais cela ne va pas bien loin et n’est que de durée limitée. La solution consiste à déplacer le problème.
    L’entreprise n’est que le vecteur d’un mouvement financier qui s’appuie sur elle, elle devient une contre partie d’un mouvement financier qui la prend pour prétexte. On va acheter des concurrents en prouvant que le résultat vaut plus que la somme des actifs, on va la vendre par morceaux en prouvant que chaque élément vaut plus que l’ensemble ou on va la vendre en entier. Mais c’est risqué, parfois inexact, long et finalement insuffisant.
    Donc il faut toujours trouver des activités de remplacement qui créent de l’emploi et de la richesse.
    Il y a eu la lutte contre la pollution, la communication et sa bulle internet et il y a aujourd’hui la gestion financière.
    Il ne s’agit plus de créer de la richesse mais, de parier sur son évolution.
    Du plus simple, j’achète du soja car il va couter plus cher, au plus risqué, j’achète du pétrole pour me couvrir contre la baisse du dollar, au plus complexe, j’achète un placement qui me fait miroiter un taux que je n’ai pas ailleurs et que je crée involontairement en achetant ce placement donc en lui apportant le succès qui fait qu’il va rapporter encore plus.

    Voilà pour le match : c’est un pari sur une évolution qui utilise des fonds démultipliés par effet de levier.

    Mais voilà, les jeux de hasard sont toujours à somme nulle: tout gain entraine une perte.
    L’argent avec le quel on joue est gagé sur des emprunts immobiliers, des dépôts de caisse d’épargne, des actifs que l’on rémunère un minimum pour donner le change.
    Entre temps, les capitaux qui circulent dans une autre sphère avec d’autres rendements se sont, comme on l’a vu, multipliés en facteur trente et plus. Où est la contre partie ?
    Dans la perte potentielle que d’aucun ont oublié mais que les marchés n’oublient jamais.
    Qui a sifflé ?
    Pas l’éthique de nos dirigeants ravis de s’approprier la responsabilité de cette croissance artificielle, pas la presse qui dans son ensemble n’y comprend rien ou n’a pas intérêt a crier « le roi est nu », pas le citoyen qui n’a évidemment rien vu venir.
    Et voilà l’arbitre, les marchés pardi !
    C’est-à-dire ceux la mêmes qui avaient tout intérêt à laisser perdurer le phénomène ?
    Evidemment car le gain potentiel, hormis les commissions et autres bonus, n’est réalisable que par la perte palpable des autres.
    Donc pour transformer cet argent virtuel en argent véritable, pour créer réellement une contre valeur à ce qui n’est que spéculation, il faut que d’autres perdent « du vrai argent ». c’est ce qui arrive quand des joueurs quittent la table.

    Aujourd’hui cette bulle qui se dégonfle entraine la perte de milliards de Dollars, d’Euros qui n’existaient pas mais qu’il va falloir créer , en partie seulement heureusement, pour payer ceux qui ont déclenché le mouvement de chute en réclamant leur du.
    Désolé, pas d’éthique, pas de philosophes, pas d’honnêtes gens pour siffler la fin de la partie mais l’appât du gain comme régulateur de l’appât du gain.
    Et voilà notre maitre : nous en sommes tous responsables, du salarié qui veut une augmentation alors que le gain de productivité qu’il apporte est nul ( je veux plus à cause de mon ancienneté…..) au trader qui se croit très doué car il a une chance sur deux de gagner ou de perdre ce qui est infiniment plus facile que le choix du chef d’entreprise, de l’exploitant agricole ou de l’artiste.
    Nous voulons plus et sous tous les prétextes, mais sans créer la contre partie nécessaire. Dès lors nous oublions de rembourser le diable de cet accord de dupe.

    Ni morale ni éthique mais un simple équilibre mathématique.

  • @ Vercaud

    Je sais que c’est juste un exemple que vous donnez, mais quand même… quand un ouvrier demande une augmentation sur la base de son ancienneté, c’est tout simplement parce que son ancienneté a de la valeur. Certes peut être pas en termes de productivité augmentée au fil des ans. Mais certainement dans la stabilité et la fiabilité. Un ouvrier avec l’expérience acquiert avec l’habitude, une parfaite connaissance du lieu, des système de communication, de la culture de la boîte ; une maitrise dans ses gestes et sa façon de fonctionner qui font qu’avec lui, les machines tombent moins en panne, il arrive à l’heure, les choses sont rangées, il ne crée pas l’arrêt de 10 personnes pour demander quelque chose qu’il ne sait pas, etc. Tout ceci a un coût, représente un gain, d’où la prime à l’ancienneté.

    Plus sérieusement, je fais exactement la même analyse du marché que la votre.

    Vous dites que la bulle lorsqu’elle crève entraine la perte de milliards de $ avec des fonds gagés sur l’argent de l’épargne individuelle/réserves des entreprises ou autres actifs. Sauf que depuis le début de ce fil, sur la base de mon seul bon sens, lorsque j’essaye de pointer les mêmes incohérences mathématiques, on me répond que non, il n’y a pas de vice caché dans le système spéculatif même basé sur du vent… On me répond équilibre, fluidification du marché.

    Vous dites que l’aspect « cavalerie » de certaines activités crée bel et bien un trou qui tôt ou tard va devoir se traduire en « pertes réelles du vrai argent ». On me répond lorsque je vous cite, non, produits financiers qui tiennent la route théoriquement, équilibre, fluidification du marché.

    Il y a comme une contradiction d’ordre technique, et j’aimerais bien savoir qui a raison.

    Parce que l’air de rien, quand je dis dans le post 105 :

    « Maintenant si vous imaginez le monde et les activités humaines comme un arbre, que la haute finance en est une branche, voire une des branches principales, et que les activités des “financiers” résultent dans le fait de couper ou de faire crever cette branche au risque de faire mourir l’arbre, vous pouvez triturer le concept dans tous les sens, il n’y a plus aucune justification éthique et certaines de ses activités destructrices doivent être annulées, stop, fin de la récré. Si, il ne s’agit pas de la faute de quelques actions/individus isolés mais que dans sa nature même, le marché inévitablement va détruire sa propre branche ET l’arbre, alors le marché lui même doit être envisagé autrement – au moins, ses règles de base constitutives de son existence doivent être modifiées plus subtilement. »

    vous semblez répondre positivement à ma seconde proposition à savoir :

    « S’il ne s’agit pas de la faute de quelques actions/individus isolés mais que dans sa nature même, le marché inévitablement va détruire sa propre branche ET l’arbre, alors le marché lui même doit être envisagé autrement – au moins, ses règles de base constitutives de son existence doivent être modifiées plus subtilement. »

    C’est exactement similaire aux problèmes environnementaux. Lorsque les actions individuelles et collectives et en particulier, les actions industrielles de masse, du fait de la destruction de l’environnement, scie la branche et l’arbre entier, alors il n’y a plus de questions à se poser, il faut changer les règles du jeu. La réponse n’est pas forcément « marxiste », ou dans la « décroissance », et même je pense qu’elle est plutôt de type capitaliste justement (une forte innovation qui permet de se goinfrer encore plus avec des solutions propres qu’avec des solutions sales), mais il en reste pas moins que les règles du jeu doivent être changées.

    Idem pour la stabilité internationale, quand vous avez une économie de paix plus profitable qu’une économie de guerre, vous avez moins de guerre, et les marchands d’armes passent à autres choses.

    Encore une fois, les bases de l’éthique telles que je les pose, ne repose pas sur des critères absolus du bien et du mal, mais sur le fait que ce qui est bien c’est ce qui permet à l’arbre de grandir, ce qui est mal, c’est ce qui le fait crever.

  • @ Eponymus

    Voilà , vous en êtes arrivé à une conception raisonnable de l’éthique. Qui dépasse les indispensables réactions communes et sympathiques, inspirées d’ un catéchisme moralisateur qui ne chauffe pas très longtemps ni très loin son homme.
    Arretez toutefois là vos efforts et n’allez pas plus loin sinon vous pourriez basculer dans la lucidité complète que les esprits passionnés , entiers et intransigeants comme le vôtre aiment ornementer par dépit, de cynisme provocateur. Bon je 😉 .

    Deux remarques : (sous contrôle d’Henri !)

    1] lorsqu’une bulle crève il n’y a pas des pertes « d’argent » , il n’y a pas destruction de richesse . Pour la simple raison que c’est la création de richesse qui était imaginaire.
    Ceci étant,
    A) à l’occasion de ces fluctuations , il y aura déplacements de richesse avec des perdants et des gagnants.
    B) Le fonctionnement global du système va s’en trouver, mais dans un second temps, affecté négativement, par un effet de contraction des liquidités et des comportements puisque la méfiance s’est installée.

    2] L’argent prêté par le système bancaire n’a pas , comme contrepartie fondamentale , ses fonds propres ou l’argent qu’il collecte. Bien sûr l’expérience et la prudence montrent qu’il faut un ratio entre les fonds de la banque et la surface de ses créances.
    En fait dans notre système la banque ‘crée’ de la liquidité à partir de rien et la contrepartie de ses prêts se trouve fondamentalement dans l’opération ultérieure de remboursement de la créance : la liquidité est alors détruite et retourne à sa vérité qui n’est que de permettre des transactions de biens et services entre les acteurs d’un projet humain de création de richesse par le travail.

    Bien souvent le système financier est villipendé par cette croyance fausse de création de richesse illusoire par l’opération disproportionnée et éternelle du Saint Crédit … et le bon sens commun se révolte devant ce qu’il croit être une insulte à l’opinion (fondée) qu’il n’est en fin de compte de richesse que le travail des hommes.

    Le terreau de la crise actuelle se trouve dans la bulle immobilière c ‘est vrai . Quelques règles élémentaires d’économie et de cycle des prix pourraient être rapelées ?
    Mais l’origine réelle et précise du merdier est en fait dans ces fameux prêts trop facilement accordés aux ménages qui se croyaient illusoirement riches. Quelques règles de prudences pourraient être codifiées ?

    Bref, ceci n’ a rien à voir avec le fonctionnement normal de la création monétaire.

    De plus, le phénomène de titrisation qui a suivi semble, lui, (d’après ce que je lis) , avoir été opéré dans une volonté assez consciente de dissimuler, noyer, diluer , fragmenter , différer le problème. Avec comme conséquence une grangrénisation obscure du système financier qui rajoute de la méfiance à la méfiance . Quelques règles de transparences seraient peut-être les bienvenues ?

    Mais finalement ( 🙂 )compte tenu de la généralisation de la dette dans le budget des états et de la vie à crédit des ménages, la richesse future ne se mesurera plus qu’à la possession de créance sur des créances de créances (!?) et peut-être que la titrisation deviendra le seul moyen de doper la croissance et d’accélerer la fluidification des marchés face au frein que représente l’ensemble de la Grande Dette que le monde entier se doit à lui-même , 😉 (y compris la formidable masse de dollars qui sert de monnaie d’échange globale et qui n’a plus vraiment de réelle contre-partie, elle non plus … – à moins que le dollar ne soit extraordinairement sur-évalué ?- )

    Vivement que la puissance publique si respectueuse des règles élémentaires d’endettement fasse la leçon au vilain secteur financier nécéssairement et viscéralement spéculatif , sous l’oeil humide du contribuable qui ne rêve que de vie à crédit financé par son voisin via l’Etat.

    C’est fou non ?

  • @ Oppossum en 108:

     » Deux remarques : (sous contrôle d’Henri !) « 

    Siou plait la, les guichets sont fermes, revenez lundi aux heures d’ouverture !!!
    🙂
    C’est pas le tout mais il y a tout un arrivage de nouvelle danseuses qu’il faut que j’aille controler, vous savez ce que c’est la conscience professionnelle !

  • « C’est pas le tout mais il y a tout un arrivage de nouvelle danseuses qu’il faut que j’aille contrôler, vous savez ce que c’est la conscience professionnelle ! »

    Et voilà… Et on s’étonne que tout va à vaut l’eau.

  • De nombreux auteurs commencent à montrer que la crise actuelle est due justement à un manque de libéralisme, à la fameuse discrimination positive, qui pousse par exemple les banques à prêter à des personnes noires, blanches, grises, jaunes ou bleus (c’est selon), non solvables, par peur de se voir attaquer en justice ou, plus simplement, pour ne pas ternir leur image dans un contexte (pesant…) d’anti-racisme primaire.

    De quoi se poser quelques questions peut-être ? Mais bien entendu, spontanément, ce n’est pas sous cet angle là qu’est présenté le problème par les médias…

  • Des sources ? Parce que le coup de la banque US qui se croit obligée de prêter à un noir pas solvable, ça me semble un peu too much.

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